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BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ NATIONALE
D'ACCLIMATATION
I>E FFIAISOE
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5977. — BountOTOS — Imprimeries réunies, A, rue Mignon.i, Paris.
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ NATIONALE
D'ACCLIMATATION
Fondée le 10 février 1854
RECONNUE ÉTABLISSEMENT D UTILITÉ PUBLiaUE
PAR DÉCRET DU 26 FÉVRIER 1855
4^ SERIE— TOME III
1§86
TRENTE-TROISIEME ANNEE
PARIS
AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ
41, RUE DE LILLE, 41
188G
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SOCIETE NATIONALE
D'ACCLIMATATION
r>E FFtAIVOE
ORGANISATION POUR L'ANNÉE 1886 «gv, y .|^^
Conseil. — Délégués. — Commissions. — Bureaux des Sections. ^OTAWiCAt.
CONSEIL D'ADMINISTRATIOiN POUR 1886
BUFtEAU
Président.
Vice-présidents.
MM. Ernest COSSON(0. ^), membre de l'Institut (Académie des sciences),
ancien conseiller général, membre du conseil d'administration
de la Société botanique de France.
Le comte d'ÉPRÉMESNlL (^), propriétaire.
De QUATREFAGES (G. ^), membre de l'Institut (Académie des
sciences), professeur au Muséum d'histoire naturelle.
Le marquis de SINÉTY, propriétaire.
Secrétaire général.
M. Albert GEOFFROY SAINT-HILAIRE (^), directeur du Jardin
zoologique d'Acclimatation du Bois de Boulogne.
Secrétaires.
MM. E. DUPIN (^), Secrétaire pour l'intérieur, ancien inspecteur des
chemins de fer.
^ Maurice GIRARD, Secrétaire du Conseil, docteur es sciences.
^ G. RAVERET-WATTEL (^), Secrétaire des séances, chef de
bureau au ministère de la guerre.
P.-L.-H. FLURY-HÉRARD (^), Secrétaire pour l'étranger, banquier
^^ du corps diplomatique.
••^'
VI SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Trésorier.
M. Sainl-Yves MÉNARD, vétérinaire, docteur en médecine, directeur ad-
joint du Jardin zoologique d'Acclimatation du Bois de Boulo-
gne, professeur à l'École centrale des arts et manufactures.
Archiviste-bibliothécaire.
M. Amédée BERTHOULE, avocat, docteur en droit.
iVIE]VIBR.ES I>U OONSEIL.
MM. Camille DARESTE, docteur es sciences et en médecine, directeur
du laboratoire de tératologie à l'École pratique des hautes
études.
A. GRANDIDIER (^), Membre de l'Institut, voyageur naturaliste.
Léon LEFORT (0 ^), membre de l'Académie de médecine, pro-
fesseur à la Faculté de médecine.
Edouard MÈNE (^), docteur en médecine, médecin de la maison
de santé de Saint- Jean-de-Dieu.
A. MILNE EDWARDS (0 ^), membre de l'Institut (Académie des
sciences), professeur au Muséum d'histoire naturelle.
Aug. PAILLIEUX, propriétaire.
P. -Amédée PICHOT, directeur de la Revue britannique.
Edo-ar ROGER, conseiller référendaire à la Cour des comptes.
Le marquis de SELVE (^), propriétaire.
Léon VAILLANT (^), professeur au Muséum d'histoire naturelle.
Henry de VILMORIN (^), ancien membre du tribunal de commerce
de la Seine. •
' Vice-président honoraire.
M. RICHARD (xiu Cantal), ancien représentant du peuple, propriétaire.
Membre honoraire du Conseil.
M. Fréd. JACQUEMART (^), manufacturier, membre de la Société
nationale d'agriculture de France.
Agent général.
M. Jules GRISARD (P A.), gérant des publications de la Société.
ORGANISATION.
VII
DÉLÉGUÉS DU CONSEIL EN FRANCE
BoM%ne-s.-iJf., MM. Carmier-Adam.
Douai, L. Maurice.
La Roche-sur Y on, D. Gourdin.
Poitiers, MM. Malapert père.
Saint-Quentin, Theillier-Des-
JARDiNS.
DÉLÉGUÉS DU CONSEIL A L'ÉTRANGER
Bruxelles, MM. Comte de Liede-
kerke.
Cerna?/ (Alsace) , A. Zurcher.
Milan, Ch. Brot.
Odessa, P. de Bourakoff.
Pesth (Hongrie),
Rio-Janeiro,
Téhéran,
Wesserling,
MM. Ladislas de
Wagner.
De Capanema.
Tholozan.
Gros-Hartmann.
COMiyiISSION DE PUBLICATION
MM. le Président et le Secrétaire général, membres de droit.
D''E.GossoN, Vice-Président.
E. DuPiN, Secrétaire pour l'intérieur.
Maurice Girard, Secrétaire du Conseil.
Baveret-Wattel, Secrétaire des séances.
Flury-Hérard, Secrétaire pour l'étranger.
Saint-Yves Ménard, Trésorier.
Docteur Ed. Mène, Membre du Conseil.
P. A. Pichol, — —
COMMISSION DES CHEPTELS
MM. le Président et le Secrétaire général, membres de droit.
Membres pris dans le Conseil.
MM. Amédée Berthoule.
Maurice Girard.
Saint-Yves MÉNARD.
Edg. Boger.
A. Paillieux.
Membres pris dans la Société.
MM. De Barrau ûe Muratel
D'AUBUSSON.
Jules Fallou.
P. Mégnin.
E. JOLY.
COMMISSION DES FINANCES
MM. le Président et le Secrétaire général, membres de droit.
MM. Amédée Berthoule.
Flury-Hérard.
MM. Eug. DupiN.
Saint-Yves Ménard.
VIII
SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
COMMISSION MÉDICALE
MM. Je Président et le Secrétaire général, membres de droit.
MM. E. Hardy. MM. Saint-Yves Ménard.
E. Decroix. L. Lefort.
Edouard Mène. Léon Vaillant.
COMMISSION PERMANENTE DES RÉCOMPENSES
MM. le Président et le Secrétaire général, membres de droit.
Délégués du Conseil.
MM. Amédée Berthoule.
Maurice Girard.
MM. A. Paillieux.
Raveret-Wattel.
Délégués des sections.
Première section. — Mammifères. — MM. Mailles.
Deuxième section. — Oiseaux. — P>athelot.
Troisième section. — Poissons, etc. — Berthoule.
Quatrième section. — Insectes. — Jules Fallou.
Cinquième section. — Végétaux. — Docteur E. Mène.
BUREAUX DES SECTIONS
*" Section. — niaininirères.
MM. Geoffroy Sl-Hilaire, d. du Cous.
E. hecro'n, président.
Mégnin, vice-président.
Mailles, secrétaire.
Trémeau, vice-secrétaire.
t* Section. — Oiseaux.
MM. Ménard, dél. du Conseil.
Huel, président^
Dautreville, vice-président.
E. Joly, secrétaire.
Comte d'Esterno, vice-secrétaire.
3* Section. — Poissons, etc.
MM. L. Vaillant, délégué du Conseil
et président.
Brocchi, vice-président.
Mailles, secrétaire.
i. Cloquet, vice-secrétaire.
4* Section. — Insectes.
MM. Maurice Girard, délégué du
Conseil et président.
Jules Fallou, vice-président.
Sédillot, secrétaire.
Eug. Joly, vice-secrétaire.
»^ Section — Végétaux.
MM. Henry de Vilmorin, délégué du Conseil et président.
Aug. Paillieux, vice-président.
Jules Grisard, secrétaire.
Jean Dybowski, vice-secrétaire.
YINGT-NEUVIÈME SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE
DE DISTRIBUTION DES RÉCOMPENSES
DE LA
SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE
PROGES-YERBAL
La Société nationale d'Acclimatation de France a tenu sa
vingt-neuvième séance publique annuelle de distribution des
récompenses, le vendredi 11 juin 1886, dans sa salle des
Conférences, sous la présidence de M. de Quatrefages ,
Membre de l'Institut, Vice-président de la Société.
Après une allocution très applaudie , M. le Président a
donné la parole à M. Raveret-Wattel, Secrétaire des séances,
qui a présenté un rapport sur les travaux de la Société pen-
dant l'année 1885.
Puis M. Saint-Yves Ménard, trésorier, a exposé la situation
financière de la Société au 31 décembre dernier.
Enfin M. A. Geoffroy Saint-Hilaire, secrétaire général, a
donné lecture du rapport au nom de la Commission des ré-
compenses.
11 a été décerné cette année :
1" Une médaille d'or off'erte par le Ministère de l'agricul-
ture;
2° Une grande médaille d'or (hors classe), à l'effigie d'Isi-
dore Geoffroy Saint-Hilaire, d'une valeur de 500 francs;
3" Deux médailles d'or, hors classe, d'une valeur de
300 francs;
4" Deux prix extraordinaires d'une valeur de 1500 francs;
5° Deux primes d'une valeur de 400 francs;
6" Yingt et une médailles d'argent et un rappel ;
7° Quatre médailles de bronze;
8* Cinq mentions honorables;
X SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
9° Deux récompenses pécuniaires d'une valeur de 300 fr. ;
10' Les deux primes de 200 et de iOO francs fondées par
feu Agron de Germigny ;
14° Huit primes offertes par l'administration du Jardin
zoologique d'Acclimatation à ses employés, d'une valeur de
600 francs.
Le Secrétaire des séances,
G. Raveret-Wattel.
PRIX EXTRAORDINAIRES ENCORE A DÉCERNER <^>
GENERALITES
i° — 1882. — Prix de 1000 francs fondé
pai* feu ni. BERE.\D, membre de la Société.
Un prix de 1000 francs sera décerné à l'auteur du meilleur tra-
vail faisant connaître, au point de vue historique et pratique, les
travaux relatifs à l'acclimatation et les résultats obtenus depuis 1854.
Concours prorogé jusfju'au !<"" décembre 1890. — Prix : looo francs.
2" — 1863. — Prix pour les travaux théoriques relatifs à
l'acclimatation.
§ I. Les travaux théoriques sur des questions relatives à l'accli-
matation, publiés pendant les cinq années qui précèdent, pourront
être récompensés, chaque année, par des prix spéciaux de 500 francs
au moins.
La Société voudrait voir étudier particulièrement les causes qui
peuvent s'opposer à l'acclimatation ou la faciliter.
§11. Il pourra, en outre, être accordé dans chaque section des
primes ou des médailles aux auteurs de travaux relatifs aux ques-
tions dont s'occupe la Société.
Ces travaux devront être de nature à servir de guide dans les ap-
plications pratiques ou propres à les vulgariser.
Les ouvrages (imprimés ou manuscrits) devront être remis à la Société
avant le 1" décembre de chaque année.
3° — 1867. — Prix pour les travaux de zoologie pure, pouvant
servir de guide dans les applications.
La Société, voulant encourager les travaux de zoologie pure (mo-
nographies génériques, recherches d'anatomie comparée, études
embryogéniques, etc.), qui servent si souvent de guide dans les ap-
plications utilitaires de cette science, et rendent facile l'introduction
d'espèces nouvelles ou la multiplication ou le perfectionnement d'es-
pèces déjà importées, décernera annuellement, s'il y a lieu, un prix
de 500 francs au moins à la meilleure monographie de cet ordre,
publiée pendant les cinq années précédentes.
Elle tiendra particulièrement compte, dans ses jugements, des
applications auxquelles les travaux ,de zoologie pure appelés à con-
(1) Le cliiffre qui précède l'énoncé des divers prix, indique l'année de la fon-
dation de ces prix. Tous les prix qui ne portent pas l'indication d'une fondation
particulière sont fondés par la Société.
XII SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION.
courir auraient déjà conduit, que ces applications aient été faites par
les auteurs de ces travaux ou par d'autres personnes.
Un exemplaire devra être déposé avant le l^"" décembre.
40 _ 1875. — Des primes ou médailles pourront être accordées
aux personnes qui auront démontré, pratiquement ou théoriquement,
les procédés les plus favorables à la multiplication et à la conserva-
tion des animaux essentiellement protecteurs des cultures.
Concours prorogé jusqu'au l^"" décembre 1890.
50 — 1807. — Prix perpétuel foudé par feu
M'"' GUÉR1I\EAU , née DELALJiI\DE.
Une grande médaille d'or, à l'effigie d'Isidore Geoffroy Saint-
Hilaire, et destinée à continuer les fondations faites les années
précédentes, dans l'intention d'honorer la mémoire de l'illustre et
intrépide naturaliste voyageur, Pierre Delalande, frère de M"'' Gué-
rineau.
Cette médaille sera décernée, en 1887, au voyageur qui, en
Afrique ou en Amérique, aura rendu depuis huit années le plus de
services dans l'ordre des travaux de la Société, principalement au
point de vue de l'alimentation de l'homme.
Les pièces relatives à ce concours devront parvenir à la Société avant
le 1" décembre 1886.
6» — 1861. — Primes fondées par feu
M. AGROIV DE GERllIGIVY.
Deux primes, de 200 francs et de 100 francs, seront décernées,
chaque année, pour les bons soins donnés aux animaux ou aux vé-
gétaux, soit au Jardin d'acclimatation (200 francs), soit dans les
établissements d'acclimatation se rattachant à la Société (prime de
100 francs).
Les pièces relatives à ce concours devront parvenir à la Société avant
le 1*' décembre de chaque année.
PREMIÈRE SECTION. — MAMMIFÈRES
1» — 1804. — Introduction d'espèces nouvelles.
11 pourra être accordé, dans chaque section, des primes d'une valeur
de 200 à 500 francs à toute personne ayant introduit quelque espèce
nouvelle, utile ou ornementale, d'un réel intérêt.
2" — 1885. — Introduction d'une espèce nouvelle de Mam-
mifère insectivore en France.
PRIX EXTRAORDINAIRES. XIII
Les candidats devront justifier de la possession de dix sujets au moins
nés chez eux et adultes.
Concours ouvert jusqu'au 1" décembre 1890. Prix: 500 n-ancs.
30 1S70. — lutroduclioii en France des belles races asines
de l'Orient.
On devia faire approuver par la Société d'Acclimatation les .\nes éta-
lons importés, et prouver que vingt saillies au moins ont été faites dans
l'année par chacun d'eux.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 1000 francs.
40 186S. — Domestication complète, application à l'agricul-
ture ou emploi dans les villes de l'Hémione {Equus Hemionus) ou
du Dauw {E. Burchelli).
La domestication suppose la reproduction en captivité.
Concours prorogé jusqu'au l^-" décembre 1890. — Prix : looo francs.
50 _ -1867. — Métissage de l'Hémione ou de ses congénères
(Dauw, Zèbre, Couagga) avec le Cheval.
On devra avoir obtenu un ou plusieurs métis âgés au moins d'un an.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890.— Prix : 1000 francs.
(30 — 1867. — Propagation des métis de l'Hémione ou de ses
congénères (Dauw, Zèbre, Couagga) avec l'Ane.
Ce prix sera décerné à l'éleveur qui aura produit le plus de métis. (11
devra en présenter quatre individus au moins.)
Concours prorogé jusqu'au 1*'' décembre 1890. — Prix : 1000 francs.
7» — 1885. — Multiplication en France du Sanglier nain
{Porcula Salvianï).
On devra justifier de la possession de douze sujets au moins, nés chez
le propriétaire et âgés de plus d'un an.
Concours ouvert jusqu'au 1"^' décembre 1890. — Prix : soo francs.
Le prix sera doublé si les sujets présentés sont nés d'individus ayant
déjà reproduit en France. — Prix : 1000 francs.
go — 1867. — Élevage de l'Alpaca, de l'Alpa-Lama et du Lama.
On devra présenter au concours douze sujets nés chez l'éleveur et
âgés d'un an au moins.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : tsoo francs.
90 — 1869. — Prix perpétuel fondé par feu
lU-^'Ad. DUTROIVE, née GALOT.
Une somme annuelle de 100 francs sera, tous les trois ans, con-
vertie en prime de 300 francs (ou médaille d'or de cette valeur),
et décernée, par concours, au propj^iétaire ou au fermier qui, en
France ou en Belgique, aura le mieux contribué à la propagation de
la race bovine désarmée sarlabot, créée par feu M. le conseiller
Ad. Dutrône.
Ce prix sera décerné en 1887 et 1890.
XTV SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
10° — 18Î3. — Chèvres laitières.
On devra présenter I Bouc et 8 Chèvres d'un type uniforme, et justifier
que trois mois après la parturition les Chèvres donnent 3 litres de lait
par jour et par tête.
Les concurrents devront présenter un compte des dépenses et recettes
occasionnées par l'entretien du troupeau, et faire connaître à quel usage
le lait a été employé (lait en nature, beurre, fromage).
Concours prorogé jusqu'au l*^"" décembre 1890. — Prix : 50o n-nncs.
11" — 1874. — Multiplication en France, à l'état sauvage (dans
un grand parc clos de murs ou en forêt), du Cerf Wapiti (Cervus
Canadensis), du Cerf d'Arislote {Cervus Aristotelis) ou d'une autre
grande espèce.
On devra faire constater la présence de dix individus au moins, nés à
l'état de liberté, parmi lesquels six animaux seront âgés de plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au 1'^'" décembre 1890. — Prix : i500 francs.
12° — 1874. — Multiplication en France, à l'état sauvage (dans
un grand parc clos de murs ou en forêt), du Cer? axis {Cervus axis),
du Cerf des Moluques {Cervus Moluccensis) ou d'une autre espèce
de taille moyenne.
On devra faire constater la présence de dix individus au moins, nés à
l'état de liberté, parmi lesquels six animaux seront âgés de plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au 1"" décembre 1890. — Prix : looo francs.
13» — 1874. — Multiplication en France, à l'état sauvage (dans
un grand parc clos de murs ou en forêt), du Cerf-Cochon {Cervus
porcinus) ou d'une autre espèce analogue.
On devra faire constater la présence de dix individus au moins, nés à
l'état de liberté, parmi lesquels six animaux seront âgés déplus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au l^"" décembre 1890. — Prix : 500 francs.
14," — 1874, — Multiplication en France, à l'état sauvage (dans
un grand parc clos de murs ou en forêt), du Cerf Pu du (Ceri'WS
Pudu) ou d'une espèce analogue.
On devra faire constater la présence de dix individus au moins, nés à
l'état de liberté, parmi lesquels six animaux seront âgés de plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au i" décembre 1890. — Prix : 500 francs.
15" — 1874. — Multiplication en France, à l'état sauvage (dans
un grand parc clos de murs ou en forêt), de l'Antilope Canna {Bos-
elaphus Oreas) ou d'une autre grande espèce.
On devra faire constater la présence de dix individus au moins, nés à
l'état de liberté, parmi lesquels six animaux seront âgés de plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 1500 francs.
16" — 1874. — Multiplication en France, à l'état sauvage (dans
un grand parc clos de murs ou en forêt), de l'Antilope Nylgau {Por-
tax picta) ou d'une autre espèce de taille moyenne.
On devra faire constater la présence de dix individus au moins, nés à
PRIX EXTRAORDINAIRES. XV
l'état de liberté, parmi lesquels six animaux seront âgés de plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au l*-" décembre 1890. — Prix : «ooo francs.
470 1874. — Multiplication en France, à l'état sauvage
(dans un grand parc clos de murs ou en forêt), d'Antilopes de petite
taille.
On devra faire constater la présence de dix individus au moins, nés à
l'état de liberté, parmi lesquels six animaux seront âgés de plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 500 francs.
18° — 1873.— Introduction en France de VHydropotes inermis
{Ke ou Chang).
On devra avoir introduit au moins trois couples de Ke ou Chang, et
faire constater que trois mois après leur importation, ces animaux sont
dans de bonnes conditions de santé.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 500 francs.
19o_ 1 87S. — Multiplication en France de VHydropotes inermis
(Ke ou Chang).
On devra faire constater la présence de dix individus au moins âgés de
plus d'un an et issus des reproducteurs importés.
Concours prorogé jusqu'au !<='■ décembre 1890. — Prix : looo francs.
20" — 1865. — Domestication en France du Castor, soit du Ca-
nada, soit des bords du Khône.
On devra présenter au moins quatre individus mâles et femelles, nés
chez le propriétaire et âgés d'un an au moins.
Concours prorogé jusqu'au l^"" décembre 1890. — Prix : 500 francs.
— Le prix sera doublé si l'on présente des individus de seconde géné-
ration.
2I0 _ 1875. — Multiplication en France, à l'état sauvage (dans
un grand parc clos de murs ou en forêt), de Kangurous de petite taille.
On devra faire constater la présence de dix individus au moins, nés à
l'état de liberté, parmi lesquels six animaux s eront âgés de plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au 1*'' décembre 1890. — Prix: 500 francs.
22" — 188^. — Multiplication en France du Lapin géant des
Flandres, à oreilles droites.
On devra présenter 5 mâles et 5 femelles adultes, nés chez l'éleveur,
du poids moyen de 8 kilogrammes.
Concours prorogé jusqu'au 1^'' décembre 1890. — Prix : 300 francs.
23" — 188*1. — Alimentation du bétail par le Téosinlé (Beana
luxurians).
On devra présenter un compte établissant le rendement obtenu, en
poids, d'une plantation de Téosinté couvrant au moins 25 ares et fournir
des renseignements circonstanciés sur les avantages ou les inconvénients
que présente ce mode d'alimentation pour le bétail.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 300 francs.
XVI SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATÂTION.
24° — 1882. — Alimentation des animaux par le Soya.
On devra fournir des renseignements circonstanciés sur les avantages
ou les inconvénients que présente ce mode d'alimentation pour les ani-
maux soit à l'état vert, soit à l'état sec.
Concours prorogé jusqu'au l'"' décembre 1890. — Prix: 300 francs.
DEUXIÈME SECTION. — OISEAUX
1" — 1864. — Introduction d'espèces nouvelles.
Il pourra être accordé, dans chaque section, des primes d'une valeur
de 200 à 500 francs à toute personne ayant introduit quelque espèce
nouvelle utile ou ornementale a'un réel intérêt.
2" — 1864. — Introduction et acclimatation d'un nouveau gibier
pi'is dans la classe des Oiseaux.
Sont exceptées les espèces qui pourraient ravager les cultures.
On devra présenter plusieurs sujets vivants de seconde génération.
Concours prorogé jusqu'au 1*"' décembre 1890. — Prix : 500 à
14»00 francs.
3" _ 1S70. — Multiplication et propagation en France ou en
Algérie du Serpentaire {Gijpogeranus Serpentarius).
On devra présenter un couple de ces oiseaux de première génération,
et justifier de la possession du couple producteur et des jeunes obtenus.
Concours prorogé jusqu'au 1*"' décembre 1890. — Paix : looo francs.
4.0 — 1868. — Acclimatation du Martin triste {Acridotheres
tristis) ou d'une espèce analogue, en Algérie ou dans le midi de la
France.
On devra présenter cinq paires de ces oiseaux, adultes, de seconde
génération.
Concours prorogé jusqu'au 1"" décembre 1890. — Prix : 500 francs.
5» — 1810. — Multiplication en France, à l'état sauvage, de la
Pintade ordinaire (Numida Meleagris).
On devra faire constater l'existence, sur les terres du propriétaire,
d'au moins quatre compagnies de Pintades de six individus chacune,
vivant à l'état sauvage.
Concours prorogé jusqu'au i" décembre 1890. — Prix : «so francs.
6° — 1875. — Multiplication en France, à l'état sauvage, du
Faisan vénéré.
On devra faire constater l'existence d'au moins dix jeunes sujets vivant
en liberté et provenant du couple ou des couples lâchés.
Concours prorogé jusqu'au 1''' décembre 1890. — Prix : 500 francs.
rillX EXTRAORDINAIRES. XVII
7" — 1S70. — Création d'une race do Poules domestiques
pondant de gros œufs.
On devra présenter au moins douze Poules de 3" génération, constituant
une race stable, et donnant régulièrement des œufs atteignant le poids de
75 grammes. Cette race, créée par la sélection ou par croisement, devra pré-
senter les caractères d'une variété de bonne qualité pour la consommation.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 500 francs.
Vvix fondés pai* il. Georges lflatliia.«i, uieinbre de la
Société.
8" — 1885. — lîeproductioii en captivité d'un oiseau quel-
conquc, de l'ordre des Gallinacés, qui jusqu'à ce jour ne s'est pas
reproduit dans ces conditions.
On devra présenter au moins quatre sujets adultes nés chez le pro-
priétaire.
Concours ouvert jusqu'au 1" décembre 1890. — l'uix : «50 franc».
9" — 1885. — Monographie des [*hasianidés (Faisan, Trago-
pan, Lophophore, etc.).
liCs auteurs devront indiquer, dans un livre ou un mémoire étendu,
les diverses espèces de cette famille, leur distribution géographique,
leur description, moeurs, habitudes, instincts, leur mode de reproduc-
tion, leur alimentation.
En d'autres ternies, les ouvrages présentés devront pouvoir servir de
Guide pratique.
Concours ouvert jusqu'au 1'=' décembre 1890 — Prix.: «»o francs.
10° — 1867. — Introduction et multiplication en France, en par-
(luels, du Tétras liuppecol (Tetrao Cupido) de l'Amérique du Nortl.
On devra présenter au moins douze sujets, complètement adultes, nés
et élevés chez le propriétaire.
(concours prorogé jus(pi'au 1" décembre 1890. — l'Rix : aso francs.
Le prix sera dou])lé si la multiplication du Tétras huppecol a été
obtenue en liberté.
11" — 1810. — Multiplication en France, à l'état sauvage, delà
Perdrix de Chine {Galloperdix Sphenura) ou d'une autre Perdrix
percheuse.
On devra faire constater l'existence d'au moins six sujets vivant en
liberté et provcnaut du ondes couples làcdiés.
Concours prorogé jiis(iu'au 1" décembre 1890. — Pni\ : 3oo francs.
i" SKUIK, T. III. — .Sciiiiri! iiuli|i(iuc: ;miiiicile. h
XVIII SOCIETE NATIUNALE D ACCLIMATATION.
li" — 1877. — Importation des grosses espèces de Colins (ori-
ginaires du Mexique et du Brésil) et des petites espèces de Tina-
mous de l'Amérique méridionale.
On devra avoir importé au moins six couples de ces oiseaux et justifier
que trois mois après leur importation ils sont dans de bonnes conditions
de santé.
Concours prorogé jusqu'au 1^'' décembre 1890. — Prix : «sofrnncs.
13"— 1877. — Multiplication en volière des grosses espèces de
Colins originaires du Mexique et du Brésil, ou des petites espèces de
Tinamous de l'Amérique méridionale.
On devra itrésenter dix sujets vivants nés des oiseaux directement im-
portés du pays d'origine.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 300 rrancM.
M" — 1^81. — Reproduction de la grande Outarde {Olis tarda)
à l'état sauvage.
On devra prouver que trois couples au moins de grandes Outardes ont
couvé et élevé leurs jeunes en France, sur les terres du propriétaire.
Concours prorogé jusqu'au 1*"' décembre 1890. — Prix : 300 rrnncM.
15° — 1870. — Domestication en France ou en Algérie de l'Ibis
sacré (Ibis religiosa) ou de l'Ibis falcinelle (Ibis falcinellus), ou
d'un autre oiseau destructeur des Souris, Insectes et Mollusques nui-
sibles dans les jardins.
Sont exceptées les espèces qui pourraient ravager les cultures.
On devra faire constater l'existence de quatre sujets au moins de pre-
mière génération, vivant en liberté autour d'une habitation et nés de
parents libres eux-mêmes dans la propriété.
Concours prorogé jusqu'au l'^'^ décembre 1890. — Prix : 500 francs.
16° — 1867. — Domestication de l'Autruche d'Afrique (Stru-
thio canielus) en Europe.
On devra justifier de la possession d'au moins six Autruches nées chex
le propriétaire et âgées d'un an au moins.
(Concours prorogé jusqu'au 1^' décembre 1890. — Prix : 1500 rrancM.
17" — 1879. — Création en Algérie d'une ferme d'Autruches.
On devra être possesseur de dix couples, au moins, de reproducteurs,
et avoir fait naître et élever dans les trois années précédentes cent jeunes
aulruchons. Les concurrents ne seront pas tenus d'entretenir chez eux
tous les jeunes produits; mais ils devront fournir des documents authen-
tiques justifiant de la destination qui leur a été donnée.
Les concurrents devront présenter un compte des dépenses et recettes
occasionnées par l'entretien du troupeau; faire connaître la valeur des
plumes livrées au commerce; les procédés à employer pour la multipli-
cation des jeunes (incubation naturelle ou hydro-incubateurs), et adresser
à la Société un ra})port circonslancié donnant tous les détails propres à
rétlucatioii do rAuliuche en cafitivité.
Concours prorogé jus(pi'au 1" décembre 1890.— Prix : looo rrancs.
PIUX EXTUAOUDIJNAIKES. XIX
18" — 1873. — Domestication d'un nouveau Palmipède utile.
On devra présenter au moins dix sujets vivants de seconde génération
produits en captivité.
Concours prorogé jusqu'au 1"" décembre 1890. — Prix : looo rrancM.
19° — 1882. — Un prix de 300 francs sera décerné à l'auteur
du meilleur travail sur les nichoirs artificiels pour la protection et
la propagation des espèces d'oiseaux qui nichent dans les creux
ou trous des arbres, des murailles ou des rochers.
L'auteur devra produire des modèles de nichoirs en indiquant leur
mode de construction et leur prix de revient, et justifier des résultats
obtenus depuis cinq ans au moins.
Concours ouvert jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 300 francs.
20° — 188*1. — Un prix de 300 francs sera accordé à l'inven-
teur d'un genre de nourriture artificielle ou composition pouvant
remplacer les pâtées fraîches, pour les oiseaux insectivores entre-
tenus en volières.
On devra faire connaître la composition et le mode de préparation,
justifier des avantages que présente l'emploi de cette composition au
point de vue de sa conservation, de ses qualités nutritives et de son pri.v
de revient.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : soo francs.
TROISIÈME SECTION. — POISSONS, MOLLUSQUES, ETC.
CRUSTACÉS, ANNÉLIDES
1° — 1864. — Introduction d'espèces nouvelles.
Il pourra être accordé, dans chaque section, des primes d'une valeur'
de 200 à .500 francs à toute personne ayant introduit quelque espèce
nouvelle, utile ou ornementale, d'un réel intérêt.
"2" — 1S82. — Recherches sur les propriétés physiques et
chimiques des eaux douces au point de vue de l'aquiculture.
L'auteur devra faire ressortir, par des observations et des analyses
pratiques, les conditions favorables au développement des diverses
espèces de Poissons, Crustacés, Mollusques et Végétaux.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 5oo francs.
3" — 1883. — Recherches sur les propriétés physi(|ues et chimi-
ques des eaux de mer et saumâtres au point de vue de l'aquiculture.
L'auteur devra faire ressortir, par des observations et des analyses
pratiques, les conditions favorables nu développement des diverses
espèces de Poissons, Crustacés, ftlollusiiues et Végétaux.
Concours proi'ogé jusqu'au \" décembre 1890. — Prix : ftoo franc».
XX SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
4" — 1884. — Alimentation du Poisson.
Le prix sera accordé à la découverte d'un procédé véritablement pra-
tique, peu coûteux et réellement industriel, pour la production rapide et
en quantité illimitée d'une nourriture r/uanic (Daphnies, Cyclopes, etc.)
propre à l'alimentation du poisson et en particulier de l'alevin de Sal-
monide.
On devra faire connaître en détail le mode de production employé et
justifier du plein succès obtenu.
Concours ouvert jusqu'au i"" décembre 1890. — Prix : soo rrancM.
BATRACIENS
5° — 1886. — Multiplication en France de la Grenouille
h'£ui {Rana mugiens) de rÀmcrique du Nord.
On devra justifier de la possession de vingt-cinq sujets adultes nés chez
le propriétaire.
Concours ouvert jusqu'au l*"^ décembre 1890. — Prix : «50 rnince*.
POISSONS
(■»" — 1873. — Acclimatation dans les eaux douces de la France
d'un nouveau Poisson alimentaire.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : looo rrancM.
7" — 1873. — Introduction dans les eaux douces de l'Algérie
d'un nouveau Poisson alimentaire.
Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins ; on
devra justifier qu'ils ont été importés depuis plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au l" décembre 1890.'^ — Prix : 500 n-anc»*.
Le prix sera doublé si le poisson introduit est le Gourami {Osphrome-
nus olfax).
S" — 1873. — Acclimatation dans les eaux douces de l'Algérie
d'un nouveau Poisson alimentaire.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : lOoo frunc».
Le prix sera doublé si le poisson acclimaté est le Gourami {Osphrome-
nus olfax).
9* — 1873. — Introduction dans les eaux douces de la Guade-
loupe et de la Martinique d'un nouveau Poisson alimentaire.
Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins ; on
devra justifier qu'ils ont été importés depuis plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1800. — Prix : 50o frauoN.
Le prix sera doublé si le poisson introduit est le Gourami {Osphromc-
nus olfax).
PRIX EXTRAORDINAIRES. XXI
10» — 1873.— Acclimatation dans les eaux douces de la Gua-
deloupe et de la Martinique d'un nouveau Poisson alimentaire.
Concours prorogé jusqu'au !•" décembre 1890.— Prix : looo francs.
Le prix sera doublé si le poisson accliaiaté est le Gouiami {Osphrome-
nus olfax).
41» — 1874. — Introduction en France du Coregomis otsego de
l'Amérique du Nord.
Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins, et
l'on devra justifier qu'ils ont été importés depuis plus d'un an.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1K90. — Prix : 500 francM.
Si des multiplications du Coregonus otsego ont été obtenues en France,
le prix sera doublé.
12° — 1879. — Multiplication en France du Saumon de Cali-
fornie (Salmo quinnat) de l'Amérique du Nord.
On devra présenter au moins 500 alevins, âgés d'un an, nés de parents
existant dans les eaux du propriétaire depuis au moins dix-buit mois.
L'étal des reproducteurs devra être constaté au moment du frai par
des pièces authentiques. On devra également faire constater l'époque de
l'éclosion des œufs et faire connaître dans un rapport circonstancié les
observations auxquelles donnerait lieu l'éducation de ces jeunes poissons.
Concours prorogé jusqu'au l" décembre 1890. — Prix : soo n-ancs.
13» _ 18S2. — Établissement d'échelles pour les Poissons mi-
grateurs.
Un prix de 500 francs sera décerné aux usiniers ou propriétaires qui
auront établi, dans des conditions pratiques, des échelles pour le passage
des Poissons migrateurs.
Concours prorogé jusqu'au f'" décembre 1890. — Puix : 500 fi-ancH.
14,0 — 1886. — Multiplication artificielle, sur les côtes do
France, d'un Poisson de mer propre à l'alimentation.
Les résultats devront avoir été obtenus sur une échelle suffisante
pour présenter un intérêt véritablement pratique.
Concours ouvert jusqu'au 1" décendjre 1895. — Prix : soo rrancN.
Le prix sera doublé si l'élevage «lu Poisson a donné lieu à une
exploitation industrielle.
l.V — 1S86. — Multiplication des Cyprinides.
H pourra être accordé des primes ou des médailles à toute personne
qui aurii obtenu, dans des eaux closes, de l'alevin de Cyprinide, notam-
ment la Carpe et la Tanche, et i|ui justifiera en avoir introduit en grand
nombre dans les cours d'eau de la région et aura ainsi contribué le plus
efficacement à leur repeuplement.
Si les travaux faits dans cet ordre d'idées ont une importance suffi-
sante, il pourra être accordé un prix de sou francs.
Concours ouvert jusipi'nu 1*' décembre 1890.
XXII SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
MOLLUSQUES
jgo — 1867. — Acclimatation et propagation d'un Mollusque
utile d'espèce terrestre, fluvialile ou marine, resté jusqu'à ce jour
étranger à notre pays.— Cette acclimatation devra avoir donné lieu
à une exploitation industrielle ; ses produits alimentaires ou autres
seront examinés par la Société.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 50© francs.
17» l§69. — Reproduction artificielle des Huîtres. — Un prix
de 1000 francs sera décerné pour le meilleur travail indiquant, au
point de vue pratique, les méthodes les plus propres à assurer cette
reproduction artificielle. L'ouvrage devra, en outre, faire connaître
d'une manière précise les conditions à remplir pour obtenir les au-
torisations de créer des établissements huîtriers, et énumérer les
travaux que comportent les bancs d'Huîtres naturels, aussi bien que
les caractères auxquels on peut reconnaître qu'un banc est exploi-
table; enfin quelles sont les mesures qu'il convient de prendre pour
l'enlèvement du coquillage. En un mot, ce travail devra constituer
un véritable manuel d'ostréiculture.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. —Prix: «ooo francs.
48° 1886. — Élevage de l'Huître sur les côtes françaises de
la Méditerranée.
On devra justifier de l'élevage, pendant au moins deux années, de
plusieurs milliers d'Huîtres françaises [Ostrea edulis ou 0. Cyrnensh)
(^10 000 au maximum).
Il sera nécessaire de faire constater :
.1" La grandeur (diamètre) des Huîtres au moment de leur introduc-
tion dans les parcs.
2" La croissance obtenue au bout de 18 mois.
Concours ouvert jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 500 franco.
490 1879. — Culture de la Moule sur les côtes méditerra-
néennes.
On devra justifier d'une superficie d'un hectare mis en culture, soit sur
fond horizontal, soit sur bouchots, et ayant donné des produits alimen-
taires au moins une année.
Les concurrents devront joindre à l'appui de leur demande un mémoire
indiquant, au point de vue pratique, les moyens les plus propres à assurer
le succès de semblable industrie, et présenter un compte des dépenses
occasionnées pour rétablissement de l'exploitation et des bénéfices qu'on
peut en tirer.
Concours prorogé jusqu'au i" décembre 1890. — Prix : 1000 franc».
PRIX EXTRAORDINAIRES. XXIII
CRUSTACES
20° — 1867. — Introduction et acclimatation d'un Crustacé
alimentaire dans les eaux douces de la France ou de ses colonies.
Concours prorogé jusqu'au l*"" décembre 1890. — Prix : 500 rrancN.
21» — 1886. — Multiplication artificielle du Homard ou de la
Langouste en France.
Cette multiplication devra avoir été obtenue sur une échelle assez
large pour constituer une exploitation industrielle.
Concours ouvert jusqu'au 1^'' décembre 1895. — Prux : looo ri-ones.
QUATRIÈME SECTION. — INSECTES
4" — 1864. — Introduction d'espèces nouvelles.
Il pourra être accordé, dans chaque section, des primes d'une valeur
de 200 à 500 francs à toute personne ayant introduit quelque espèce
nouvelle, utile ou ornementale, d'un réel intérêt.
2° — 1865. — Acclimatation et multiplication soutenue pen-
dant trois années au moins en Europe ou en Algérie d'un insecte
producteur de cire, autre que l'Abeille ou les Mélipones.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix: tooo rraneii».
SÉRICICULTURE
3° — 1881. — Acclimatation et multiplication soutenue pen-
dant trois années au moins, en France ou en Algérie, d'une nouvelle
espèce de Ver à soie produisant de la soie bonne à dévider ou à
carder pour employer industriellement.
Le prix ne sera accordé que sur preuve d'une production annuelle de
trois mille cocons au moins.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Piux : t ooo rrancH.
4" — 1886. — Application industrielle de la soie de VAt-
tacus Cynthia vera, Ver à soie de l'Allante.
On devra présenter plusieurs coupes d'étoffe formant ensemble au
moins 50 mètres, et fabriquées avec la soie cardée (ailantine) de VAttacua
Cynthia et sans aucun mélange d'autres matières. Les tissus de bourre
de soie sont hors de concours .
Concours prorogé jusqu'au l""" décen»1)re 1890. — Prix : 5oo franchi.
Le prix sera doublé si l'étotTe provient d'une soie grège du même
Ver dévidée en fil continu.
5° — 1878. — Encouragement, en France, à un établissemen
industriel pouvant livrer à la consommation, et prêtes à être tissées,
XXIV SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
des soies grèges ou des fdoselles des cocons d'une des espèces ci-
après désignées :
Attacus Yama-maï, Pernyi, Cijnlkia, Cearopia, Pohjphe-
mus, etc., espèces qui ont déjà été l'objet d'éducations en France
sur une échelle plus ou moins étendue.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890.— Prix : «ooo ri-ancs.
6» — 187 y. — Vers à soie du Mûrier. — Etudes théoriques et
pratiques sur les diverses maladies qui les atteignent. Les auteurs
devront, autant que possible, étudier monographiquement une ou
plusieurs des maladies qui atteignent les Vers à soie, en préciser
les symptômes, faire connaître les altérations organi(jues qu'elles
entraînent, étudier expérimentalement les causes qui leur donnent
naissance et les meilleurs moyens à employer pour les combattre.
Concours prorogé jusqu'au 1'^'" décembre 1890.— Prix : looo ri-anct^.
70 — 1S70. — Vers à soie du Mûrier. — Production dans le nord
de la France de la graine de Vers à soie de races européennes par
de petites éducations.
Considérant l'intérêt qu'il y aurait à encourager la production de
la graine saine des Vers à soie du Mûrier de races européennes, les
prix sont institués pour récompenser dans les bassins de la Seine,
de la Somme, de la Meuse, du Rhin, ainsi que dans la portion sep-
tentrionale du bassin de la Loire, les petites éducations qui permet-
tront de mettre au grainagedes cocons provenant d'éducations dans
lesquelles aucune maladie des Vers n'aura été constatée.
La Société n'admettra au concours du grainage que les graines de
Vers à soie de races européennes.
Elle ne primera aucune éducation portant sur plus de 30 grammes
de graine pour une même habitation.
Mise au grainage de plus de 50 kilogrammes de cocons :
Deux Prix de 500 francs chacun.
Mise au grainage de 25 à 50 kilogrammes de cocons :
Deux Prix de 250 francs chacun.
Mise au grainage de 10 à 25 kilogrammes de cocons :
Quatre Prix de 150 francs chacun.
Mise au grainage de 5 à 10 kilogrammes de cocons :
Dix Prix de 100 francs chacun.
Ces primes seront distribuées chaque année, s'il y a licu,]\i%({noA\ 1890.
Les concurrents devront (cette condition est de rigueur; se faire con-
naître en temps utile, afin que la Société puisse faire suivrn par ses di'-
léîués la marche des éducations et en constater les résultats.
PRIX EXTr.AOr.DINAlRES. XXV
APICULTURK
S» — 1870. — Éludes lliéoiiques et praliques sur les diverses
maladies qui atteignent les Abeilles, et principalement sur la loqiie
ou pourriture du couvain.
Les auteurs devront, autant que possible, en préciser les sym-
ptômes, indiquer les altérations organiques qu'elle entraîne, étudier
expérimentalement les causes qui la produisent et les meilleurs
moyens à employer pour la combattre.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 5oo rennes.
0" — 1886. — Croisements de l'Abeille ordinaire {Apis mel-
lifica) avec les races italiennes, Cbypriotes, Carnioliennes et
Syriennes et avec l'Abeille égyptienne {A. fasciata).
Il pourra être accordé des primes ou des médailles.
Concours ouvert jusqu'au 1" décembre 1890.
10" — 18Î0. — Introduction en France d'une Mélipone ou Tri-
gone (Abeille sans aiguillon) américaine, australienne ou africaine.
Présenter une colonie vivant depuis deux ans chez le propi-iétaire.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 5«m» francM.
CINQUIÈME SECTION. — VÉGÉTAUX.
1" — 1864. — Introduction d'espèces nouvelles.
11 pourra être accordé, dans chaque section, des primes d'une valeur
de 200 à 500 francs à toute personne ayant introduit quelque espèce
nouvelle, utile ou ornementale, d'un réel intérêt.
•i" — 1886. — Plantes de pleine terre utiles et d'ornement, in-
troduites en Europe dans ces vingt-cinq dernières années.
Les auteurs devront indiquer dans un livre, ou dans un mémoire étendu,
les usages divers de ces plantes, leur pays d'origine, la date de leur in-
troduclion, la manière de les cultiver; les décrire et désigner les diffé-
rentes variétés obtenues depuis leur importation, ainsi que les différents
noms sous lesquels ces végétaux sont connus.
En d'autres termes, les ouvrages présentés au concours devront pouvoir
servir de guide pratique pour la culture des plantes d'importation nouvelle .
Les ouvrages (manuscrits ou imprimés) devront être remis à la Société
avant le i" décembre.
Concours ouvert jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : soo n-ancH.
3» — 1866. — Introduction en France et mise, en grande cul-
ture d'une plante nouvelle pouvant être utilisée pour la nourriture
des bestiaux.
(concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — 1" Prix : 5oo rrancH.
— 2* Prix : .100 rrnneN.
XXVI SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION
40 _ fl§S0. — Prix de 200 francs, fondé par
m. OODEFROY-LEBEUF.
Un prix de '200 francs sera décerné à la personne qui présentera
un double décalitre de graines QVElœococca vernicia récoltées sur
des plantes cultivées à l'air libre, en Europe ou en Algérie, sans
autres abris que les rangées d'arbres nécessaires à leur protection
dans le jeune âge (comme au Se-tchuen).
Concours ouvert jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : too rranes.
50 _ 1870. — Utilisation industrielle du Lo-za {Rhamnus utilis)
qui produit le vert de Chine.
On devra fournir a la Société, sous réserve des droits de propriété, les
documents relatifs aux méthodes et procédés employés.
On devra également présenter des spécimens d'étoffes teintes en France
avec les produits du Lo-za préparés en France.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 5©o rranc*«.
6» — 1881. — Introduction et culture en France du Noyer
d'Amérique {Carya alba), connu aux États-Unis sous le nom de
Hickory (bois employé dans la construction des voitures légères).
On devra justifier de la plantation sur un demi-hectare de Noyers d'A-
mérique ou de la possession de 500 arbres hauts de l^jSO au moins.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : soo n-anc»».
7° — 1881. — Introduction et culture pendant deux années
successives d'une Igname (Dioscorea) joignant à sa qualité supé-
rieure un arrachage facile.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. —1" Prix : «00 rrancH.
— 2* Prix : 4©0 francs.
8" _ 1870. — Culture du Bambou dans le centre et le nord de
la France.
Le prix sera accordé à celui qui aura :
1^ Cultivé avec succès le Bambou pendant plus de cinq années, et dont
les cultures couvriront au moins, pendant les dernières années, un demi-
hectare;
2° Exploité industriellement ses cultures de Bambou.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890.
Deux Prix de 1000 francs chacun.
9" — 1873. — Culture de YEucaltjptus en Algérie.
Le prix sera accordé à celui qui aura :
1" Cultivé avec succès VEucalijptus pendant plus de cinq années et dont
les cultures couvriront au moins, pendant les dernières années, 8 hectares;
2" Exploité industriellement ses cultures d'Encalijptua.
Concours prorogé jusqu'au l'*'' décembre 1890.— Prix : 14M»« francs.
PRIX EXTRAORDINAIRES. XXVH
10" — 1S73. — Culture de l'Eucalyptus en France et particu-
lièrement en Corse.
Le prix sera accordé à celui qui aura :
1" Cultivé avec succès VEucalyptiis pendant plus de cinq années et dont
les cultures couvriront au moins, pendant les dernières années, 2 hectares ;
2° Exploité industriellement ses cultures d'Eucali/ptun.
Concours prorogé jusqu'au l""" décembre t890. — Pnix : looo rranps.
il" — 1886. — fiuide théorique et pratique de la culture de
VEucalyptiis.
Les auteurs devront surtout étudier, en s'appuyant sur des expériences,
et comparativement, quelles sont les espèces à' Eucalyptus qui peuvent
être cultivées sous les divers climats; faire connaître la nature du sol qui
leur convient, les soins spéciaux de culture que chaque espèce exige, le
degré de froid auquel elle résiste et leur valeur relative.
Les ouvrages imprimés peuvent seuls prendre part à ce concours.
Concours ouvert jusqu'au \" décembre 1890. — Prix: 5oo rranes.
12° — 1876. — Culture du Jahorandi {Pilocarpus pinnatus)
dans les colonies françaises.
Le prix sera décerné à celui qui aura :
1° Cultivé avec succès le Jaborandi pendant plus de cinq années et
dont les cultures couvriront au moins, pendant les dernières années, un
demi-hectare ;
2" Exploité commercialement ses cultures de Jaborandi.
Concours prorogé jusqu'au l^"^ décembre 1890. — Prix : soo francs.
13" — 1879. — Reboisement des terrains en pente par
l'Ailante.
Considérant que l'Ailante s'accommode facilement de tous les sols ,
que les troupeaux ne touchent ni à ses feuilles ni à son écorce, et qu'il
serait par conséquent essentiellement propre au reboisement de certains
terrains pauvres servant actuellement de pâture, la Société institue un
prix de 1000 francs, qui sera décerné à la personne ou à la commune qui,
en France ou en Algérie, justifiera de la plantation de 5 hectares de cette
essence.
Les concurrents devront établir que le reboisement est fait depuis plus
de cinq ans.
Concours prorogé jusqu'au i^-" décembre 1890. — Prix : looo francs.
14° — 1885. — Utilisation, pour le reboisement en Algérie,
d'essences étrangères à la colonie.
On devra faire connaître les espèces employées, la date des planta-
tions, la nature du sol et les précautiqns prises pour assurer le succès
de la plantation, enfin l'étendue consacrée au reboisement.
Concours ouvert jusqu'au i" décembre 1890.
La Société décernera :
Un prix de six cents (600) francs; un prix de quatre cents (400) francs ;
un prix de deux cents (200) francs.
XXVIII SOCIKTK NATIONAI-E D ACCLIMATATION.
15" — 18S*î. — Alimentation du bétail par le Téosinté {Reann
hixurians) dans les colonies françaises.
On devra présenter un compte établissant le rendement obtenu, en
poids, d'une plantation de Téosinté couvrant au moins 25 ares et fournir
des renseignements (•irconstanciés sur les avantages ou les inconvénients
que présente ce mode d'alimentation pour le bétail.
Concours prorogé jusqu'au 1" décembre 1890. — Prix : 3©o rrnnes.
16" — 1S82. — Alimentation des animaux par le Soya.
On devra fournir des renseignements circonstanciés sur les avantages
on les inconvénients que présente ce mode d'alimentation pour les ani-
maux, soit à l'état vert, soit à l'état sec.
Concours prorogé jusqu'au i" décembre 1890. — Prix : soo francs
17" — ISS'l. — Jardin fruitier exotique en Algérie ou sur le
littoral méditerranéen français.
On devra faire connaître les espèces et les variétés d'arbres fruitiers
exotiques entretenues, indiquer la date des plantations, la nature du sol,
et les précautions prises pour assurer le succès de la plantation.
Ce travail devra faire connaître les variétés les plus recommandables
pour la localité où l'expérience aura été faite.
t^iOncours ouvert jusqu'au 1'=' décembre 1895. — Prix : soo ri-une<4.
18" — 1883. — Culture du Vhaseoliis radialus.
Le prix sera accordé à la personne qui aura cultivé avec succès le
Haricot radié dans un champ d'un demi-hectare au moins.
S'il se présentait plusieurs concurrents, la préférence serait donnée à
celui qui produirait les plus beaux spécimens de préparations alimen-
taires, obtenues avec les graines du Phaseolus radiatus.
Concours ouvert jusqu'au l*' décembre 1890. — Prix : »oo ri-aucH.
19" — 1886. — Fabrication d'un vin ou cidre d'oranges
douces, titrant après fermentation, de 4 à () degrés ou davan-
tage, sans addition d'alcool, et pouvant se conserver plusieurs
années en tùls ou en bouteilles.
Les candidats devront présenter dix bouteilles au moins de ce pro-
duit, et faire connaître les procédés de fabrication.
Concours ouvert jusqu'au f' décembre 1890. — Prime on médaille
d'une valeur de .loo rruncs.
20" — 18S6. — Introduction de culture pendant plus de cinq
années, dans le sud algérien ou tunisien, du Nara de la (lafrerie
occidentale {Acanthosycios horrida) sur une superlicie impor-
tante.
Concours ouvert jusqu'au l'"" décembre 1890. — Prime on médaille,
d'une valeur de :ioo rrancN.
ALLOCUTION
PUONONCliE
Par M. DE QUATREFAGES.
IMeiiibrv «lu riiiMtiCiit, vico-pi-é»<i«lcnt do la Mooiétc
à la
VINGT-NEUVIÈME SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE
bK LA SOCIÉTÉ NATIONALK D'ACCLIMATATION
Messieurs,
En eiiliant dans celle salle, en jelanl les yeux aulour de
vous, vous avez dû èlrc quelque peu surpris, peul-êlre même
désappoinlés. Le jour où noire Société dislrihue ses récom-
penses a élé jusqu'ici pour elle une fêle solennelle, donl on
chercliait à rehausser l'éclal. Nous ouvrions largement aux
ramilles de tous nos Sociétaires, à un public d'élite, à des
sommités sociales un local exceptionnel; des conlêrences
allrayanles et inslruclives captivaient rallention de Faudi-
loire, et un orchestre de choix saluait de ses fantares les
concurrents couronnés.
Aujourd'hui, rien de semblable. Point de musique; point
de gaz éclairant les loges et la scène ; dans la salle, sur une
modeste estrade, rien que des collègues; et aulour de nous
des murs tout nus, à peine grattés de la veille. Telle est noire
réunion celte année. El pourtant, malgré ce qu'elle a de peu
brillant et de sévère, elle marque un moment important dans
notre existence; elle est bien réellement une fêle.
En effet. Messieurs, jusqu'à ce jour la Société d'Acclimata-
tion était en réalité errante el logée au hasard. En se trans-
portant d'une rue à l'autre, elle subissait les nécessités im-
posées par chaque nouveau domicile; et celui-ci, acquis aux
conditions d'une location ordinaire, pouvait, à rliaque
échéance, la laisser dans rend)ai'ras. Aujourd'hui, elle va
habiter un local construit en vue de satisliiire à ses besoins.
XXX SOCIÉTÉ NATlOiNALE D ACCLIMATATION.
de laciliter ses services ; et dix-lmit ans de stabilité lui sont
assurés. Pour la première fois depuis sa fondation, notre So-
ciété est chez elle.
Votre Conseil a pensé que cette transformation heureuse
dé nos conditions d'existence méritait d'être célébrée. Mais il
a senti en même temps qu'une solennité trop éclatante serait
mal venue en ce moment. Si nous avons nos joies, nous avons
aussi nos douleurs ; et, pour pouvoir marier librement les
uns aux autres ces sentiments opposés, il a jugé qu'il ne fal-
lait pas appeler à nous un public indifférent, qu'il était mieux
de s'en tenir à une réunion de famille.
Bien peu de mois se sont écoulés depuis que la Société a
perdu son troisième président. Ce n'est pas quand la tombe
de Bouley est à peine fermée, que nous pouvions songer à
une grande fêle, où manquerait celui-là même qui aurait dû
la présider. Ce n'est pas au milieu des préoccupations inspi-
rées par cette perte, qu'il eût été possible de se livrera des
manifestations bruyantes en désaccord avec notre deuil.
Messieurs, dans toute Société libre comme la nôtre, la pré-
sidence a une importance tout autre que dans une Académie.
Pour être à la hauteur de sa tache, pour maintenir le présent
et assurer l'avenir de l'association, celui qui en est la tête doit
posséder des qualités spéciales et rarement réunies. Jusqu'ici
nous avons été favorisés. Vous savez fce qu'ont été Isidore
Geoffroy Saint-Hilaire et Drouyn de Lhuys. Le premier par
son savoir si grand, si élevé, uni au sentiment si net et si
droit de tout ce qui peut être utile, représentait, à un degré
exceptionnel, l'union de la science pure et de l'application.
Le second, par sa haute position sociale, nous ouvrait les
classes influentes et riches. Tous deux ont servi la Société
avec un égal dévouement; et je n'ai pas besoin de vous rap-
peler combien furent grands et sérieux les progrès accom-
plis, grâce à leurs mérites si divers.
Par la nature des études qui avaient rempli sa vie, par la
haute situation qu'elles lui avaient méritée, Bouley nous
rattachait à la fois au monde scicntilique et aux agriculteurs.
Ceux-ci auraient écouté avec conliance le praticien éprouvé
ALLOCUTION. XXXI
qui s'attachait ciiaque jour davanlaiçc à nos travaux, qui en
comprenait de mieux en mieux l'imporlance. En le frappant
avant riieure, la mort nous a pris un liommequi aurait bientôt
rivalisé avec ses prédécesseurs, qui aurait rendu des services
signalés à la Société, au pays ; et, — répétons-le après tant
d'autres, — un homme qui se faisait aimer autant qu'esti-
mer, par ses qualités à la fois charmantes et sérieuses.
Voilà surtout, Messieurs, pourquoi votre Conseil a cru de-
voir vous convoquer en petit comité. Il lui a semblé d'ailleurs
que, pour être plus intime, notre réunion n'en aurait pas
moins un intérêt tout spécial. Remettre, ici, à nos lauréats
les récompenses qu'ils ont méritées, c'est inaugurer notre
nouvelle demeure, c'est consacrer la prise de possession d'un
édifice qu'il est bien permis d'appeler VHûtel de la Société,
puisqu'il a été bâti pour elle.
L'expression d'Hôtel est peut-être un peu ambitieuse, car,
en réalité, notre installation est très modeste. Votre (<onscil
n'a rien voulu faire pour le luxe. 11 a bien rarement franchi
les bornes du nécessaire, jamais celles de l'utile. Mais du
moins, nous pourrons désormais recevoir convenablement
chez nous les étrangers et il a été pourvu à des besoins jus-
qu'ici restés en souffrance.
Ce changement de demeure marquera, nous l'espérons,
pour la Société les débuts d'une ère nouvelle. Pour une
Association comme la nôtre, que rien ne rattache aux pou-
voirs officiels et qui ne doit compter que sur elle-même, c'est
beaucoup d'avoir un cliez-soi. A lui seul, ce fait lui assure
une notoriété qui attire l'attention du public dont elle a be-
soin et qui vient à elle avec plus de confiance. Mais, })our que
cette modification matérielle porte tous ses fruits, il faut
qu'elle soit accompagnée d'améliorations d'un autre ordre.
Votre Conseil n'a pas méconnu ce côté de la question.
Déjà il a pris des mesures pour activer et étendre notre cor-
respondance, pour en assurer la régularité. Il espère pouvoir
bientôt rendre plus fréquentes les communications entre
tous les membres; il étudie les moyens de compléter nos
publications et d'en accroître l'attrait; il se ))réoccupc
XXXII SUCIÉTÉ NATlOiNALE DACCLIMATATION.
des voies qu'il sera peut-être bon d'indiquer à l'activité de
nos membres. En un mot, il s'ingénie à trouver et à mettre
en œuvre tout ce qui peut solliciter les intelligences et don-
ner un nouvel élan à nos travaux.
Mais vous aussi, Messieurs, vous avez votre part de tâche
à accomplir dans cette rénovation. Venez-nous en aide en re-
doublant de zèle. Apportez-nous plus souvent le résultat de
vos études, de vos expériences ; faites autour de vous la pro-
pagande honorable qui résulte de l'exemple et du travail.
Ces paroles que je vous adresse ici de vive voix, je les envoie
à tous nos collègues des départements et de l'étranger. Déjà
notre Association internationale a porté bien des fruits ; res-
serrons-en les liens, unissons plus que jamais nos ctforis, et
aux succès du passé s'ajouteront les progrès de l'avenir.
RAPPORT ANNUEL
SUR
LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ NATIOXALE D'ACGUMATATION
DE FRANCE ElN 1885
Par M. C. RWERET-^VATTEL
Secrétaire des séances.
Messieurs,
Je répondrais mal à vos sentiments si, en commençant ce
compte rendu succinct des travaux de notre Compagnie pen-
dant l'année écoulée, je ne saluais d'un dernier hommage le
savant éminent, le chef sympathique à tous dont la place
reste vide aujourd'hui et auquel, par un pieux sentiment,
vous vous êtes abstenus jusqu'à ce jour de donner un succes-
seur. Des voix éloquentes ont retracé la carrière scientifique
de M. Henri Bouley, analysé sa vie si brillamment remplie,
mesuré l'étendue de la perle que la science a faite en sa per-
sonne, et assurément, Messieurs, nous qui avions l'honneur
de le posséder à notre tète, nous avons, plus que personne,
à déplorer sa lin inattendue. Mais, si nous regrettons en lui le
savant qui honorait notre Société, nous avons à regretter
bien plus encore l'homme de cœur, l'homme aimable et bon,
dont la bienveillance était acquise à tous et qui réservait un
accueil favorable à quiconque l'approchait.
Une autre illustration scientifique a également disparu de
nos rangs : le 29 juillet dernier, la mort nous enlevait
M. Henri Milne-Edwards, membre de l'Institut, grand offi-
cier de la Légion d'honneur, Doyen de la Faculté des sciences,
professeur au Muséum d'histoire naturelle, etc. Si par son
âge et par des occupations absorbantes, M. Henri Milne-
Edwards se trouvait un peu éloigné de nos travaux, il ne les
a pas moins suivis toujours avec le plus sympathique intérêt.
Aussi, sa perte, qui est un deuil profond pour la science, ne
pouvait-elle être que vivement sentie par notre Compagnie.
Nous avons du moins la consolation de voir ce nom illustre
4' SÉRIE, T. in. — Séance publique anauelle. C
XXXIV SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
fiffurer encore au milieu de nous et honorer notre Société
en continuant de glorieuses traditions.
Parmi les membres du conseil, nous avons eu la douleur
de perdre M. le docteur Henri Labarraque, qui fut longtemps
un des membres les plus assidus de nos séances, auxquelles
il apportait, avec le concours de ses lumières, ce zèle, ce
dévouement, cette bienveillance extrême, cette bonté par-
faite qui formaient le fond même de son caractère. C'est
pour nous une perte bien sensible que celle d'un collègue
qui se distinguait par une si heureuse combinaison des
qualités du cœur et de l'esprit.
Un de nos membres à vie nous a aussi été enlevé : M. Vau-
vert de Méan, ancien consul général, qui appartenait à la
Société depuis de longues années, et qui avait souvent enrichi
le Bulletin de communications intéressantes. Très dévoué à
notre œuvre, notre regretté collègue lui a légué en mourant,
une somme de 15 000 francs comme dernier témoignage de son
sympathique attachement et de la part qu'il prenait aux inté-
rêts de l'acclimatation; son nom restera désormais inscrit au
nombre des bienfaiteurs de la Société.
Dans les rangs de notre 5' Section, un autre vide doulou"
reux s'est produit. Nous avons perdu M. Vavin, qui, l'un
des membres les plus anciens et les plus actifs de la Société,
s'était toujours occupé avec zèle de la propagation des végé-
taux utiles et qui n'avait pas abandonné ses travaux alors que
l'âge eût pu lui permettre le repos.
Ces pertes douloureuses ne sont malheureusement pas les
seules que nous ayons à déplorer : je dois encore rappeler à
vos souvenirs, à vos regrets, M. Sentis, consul général en
retraite; M. le colonel Pauthonnier, ancien aide de camp de
S. A. le vice-roi d'Egypte ; M.Gustave Arosa; M. Paul de
Bourakoff, qui était, depuis de longues années, délégué de
la Société à Odessa ; enhn, M. Victor Ghatel, de Valcongrain,
dont le zèle et le dévouement étaient à toute épreuve quand
il s'agissait de se consacrer à quelque œuvre utile, et surtout
de travailler à l'amélioration de la situation morale ou maté-
rielle de nos populations des campagnes.
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. XXXV
Dans ce temps où l'on oublie vite, c'est l'honneui' de
notre Société de se souvenir de ceux qui ne sont plus. Mais
en présence des vides qui s'ouvrent dans ses rangs, un autre
devoir s'impose à ceux qui restent : redoubler de zèle, pour
continuer l'œuvre commencée avec ces regrettés collabora-
teurs et la faire prospérer.
Vos travaux, du reste, n'ont été, Messieurs, ni moins nom-
breux ni moins importants cette année que les années précé-
dentes. Des progrès nouveaux ont été réalisés, des succès
obtenus, des questions intéressantes étudiées avec fruit, et si
nombreux, si variés sont les sujets qu'embrassent vos études,
que je puis craindre de faire quelques omissions dans ce
compte rendu, lequel ne saurait être que très rapide, car j'ai,
avant tout, à cœur de ne pas abuser de votre bienveillante
attention.
Si les tentatives d'acclimatation et de domestication pré-
sentent des diflicultés spéciales en ce qui concerne les Mam-
mifères, nous n'en avons pas moins à enregistrer cette année
des résultats satisfaisants au sujet de diverses espèces inté-
ressantes, et je dois rappeler en première ligne les nombreu-
ses reproductions de Cervidés, d'Antilopes, de Gazelles, etc.,
obtenues dans son domaine de la Palaudière (Indre-et-
Loire), par notre collègue M. Pays-Mellier (1), qui a pu con-
stater la rusticité de plusieurs de ces espèces, aussi bien que
le mal-fondé de l'opinion d'après laquelle ces animaux ne
pourraient vivre et se reproduir en captivité (2).
De leur côté, M. de Carpentier (3) et M. E. Delloye (4-) ont
obtenu la reproduction du Cerf nain de la Chine, qu'ils con-
sidèrent comme parfaitement rustique, d'un élevage facile et
très prolifique; ces petits Cervidés, qui ne causent pas de
dommage aux bois, paraissent être appelés à fournir un
précieux appoint pour repeupler nos chasses.
(1) Pays-Mellier, Reproductions de Mammifères (Bulletin, 1885, p. :}:J7).
(2) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p 525).
(3) Ibidem, p. 37(5.
(4) Ibidem, p. C5I.
XXXVI SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Les noies de M. le vicomte Powerscourt (1) sur racclimata-
tion en Irlande du Cerf Sika {Cervus Sika) ont appelé votre
attention sur celte charmanle espèce du Japon, qui repré-
sente un gibier de bonne qualité, pouvant faire l'ornement
d'un parc et, bien que de petite taille, trouver sa place à côté
des espèces les plus robustes (^).
Dans une note sur les Cerfs à acclimater, M. Huet, aide
naturaliste au Muséum d'histoire naturelle , a d'ailleurs insisté
auprès de vous (3) sur les qualités du Cerf Sika et de quelques
autres espèces qui, sans grande dépense ni beaucoup de
difficultés, pourraient être acquises en vue du repeuplement
de nos forêts.
M. Huet a signalé (4) également l'intérêt qui s'attacherait
à l'introduction en France de cette belle Antilope connue au
Sénégal sous le nom de petite Vache brune, et dans les nomen-
clatures scientifiques sous celui de Kob (Kohus unctuosus
Lauril.). Des observations faites depuis quatre ans par notre
collègue (5) l'ont convaincu que ces animaux vivraient très
bien sous notre climat, que leur domestication ne présente-
rait aucune difficulté, et qu'on peut, en conséquence, espérer
les voir prendre place un jour dans nos élables, àcôlé de nos
Bœufs et de nos Moutons, avec lesquels ils s'accommoderaient
parfaitement.
Gomme les années précédentes, M. Huet a bien voulu tenir
la Société au courant des naissances de Mammifères et d'Oi-
seaux obtenues à la ménagerie du Muséum d'histoire natu-
relle (6). Quelques-unes de ces naissances, comme par exem-
ple celles d'Antilopes de l'Inde, de Munjacks, de Bless-Bocks,
etc., survenues à la fin de l'année, présentent un grand inté-
rêt ; elles donnent la mesure de la vigueur, de la force de
résistance au froid des jeunes, issus cependant d'espèces
(1) Vicomte Powerscourt, Acclimatation en Irlande du, Cerf Sika, du Ja-
pon (Bulletin, 1885, p. 254).
(2) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 196).
(3) Huet, Cerfs a acclimater (Bulletin, 1885, p. 257).
(4) Huet, Sur l'Antilope Kob du Sénégal (Bulletin, 1885, p. 145).
(5) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 317).
(6) Huet, Notes sur les naissances, dons et acquisitions du Muséum d'his-
toire naturelle {Bulletin, 1885, p. 314, 465, 661).
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. XXXVII
provenant de contrées plus chaudes et plus ensoleillées que
notre pays sombre et froid pendant les mois d'automne.
Acclimatateur infatigable, M. Joseph Cornély vous a fait
part cette année de ses succès dans l'élevage du Mara, ou
Lièvre patagon {Dolichotis patachonica) , petit mammifère
qui paraît être d'une rusticité remarquable, et qui, s'il n'est
pas destiné à devenir un animal de chasse, sera tout au moins
un animal de grand parc, donnant un tiré des plus intéres-
sants (1).
Les observations précédemment recueillies par M. LeGuay
et par M. Mathey sur la fécondilé de la Chèvre naine du
Sénégal et sur la remarquable aptitude de cette race à sup-
porter les intempéries de notre climat, ont été confirmées par
celles de M. le docteur Clos (^), directeur du Jardin des Plan-
tes de la ville de Toulouse. M. Fuzier-IIerman vous a entre-
tenus des qualités que lui semble présenter la race des Mou-
tons chinois Ong-ti (3), animaux robustes, d'assez forte taille,
peu difficiles pour la nourriture ; notre confrère estime
qu'à l'aide de croisements prudents avec cette race, on arri-
verait facilement à augmenter, dans une notable proportion,
la fécondilé de nos races indigènes.
Vous devez à M. Couput, directeur de la Bergerie nationale
de Moudjebeur (Algérie), une intéressante communication
sur les résultats satisfaisants de l'élevage de la Chèvre d'An-
gora (4-), sous un climat absolument saharien, dans un pays
où de vastes espaces incultes attendent d'être mis en valeur,
où le seul mode d'exploitation culturale possible est l'éle-
vage du bétail. Si l'Arabe, avec ses habitudes invétérées de
négligence, ne peut retirer de cet élevage un résultat avanta-
geux, l'Européen pourra, sans nuire aux forêts algériennes,
qui doivent être l'objet des préoccupations de tous, s'adonner,
lui aussi, à l'élevage de la Chèvre, resté jusqu'ici l'apanage
(}) Joseph (Cornély, Note sw le Lièvre Patagon ou Mara (Bulletin, 1885,
p. 553).
(2) Procès-verbaux [Bulletin, 1885, p. 587).
^3) Ibidem, p. 70.
(l) Couput, Au sujet des Chèvres angoras en Algérie (Bulletin, 1885,
p. 120).
XXXVIII SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
exclusif de la population indigène. Il suffira pour l'encourager
dans celle voie, de lui prouver que non seulement l'élevage de
la Chèvre d'Angora est facile dans le Sud, mais encore que le
prix delà toison de cette Chèvre est assez élevé pour donner
un bénéfice raisonnable.
C'est d'après ces considérations que, sur la proposition de
M. Decroix (1), vous avez décidé de faire auprès de M. le
ministre de l'agriculture une démarche tendant à obtenir
que des mesures soient prises en vue d'encourager la propa-
gation de la Chèvre d'Angora en Algérie et la substitution de
cette espèce à la race indigène.
Avec une entière compétence en pareille matière, M. De-
croix vous a aussi entretenus de l'importante question du
transport des animaux à bord des navires (2) et des précau-
tions qu'il conviendrait de prendre, tant pour éviter les acci-
dents que pour maintenir les animaux en bonne santé, mal-
gré les fatigues du voyage.
Des renseignements fort curieux vous ont été donnés par
M. Pierre-Amédée Pichot sur les Éléphants de service dans
l'Inde, ainsi que sur les maladies qui affectent parfois ces
gigantesques pachydermes (o), et cette intéressante commu-
nication a été complétée par les observations que M. Saint-
Yves Ménard s'est trouvé à même de recueillir sur les Elé-
phants du Jardin d'Acclimatation (4). Vous avez de même
accueilli avec intérêt les notes statistiques que P.-L. Sim-
monds vous a fait parvenir sur le Chameau et sur l'utilisa-
tion de cet animal (5), un des plus précieux auxiliaires de
l'homme dans certaines régions du globe.
J'ai également à rappeler ici les communications : de M. le
comte de la Touche, sur l'élève du Cheval dans le dépar-
tement des Côtes-du-Nord ; de M. le baron de Sachs, sur
(1) Procès-verbaux {Bulletin, 1885, p. 71, 196, 326).
(2) Ibidem, \>. 390.
(3) Pierre-Amédée Pichot, Les maladies des Eléphants de service (Bulletin,
1885, p. 1).
(i) Saint-Yves Ménard, Sur les maladies des Eléphants (Bulletin, 1885,
p. 9).
('.) P,-L. Simiiionds, Le Clmneau (Bulletin, \%^'^, p. 392).
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. XXXIX
une curieuse émigralion de Campagnols observée dans les
plaines de la Beauce (i) ; de M. Mailles (2) et de M. O'iNeill (3),
sur le Rat noir; de M. Amédée Berlhoule , sur l'Ornitho-
rynque (4) ; de M. Pays-Mellier, sur la multiplication du Porc-
épic (5); de M. Mailles (6) et de M. Fernand Lataste (7),
sur l'intérêt qui s'attacherait à l'introductiou chez nous de
deux Hérissons du nord de l'Ah-ique, particulièrement re-
commandables au j)oint de vue de la destruction des Mol-
lusques et des insectes nuisibles dans les jardins. Enfin, je
ne dois pas oublier de mentionner les détails fort intéres-
sants qui vous ont été communiqués par M"' Lagrenée, sur
l'utilisation industrielle des poils de Lapins angoras de
grande race. Jusqu'à présent on n'avait presque pas élevé
cette race de Lapins. On considérait souvent ces animaux
comme des animaux de luxe ; mais aujourd'hui on peut être
sûr d'un débouché pour les produits, qui ne sont pas sans
valeur, car un Lapin adulte ne rapporte pas moins de 6 à
8 francs de soie (8). Il y a donc lieu de féliciter tout particu-
lièrement M'"' Lagrenée du zèle désintéressé qu'elle apporte
à la propagation de cette belle et utile race.
Pour les animaux qui ne sont encore que peu répandus,
insuftisamment connus et acclimatés, il y aurait grand intérêt
à ce que chaque amateur qui les possède ne gardât pas pour
lui seul ses observations, mais en fit publiquement part et
dît ce qu'il a appris de leurs moeurs, de leur manière d'être,
de leurs habitudes. Si cet usage se généralisait beaucoup
plus parmi les membres de notre Société, l'acclimatation en
acquerrait un sérieux avantage. Quels tâtonnements, quel
gaspillage de temps et de sujets rares et précieux on évite-
rait en profitant des essais précédents, puisque chacun, d'or-
(1) Procès-verbaux {Bulletin, 1885, p. 525).
(2) Ibidem, p. 537.
(3) Ibidem, p. 503.
(4) Am. Berlhoule, L'Ornitliorijnque {BuÛelin, 1885, p. 5U5).
(5) Proces-verbaux (Bullelin, 1885, p. 133j.
(6) Ibidem, p. 325.
(7) Ibidem, p. 32tJ.
(8) M™" G. L-.igrenée, Utilisation indusirielle des poils de Lapins angoras.
[Bulletin, 1885, p. 642).
XL SOCIÉTÉ NATIOISALE D ACCLIMATATION.
dinaire livré à ses propres moyens et inspirations, est à peu
près obligé de faire son éducation à ses dépens, et, en
somme, à ceux de l'acclimatation en général, dont, par inex-
périence, on retarde le développement et souvent on stérilise
et même on anéantit les ressources.
Ce sont précisément ces raisons qui donnent une sérieuse
valeur aux comptes rendus que veulent bien nous adresser
sur leurs élevages de zélés éducateurs, parmi lesquels
M. Gabriel Rogeron mérite cette année encore une mention
spéciale. Les observations faites par noire collègue (1) sur les
Canards Casarkas de Paradis {Tadorna variegata), les essais
qu'il poursuit sur le croisement de ditîérentes espèces de
Canards (2) ont, ajuste titre, fixé votre attention. Il en a été
de même des renseignements adressés par M. le comte A. de
Monllezun sur la Bernache de Magellan (3), par M. le mar-
quis de Brisay sur la Perruche érythroptère(4'), par M. Gour-
raud sur le Canard de Bahama (5).
D'autres élevages ont également été couronnés de succès,
et nous avons à mentionner en première ligne celui du Lo-
phophore resplendissant (Lophophorus refulgens) , mené à
bien par M. Georges Mathias, qui a réussi à obtenir dix Lo-
phophores vivants (6) et réalisé ainsi les conditions du prix
fondé par la Société. Mais notre généreux collègue n'a pas
voulu bénéficier personnellement de la récompense promise.
Joignant le désinléressement à la modestie, et se contentant
de la constatation du succès obtenu, il a immédiatement
affecté le montant du prix mérité par lui à la création de deux
prix destinés : l'un à l'éleveur qui aura obtenu la reproduc-
tion en captivité d'une espèce quelconque de l'ordre des
Gallinacés n'ayant pas encore multiplié en France dans ces
conditions ; fautre, à l'auteur de la meilleure monographie
(1) Gabriel Rogeron, Le Casarka de Paradis {Bulletin, 1885, p. 151).
(2) Gabriel Rogeron, Croisements de Canards {Bulletin, 1885, p. 4-01).
(3) Comte A. de Montlezun, Sur la Bernache de Magellan {Bulletin, 1885,
p. 609).
(4) Marquis de Brisay, Sur la Perruche érythroptére {Bulletin, 1885,
p. 558).
(5) Procès-verbaux {Bulletin, 1885, p. 592).
(6) Ibidem, p. 592.
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. XLI
des Phasianidés. Ce sont deux fondations utiles ajoutées à
la liste de nos prix. Qu'il me soit permis de renouveler ici à
notre collègue, pour cette création, les félicitations et les re-
merciements de la Société.
Vous avez eu à applaudir également aux succès de M. le
D"" Clos dans la reproduction du Nandou (1), de M. Maxwell
dans l'élevage de la Tourterelle maillée ('2), de M. Th. Leroux
dans l'éducation de la Perruche omnicolore et de la Perruche
de Pennant (3), de M. le comte Henri de Bussierre dans la
propagation du Colin de Virginie et du Faisan de Mongolie (4),
de M. Delaurier dans l'élevage de la Colombe grivelée (5), de
M. Courtois (6) dans la multiplication du Canaid de Paradis
(Casarka variegata). Signalons, en passant, qu'en même
temps qu'ils sont, pour ceux qui s'en occupent, un sujet
d'attachantes distractions, beaucoup de ces élevages peuvent
devenir une véritable source de revenu. C'est ainsi qu'une
seule femelle de Canards de Paradis, achetée par M. Courtois
au Jardin d'Acclimatation en 1875, à raison de -400 francs la
paire, lui a donné, en l'espace de sept ans, 34 sujets mâles et
33 femelles, qui ont été vendus au prix total de 5 470 francs (7).
On voit, par cet exemple, les bénéfices que l'éducation des
oiseaux de luxe peut donner entre les mains d'éleveurs véri-
tablement entendus et bien installés.
Nombreuses sont les espèces intéressantes à acquérir, et,
chaque jour, des importations nouvelles multiplient vos
sujets d'expérience. Prétendre établir actuellement la liste
exacte des espèces qui pourront un jour être utilisées serait
assurément téméraire; mais il est du moins possible, comme
le conseillait notre illustre et vénéré fondateur, de « dresser
celle des espèces dont la domestication, déjà préparée par
quelques études préliminaires, par des observations faites
(1) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 587j.
(2) Ibidem, p. 181.
^3) Ibidem, p. 647.
(i) Ibidem, p. 73.
(5) Ibidefii, p. G52.
(&} Ibidem, p. 189.
(7\ thiriorn i^ mn
\Dj loiuem, p. iot>.
(7) Ibidem, p. 190.
XLII SOCIÉTÉ NATIO^^ÂLE d'ACCLIMATATION.
dans le pays, ou même par des expériences sous notre climat,
est assez manifestement utile et possible pour que tous les
auteurs s'accordent à cet égard (1) ».
C'est en prenant pour guide ces judicieuses réflexions que
notre collègue M. d'Aubusson a entrepris un travail d'une
grande utilité : le catalogue raisonné des espèces d'oiseaux
qu'il y aurait lieu d'acclimater et domestiquer en France (2).
Cette élude n'est pas un aride inventaire des richesses futures
que peuvent nous procurer l'acclimatation et la domestica-
tion de certains oiseaux; c'est un exposé, aussi exact que le
permettent les documents recueillis par la science, de leurs
mœurs, de leurs habitudes, de leur distribution géogra-
phique, de leur habitat, de leur régime et enfin de l'utilité
que nous pouvons en retirer. L'importance d'un pareil travail
n'échappera à personne, et l'on doit remercier vivement
l'auteur de l'avoir entrepris.
Dans urie série de communications faites en 1883 et 1884,
M. le D' Camille Dareste avait fait part à la Société des résul-
tats de ses belles recherches expérimentales sur les condi-
tions physiques et physiologiques de l'évolution normale du
Poulet dans l'œuf. Cette année, notre savant collègue a porté
son attention sur un point qui restait à élucider : l'influence
du déplacement des œufs pendant l'incubation (3). Nous sa-
vons que la Poule couveuse remue fréquemment ses œufs,
que la pratique du retournement quotidien des œufs est gé-
néralement adoptée par toutes les personnes qui s'occupent
d'incubation artificielle, qu'enfin, tout récemment, on a ima-
giné des appareils pour pratiquer le retournement des œufs
par des procédés mécaniques. L'immobilité des œufs pen-
dant toute la durée de l'incubation est-elle donc un obstacle
à l'éclosion? Des expériences comparatives ont permis à
M. Dareste de résoudre cette question, en démontrant, de la
(1) Isidore Geoffroy SaiiU-Hilaire, Acclimatation et domestication des ani-
maux utiles, p. i8.
(2) Magaud d'Aubusson, Catalogue raisonné des oiseaux qu'il y aurait lieu
d'acclimater et domestiquer en France {Bulletin, 1885, p. 471).
(3) D' Camille Dareste, Note sur l'éclosion des œufs de Poule {Bulletin, 1885,
p. 209).
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIETE. XLIII
manière la plus nette, que l'immobilité de l'œuf lait adhérer
l'allantoïde au jaune et amène ainsi la mort de l'embryon.
Toutes ces recherches expérimentales sur l'éclosion avaient
été entreprises par M. Dareste dans un but tout scientifique;
elles étaient le point de départ d'études sur les conditions de
l'évolution anormale ou de la production des monstruosités.
Mais elles ont une utilité pratique évidente, puisqu'elles
rendent compte des difîérenles conditions qui font réussir
l'incubation artificielle. L'importance de l'incubation artifi-
cielle comme procédé industriel s'accroît tous les jours. En
substituant des notions scientifiques aux notions purement
empiriques dont on s'était contenté jusqu'à présent, notre
savant collègue a rendu service à tous ceux qui s'occupent de
l'élève des oiseaux.
En même temps qu'il appelait votre attention sur les pro-
grès que fait en divers pays l'élevage industriel de l'Autruche,
M. le Secrétaire général vous a signalé les difficultés particu-
lières que présente cet élevage dans notre colonie algé-
rienne (1), où, dès qu'ils ont une quinzaine de jours, les Au-
truchons sont sujets à une affection des os qui, jusqu'à l'âge
de six mois, les fait périr en grand nombre.
Heureusement ces difficultés paraissent devoir être bientôt
surmontées d'une manière définitive, grâce aux persévérants
efforts d'éleveurs intelligents et soigneux, parmi lesquels nous
avons à mentionner plusieurs de nos collègues et en particu-
liers M. Laloue (de Zéralda) (2), M. Créput (de Misserghin)
et M. Lucien Merlato (d'Ain Marmora) (3).
Des renseignements que vous avez enregistrés avec intérêt
vous ont été fournis par M. Iluet sur les habitudes et les al-
lures du Menure Lyre (Menura superba) en captivité (4) ; par
M, Fernand Lataste, sur l'alimentation des Kapaces noc-
turnes (5); par M. Gabriel llogeron (6) et par M. Gretté de
(1) Procès-verbaux {Bulletin, ItiSô, p. \'i\).
(2) A. Laloue, Ferme iV Autruches de Zéralda (Bulletin, 1885, p. 665).
(3) Procès-verbaux {Bulletin, 1885, p. G;{, 646, 703).
(4) Bulletin, 1885, p. 46J.
(5) Proces-verbaux (Bulleti).i, 1885, p. 327, 391),
(6) Ibidem, p. 588.
XLIV SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Palluel (1), sur le phénomène de la mue chez différentes
espèces d'oiseaux; par M. O'Neill (2) et par M. Maxwell (3),
sur le développement extraordinaire de l'œuf chez certaines
Poules; enfin par M. Huet (4), sur les résultats très satisfai-
sants que donne, pour l'éducation déjeunes Faisans, la nour-
riture spéciale proposée par notre collègue M. Dautreville.
D'après les expériences comparatives qu'il a été à même de
faire au Muséum d'histoire naturelle, M. Huet estime que les
amateurs sont désormais à l'abri des ennuis de l'élevase au
moyen des œufs de Fourmi, attendu qu'avec la poudre toni-
nutritive de M. Dautreville on pourra, sans plus de frais,
mener parfaitement à bien l'élevage des Faisandeaux.
Gomme les années précédentes, la culture des eaux a été,
de votre part, l'objet d'une sérieuse attention; vous avez
suivi avec intérêt le développement de cette industrie tant
en France (5) qu'à l'étranger ((3), et vous vous êtes préoccu-
pés de la nécessité, qui s'impose plus que jamais, de mesures
protectrices réellement efficaces en faveur du poisson (7).
C'est spécialement à ce point de vue qu'à l'occasion des ex-
positions d'Edimbourg et de Londres, vous vous êtes fait
présenter, par votre Secrétaire des séances, un rapport sur
la situation de la pisciculture dans la Grande-Bretagne et
quelques autres pays voisins (8). En même temps, d'utiles
relations ont été nouées avec diverses Sociétés de piscicul-
ture régionales (9) ou étrangères (10), dont les travaux,
comme les vôtres, ne pourront que gagner à se combiner
dans une sage et fructueuse communauté d'efforts.
Parmi les nombreux rapports qui vous ont été adressés sur
(1) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 392).
(2) Ibidem, p. -426.
(3) Ibidem, p. 416, 428.
(4) Bulletin,, 1885, p. 466.
(5) Procès-verbaux {Bulletin, 1885, p. 67, 181, 182, 251, 310, 311, 378,590,
704, 705).
(6) Ibidem, p. 71, 127, 130, 134, 179, 246, 590, 591, 601, 647, 656).
(7) Comte V. de Lorgeril, Dépeuplement des eaux (Bulletin, 1885, p. 394).
(8) Raveret-Watlel, Rapport sur les Expositions internationales de pèche
d'Edimbourg et de Londres [Bulletin, 1885, p. 260).
(9) Proces-verùaux (Bulletin, 1885, p. 176, 181).
(10) Ibidem, p. 246, 526.
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIETE. XLV
les travaux de repeuplement des eaux entrepris sur différents
points, je dois rappeler spécialement les communications de
MM. Wagner (1), Rivoiron (2), Delg range (3), Berthoule (4),
Julien (5), Vacher (6), marquis de Scey de Brun (7) et des
Vallières (8).
Je dois aussi mentionner d'une façon toute spéciale les
travaux d'empoissonnement, complètement désintéressés, que
M. René de Sémallé poursuit depuis plusieurs années dans
le département du Puy-de-Dôme, où notre collègue fait gé-
néreusement lâcher, dans divei's cours d'eau et dans la Dore
en particulier, des quantités importantes d'alevins de Carpe.
Déjà aujourd'hui il n'est pas rare de voir les pêcheurs cap-
turer des sujets du poids de plus de 1 kilogramme (9). On
peut donc espérer que, grâce à M. Sémallé, la Dore se repeu-
plera de cet excellent poisson et que l'alimentation publique
retrouvera sur ce point une ressource qui n'aurait jamais dû
lui faire défaut.
Vous avez applaudi aux résultats obtenus par M. le vicomte
de Causans (10) dans l'empoissonnement du lac de Saint-Front
(Haute-Loire), où notre collègue a créé, pour l'élève de la
Truite, un établissement important, installé dans des condi-
tions particulièrement remarquables.
Des renseignements intéressants vous ont été donnés par
M. le docteur Paul Brocchi sur la possibilité de mettre en
exploitation les étangs de la Basse-Camargue (11), à l'instar de
ce qui se fait, depuis si longtemps et avec tant de profit, dans
les lagunes du delta du Pô, à Commacchio.
(I) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 67, 74, 311).
(2i Ibidem, p. 67.
(3) Ibidem, p. 134, 181, 705.
(4) Ibidem, p. 311.
(5) Ibidem, p. 378.
(6) Ibidem, p. 704.
(7) Ibidem, p. 704.
(8) Ibidem, p. 134.
(9) Ibidem, p. 175, 190).
(10) Vicomte de Causans, Établissement de pisciculture du lac de Saint-Front
{Bulletin, 1885, p. 148).
(II) Paul Brocchi, Sur les étangs de la Basse-Camargue (Bullet., 1885,
p. 407).
XLVI SOCIÉTÉ NATIO-NALE d'ACCLIMATATION.
Enfin, il convient de rappeler les excellents résultats obte-
nus, de plusieurs côtés, dans les essais d'acclimatation de di-
vers poissons étrangers (1) qu'il serait intéressant d'intro-
duire dans nos eaux douces et sur lesquels des notes vous
ont été communiquées à différentes reprises (2).
Des dons précieux d'œufs ou d'alevins vous ont mis à
même de continuer ces essais et d'en entreprendre de nou-'
veaux. L'éminent Président de la Société allemande de pisci-
culture, M. de Behr, auquel vous êtes déjà redevables de
nombreux et intéressants envois, vous a encore fait adresser
cette année cent mille œufs de Coregunus albula (3), excel-
lente espèce des lacs du nord de l'Europe, dont l'acquisition
présenterait une réelle valeur pour nos eaux douces et en
particulier pour nos lacs de l'Auvergne. Les œufs, arrivés en
parfait état, ont été placés en bonnes mains, et nous avons
tout lieu d'espérer que les alevins obtenus prospéreront dans
les eaux où ils ont été versés (4).
Un autre envoi très précieux que nous a généreusement
fait M. le professeur Spencer F. Baird, commissaire des Pê-
cheries des États-Unis, vous a permis d'essayer l'acclimata-
tion de VAmiurus nebulosus ou Poisson-Ghat, de l'Amérique
du Nord (5). Ce poisson, très estimé aux États-Unis (6), mé-
rite spécialement l'attention en ce qu'il se contente d'une
eau stagnante et même vaseuse ; robuste et d'une grande fé-
condité, il serait une excellente acquisition pour l'empois-
sonnement des fosses de tourbières, où il réussirait à mer-
veille, tandis que peu de nos Poissons indigènes y prospére-
raient de façon à donner des produits vraiment sérieux.
M. Max von dem Borne, de Berneuchen, nous a fait, lui
aussi, deux envois dont vous avez apprécié toute la valeur :
l'un, de jeunes Sandres (7) ou Perches-Brochets (Lucioperca
(1) Procès-verbaux {BuUelin, 1885, p. 67, 74, 75, 134, 311, 704).
(2) Raveret-Wattel, La Truite arc-en-ciel [Bulletin, 1885, p. 81).
(3) Procès-verbaux [Bulletin, 1885, p. 67, 75).
(4) Ibidem, p. 75.
(5) Ibidem, p. 526.
(6) Ibidem, p. 313, 541.
(7) Ibidem, p. 704.
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIETE. XLVIl
Sandra), espèce qui pourra, malgré son robuste appélil,
rendre des services dans les eaux closes; l'autre, de Black-
Bass (1) ou Perche noire d'Amérique {Microplenis salmo-
nidés et Micropterus Dolomieu Lacépède), un des meilleurs
poissons des États-Unis, recommandable par son aptitude
à vivre à peu près dans toutes les eaux. La facilité avec
laquelle notre généreux donateur, M. Max von dem Borne, a
obtenu, en Allemagne (2), la multiplication de celte intéres-
sante espèce donne lieu d'espérer qu'elle pourra de même
s'acclimater chez nous.
De nouveaux documents vous ont été fournis concernant la
maladie qui sévit d'une façon si désastreuse sur les Écrevisses
de nos rivières (3). Si la cause de cette maladie n'a pu en-
core être établie d'une façon indiscutable (4), les expériences
faites prouvent du moins que, dix-huit mois ou deux ans
après le passage de la maladie, un cours d'eau n'est plus in-
fecté et peut être repeuplé d'Ecrevisses au moyen d'importa-
tions bien dirigées. C'est donc de ce côté que doivent se
porter aujourd'hui les etîorts, et il semble qu'on soit en droit
d'espérer qu'avec un peu d'intelligence et d'initiative, on
pourra faire de nouveau prospérer dans nos cours d'eau ce
crustacé, qui semblait être sur le point de disparaître.
En outre des travaux que je viens de rappeler, je dois en-
core mentionner les communications faites par M. Charles de
Souancé (5) sur des faits curieux de migrations de poissons,
par M. Laisnel de la Salle (6) et par M. Mailles (7), sur les
Grenouilles-Bœufs; par M. Fernand Lalaste (8), sur le Scor-
pion de l'Algérie; par M. Mailles (9) et par M. E. Joly (10), sur
(1) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 649, 654, 655).
(2) Ibidem, p. 127.
(3) /fttdem, 67, 384, 591, 705.
(4)^ Raveret-Wattel, Résumé des réponses au questionnaire sur la maladie
des Ecrevisses (Bulletin, 1885, p. 614).
(5) Procès-verbaux {Bulletin, 1885, p. 527).
(6) Laisnel de la Salle, Histoire de Grenouilles-Bœufs (Bulletin, 1885, p 213).
— Procès-verbaux {Bulletin, 1885, p. 527).
(7) Ibidem, p. 247.
(8) Ibidem, p. 188.
(9) Ibidem, p. 175, 328.
(10) Ibidem, p. 182.
XLVIII SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
les Grenouilles indigènes el sur l'utilité de protéger ces
Batraciens, destructeurs de Mollusques et d'Insectes nui-
sibles, etc.
Pendant cette dernière session, vous avez encore reçu de
nombreux rapports sur la sériciculture et sur les différentes
espèces de Vers à soie. L'un des plus zélés correspondants de
la Société, M. Alfred Wailiy, vous a, comme de coutume,
fait parvenir un compte rendu détaillé de ses travaux de
l'année (1) comportant l'éducation d'un grand nombre de
Lépidoptères séricigènes exotiques. Parmi les différentes
observations consignées dans ce rapport (2), il en est une
particulièrement intéressante à enregistrer : c'est la possi-
bilité d'élever le Ver à soie du Chêne du Japon, VAttacus
Yama-maï, avec les feuilles de l'Aubépine, et de parer ainsi
à l'inconvénient du développement tardif des feuilles du
Chêne, cause fréquente de grand embarras pour l'éducation
de ce Bombycien exotique.
Des rapports très intéressants vous sont parvenus de divers
côtés sur l'élevage du Ver à soie du Chêne de la Chine,
VAttacus Pernyi, que sa rusticité véritablement exception-
nelle rend précieux pour notre climat (8). On doit donc
applaudir vivement aux efforts que font pour propager cette
espèce plusieurs éducateurs zélés, parmi lesquels figurent,
au premier rang, M. Fallou (4), M. E. Charrin (5), M. le
comte Léon de Danne (6), M. le docteur Gilbert (7) et surtout
M"* veuve Turpin (8), de Sillats, qui travaille à cette œuvre
utile par de nombreuses distributions de graines et de
cocons, et qui a bien voulu, cette année, faire à la Société,
l'envoi d'un lot important de graine choisie (9).
(1) Procès-verbaux {BuUelin, 1885, p. 529, 531).
(2) Alfred Wailiy, Éducations d'Attacietis séricigènes [Bulletin, 1885, p. 410).
(3) Procès-verbaux {Bulletin, 1885, p. 320, 329).
(4) Ibidem, p. 192,320.
(5) E. Charrin, Essai d'élevage du Ver à soie du Chêne de Chine (Bulletin,
1885, p. 542).
(6) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 378, 648, 707).
(7) Ibidem, p. 378.
(8) Ibidem, p. 529.
(9) Ibidem, p. 311, 592.
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. XLIX
Le R. p. Camboué, missionnaire apostolique à Tama-
lave, auquel vous devez de nombreuses notes sur la flore et
la faune de Madagascar (1), vous a notamment fait parvenir
un travail très intéressant sur les Bombyciens séricigènes de
cette île (2). Les renseignements fournis par ce travail, et les
échantillons de soies qui l'accompagnaient, font voir tout le
développement que la sériciculture pourrait prendre à Mada-
gascar, où cette industrie ne sera pas la moindre ressource
offerte à nos colons, quand la France s'établira solidement
sur ce point, La quantité de soie consommée annuellement
par nos fabriques françaises se chiffre par 250 millions de
francs environ; or la moitié de cette soie nous vient de la
Chine, par l'Angleterre. Du jour où la grande île africaine
sera vraiment et de fait la France orientale, nous pourrons
y trouver, entre autres avantages, celui d'y prendre la ma-
tière première que nous sommes actuellement obligés de
demander à l'étranger. Puissions-nous donc, dans un avenir
prochain, voir sur la grande île africaine de Madagascar,
triompher définitivement, avec les droits de la France, les
intérêts de la vraie civilisation !
M. P. Mégnin, l'auteur de si importants travaux et de si
nombreuses découvertes concernant les Acariens, poursuit
ses savantes recherches sur ce groupe d'êtres microscopiques
que l'on regarde généralement, mais à tort, comme étant tous
nuisibles. La plupart sont inoffensifs; beaucoup peuvent
même être considérés par nous comme des auxiliaires. Avec
la collaboration de M. le professeur Laboulbène, M. Mégnin
vient de faire l'étude complète d'une espèce qui restait fort
mal connue , le Sphœrogyna ventricosa , et, d'après les
mœurs, la manière de vivre de cette espèce, on est en droit
de penser qu'elle pourrait devenir, pour combattre le Phyl-
loxéra, un agent destructeur des plus efficaces (3).
Parmi les communications ressortissant à la 4' Section, je
(1) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 183, 247, 329, 658).
(2) Le R. P. Ciuiiboué, Bombyciens séricigènes de Madagascar {Bulletin,
1885, p. 367). .
(3) P. Mégnin, Note sur un Acarien utile (Balletin, 1885, p. 4.59).
4' SÉRIE, T. III. — Séance publique annuelle. d
L SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
dois encore mentionner celle de M. Moleyie sur les Insectes
et les Craslacés comestibles (1); celles de M. Maurice Girard,
concernant divers insectes nuisibles aux cultures (2) ; celle
de M. O'Neiil, sur la destruction des Criquets dans l'île de
Chypre (3) au moyen du procédé décrit il y a quelque temps
dans le Bulletin, ])2iV notre collègue M. Decroix (4); celle
de M. Fallou sur un Lépidoptère de l'Europe méridionale, le
Lasiocampa otus, qui produit un beau cocon soyeux et qui
mériterait qu'on essayât de l'acclimater en Algérie (5) ; enfin,
celle de M. Charles Naudin, sur les ressources que pourrait
offrir, pour l'élevage des Vers à soie du Chêne {Attacus
Yama-maï et A. Pernyi), le Chêne de Mirbeck {Quercus
Mirbeckii), qui, plus précoce que ses congénères, fournirait
des feuilles bien développées à l'époque de l'éclosion des
jeunes Chenilles (6).
Des rapports détaillés vous ont été adressés par plusieurs
de nos collègues, sur la culture des plantes qui leur avaient
été confiées par la Société. Il convient de mentionner parti-
culièrement ceux de MM. le docteur Lecler (7), Willist (8),
Yincendon-Dumoulin (9), Faudrin (10), Duchastel (11),
Baron d'Avène (12), Sœhnlin (13), llédiard (14), Fallou (15),
de Barrau de Muratel (16), Félix de la Rochemacé (17),
AdenoL (18), Fleury(19) et Mathey (20).
(1) Molevre, Insectes et Crustacés comestibles {Bull., 1885, p. 500, 56"2,668).
(2) Proces-verbuux (Bulletht, 1885, p. 311, 531 j.
(3) Ibidem, p. 135.
(4) Ibidem, p. 311.
(5) Ibidem, p. 194.
(6) Ibidem, p. 049.
(7) Ibidem, p. 7U.
(8) Ibidem, p. 70.
(9) Ibidem, p. 128.
(lOj Ibidem, p. 185.
(11) Ibidem, [k 187.
(12) Ibidem, p. 321.
(13j Ibidem, p. 388.
(14) Ibidem, p. 387.
(15) Ibidem, p. 388.
(16) Ibidem, p. 534.
(17) Ibidem, p. 592.
(18) Ibidem, p. 710.
(19) Ibidem, p. 710.
(20) Ibidem, p. 712.
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. LI
Votre atlention a été appelée par iM. Cli. Naiidia sur difle-
rents végétaux économiques, dont l'acclimalalion lui paraî-
trait devoir être essayée dans noire Midi (1).
Continuant à s'occuper, avec le zèle infatigable qu'on lui
connaît, des végétaux exotiques intéressants à acquérir pour
nos cultures potagères, M. A. Paillieux vous a entretenus, à
plusieurs reprises (2), de diverses plantes alimentaires nou-
velles, qu'il travaille activement à propager et qui méritent,
en effet, une attention toute spéciale (3).
M. le docteur Mène a complété le travail si important qu'il
avait entrepris sur les productions végétales du Japon, et
dans lequel sont passées en revue toutes les plantes alimen-
taires, industrielles, forestières ou ornementales. Le savoir
étendu, le soin minutieux, la conscience extrême apportée
dans l'exécution de ce travail en font, au point de vue scienti-
fique comme au point de vue purement pratique, un des
documents les plus remarquables que notre Bulletin ait pu-
bliés jusqu'à ce jour (4).
Vous avez appris avec satisfaction le développement de la
culture des Eucalyptus, dont plusieurs espèces ont fait l'objet
de communications de la part de MM. Henry de Vilmorin (5),
le docteur J. Michon (6), R. de Noter (7), Brau (8) et Ra-
verel-Wattel {9). M. Félix delà Rochemacé vous a fait par-
venir des renseignements complémentaires sur le procédé
qu'il emploie pour rendre ces arbres australiens plus résis-
tants aux froids, procédé qui lui donne les meilleurs résul-
tats et qui, même sous le climat du département de la
Loire-Inférieure, lui a permis d'obtenir, à quatre ans et
demi de plantation, des Eucalyptus amygdalina de 10™,50
(l) Ch. Naiidin, Sur divers végétaux économiques (Bulletin, 1885, p. 138).
(2j Proces-verbaux (Bulletin, 1885, p. 75, 194, 195, 197, 324, 386).
(3) A. Paillieux, Quelques plantes alimentaires nouvelles [Bulletin, 1885,
p. 634).
(4) Edouard ^ène, P:is productions végétales du Jupon [Bulletin, 1885, p. 93,
2-24, 288, 347. 423).
(5, Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 19?).
(6) Ibidem, p. 252.
(7) /fcirfem, p. 592.
(8) Ibiilem, p. 709.
(9) Ibidem, p. 129, 462.
LU SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
de hauteur et de 0'",53 de circonférence à 1 mètre au-dessus
du sol (1). De son côté, M. Jaille a fait, dans le département
de la Gironde, d'intéressanles observations sur la rusticité
de plusieurs espèces d'Eucalyptus et en particulier de rjE*.
amydalina, qui, par sa végétation rapide et par son aptitude
à résister au froid, mérite une attention spéciale (2), Nous
pouvons d'autant plus, Messieurs, nous féliciter des résultats
obtenus, que la Société d'Acclimatation a contribué pour
une très large part à la propagation des Eucalyptus, et il con-
vient, d'ailleurs, de rappeler que c'est à un de nos collègues,
M. Alfred Bonchereaux, que revient le mérite d'avoir dé-
montré la possibilité de l'utilisation du bois d'Eucalyptus,
non seulement pour des travaux tels que les grosses char-
pentes, mais encore pour la fabrication des meubles. On a
longtemps prétendu que l'Eucalyptus ne pourrait pas être
employé en ébénisterie, parce que les fibres de ce bois se
tordaient. M. Bouchereaux a constaté qu'en lui faisant subir
un certain séjour dans l'eau, ce bois perd complètement le
défaut qu'on lui reprochait et peut recevoir une foule d'ap-
plications. Des meubles ont été confectionnés en utilisant le
bois d'Eucalyptus globulus, provenant de la succursale du
Jardin d'Acclimatation, à Hyères, et M. Bouchereaux a éga-
lement essayé l'emploi de l'-É^. rostrata, qui fournit un excel-
lent bois de placage, plus élégant que Tacajou moucheté (3).
Une remarquable élude de notre collègue. M, Charles
Rivière, directeur du Jardin d'essai du Hamma, sur une vé-
gétation assainissante au Gabon (4), a provoqué au milieu de
vous une intéressante discussion sur l'influence des planta-
tions d'Eucalyptus dans les régions paludéennes (5), et cette
controverse ne peut être que profitable à la vérité scienti-
fique. Comme M. le docteur Michon l'a fait remarquer avec
tant de justesse, dans des questions aussi difficiles que celle
(1) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 380, 651).
(2) Ibidem, p. \U.
(3) Ibidem, p. 187.
(4) Ch. Rivière, Végétation assainissante au Gabon {Bulletin, 1885, p. 12,
38 71).
(5) Bulletin, p. 28, 31, 54, 55, 71.
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIETE. LUI
de l'assainissement i]e ces contrées que la civilisation mo-
derne dispute à la nature sauvage, les expériences sont très
difficiles; elles ne sauraient se faire avec la rigueur et la pré-
cision des essais de laboratoire. Des fLÙts, riooureusement
constatés, peuvent seuls servir à élucider cette question d'hy-
giène, une des plus importantes qui puissent faire l'objet des
études de la Société d'Acclimatation.
Au nombre des végétaux exotiques dont l'acquisition vous
préoccupe à bon droit, les Bambous occupent une des pre-
mières places. La culture de ces précieuses graminées gagne
heureusement chaque jour du terrain, grâce aux efforts de
plusieurs d'entre vous (1), et elle prend déjà, sur quelques
points, une véritable importance. A Bayonne, M. Gustave
Pinède, qui a l'un des premiers introduit cette culture dans
la région en 1865, possède aujourd'hui une magnifique plan-
tation, où certains Bambous présentent des jets de plus de
10 centimètres de diamètre, sur une longueur de 12 mètres.
En présence d'un pareil résultat, on est porté à croire que
cette plante trouvera sa place en France, non seulement à
titre de plante d'ornement, mais encore comme une essence
forestière appelée à rendre, dans un temps plus ou moins
rapproché, les plus grands services (2).
De nombreuses notes vous ont été adressées sur des végé-
taux provenant de diverses régions du globe, ou sur des cul-
tures particulières ; il convient de citer spécialement les com-
munications de M. Gourdin, sur la réussite remarquable de
ses plantations de Chamœrops excelsa et à' Araucaria imbri-
cata à la Roche-sur-Yon (o) ; de M. Jules Cloquet, sur la cul-
ture des Cèdres sous le climat de Paris (4) ; de M. Charles
Mailles, sur des essais de culture de différents végétaux
dans la mousse (5) ; de M. le D' Vidal (6) et de M. Charles
(1) M. le I)'' Lecler s'est particulièrement occupé de celte intéressante
question (voy. Bulletin, 18<S5, p. 70, 651).
(2) Proces-rerbaux [Bullelin, 1885, p. 60, 189.
(3) Ibidem, p. 177.
(4) Ibidem, p. 178.
(5) Ibidem, p. 388.
(6) Ibidem, p. 379.
LIV SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
Nandin (1), sur le Rlius vernicifera, et sur l'utililé que pré-
senterait l'introduction chez nous de ce Sumac du Japon ;
de M. Decroix (2), sur le Pacanier ou Noyer d'Amérique {Cary a
olivœfo'rmis) ; de M. llédiard (3), sur la production et le com-
merce des Oranges en Algérie, et sur l'urgence d'une revision
des tarifs des chemins de fer, au point de vue des intérêts du
producteur et du consommateur ; enfin, de M. le D' Pallas
sur le Pinus australis, conifère des États-Unis, qu'il y au-
rait intérêt h essayer dans les Landes, pour la production
de la résine (4).
Comme les années précédentes, des envois précieux d'ani-
maux, de plantes et de graines vous ont été faits. Je dois men-
tionner principalement ceux de MM. Sarrazin (5), Albuquer-
que (6), de Bouchaud de Bussy (7), Romanet du Caillaud (8),
Gamba (9), James Jakson (10), Pioulland (M), de Vilmo-
rin (12), von Mueller (13), et Daruty (li).
Enfin, j'ai à signaler que, aussi bien que nos collections,
notre bibliothèque s'est enrichie cette année, grâce à des dons
nombreux et importants (15) et, à ce sujet, je ne dois pas
omettre de rappeler les intéressants bulletins bibliographi-
ques que vous devez tant à la plume à la fois élégante et con-
sciencieuse de votre bibliothécaire-archiviste, M. Amédée
Berthoule (16), qu'à celle de plusieurs autres collègues,
M. Georges Mathias en particulier (17).
(1) Procès-verbaux (Bulletin, 1885, p. 380).
(2) Ibidem, p. 384.
(3) Ibidem, p. ) 7'J.
(4.) Ibidem, p. 75.
(5) Ibidem, p. 178.
(6) Ibidem, p. 183.
(7) Ibidem, p. 185.
(8) Ibidem, p. 312.
(9) Ibidem, p. 313.
(10) Ibidem,]). 379,532.
(11) Ibidem, p. 530.
(12) Ibidem, p. 536.
,13) Ibidem, p. 560, 657.
(U) Ibidem, p. 651.
(15) Ibidem, p. 243, 250, 251, 702, 711.
(16) Bulletin, 1885, p. 78, 142, 204, 206, 333, 606, 608.
(17) Ibidem, p. 423.
RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. L\
Messieurs, la tâche du rapporteur est finie. Il ne lui reste
plus qu'à vous demander pardon d'avoir soumis à une si lon-
gue épreuve votre indulgente attention ; sa seule excuse est
dans le nombre et l'importance de vos travaux, dont il craint
de n'avoir réussi, toutefois, à donner qu'une idée bien
imparfaite.
RAPPORT
AU NOM
DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES <*>
Par M. A. GEOFFROY SAU^T-HILAIRE
Secrétaire général de la Société.
La Société nationale d'Acclimatation récompense par des
prix, par des primes, par des médailles et par des allocations
pécuniaires les travaux tant théoriques que pratiques inté-
ressant l'acclimatation et d'une façon générale les applica-
tions de l'histoire naturelle.
Notre Association encourage tous les efforts, accueille tous
les progrès. A mesure qu'on avance sur le chemin que nous
parcourons, le but semble reculer, c'est que chaque jour le
désir d'un nouveau progrès vient s'ajouter aux convoitises
de la veille. Il semble que rien ne soit fait tant qu'il reste
quelque chose à faire. Et pourtant, Messieurs, si nous jetons
un regard en arrière, que d'efforts déjà récompensés depuis
la fondation de la Société, que de résultats obtenus ! Com-
bien d'expériences intéressantes consacrées par vos médailles,
combien de résultats définitifs acquis !
La liste des récompenses décernées par la Société depuis
sa fondation serait en quelque sorte le résumé des progrès
accomplis.
Ces progrès, ces succès, pour les bien apprécier, il faut
avoir assisté comme nous aux efforts qui les ont donnés.
Mais ce n'est pas le lieu d'entreprendre la nomenclature,
pourtant instructive, des encouragements décernés, des prix
gagnés. En attirant vos regards veis ce laborieux passé j'ai
(1) La Commission des récompenses était ainsi composée :
Membres de droit: MM. le Président et le Secrétaire général.
Membres délégués du Conseil : MM. Bertlioulc, Maurice Girard, A. Paillieux
et le marquis de Sinéty.
Membres délégués des sections: MM. Saint-Yves Ménard , Georges Mathias,
Raveret-Watlel, J. Fallou, le docteur E. Mène.
RAPPORT DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES. LVII
voulu seulement vous donner bon courage pour la marche en
avant.
PREMIÈRE SECTION. — MAMMIFÈRES.
médaille d'or (Hors classe).
Les travaux de vulgarisation et les publications périodiques
relatives aux sciences appliquées sont toujours l'objet de
l'attention de la Société. A ce titre les services rendus par
M, Ernest Menault, inspecteur général de l'agriculture,
sont appréciés comme il convient. Ils font connaître au grand
public les efforts qui ont pour objet les applications de la
zoologie et de la botanique ; c'est dire que les travaux de la
Société d'Acclimatation trouvent en M. iMenault un historien
compétent autant que bienveillant.
Nous sommes heureux de pouvoir remercier M. Menault
de son concours en lui remettant une médaille d'or hors
classe.
Prix de lOOO francs.
Fondé par la Société pour la multiplicalion en France de Kangiirous de grande
espèce.
Depuis plusieurs années déjà, la Société avait proposé un
prix ainsi libellé :
<,( Multiplication en France, à l'état sauvage, dans un
grand parc clos de murs ou en forêt, de Kangurous de
grande taille.
» On devra faire constater la présence de dix individus au
moins, nés à l'état de liberté, parmi lesquels six animaux
seront âgés de plus d'un an. — Prix : 1000 francs. »
M. le vicomte Cornély, dont le nom a été inscrit déjà bien
souvent sur la Uste des lauréats de la Société, a rempli et
au delà le programme du prix, puisque dans son parc de
Bcaujardin nous avons pu voir quatorze Kangurous géants,
dont dix nés sur place.
Ce nouveau succès de M. le vicomte Cornély a son impor-
LVIII SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
tance et la Société félicite le lauréat d'avoir mené à bien cette
intéressante expérience.
médailles «le prcniièro classe.
A la suite de persévérants efforts M. le vicomte Cornély a
réussi à se procurer un couple de Lièvres de Patagonie ou Ma-
ras {Dolichoiis patagonica). Il a fallu bien des années pour
obtenir cette importation; enfin elle a été faite et notre lauréat
s'est trouvé, après une longue attente, en possession d'un
couple de ces rongeurs. Dès la première année la reproduc-
tion en a été constatée. Dans un mémoire étudié, M. le
vicomte Cornély a fait part à la Société des observations qu'il
a recueillies. Nous avons voulu constater ce résultat en dé-
cernant une médaillejle première classe.
Utiliser un produit négligé, en vulgariser l'emploi, consti-
tue un progrès sérieux. Nous décernons à des services de cet
ordre trois médailles de première classe, à M. Jacquier, de
Saint-Innocent (Savoie), à M. Patard-Ghatelain, de La Ferté-
Macé, à M"" G. Lagrenée (de Beauvais).
Ces trois lauréats produisent, on peut dire industrielle-
ment, du poil de Lapins angoras. Ils fournissent une matière
première qui prend de plus en plus sa place dans le com-
merce de la bonneterie. Si l'utilisation de la laine de Lapins
angoras acquiert peu à peu de l'importance, c'est, sans aucun
doute, à l'exemple donné par MM. Jacquier et Patard-Cha-
telain et à M"" Lagrenée qu'on le devra.
Menfion honorable.
Une mention honorable est accordée à M. Jules Pataillot,
instituteur à Maizières (Haute-Saône), qui cherche dans son
enseignement à intéresser ses élèves à la connaissance des
animaux utiles. Ses dictées relatives à l'histoire naturelle
appliquée sont conçues dans un esprit excellent.
RAPPORT DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES. LIX
DEUXIÈME SECTION. — OISEAUX.
Médaille d'Or.
La nourriture artificielle destinée aux Gallinacés, dont
M. Dautreville est l'inventeur, constitue un progrès inté-
ressant.
Cette nourriture artificielle, étant facile à transporter et à
conserver, rendra les plus signalés services pour l'éduca-
tion des oiseaux-gibiers et des oiseaux de volière. Un grand
nonîbre d'éleveurs et d'amateurs des plus honorables ont
fourni à M. Dautreville les meilleurs témoignages sur
l'emploi qu'ils ont fait de la poudre toni-nutritive. Pourra-
t-elle remplacer partout et complètement les œufs de
fourmi? Plusieurs des attestations mises sous nos yeux l'af-
firment et nous serions portés à le croire. Mais il n'est pas
besoin de faire cette preuve pour admettre que la poudre
toni-nutritive est un excellent produit et que, par son in-
vention, M. Dautreville a rendu un véritable service aux
éleveurs.
La Société décerne à M. Dautreville une médaille d'or hors
classe.
Médailles de iireinièrc clas.«ic.
Domestiquer une espèce d'oiseau propre à détruire dans
les jardins les souris, les insectes et les mollusques nuisibles,
est un but intéressant à atteindre. Les essais poursuivis par
M. le vicomte Cornély tendent vers la solution du problème
posé. En effet, depuis plusieurs années déjà l'Ibis à la face
noire du Chili {Ibis melanopis) reproduit régulièrement au
parc de Beaujardin. Dans combien de générations ces robustes
oiseaux, qui peuvent supporter les rigueurs de nos hivers,
deviendront-ils domestiques ?
M. le vicomte Cornély reçoit une médaille de première
classe pour les expériences faites sur cette intéressante es-
pèce.
LX SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
Les études faites par M. le professeur Forbes, de l'université
commerciale de l'illinois, sur le régime alimentaire des
oiseaux et des poissons, méritent l'attenlion. Ces recherches
ont une utilité pratique, que la Société est heureuse de ré-
compenser par une médaille de première classe. Il serait à
souhaiter que les efforts de M. Forbes fussent imités sur di-
vers points du globe.
L'ouvrage intitulé: Élevage des animaux de hasse-cour,
a été écrit par M. Lemoine, dont le nom est bien connu de
toutes les personnes qui s'occupent de Gallinoculture, car
la réputation de l'établissement de Crosne n'est plus à faire ;
l'auteur du livre que nous récompensons aujourd'hui d'une
médaille de première classe, a l'expérience et le savoir, aussi
trouvons-nous dans cette publication, à côté de descriptions
exactes, des conseils pratiques, des enseignements précieux
pour l'élevage et l'entretien des volailles.
Une médaille de première classe est décernée à M. le comte
de MoNTLEzuN pour le mémoire qu'il a publié sur les Ber-
naches. Ce travail descriptif a de l'intérêt ; il est d'une grande
précision. L'auteur a réuni à ses observations personnelles,
sur ce groupe de palmipèdes, tous les renseignements qu'il a
su se procurer. Cette monographie conscigncieuse est accom-
pagnée de dessins soigneusement exécutés et qui sont d'une
grande exactitude.
La section ornithologique de la Société impériale russe
d'Acclimatation de Moscou a recommandé les services ren-
dus par M'"" Barbe Tcherepow à l'attention de la Commission
des récompenses.
M'"' Tcherepow s'occupe depuis longtemps déjà et avec suc-
cès d'introduire en Russie les bonnes races de Poules. Elle
entretient plus de deux mille de ces oiseaux et son établisse-
ment concourt utilement à l'amélioration des basses-cours.
La lauréate s'occupe en outre d'oiseaux de luxe ; elle a obtenu,
peut-être la première en Russie, la multiplication du Cygne
noir d'Australie.
RAPPORT DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES. LXI
La Société est heureuse de remettre à M'"' deTcherepowune
médaille de première classe.
M. VoiTELLiER (de Mantes) a publié un volume sur lln-
cuhalion artificielle et la basse-cour, auquel nous décernons
une médaille de première classe.
Dans ce livre, l'auteur traite d'une façon étendue ce qui
concerne l'usage des hydro-incubateurs ; il s'étend avec com-
pétence sur toutes les questions relatives à l'installation et à
l'hygiène des oiseaux. Enfin il s'occupe de l'étude des races.
Comme le dit M. Voitellier dans la lettre qui accompagne
l'envoi de l'ouvrage : « Ce livre est le résumé d'une expé-
rience de vingt années. » Il rendra, nous en avons l'assurance,
de grands services aux éleveurs.
niédaille de seconde classe.
On a souvent observé que les oiseaux sauvages indigènes
se reproduisaient moins facilement en captivité que les exo-
ti(jues. Les résultats obtenus par M. Audap dans la multipli-
cation du Canard pilet (Dafila acuta) semblent donner tort à
cette croyance. Depuis 1877, M. Audap obtient régulière-
ment, de plusieurs couples, des œufs fécondés; les uns sont
confiés à des Poules, les autres aux Canes elles-mêmes. Il
semble que le lauréat soit parvenu à assouplir le caractère
essentiellement farouche et méfiant du Pilet, L'espèce subit
un commencement de domestication. M. Audap réussira-t-il
à conserver ses élèves le jour où il aura renoncé à les éjoinler?
Il l'espère. La Société décerne une médaille de seconde classe
à M. Audap.
Mention honorable.
Les amateurs d'oiseaux sont arrivés depuis quelques an-
nées à faire reproduire la plupart des espèces de Perruches
avec une parfaite régularité. Ils sont même parvenus à faire
naître des métis entre diverses espèces. Nous récompensons
LXII SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
aujourd'liui d'une menlion honorable le croisement obtenu
par M. Th. Leroux entre la Perruche de Pennanl et l'Omni-
colore. Ce qui ajoule à l'intérêt de l'expérience, c'est que les
oiseaux métis ont produit à leur tour.
TROISIÈME SECTION. — POISSOiNS, CRUSTACÉS, ETC.
niédaillo d'or offerte par le Ministre de l'Agriculture.
L'établissement de pisciculture créé à Apeldoorn (Pays-
Bas) par M. Noordhoeck-Hegt, est entré depuis longtemps
dans la voie pratique. C'est par centaines de mille qu'il
produit les alevins de Saumons que le gouvernement néer-
landais fait lâcher chaque année dans les eaux du Rhin.
Les sujets reproducteurs sont saisis en pleine eau, au mo-
ment de la montée. Les œufs sont fécondés, mis en incuba-
tion ; enfin les alevins sont conservés jusqu'au jour où ils ont
acquis assez de force pour être abandonnés à eux-mêmes.
Depuis plusieurs années déjà on a pris soin de marquer
(à la nageoire adipeuse) les jeunes poissons lâchés, et on a
pu ainsi maintes fois reconnaître, dans les Saumons péchés,
les élèves sortis des bassins d'Apeldoorn.
M. Noordhoeck-Hegt, outre l'élevage des Saumons, s'oc-
cupe des divers Salmonidés dont l'introduction présente de
l'intérêt. Pour être moins importantes, les multiplications et
les éducations qu'il fait des Sahno fonlinalis, Qulnnat, etc.,
méritent cependant l'attention.
En décernant à M. Noordhoeck-Hegt la médaille d'or offerte
par le Ministre de l'agriculture, la Société est heureuse de
pouvoir récompenser la création d'un établissement de pisci-
culture pratique des plus importants et des plus prospères.
Médailles do première classe.
Bien entendue, la culture des eaux peut donnei" des résul-
tais pratiques très rémunérateurs. Mais, pour réussir, il faut
RAPPORT DE LA COMMISSION DES RECOMPENSES. LXIII
savoir préparer le succès par des installaLions raisonnées.
C'est ce que M. André d'Audeyille a bien compris lorsqu'il a
créé l'établissement de pisciculture d'Andecy.
Ayant à sa disposition de belles eaux, il a fait creuser des
bassins d'alevinage très étendus, et aujourd'hui l'entreprise
est en pleine activité. Avant peu d'années, l'établissement de
pisciculture d'Andecy récompensera par ses produits les ef-
forts de son fondateur. La Société a voulu encourager les
premiers résultats obtenus en décernant cà M, d'Audeville une
médaille de première classe.
Depuis plusieurs années déjà, la Société a reçu des États-
Unis des œufs fécondés de Salmonidés, grâce au concours
oblii;eant de M. Blackford.
En 1885, nous avons dû à cet excellent coopérateur l'envoi
d'œufs de Truite arc-en-ciel {Salmo iricleus).
Nous avons voulu remercier M. Blackford des services ren-
dus à la Société en lui décernant une médaille de première
classe.
Il y a plus de trente années que M. le vicomte de Causans
a commencé à s'occuper de pisciculture. L'exploitation des
eaux du lac de Saint-Front a donné des résultats de plus en
plus considérables; on peut même dire des résultats indus-
triels.
La fécondation artificielle est pratiquée chez M. de Cau-
sans sur la plus grande échelle ; 330000 œufs ont été recueil-
lis en 1883. Bientôt on arrivera, espère-t-on, à un produit
d'un million d'œufs.
La Société est heureuse de pouvoir offrir à M. de Causans
une médaille de première classe.
M. le capitaine G. -M. Dannevig a été le promoteur de la
création de la station d'aquiculture, marine de Flodevig près
Arandal (Norvège).
Grâce à l'emploi des appareils dont il est l'inventeur,
M. Dannevig pratique avec succès l'élevage de divers poissons
LXVI SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
QUATRIÈME SECTION. — INSECTES.
Prix de 500 franet^.
Fondé par la Sncielc pour les travaux llicoriques relatifs a racclinialation.
La Société décerne à M. Alfred Wailly un des prix fondés
pour récompenser les travaux théoriques relatifs à l'acclima-
tation.
Le Catalogue raisonné des séricigènes sauvages connus
n'est pas une simple nomenclature, c'est un travail dans le-
quel sont discutés les mérites comparatifs des diverses espèces
de Lépidoptères producteurs de soie qui vivent dans toutes
les parties du monde.
Dans son mémoire, M. Wailly a résumé en quelque sorte
vingt ans de persévérantes recherches, et les renseignements
fournis par un savant compétent ont le plus haut intérêt.
M. Alfred Wailly reçoit un prix de 500 francs.
Primo de .lOO franc»*.
L^'ouvrage intilulé : Leçons sur le Ver à soie du Mûrier,
publié par M. E. Maillot, est un travail des plus sérieux,
dans lequel l'auteur traite avec une haute compétence tout
ce qui concerne la conservation des graines, l'élevage, les
maladies des Vers à soie. Non seulement M. Maillot résume
les notions acquises, mais il a su y ajouter les résultats de
ses propres études personnelles, le fruit de ses propres tra-
vaux.
Les Leçons sur le Ver à soie du Mûrier sont un livre qu'on
peut considérer comme un guide pratique, comme un guide
excellent pour tous ceux qui s'occupent de sériciculture.
M. Maillot reçoit une prime de 300 francs.
Prime de lOO francs.
Les Abeilles. La brochure à bon marché, publiée par
M. de Layens, est un résumé pratique et clair de tout ce que
RAPPORT DE LA COMMISSION DES RECOMPENSES. LXVII
doit connaître un apiculteur. Mobiliste, c'est-à-dire partisan
des ruches à cadres mobiles, comme tout ami du progrès,
M. de Layens a su réunir dans son petit ouvrage les notions
pratiques et les conseils utiles. En mettant cette publication
à la portée de tous par son prix très modéré, l'auteur a rendu
un nouveau service à l'apiculture, service que la Société est
heureuse de récompenser par une prime de 100 francs.
Médaille do première classe.
Xes renseignements fournis par le R. P. Gamboué sur les
séricigènes de l'île de Madagascar ont été accueillis avec in-
térêt par la Société.
Les détails relatifs aux Vers à soie indigènes, dont les Mal-
gaches tirent la soie de leurs étoffes dites Lamba-landy, et
qu'ils appellent Bibindandy, ont particulièrement attiré l'at-
tention.
La Société est heureuse de remercier le R. P. Gamboué de
son concours en lui décernant une médaille de première
classe.
llention honorable.
Une mention honorable est accordée à M. E. Gharrin, qui
s'est occupé avec succès de l'éducation de Vers à soie du
Ghêne {Attacus Pemyi) à l'orphelinat agricole de Laforet
dans le Gantai.
Les résultats de cette expérience ont été assez satisfaisants.
Il faut espérer que dans l'avenir on donnera à ces essais plus
d'importance,
cinquième SECTION. — végétaux.
■Jll ^ ,XÏI
Grande médaille d'or (Hoi'S classe)
A l'effigie d'Isidore Geoffroy Saint-Hilaire.
Ghargé parla Société d'étudier les productions' Végétales
du Japon qui ont figuré à l'Exposition universelle de 1878,
M. le D' Mène s'est livré aux recherches les plus conscien-
LXVIII SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION- .
cieuses, les plus approfondies. Il s'est entouré de renseigne-
ments complets, circonstanciés, sur les sujets les plus divers.
Il a groupé des faits épars; il a profité de toutes les bonnes
volontés qu'il a su faire naître. A force de sagacité, de travail
et de ténacité, notre collègue nous a apporté une œuvre ex-
cellente, une œuvre achevée et parfaite, faisant connaître de
la façon la plus complète les richesses végétales du Japon et
les produits qu'on en peut obtenir. Le botaniste, le voya-
geur, l'industriel, l'horticulteur, consulteront avec fruit cet
ouvrage important, dû à l'esprit critique et au patient labeur
de notre collègue.
Les premiers fascicules de cette publication ont valu à leur
auteur une des récompenses de la Société. Aujourd'hui le
livre est terminé, et il est apprécié comme il mérite de l'être
par les juges les plus compétents. La Société remercie le
D'' Mène de ses efforts; elle est heureuse de pouvoir lui dé-
cerner la plus haute des récompenses dont elle puisse dis-
poser, la grande médaille d'or hors classe.
Médailles de première clattse.
Dans le courant de l'année 1885, la Société a entendu les
communications de MM. Zeiller, Godefroy-Lebeuf et Duval
(de Versailles) sur les Orchidées de serre froide. Bien que ces
végétaux ne puissent vivre sans abris sous le climat du nord
de l'Europe, ils présentent cependant un très réel intérêt au
point de vue de la décoration de nos demeures, et même au
point de vue de la décoration de nos jardins dans la région
de l'Oranger.
Les lauréats que la Société récompense aujourd'hui ont
démontré, par les expériences qu'ils ont faites, par leurs com-
munications, les résultats importants qu'on peut obtenir, pour
l'ornementation, de ces végétaux aux fleurs éclatantes et par-
fumées, qui semblaient, il y a peu d'années encore, réservés
à la culture des serres chaudes et aux riches collections. Au-
jourd'hui, pourvu qu'on sache choisir, tout le monde peut
parer sa demeure de fleurs d'Orchidées, puisqu'une serre à
RAPPORT DE LA COMMISSION DES RECOMPENSES. LXIX
Géranium, et peut-être même de modestes châssis, suffisent
pour cultiver avec succès ces plantes réputées si difficiles
autrefois.
La Société décerne à MM. Zeiller, Godefroy-Lebeuf et Duval
(de Versailles), des médailles de première classe.
L'introduction en France du Pacanier des États-Unis
(Cari/a olivœformis) , qui pourrait fournira notre industrie un
bois méritant, a été, à diverses reprises, l'objet de l'attention
de la Société.
Grâce aux envois de semences faits par M. Sanford, des
essais importants pourront être tentés.
La Société, reconnaissante du concours que lui a donné
M. Sanford, lui décerne une médaille de première classe.
M. VoiNiER, médecin vétérinaire à l'armée du Tonkin, a
su créer en peu de mois, à Hanoï, un véritable potager
européen. Grâce à son initiative, nos compatriotes ont pu
trouver dans l'Extrême-Orient des légumes frais et de bonne
qualité. M. Voinier a donné un excellent exemple. Il a prouvé
expérimentalement les résultats que peut donner, même dans
les conditions les plus difficiles, une culture bien conduite.
M. Voinier reçoit une médaille de première classe.
Médaille de seconde classe.
Dans un mémoire étendu, M. P,-L. Simmonds a étudié les
progrès de la culture des Eucalyptus dans les différentes par-
ties du globe. Ce travail consciencieux contient un grand
nombre de renseignements utiles et nouveaux. Il montre qu'en
moins de vingt ans les Eucalyptus ont été introduits avec
succès dans un grand nombre de contrées, sous les latitudes
les plus diverses.
M. Simmonds fait en outre connaître dans son mémoire les
résultats obtenus en divers lieux des nombreuses espèces
d'Eucalyptus mises en expérience.
Ce travail a reçu à la Société le meilleur accueil, et il est
décerné à son auteur une médaille de seconde classe.
LXX SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
RÉCOMPENSES PÉCUNIAIRES
Une récompense pécuniaire de 200 francs est accordée a'
M. Pierre Bosc, pisciculteur chez M. le vicomte de Gausans.
Attaché depuis de longues années à l'établissement de
Saint-Front, le sieur Bosc a rendu les plus grands services à
la pisciculture. Son zèle, son intelligence sont appréciés
comme ils le méritent par M. de Gausans.
Une récompense pécuniaire de 100 francs est accordée à
M. Henri Véniat, jardinier chez notre excellent collègue,
M. Paillieux, Le sieur Henri Véniat est un serviteur dévoué,
que la Société est heureuse de pouvoir récompenser.
Primes fondécN par feu Agron do Gerniigny
Pour récompenser les bons soins donnés aux aninianx ou aux plantes.
Prime de 200 francs.
M. Blondel, gardien chef des Mammifères au Jardin zoolo-
gique d'acclimatation depuis plus de vingt-cinq ans, reçoit la
prime de 200 francs.
Prime de flOO francs.
M. ScH.^FFER, employé à la ménagerie du Muséum d'his-
toire naturelle, reçoit la prime de 100 francs.
Primes offertes par l'administration du Jardin zoologiqne
d'jtcciimatation à. ses employés.
'' M.
Bouvière . . .
(Service
des
; Mammifères). — 200 fr.
M.
Moutard. . . .
Oiseaux). '
:': 100 fr.
M.
Debaize
Mammifère
!s). 100 fr.
M.
Baudouin. . . .
Poneys). .
. . 100 fr.
M.
Baudouin jeune
—
- )
25 fr.
" M.
MOY
- )
25 fr.
M.
Bodevin . . . .
- )
25 fr.
M.
Testard. . . .
r tiiiUn:
25 fr.
ffO-
RAPPORT
AU NOM DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ
SUR L'EXERCICE 1885
Par M. le D' iSAINT-YVES MÉIVARD
Trésorier.
Messieurs,
Comme nous sommes réunis en famille pour les raisons que vous a
exposées M. le Président, votre Conseil a pensé qu'il convenait de vous
parler dans celte séance de nos intérêts matériels. J'aurais à m'excuser
de l'aridité du sujet si vous ne compreniez que, pour une œuvre d'ini-
tiative privée comme la nôtre, la situation financière a l'importance de
l'aliment pour les êtres vivants.
J'ai donc l'honneur de vous faire connaître, au nom de votre Commis-
^ sion de comptabilité, la situation financière de la Société en vous pré-
sentant, d'une part, l'état des recettes et des dépenses du dernier exer-
cice ; d'autre part, le bilan au 31 décembre 1885.
Pour vous permettre d'apprécier les chiffres, je vous ferai comparer
ceux de l'année 1885 à ceux de l'année précédente.
Recettes ordinaires.
Cotisations annuelles. — Le total des cotisations annuelles a baissé
de -2822 francs.
<>{.; Ce n'est pas que le nombre des membres anciens ait diminué sensi-
blement plus que d'ordinaire, c'est surtout le recrutement de membres
nouveaux qui a laissé à désirer.
Le dénombrement de la Société au 31 décembre, après les démissions
et les décès, s'établit comme suit : 'i-
._ i,6'J4 membres ou sociétés agrégées payant cotisation à 25 fr... 42,350 fr.
27 membres nouveaux entrés après le 30 juin, ayant payé
9 francs 243 fr.
Tolal (les cotisations annuelles.' , 42,593 fr.
-lOlllOV
16 membres honoraires. '"
478 membres à vie.
10 sociétés atliliées.
2,225 au total, soit 103 de moins qu'en 1884.
LXXII SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
Droits d'entrée. — Ce chiffre nous donne la mesure de la faible acti-
vité de notre recrutement :
Nous avons compté :
En 1883 191 membres nouveaux.
En 1884 133 —
En 1885 81 —
Il semble que nous subissions le contre-coup de la crise des affaires
et de la gêne générale. Nous voulons espérer que cet état de choses
prendra fin et que nous cesserons de suivre une progression descen-
dante.
Les revenus des valeurs de la Société ont diminué de 376 fr. 25; je
vous en donnerai l'explication en vous exposant les dépenses extraor-
dinaires.
La subvention du ministère de l'agriculture a été diminuée de 500 fr.;
c'est le résultat d'une mesure générale.
Les tirages à part, les abonnements et annonces du Bulletin et de
la Chronique ont produit un peu moins que l'année dernière.
La location de la salle a donné aussi un peu moins.
Au total, les recettes ordinaires de l'année 1885 sont inférieures de
4885 fr. 10 à celles de l'année 1884.
Recettes extraordinaires.
Sous ce titre, nous comprenons les receltes qui ne doivent pas faire
face aux dépenses courantes; telles sont les cotisations définitives
(3000 francs eu 1884, 2500 francs en 1885) destinées à être capitalisées
pour assurer le service des membres à vie; telles sont aussi les recettes
imprévues, qui se trouvent être cette année d'une assez grande impor-
tance, grâce à la libéralité d'un de nos confrères, M. Vauvert de Méan,
consul de France à San-Francisco, membre de la Société depuis l'année
1860, qui a toujours eu à cœur l'extension de l'influence française et
s'est intéressé tout particuHèrement aux oeuvres d'initiative privée con-
çues dans un but d'utilité générale. C'est à ce titre qu'il a apprécié les
efforts de la Société d'Acclimatation ; il a été pénétré de l'importance
des services qu'elle a rendus; enfin, désireux de contribuer largement
à ceux qu'elle peut rendre dans l'avenir, il lui a légué par testament
une somme de 15000 francs.
Le jour où nous inscrivons à notre actif le legs du généreux dona-
teur, nous voulons témoigner toute notre reconnaissance au collègue
regretté.
SITUATION FINANCIÈRE DE LA SOCIÉTÉ. LXXIII
Dépenses ordinaires.
Dans une année où les recettes tendaient à baisser, il était indiqué de
chercher à réduire les dépenses. Telle a été la préoccupation de votre
Conseil, qui est parvenu à maintenir à peu près l'équilibre.
Le Bulletin mensuel a coûté 2900 francs de moins, et la Chronique
500 francs de moins que dans l'exercice précédent.
De même des économies ont été réalisées sur le chauffage et Véclai-
rage, les frais généraux, les frais de bureau, les impressions diverses,
les frais de recouvrement, \a. sténographie, la séance publique.
La redevance au Jardin d'acclimatation s'est trouvée plus faible,
puisqu'elle dépend du nombre des membres.
Seuls les frais de correspondance, les cotisations perdues, les impo-
sitions, les cheptels, offrent une légère augmentation.
Les dépenses de loyer et de personnel restent stalionnaires.
Au résumé, les dépenses ordinaires sont moindres de 104.64 fr. 90.
Si bien que les comptes se soldent par un excédent de dépenses in-
signifiant (697 fr. 35).
Dépenses extraordinaires.
Les dépenses extraordinaires comprennent les frais d'enregistrement
pour le legs de M. Vauvert de Méan, et une petite partie des dépenses
occasionnées par notre nouvelle installation, qui a été commencée à la
fin de l'année 1885 (15006 fr. 90).
Pour faire face à ces dépenses, nous devons distraire une partie de
notre capital. C'est précisément la vente de certaines valeurs qui a di-
minué déjà un peu nos revenus, comme je vous le faisais remarquer au
début de mon rapport.
LXXIV
SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
BILAN AU
ACTIF
Valeurs disponibles
Caisse
Banque de France.
Obligations de chemins de fer et autres.
Titre de rente Dutrône.
Cotisations, Droits d'entrée, etc., à re-
couvrer
Crédit Lyonnais
Jardin d'acclimatation de Paris
Hodocanachi, banquier
Société centrale de médecine vétérinaire.
Valeurs réulisabies
Bibliothèque
Mobilier
Valeur des animaux chez les chepteliers.
Loyer d'avance
Divers
100 actions du Jardin d'acclimatation..
Legs Vauvert de Méan
1S««
1.387
50
7.087
05
t6.5-i6
75
2.7U0
))
1.300 »
2 30
5.294 65
4.911 90
6.820 20
25.000 »
201.050 35
flSSâ
608
45
6.038
10
16.328
75
2. 700
II
7.896
»
2
30
142
90
931
55
250
»
5.594 70
5.046 75
5.505 30
4.000 I)
25.000 «
15.000 »
SITUATION FINANCIÈRE DE LA SOCIETE.
LXXV
31 DÉCEMBRE 1885.
PASSIF
Divers à payer
Jardin d'acclimatation de Paris
Recettes faites pour l'exercice suivant. .
Prix offert par feu Bérend, à décerner. .
Loyer à payer
tS)^4
11.639 30
-1.716 85
392 »
1.000 »
ftSS5
5.780 60
» H
489 .)
1 000 »
1.375 ..
I
■ittthitfi.
'< rH
14.748
186.302
15
20
8.644
180.460
60
20
201 .050
35
195.104
80
LXXVIII SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION.
BIIi.*]ll AU 31 DÉCEMBRE ISS5.
* Notre situation financière est toujours satisfaisante ; l'excédent de
notre actif n'a pas varié.
i
; Actif.
L'encaisse est de 668 fr. 45.
Le dépôt à la Banque s'élève à 6038 fr. 10.
Les valeurs mobilières figurent pour H 6 328 fr. 75, déduction faite de
celles que nous avons dû vendre (30218 fr. 75). Nous conservons l'ha-
bitude, adoptée jusqu'ici, de compter ces valeurs aux prix d'achat;
mais les cours au 31 décembre dernier nous assuraient une plus-value
notable.
Les cotisations et autres créances restant à recouvrer représentent
une somme un peu élevée (7896 francs), mais n'en sont pas moins un
actif certain.
La bibliothèque, le mobilier, les animaux en cheptel, n'ont pas changé
sensiblement de valeur (1614.6 fr. 75).
' Un article nouveau se présente ici, c'est un terme de loyer d'avance
(4000 francs) remis à notre nouveau propriétaire, suivant les conditions
'du bail.
Les actions du Jardin d'acclimatation figurent toujours pour
25000 francs.
I Enfin le legs de M. Vauvert de Méan sera inscrit à part jusqu'au
jour où il pourra être représenté en valeur mobilière.
. Total de l'actif : 195104 fr. 80.
i
Passir.
Notre passif est toujours composé de divers mémoires qui n'ont pas
du être réglés avant la clôture de l'exercice (5780 fr. 50) ;
ï De cotisations de l'année 1886, encaissées d'avance (489 francs);
D'une somme de 1000 francs, offerte par feu Bérend et représentant
un prix à décerner ;
D'un terme de loyer échu et non encore payé (1375 francs).
Au total, 864i fr. 60. ;
L'excédent de l'actif est ainsi de 186460 fr. 20.
Vous venez de voir, Messieurs, que l'équilibre des recettes et des dé-
penses a été obtenu par suite de grosses économies dans l'adminis-
tration.
I Mais, pour le bien de la Société, il est désirable que le temps des
SITUATION FINANCIÈRE DE LA SOCIÉTÉ. LXXIX
économies forcées ne soit pas de longue durée ; vous avez bien des efforts
à encourager, bien des travaux à récompenser, beaucoup de bonnes vo-
lontés à diriger. Pour cela, vous avez besoin de grandes ressources, pI
vous ne les trouverez que par l'accroissement du nombre des sociétaires.
Telle est la conclusion forcée du rapport d'un trésorier. Notre prospérité
matérielle en dépend.
JARDIN D'ACCLIMATATION DU BOIS DE BOULOGNE
RAPPORT
PRÉSENTÉ AU NOM DU CONSEIL D'ADMINISTRATION
Par ML A. GEOFFROY SAIIVT-HILAIRE
DIRECTEUR DU JARDIN
A l'Assemblée générale ordinaire des Aclionnaircs du 20 mai 1886.
PRÉSIDENCE DE M. F. JACQUEMART,
Président du Conseil d'administration.
Messieurs,
Au nom du Conseil d'administration, nous avons l'honneur de vous
présenter les comptes de l'année 1885.
Vous trouverez ci-dessous les chiffres du bilan arrête au 31 dé-
cembre dernier.
Bilan au Si décciultro tS94.
ACTIF.
Valeurs immobilisées.
Création du Jardin 1,024,110 50 ^
Travaux neufs et appropriations diverses M, 731, 253 08
exécutés depuis la création du Jardin.. 707,142 58 ;
Le capital employé (1,731,253 fr. 08) fera
retour à la Ville à la fin de la concession.
Valeurs réalisables.
Animaux 420,725 50 \
Approvisionnements ^ll'fH '^^ ) 850,786 05
Cautionnement 10,000 » l
Mobilier 206,819 20 j
Valeurs disponibles.
Caisse 2,90165)
Effets à recevoir » » 5 68,436 10
Débiteurs divers 65,534 45 )
Excédent du passif 22,187 65
Total 2,672,662 88
SITUATION FINANCIEP.E DU JARDIN. LXXXI
PASSIF.
Capital immobilisé.
Sommes employées en immobilisation
(voy. ci-contre) 731,253, 08
Engagements sociaux.
Capital-Actions (2000 actions à 500 fr.) 1,000,000 » 1,731,253 08
Engagements envers les tiers (â terme)
Dette consolidée : 702 obligations à
•470 fr. (Solde des 1060 oblige émises
sur l'emprunt autorisé de 1200.) . . 329,940 »
{Exigibles.}
Service de l'emprunt: obligations sor-
ties aux tirages et intérêts des cou-
pons 27,662 50
Créanciers divers ,578,400 50 006,063 « 936,003 ,;
Réserve.
5 V„ du bénéfice de l'exploitation en 1883 (108,135 85).. 5,406 80
ToTAi 2,672,662 88
Pa.«isir.
Vous voyez figurer au passif du bilan :
1° Le capital immobilisé en travaux neufs depuis la création du Jardin
zoologifjue d'acclimatation, soit 731 i253 fr. 08;
2" Le capital initialement fourni par les actionnaires, soit un railbon
Je francs ;
3" Ce qui reste dû sur l'emprunt émis en 1876, déduction faite des obli-
gations amorties, jusqu'au tirage du 15 décembre dernier (1885) inclu-
sivement, soit 329940 francs.
Au !"■ janvier 188G, trois cent cinquante-huit (358) obligations avaient
été successivement extraittss de la roue et remboursées ;
4" Dans le passif, que nous soumettons à votre examen, les engage-
ments exigibles comptent pour 606 003 francs. Les valeurs actives qui
figurent, d'autre part, représentent et au delà l'importance de l'ensemble
de ce passif.
Af<îl. '
L'actif, porté au bilan qui vous est soumis, comprend :
1" Les valeurs immobilisées. La création du Jardin a coûté 1 million
24110 fr. 50. Les appropriations diverses, les travaux neufs exécutés
4" SÉKIE, T. m. — Séance publique annuelle. /■
LXXXII SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
depuis l'origine de la Société ont employé une somme de 707 14.î?fr. 58.
C'est-à-dire que la création et les développements ultérieurs de l'éta-
blissement que vous avez fondé sur la concession municipale, ont occa-
sionné, à la date du 31 décembre 1885, une dépense totale de 1 million
731 253 fr. 08.
Ce capital immobilisé figure à votre actif pour représenter le capital
initial, qui a été fourni par les actionnaires, et aussi pour clairement éta-
blir l'emploi des bénéfices réalisés successivement par l'exploitation (1).
Mais nous ne devons pas oublier que nous avons seulement la jouis-
sance (pour un long temps, il est vrai) de l'établissement créé, puisqu'en
1938, dans cinquante-trois années, il fera retour à la Ville, avec tous les
aménagements divers qu'il contiendra.
Pour expliquer clairement cette situation, nous avons fait figurer au
passif, cette année, comme de coutume, un chiffre exactement égal aux
sommes employées en immobilisations et qui sont inscrites à l'actif.
11 n'est pas inopportun de faire observer que dans l'établissement de
(1) Résultats annuels de l'exploitation du Jardin zoologique d'acclimatation
(le 1860 à 1885.
Insuffisance Excédent
dos Reccitos. des Recettes.
1860 (3 mois) 4.,982 40
1861 39,341 54
1862 90,186 17
1863 78,461 52
1864 52,967 88
1865 15,053 05 » »
1866 25,217 65
1867 45,243 70
1868 40,145 64 »
1869 19,608 «
1870 51,799 85
1871 41,551 16 » »
1872 22,356 «
1873 37,250 05
1874 40,382 40
1875 27,757 60 « >.
1876 17,004 75
1877 83,852 05
1878 96,049 90
1879 91,734 88 » «
1880 46,829 80 « »
1881 102,746 20
1882 146,225 65
1883 108,135 85
1884 27,063 80 » »
1885 4,220 70
Total 341,935 78 1,014,232 41
Le total des insuffisances de recettes, les années 1870 et 1871 {Guerre
franco-allemande et Commune) comprises, est de 341 935 fr. 78. Le total des
excédents de recettes réalisées est de 1 014 232 fr. 41. Depuis sou commence-
ment jusqu'au 1" janvier 1886, l'exploitation a donc produit 072 290 fr. 63 de
plus qu'elle n'a coûté.
SITUATION FINANCIERE DU JARDIN. LXXXIII
ce bilan, nous n'avons jamais tenu aucun compte de la valeur de la con-
cession et de l'achalandage qui nous est acquis.
Dans le courant de l'exercice 1885, le compte des travaux neufs s'est
peu augmenté. 11 a été chargé de l'amortissement de la construction du
manège et de la maison du chenil, et aussi de quelques dépenses sans
importance.
L'ensemble de ces travaux neufs a coûté 14805 fr 90.
Constructions nouvelles faites en 1885.
Amortissement de la construction du manège 8,56-4 60
— de la maison du chenil 3,933 »
Dépenses diverses 2,308 30
Total 1-4,805 90
2° Les valeurs réalisables comptent pour 850 786 fr. 05 dans le bilan
que nous vous présentons. Le tableau suivant vous fera connaître les
éléments constituant ce chiffre important.
1881 1882 1883 1884 1885
A. Collection des animaux. 3il,878 65 366,763 d5 414,238 55 403,466 25 420,725 50
B. Plantes diverses dispo-
nibles 96,614 » 116.458 35 123,043 55 127,222 » 148,403 90
C. Mohilier et Outillage.. 99,058 90 102,937 15 126,390 25 140.329 75 138,413 50
D. Appruvisioniii'nients di-
vprs, chai)ffaoe, nour-
riture, libriirio, etc.. 40,870 10 50,093 05 57,194 25 67,46165 64,837 45
E. Tramway extérieur, voie
et matériel 65,062 80 69,922 10 65,42195 63,975 10 60,776 35
F. Cautionnement de'posé
dans les caisses de la
Ville de Paris 5,000 » 5,000 » 10,000 » 10,000 » 10,000 »
G. Outillai'o et Matériel à
Meulan 1,578 » 5,601 « 3,705 55 7,424 70 7,629 35
650,062 45 716,774 10 799.994 10 819,879 45 850,786 05
Les valeurs disponibles figurant à l'actif représentent 68 436fr. 10.
Compte (l'csploUation de roxorcice 1^95.
Recettes.
Subvention du Ministère de
l'Agriculture 4,000 »
Participation sur colisalions
des membres de la Société
d'Acclimatation 3,820 »
Entrées du Jardin 312,914 75
Abonnements. . . , 5,487 50
Promenades 39,845 25
Location des chaises 1 1,485 10
Exposition permanente.... 3,761 »
Loyer du bullet 13,998 »
Manège 13,259 10
Dons d'animaux 873 80
Bénéfice ducompfanimaux,
mortalité déduite 34,041 40
Saillies 4,988 85
Ventes des œufs 9,322 »
Bénéfice du compte graines
et plantes 41,477 65
Pré t-itelan 6,863 70
Succursale de Meulan 854 50
Tramways 35,722 25
Panorama 3,222 25
Total.... 550,940 10
LXXXIV
SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION.
Dépenses.
Personnel 173,065 25
Uniformes 12,396 10
Nourriture des animaux... 157,614 60
AquariimT 3,292 70
Entretien des bâtiments. .. 19,761 35
Entrelien des clôtures 5,023 10
Entretien du Jardin 2,(S83 65
Abonnement des eaux 3,260 50
Gbauffage et éclairage. .. . 14,521 55
Mobilier industriel et outil-
lage 34,795 75
Outils de jardinage 720 05
Concerts 30,873 10
Frais de bureaux 6,362 50
Frais de correspondance. . . 4,484 55
Publicité.... 6,500 30
Loyers 4,631 45
Assurances 3,194 20
Impositions 5,206 80
Timbre et impôt des ac-
tions et obligations 2,630 05
Assemblée générale 975 75
Frais généraux 34,504 90
Ilucber 1,312 70
Librairie 203 70
Intérêts des obligations.. . . 18,475 »
Total des dépenses de
l'exercice 1885 546,719 40
Excédent des receltes de
l'exercice 1884 4,220 70
Total 550,940 10
Dépenses.
Le total des dépenses, pour l'année 1885, s'est élevé à 546 719 fr. 40.
Ce chiffre est inférieur de 45 922 fr. 15 à celui des dépenses de 1884 et
de 180 738 fr. 15 à celui de l'année 1883. Notre exploitation a subi le
contre -coup des enil)arras qui paralysent en ce moment le mouvement
des affaires et nous avons dû modérer nos dépenses le plus possible.
Recettes.
Le chiffre atteint par les receltes de toutes natures, en 1885, s'est
élevé à 550940 fr. 10. Le produit des entrées a été particulièrement
faible, il est resté de 40 000 francs environ au-dessous des résultats de
1884. Pendant les premiers mois le nombre de nos visiteurs avait été
satisfaisant, mais après mai l'exploitation a été souvent contrariée par
le mauvais temps.
Par contre, nous avons vu certains chapitres de receltes donner des plus-
values intéressantes. Le bénéfice du compte Animaux et celui du compte
Graines et Plantes ont fourni des ressources importantes, aussi le résultat
final de l'exercice a-t-il été un excédent de recettes de 4220 fr. 70.
Nous devons, en terminant, Messieurs , vous demander l'approbation
des comptes que nous vous avons présentés.
Vous n'avez pas oublié, Messieurs, que la Ville de Paris a accueilli en
1882 la demande de prolongation de concession que votre Conseil d'ad-
ministration lui avait adressée avec votre autorisation.
Depuis cette époque, vos administrateurs n'ont pas cessé de se préoc-
cuper des obligations qui résultent pour votre Société des avantages
nouveaux que la Ville de Paris lui a accordés.
Mais, il faut li reconnaître, il a été assez difficile, jusqu'à ce moment,
de réaliser le programme qui, de l'avis de tous ceux qui l'ont étudié,
doit améliorer les conditions dans lesquelles se fait l'exploitation.
SITUATION FINANCIÈRE DU JARDIN. LXNXV
Nous nous sommes trouvés dans un sérieux embarras. Pour exécuter
les travaux projetés, il faut obtenir d'une assemblée générale extraordi-
naire, rautorisation d'émettre des obligations. Or, votre capital actions
est tellement divisé que, dans l'état actuel des choses, il serait, pour
ainsi dire, impossible de constituer cette assemblée.
Après avoir sérieusement étudié la question, votre Conseil, usant des
pouvoirs que vous lui avez conférés dans la séance du 21 avril 1883, a
voté l'émission de mille actions nouvelles.
Ces mille actions qui, placées, nous permettront de réunir une assem-
blée générale extraordinaire pouvant délibérer valablement, nous avons
aujourd'hui la certitude de les voir souscrire, car un groupe financier
est prêt à assurer le succès de l'émission, mais ce groupe financier,
formé d'actionnaires de la Société, souhaiterait d'avoir un certain nombre
de places dans le Conseil.
Pour faciliter les négociations en cours, tous vos administrateurs ont
pensé qu'ils devaient se retirer.
Ils vous demandent, Messieurs, de vouloir bien accepter leurs démis-
sions et de leur en donner acte en votant les résolutions suivantes :
Première résolution :
L'Assemblée générale accepte la démission de : MM. Jacquemart,
Blount, Uodocanachi, Edouard André, Henri Aron, comte de Camondo,
Tony Conte, A. d'Eichthal, comte d'Eprémesnil, duc de Fitz-James, Flury
Hérard, baron Gérard, Alfred Grandidier, duc de La Piocbefoucauld-Dou-
deauville, 0. Maggiar, Pierre-Amédée Pichot, baron Alphonse de Roth-
schild, M. de Saint-Paul, marquis de Selve, A. Touchard, prince de Wa-
gram, membres du Conseil -d'administration de la Société, et leur donne
décharge pleine et entière à l'égard de leurs fonctions.
Deuxième résolution :
Vu l'article 17 des statuts prescrivant que la Société sera administrée
par quinze administrateurs, l'Assemblée générale nomme pour cinq
années :
MAL Edouard André, Amédée Berlhoule, Albert Geoffroy Saint-
Hilaire, Alfred Grandidier, Er. Jacquemart, duc de La Piochefoucauld-
Doudeauville, Saint-Yves ftlénard, Armand Pihorel, Pierre Piodocanachi,
Maurice de Saint-Paul, marquis de Selve, Léon Simon, baron Arnould
Thénard, Arthur Touchard, prince de Wagram, administrateurs de la
Société du Jardin d'acclimatation.
Conformément à l'article 10 des statuts, le Conseil d'administration se
renouvellera chaque année par cinquième, d'abord par voie de tirage au
sort, ensuite par roulement dans l'ordre indiqué par ces tirages.
M. le Président informe l'assemblée que M. Charles de Souancé,
membre du Conseil d'administration, avait donné sa démission le 5 no-
vembre 1885.
s
LXXXVIII SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Odent, 11, boulevard Saint-Michel, à Paris.
1 couple Eperonniers chinquis.
Le comte Okecki, à Paris.
1 couple de Pigeons frisés;
1 lot de Poules Dorking.
O'Neill, à Cognac (Charente).
1 couple de Canards de Yeddo.
Ramelet, à Neuvon, commune de Plombières-les-Digon(Côte-d'Or).
1 couple de Canards Carolins.
Le marquis de la Rochejaquelein, 73, rue de Grenelle, à Paris.
1 couple de Cygnes noirs,
Roussel, à Issoire (Puy-de-Dôme).
1 couple de Canards de Rouen.
Comte De Sainte-Marie, 13, avenue de Ségur, à Paris.
1 couple de Cygnes blancs.
TiiAUViN, à Orléans (Loiret).
1 couple de Grenouilles-bœufs.
Du Verne, au château de la Croix, commune de Varenne-les-Nevers
(Nièvre).
1 lot de Poules Dorking.
Le Gérant ; Jules Grisaru.
5977. — DoURLOTON. — Iiii|irimcric3 réunies, A, rue Mignon, 2, Paris.
BULLETIN MENSUEL
DE LA
SOCIÉTÉ NATIONALE
D'ACCLIMATATION
IDE FI^A.IVOE
I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ (i)
CATALOGUE RAISONNÉ
PAR RÉGIONS
DES ESPÈCES D'OISEAUX
qu'il y aurait lieu
D'ACCLIMATER ET DOMESTIQUER EN FRANCE
Par L. MiieAUD D'AUBUSSOIV
(Suite.)
Thaumalé peint ou Faisan doré (Thaumalea pictaV^âgler).
Phasianus aureus sinensis, Brisson, Ornith. (1760), t. I, p. 271. — PItasiantis
pictiis, Linné, Sijst. nat. (1766), t. I, p. 27'2. — Le Faisan doré de la Chine,
Buffon, PL Enl., 217 (1770). — Tliaumalea picta, Wagler, /s/s (1832), p. 1227.
— Bonaparte, Compt. rend. Ac. se. (1856), t. XLII, Tahl. des Gall., n" 79.
— Swinhoë, Proc. Zool. Soc. (1863), p. 307. — Gould, Birds of Asia (1866),
livr. XVIIl, pi. — Chnjsolophus pictiis, Swinhoë, Proc. Zool. Soc. (1871),
p. 398.— David et Oustalel, Ois. de la Chine (1877), p. ili.
Tout le monde connaît le Faisan doré, et, quoique son in-
troduction en Europe remonte à un passé déjà lointain, on
ne s'est jamais lassé de l'admirer (3).
(1) La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par
les auteurs des articles insérés dans son Bulletin.
(2) Cuvier pense que le fameux Phéni.x des anciens n'est autre que le Faisan
4' SÉRIE, T. 111. — Janvier 1886. 1
2 SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION.
C'est, en effet, un des oiseaux que la nature s'est plu à
parer avec magnificence. L'or, l'azur, le pourpre, brillent sur
son manteau. Une huppe d'un jaune doré vif décore sa tête
et retombe élégamment sur une large collerette rouge orange
bordée de satin noir, La gorge et le ventre sont d'un beau
rouge safran vif. La queue brune, marbrée de noir, très dé-
veloppée, ornée de longues et étroites couvertures supérieu-
res, de couleur écarlate, termine avec grâce un corps élancé
et souple.
La femelle est, comme d'habitude, sombrement vêtue. Les
jeunes mâles ressemblent aux femelles, et ce n'est qu'à la
seconde mue qu'ils commencent à se revêtir de toute la ri-
chesse et de toute la beauté de leur parure.
Nous n'avons rien à dire du Thaumalé peint en captivité ;
il est aujourd'hui tellement répandu dans les volières et les
faisanderies, que nous ne pourrions rien ajouter qui ne fût
déjà parfaitement connu. En revanche, on sait fort peu de
chose sur les habitudes de cet oiseau, à l'état de liberté, dans
son pays d'origine. Vainement chercherait-on dans les récits
des voyageurs-naturalistes des indications satisfaisantes sur
ce sujet. M. Swinhoë, le père Armand David, par exemple,
qui ont pu observer le Faisan doré à l'état sauvage, sont
presque muets quand il s'agit de nous parler de ses mœurs,
d'où il faut conclure qu'elles doivent être à peu près les
mêmes que celles de ses congénères, et que rien de bien spé-
cial, en ce qui les concerne, n'est venu frapper ces voyageurs.
Le père David se contente de dire que cet oiseau vit dans
les bois, sur les montagnes d'altitude moyenne. Il l'a ren-
contré, dit-il,, assez communément dans le Setchuan occi-
dental et dans le Kokonoor oriental, et beaucoup plus rarement
dans le Ghensi méridional. Il manquerait complètement dans
les provinces septentrionales et orientales de l'Empire, ainsi
qu'en Mantchourie et en Corée.
doré; ce qu'en ont écrit les poètes se rapporte en effet assez bien à cet oiseau.
On ignore Tépoque exacte de l'introduction du Faisan doré en Europe; on
admet qu'il a été importe au quinzième siècle; les auteurs plus anciens ne par-
lent point de cet oiseau. Sa domestication aurait eu lieu en Angleterre vers le
milieu du dix-huitième siècle.
OISEAUX A ACCLIMATER. 3
Les Chinois l'appellent « Ken-chy », Poule d'or, et c'est
bien là le nom qui lui convient.
On a lâché le Faisan doré dans des chasses aménagées avec
soin; l'expérience n'a pas partout réussi, faute peut-être de
précaution et de persévérance, car notre climat n'est pas trop
rigoureux pour lui. On le voit encore figurer de temps à
autre au tableau de quelques chasseurs privilégiés, et il faut
avouer qu'il est, pour l'œil tout au moins, un merveilleux
gibier.
« Le Faisan doré, dit M. Cosson, est d'une chasse plus dif-
ficile que celle du Faisan commun, car il se tient presque
constamment dans les fourrés et se dérobe généralement à
l'arrêt du Chien sans prendre son vul ; mais ces inconvénients
sont largement compensés par une ponte abondante, qui a
lieu généralement dans le mois de mars, et dont la précocité
a l'avantage d'assurer la multiplication de l'espèce, même
dans les années où celle du Faisan commun se trouve com-
promise par les pluies d'avril et de mai. »
Le Thaumalé peint se marie volontiers avec le Thaumalé
d'Amherst, et de cette union résultent des hybrides de toute
beauté.
On élève au Japon et dans les jardins zoologiques d'Europe
une variété du Thaumalé peint dont la queue est plus courte,
la collerette plus sombre et la gorge noire. On lui a donné le
nom de « Thaumalé sombre, Thaumalea obscurci », et vulgai-
rement celui de « Charbonnier ». 11 existe aussi une variété
Isabelle.
Thaumalé d'Amherst {Thaumalea Amherstiœ Wagler).
Phasianus Amherstiœ, Leadbeater, Linn., Trans., t. XVI, p. 129. — Temminck^
PL col., t. V. — Thaumalea Amherstiœ, Wagler, Isis (1832), p. 1228. —
Bonaparte, Comptes rendus Acad. se. (1856), p. 879. — Swinhoë, Proc.
Zool. Soc. (1863), p. 317. — David et Oustalet, Ois. de la C/jine (1877),
p. 415.
Cet oiseau ne le cède pas en beauté au précédent. 11 porte
la huppe rouge et la collerette d'argent à bords foncés. Le
cou, le haut du dos, les couvertures supérieures des ailes
4 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
sont d'un vert doré clair. Sur le bas du dos règne une belle
teinte d'un jaune doré, et sur les couvertures supérieures de
la queue un rouge clair rayé et tacheté de noir. Le ventre est
d'un blanc pur.
Cette remarquable espèce fut rencontrée pour la première
fois en Cochinchine par sir A. Gampbel, qui reçut deux mâles
du roi de Awa. Il en fit présent à lady Amherst, qui eut la
bonne fortune de les apporter tous deux vivants en Angleterre,
où, du reste, ils ne vécurent que quelques semaines. Lead-
beater donna une description de ce magnifique Phasianide et le
dédia à lady Amherst, sous le nom de Faisan d'Amherst, P/ia-
sianus Amherst et.
Pendant longtemps les dépouilles de ces deux mâles, dont
l'un prit place dans la collection du comte de Derby et se voit
encore maintenant au « Derby Muséum » de Liverpool et
l'autre resta dans la famille du comte Amherst, furent les
seuls représentants en Europe de l'espèce. Mais, en 4869,
M. J. Stone fit venir, par l'intermédiaire de M. Medhurst,
consul de Sa Majesté Britannique à Shangaï, six individus,
cinq mâles et une femelle, qui arrivèrent vivants en Angle-
terre. Ils étaient les derniers survivants de vingt oiseaux ex-
pédiés du Yunan occidental ; huit seulement étaient arrivés
en bon état à Shangaï, où il en était mort deux autres. Déposés
provisoirement au « Zoological Garden », ces Faisans, à l'ex-
ception d'un jeune mâle, furent ensuite expédiés à M. Veke-
mans, directeur du Jardin zoologique d'Anvers. Depuis, un
grand nombre de couples ont été apportés en Angleterre et
sur le continent; des reproductions régulières se sont effec-
tuées, et aujourd'hui le Thaumalé d'Amherst est devenu un
oiseau très répandu.
C'est une acquisition précieuse. Comme oiseau d'ornement,
il ne peut être surpassé : il est beau, élégant et facile à éle-
ver en volière. Originaire de contrées assez froides, il n'a
pas à redouter les intempéries de nos climats, où sa repro-
duction est assurée. Sa place est donc marquée dans nos
parcs et nos chasses à côté du Faisan vénéré.
« Le Faisan de lady Amherst, dit le père David, habite pen-
OISEAUX A ACCLIMATER. 5
dant toute l'année les plus hautes montagnes boisées de
l'ouest du Setchuan, du Yunan, du Kouycheou, et les hautes
montagnes du Thibet oriental. Il affectionne particulièrement
les massifs de Bambous sauvages qui croissent à une altitude
de 2 à 3000 mètres, et dont les bourgeons constituent sa
nourriture favorite ; c'est même de là que lui vient son nom
chinois de Seng-ky (Poule des bourgeons). Pris jeune, il s'é-
lève fort bien et se reproduit facilement en captivité, comme
on a pu s'en assurer par des expériences faites au collège de
Moupin. C'est un oiseau robuste, qui ne redoute ni le froid
ni la neige, et qui s'accommode de toute espèce de nourriture,
comme notre Poule domestique. A l'état sauvage, il se montre
fort jaloux et ne souffre pas que le Faisan doré, qui seul
pourrait rivaliser avec lui, s'approche de l'endroit où il s'est
établi ; aussi ne rencontre-t-on jamais ces deux Faisans aux
couleurs éclatantes sur la même montagne ni dans la même
vallée. ))
Nous avons dit que cette espèce contracte aisément des
unions avec l'espèce précédente. Cet accouplement donne des
oiseaux d'une rare beauté ; ils sont plus forts que les parents
dont ils sont issus, et les mâles ont souvent une coloration
des plus riches, participant des deux plumages.
EUPLOCOME NYCTHÉMÈRE OU FaISAN ARGENTÉ (EuplocomUS
nycthemerus Temminck).
Phasianus albus sinensis, Brisson, Ornitli. (17G0), t. [, p. 277. — Phasianus
nycthemerus, Linné, Sijst. nat. (1766), t. I, p. 272. — Le Faisan blanc de la
Chine, Buffon, PL Enl., 123 et 124. (illO). — Gennœus nycthemerus, Wagler,
Isis (1832), p. 1228. — Euplocomus nycthemerus, Temminck (1838). — Gen-
nœus nycthemerus, Bonaparte, Compt. rend. Ac. se. (1856), t. XLII, Tabl.
des GalL, WSd. — Gould, Birds of Asia (1859J, livr. XI, \A. — Euplocomus
nycthemerus, Elliot, Mon. of Phas. (1870), livr. I, pi. — Swinhoë, Proc.
Zool. Soc. (1871), p. 399. —David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877),
p. 416.
Comme le Faisan doré, le Faisan argenté est depuis long-
temps connu en Europe (1), et, pour le moins, aussi répandu
(1) Son introduction est postérieure toutefois à celle du Faisan doré, caries
auteurs du seizième siècle, Gessner notamment, ne parlent pas de cet oiseau.
Q SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
que son congénère. Son plumage, qui n'a pas la richesse de
celui du Faisan doré, est cependant fort remarquable, grâce
aux couleurs en apparence disparates dont il est orné, mais
qui s'harmonisent admirablement par leur distribution.
Toutes les parties supérieures du corps, d'un blanc d'ar-
gent, relevées par une huppe noire et des lignes étroites de
même nuance disposées en zigzag; toutes les parties infé-
rieures d'un noir à reflets bleus ; les pattes de corail et le bec
opalin. La femelle d'un brun roux, finement tacheté de gris.
M. Swinhoë nous dit que l'espèce est sauvage dans le sud
de la Chine, qu'elle y habite les montagnes boisées de l'inté-
rieur, qu'on en a tué plusieurs individus dans le voisinage
d'Amoy, mais qu'il n'en a jamais rencontré dans ses voyages.
D'après le père David, le Faisan argenté est devenu fort
rare à l'état sauvage et ne se rencontre plus que dans la Chine
méridionale, jusqu'au nord du Fokien, et peut-être jusqu'au
Tché-kiang. Il n'existe pas au Setchuan, et est remplacé dans
le sud-ouest du Yunan par une race de plus petite taille, que
M. EUiot a désignée sous le nom d'Euplocome d'Anderson
(Euplocomus Andersoni). Cette forme, qu'Anderson, con-
servateur de « l'Indian Muséum » de Calcutta, a découverte en
Birmanie, paraît être intermédiaire à Euplocomus nycthe-
merus et Euplocomus lineaMs, qu'on rencontre également
dans plusieurs contrées de la Birmanie. Nous y reviendrons
lorsque nous parlerons ultérieurement du lineatus.
En Chine, l'Euplocome nycthémère porte le nom de Jug-hj,
Poule argentée, et de Pae-ky, Poule blanche. On voit cet oi-
seau reproduit en broderies sur la poitrine et le dos des vê-
tements officiels des mandarins civils, comme signe distinctif
de leur rang.
Le Faisan argenté réussit très bien dans nos volières et
nos faisanderies; mais de bonnes raisons s'opposent à ce
qu'il devienne un nouveau gibier pour nos forêts et nos tirés.
La couleur éclatante du costume du mâle le dénonce de loin
aux attaques des braconniers et des carnassiers, et son naturel
querelleur l'empêche de souffrir un autre mâle de son espèce
dans le même district. En outre, il combat et chasse les au-
OISEAUX A ACCLIMATER. 7
1res Gallinacés sauvages, le Coq-faisan notamment. Cette
humeur farouche prend un caractère encore plus aigu au
moment des amours. Cet oiseau entre alors dans un état d'ir-
ritabilité excessive; il va même jusqu'à attaquer l'homme, à
lui donner des coups de bec et des coups d'ergot. Sous l'in-
fluence de cette excitation, il bat violemment des ailes et fait
entendre un sifflement très prolongé, qu'accompagne une
sorte de gloussement sourd et saccadé.
EuPLOGOME DE S\NimiOE (Euplocomus SwinhoU Gou\d).
Euplocamus Swinhoii, Gould, Proc. Zool. Soc. (1862), p. 284. — Id., Birds of
Asia, pi.— Sclater, Proc. Zool. Soc. (1863), p. 119. —Gray, List Gall. (1867),
p. 34. — Swinhoë, Ibis (1863), p. 401; (1865), p. 538; (1866), p. 308. — Id.,
Proc. Zool. Soc. (1871), p. 399. — Elliot, Mon. of Plias. (1871), t. II, pi.—
David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877).
Cette belle espèce est propre à l'île Formose, où elle vit
Euplocome de Swinhoë {Euplocomus Swinhoii Gould).
dans les grandes montagnes boisées de l'intérieur. Elle y fut
8 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
découverte par M. Swinhoë, alors vice-consul d'Angleterre à
Formose. Gould la décrivit en 1862 dans les Proceedings et
la dédia à son inventeur, sous le nom d'Euplocome de
Swinhoë, Euplocamus Swinhoii.
Dans une lettre adressée en 1863 au directeur du journal
VI bis, M. Swinhoë raconte comment il lut amené à connaître
cet intéressant Phasianide.
Un jour il apprit par ses chasseurs qu'il existait dans l'in-
térieur un Faisan appelé par les Chinois Wa-koé. Ce Faisan
fréquentait les hauteurs les plus sauvages, et descendait ra-
rement sur les versants inférieurs. Ils ajoutèrent que le soir
et le matin, au crépuscule et à l'aube, le mâle avait pour
habitude de se placer sur une branche, bien en évidence, ou
sur le toit d'une hutte solitaire, et que là, se prélassant, se
pavanant, étalant sa queue, il faisait retentir l'air de cris stri- ,
dents. M. Swinhoë offrit à ses hommes de fortes récompenses
pour qu'ils lui procurassent le plus grand nombre possible
de spécimens de cet oiseau singulier. Mais il eut si peu de
chance, qu'il ne put en obtenir qu'une paire, une femelle
d'abord, et ensuite un mâle. Vainement, dans une tournée à
l'intérieur, chercha-t-il à observer par lui-même cet oiseau,
afin de l'étudier à l'état sauvage et dans ses demeures habi-
tuelles ; tous ses efforts restèrent infructueux.
En 1 865, ses chasseurs lui procurèrent un vieux mâle qu'ils
avaient tué dans les montagnes.
Dans une seconde lettre, M. Swinhoë, annonçant l'envoi
de "plusieurs couples vivants de ce Faisan, exprime l'espé-
rance qu'avant peu il aura réussi à introduire en Angleterre
cette magnifique espèce, qui sera, dit-il, très répandue dans
les jardins. Entre temps, le docteur Squire avait déjà importé
une femelle par la voie de Calcutta.
L'espoir de M. Swinhoë s'est réalisé; son Faisan orne les
volières des jardins zoologiques. On l'a même croisé avec le
Faisan argenté, et on a obtenu des hybrides qui sont assez
curieux par la distribution des couleurs.
Les premiers oiseaux de cette espèce que posséda notre
Jardin d'Acclimatation furent acquis de M. le baron James
OISEAUX A ACCLIMATER. Q
de Rolhschild, en octobre 1866. L'année suivante, douze
jeunes furent obtenus.
Cet Euplocome, comme l'Euplocome nycthémère, est un
oiseau robuste et qui s'élève facilement; aussi s'est-il bien
vite partout répandu et partout multiplié. Malgré cela, il a
peu d'avenir comme gibier. Très querelleur et très fort,
comme son congénère, il fera difficilement bon ménage, en
forêt, avec les autres Faisans, qu'il éloignera toujours de la
faisanderie et des endroits qu'il aura adoptés. En outre, son
dos blanc servira de point de mire aux carnassiers et aux
braconniers. Il est probablement destiné à rester captif dans
nos volières; mais de quel splendide oiseau d'ornement nous
a dotés le naturaliste anglais!
L'Euplocome de Swinhoë est, en effet, magnifiquement
vêtu. Des caroncules d'un rouge vif s'élèvent de chaque côté
du sommet de la tête, qui est ornée d'une touffe de plumes
allongées d'un blanc légèrement mélangé de bleu. Une teinte
bleu foncé, à reflets soyeux, règne sur la tête, le cou, la poi-
trine et les flancs. Une longue tache d'un blanc de neige s'é-
tend sur le milieu du dos et tranche sur le rouge carmin
sombre à reflets de bronze florentin qui décore les scapu-
laires. Le bas du dos est d'un noir soyeux, avec des reflets
d'un bleu violet très brillant au bord des plumes. Enfin, les
couvertures des ailes sont noires, glacées de vert bronze sur
les bords, et les plumes médianes de la queue d'une blan-
cheur éclatante.
La femelle, beaucoup plus modeste, selon l'usage, n'a pas
de caroncules, et son plumage revêt une teinte générale d'un
brun rougeâtre ou orangé, avec des raies et des taches d'un
brun foncé.
L'Euplocome de Swinhoë ne prend ses couleurs que la
seconde année, comme l'Euplocome nycthémère et le Thau-
malé peint; il est propre néanmoins à la reproduction dès
l'âge d'un an, moins sans doute qu'après avoir revêtu sa ma-
gnifique livrée, mais d'une façon déjà satisfaisante.
10
SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION,
Crossoptile mantchou (Crossoptilon mantchuricum
Swinhoë).
Crosxoptilon mantchuricum, Swinhoë, Proc. zool. Soc. (1862), p. 287. —
A. David, Nouv. Arch. du Mus. (1871), Bull., VU, Cat., n" 349. — EUiot,
Monogr. of Phas. (1871), liv. IV, pi. — David et Oustalet, Ois. de la
Chine (1877), p. 405.
Lorsque cet oiseau arriva pour la première fois en Europe,
on le confondit avec l'espèce que Pallas avait décrite dans sa
Crossoptile mantchou {Crossoptilum mantchuricum Swinhoë).
Zoographie de la Russie asiatique, sous le nom de Faisan
oreiWavd, Phasianus auritus; mais une comparaison atten-
tive fit promptement reconnaître l'erreur dans laquelle on
OISEAUX A ACCLIMATER. 11
était tombé. M. Swinhoë adopta alors pour le différencier la
dénomination de mantchuricum, mantchou, tirée de celle
de son pays d'origine.
Cette espèce fort intéressante fut, en effet, rencontrée en
1862, en Mantchourie et dans les montagnes boisées du Pet-
che-ly, au delà de Tan-Yu, par le père Armand David, ce
missionnaire français qui a rendu tant de services à l'histoire
naturelle de la Chine, et qui l'assimila tout d'abord à l'oi-
seau de Pallas.
M. Swinhoë dit de même que l'on rencontre ce Crossoptile
en Mantchourie, dans les montagnes situées au nord de Pékin
et qu'on l'apporte en hiver sur les marchés de cette ville.
On assura à M. Saurin qu'il se trouve également dans le
Wei-Chieng, terrain des chasses impériales ; mais ce natura-
liste juge ce rapport inexact, car visitant ces localités il ne put
parvenir à voir un seul des oiseaux dont on lui avait parlé.
Les indigènes l'appellent « Ho-chi ». D'après MM. Saurin
et Swinhoë, ce nom signifierait « Poule de feu ». Ce dernier
ajoute que les plumes de cet oiseau étaient autrefois recher-
chées comme parure par les guerriers tartares.
Le Crossoptile mantchou est peu répandu et vit à l'état sé-
dentaire. C'est un oiseau très doux et très sociable que Ton
rencontre toujours en compagnie. Il se nourrit de toutes
espèces de graines, de bourgeons, de feuilles, de racines et
d'insectes.
La connaissance du régime diététique d'une espèce est
une des conditions principales de tout essai rationnel d'accli-
matation ; il est donc utile d'insister sur ce point.
Trois Crossoptiles tués au mois de juillet, dans leur pays
natal, par le père David, avaient le jabot rempli de feuilles de
cytise. Chez d'autres individus tués en hiver, le même obser-
vateur trouva des noisettes, divers pépins, des feuilles d'ar-
moise, de fougères et surtout des racines d'orchidées et autres
racines succulentes, des coléoptères, des vers, des chenilles.
Ce gallinacé paraît être plus herbivore que granivore, tout
en se montrant peu difficile pour sa nourriture. Les Chinois
qui apportent ces oiseaux sur les marchés les nourrissent
12 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
avec une espèce de gâteau de millet. Ils sont aussi très
friands d'orge que l'on récolte en grande quantité dans les
vallées des montagnes qu'ils habitent.
Le Crossoptile mantchou a les mœurs des autres Phasiani-
des, mais se fait remarquer, comme nous venons de le dire,
par son caractère paisible. Cette qualité jointe à la facilité que
l'on a de le nourrir, semble le destiner à devenir la souche
d'un nouvel oiseau domestique. Malheureusement cette es-
pèce s'est montrée, jusqu'à présent, inféconde dans la plu-
part des volières. Quelques éleveurs cependant ont obtenu
des reproductions et la Société nationale d'Acclimatation de
France a eu dernièrement à récompenser deux de ses mem-
bres pour leurs succès dans l'éducation de ces Crossoptiles (1).
Il est donc probable que, lorsque ces oiseaux auront été mieux
étudiés, ils donneront, au point de vue de l'élevage, de.s ré-
sultats satisfaisants.
Ces résultats sont d'autant plus désirables que depuis quel-
ques années cette espèce est devenue fort rare dans son pays
d'origine et ne tardera pas, dit-on, à disparaître complète-
ment, soit par suite de la guerre d'extermination qu'on lui
fait, soit par la destruction des forêts qui lui servent de re-
traite.
Le Crossoptile mantchou est moins brillamment paré que
la plupart des autres Phasianides ; mais son costume ne man-
que pas d'une certaine originalité.
Le genre auquel il appartient est, en effet, caractérisé
principalement par la nudité de la face et les plumes effilées
de la région auriculaire, qui s'allongent en pinceau et for-
ment comme deux cornes en arrière de la tête. La queue est
relativement courte, mais les plumes médianes ébarbées et
pendantes retombent comme des franges par-dessus les au-
tres.
L'espèce qui nous occupe a le plumage brun poussant au
noir vers le cou et sur la tête, au blanc d'argent sur le crou-
pion et à la base de la queue, dont l'extrémité est noire à
(1) M. Maillard, du Croisic (188i); M. Barrachin (1885). Ce dernier a obtenu
des hybrides du Mantchuricum et du Cœrulescens.
OISEAUX A ACCLIMATER. 13
reflets métalliques. La gorge est également blanche ainsi que
les pinceaux. La femelle diffère peu du mâle par le plumage.
Crossoptile oreillard (Crossoptilum auritum Gould).
Phasianus auritus, Pallas, Zoogr. (1811), t. II, p. 86. — Crossoplilon cœrules-
cens, A. David, mss., et Milne-Edwards, Compl. rend. Ac. se. (1870),
t. LXX, p. 538. — Crossoplilon auritum, Gould, Birds of Asia (1870), liv.
XXII, pi. — Swinhoë, Proc. Zool. Soc. (1871), p. 119. — Elliot, Mon. of
Phas. (1871), liv. V, pi. — David et OuStalet, Ois. de la Chine (1871),
p. 406.
C'est le Faisan oreillard de Pallas retrouvé en 1869 dans
leSetchuan, parle père A. David, qui écrivait, en effet, à
M. Milne-Edwards, à la date du 18 décembre de cette année :
« J'ai découvert une nouvelle espèce de Crossoptilon, qui me
paraît très remarquable et qui pourra recevoir le nom de
Crossoptilon cœrulescens ». Mais, lorsque le père David eut
sous les yeux la description de Pallas, il reconnut bien vite
son erreur et renonça à la dénomination qu'il avait imposée
à cet oiseau lorsqu'il le considérait comme une espèce nou-
velle.
Le Crossoptile oreillard offre des dimensions et des formes
à peu près identiques à celles du Crossoptile mantchou ; les
couleurs des yeux, du bec, des pattes et de la peau nue qui
entoure les yeux sont absolument les mêmes. Mais le corps
est d'un bleu-ardoise, avec la base des rectrices centrales et
la plus grande partie des rectrices latérales d'un blanc pur.
Les pinceaux auriculaires sont moins développés que dans
l'espèce précédente. Il n'existe aucune différence de plumage
entre les deux sexes.
Jusqu'à ces derniers temps, cette belle espèce n'était re-
présentée dans les musées d'Europe que par les quatre in-
dividus que le père David avait envoyés de Pékin, C'est un
oiseau encore fort rare, même dans son pays d'origine qui est
le noi'd-ouest du Setchuan, le Kokonoor oriental et peut-être
même le Kan-sou.
En Chine, on recherche beaucoup les plumes de la queue
de ce Crossoptile pour l'ornement des chapeaux des manda ^
lins.
U SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
Grossoptile du Thibet {Crossoptilon Thibetanum
Hodgson).
Crossoptilon Thibetanum, Hodgson, Journ. asiat. Soc. Beng., t. VIT, p. 864.
— Gray, Zool. Mise. (1844) et Gen. of Birds, pi. — EUiot, Mon. of
Phas. (1871), liv. V, pi. — David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877),
p. 407.
Le plumape de cette espèce est entièrement blanc à l'excep-
tion de la calotte qui est d'un noir velouté, des rémiges qui
sont d'un noirbleuâtre et de la queue qui offre une teinte d'un
noir métallique avec des reflets verts et pourprés, et une
tache blanche à la base des rectrices latérales. Le bec est rose
pâle, la peau nue qui entoure les yeux d'un rouge vif; les
pattes et les éperons sont d'un rouge de corail.
Les femelles et les jeunes mâles, avant la première mue,
se distinguent des mâles adultes par les teintes moins pures
de leur plumage et leurs éperons moins développés.
« Le Crossoptilon blanc, dit le père David, ne se trouve
en Chine que dans quelques localités boisées, sur les monta-
gnes élevées du pays des Mantzes, par exemple à Yaotchy et
à Tatsienlou, où son existence est protégée par le respect
superstitieux des indigènes. C'est un oiseau doux et sociable
qui aime à vivre en compagnie de ses semblables, même à
l'époque de l'éducation des jeunes, et qui ne s'éloigne guère
des lieux qui l'ont vu naître. Sa nourriture consiste en feuil-
les, en racines, en graines et en insectes. Heureusement pour
la conservation de l'espèce, la chair de ce Gallinacé est d'un
goût fort médiocre; aussi les chasseurs préfèrent-ils comme
gibier les Faisans, qui sont d'ailleurs beaucoup plus répandus
et plus faciles à atteindre. »
OISEAUX A ACCLIMATER. 15
Grossoptile de Drouyn (Crossoptilon Drouynii
Milne-Edwards).
Crossoptilon Drouynii, Milne-Edwards, Compt. rend. Ac. se. (1868), t. LXVI,
p. 767. — J. Verreaux, Nom. Arch. du Mus. (1865), Bull., t. IV, p. 85 et
pi. 3.— Svinhoë, Proc. Zool. Soc. (1871), p. 399. — Elliot, Mon. of Phas.
(1871), liv. V, pi. — Crossoptilon Thibetanum, David et Oustalet, Ois. de la
Chine (1877), p. 407.
Forme très voisine de la précédente, si voisine que nous ne
pouvons guère la considérer que comme une race locale ou
peut-être même simplement comme une différence d'âge, les
individus très vieux, suivant l'opinion de MM. David et Ous-
talet qui assimilent les deux formes, ayant les rémiges d'un
gris blanchâtre au lieu du noir bleuâtre que l'on observe
dans le Grossoptile du Thibet.On peut relever encore d'autres
différences ; ainsi les lectrices externes, non seulement ne
sont pas noires, mais manquent de taches noires si caracté-
ristiques dans l'espèce indiquée. En outre, les rectrices mé-
dianes n'ont ni la largeur, ni l'éclat vert doré de l'oiseau
décrit par Hodgson.
Ge beau Phasianide, envoyé à M. Soubeiran par M. Dabry,
consul de France à Hankow, et donné par M. Drouyn de
Lhuys, président de la Société d'Acclimatation, au Muséum
d'histoire naturelle de Paris, fut présenté par M. Milne-Ed-
wards, à l'Académie des sciences, dans la séance du 20 avril
1868, sous le nom de Crossoptilon Drouynii.
Son régime, ses mœurs et ses allures ne diffèrent en au-
cune façon de ceux du Crossoptilon thibetanum. Il provient
comme lui du Thibet, dans la partie nommée Moupin.
16
SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
EULOPHE A COU JAUNE
{Pucrasia Xanthospila Gray).
Pucrasia xanthospila, Gray, Proe. Zool. Soc. (18G4), p. 259 et pi. 20. — Pîtcrasia
Davidiana, Milne-Edwards, Arch. du Mus. (1864), p. 15; xanthospila, id.,
Nouv. Arch. du Mus. (1865), Bull., I, p. 14 et pi. I, fig. 2. — Saiirin, Proc.
Zool. Soc. (1866), p. 437. — Gould, Birds of Asia, liv. XXI, pi. — Swinlioë,
Proc. Zool. Soc. (1871), p. 399. — David et Oustalet, Ois.de la Chine (1877),
p. 407.
Le D' Lamprey révéla le premier l'existence de cette espèce
dans une lettre adressée à la Société zoologique de Londres,
Eulophe à cou jaune {Pucrasia XanUiospila Gray).
en 1861 . 11 la trouva au marché de Tientsin et vanta beaucoup
l'excellence de sa chair.
Le père David en possédait des exemplaires dès la fin de
1862. Ils provenaient de Ta-Tchio-Chan, de Jehol et de la
chaîne de 1 Ourato. En 1868, il les apporta à Paris et ils furent
décrits l'année suivante par M. Milne-Edwards, dans les Ar-
chives du Muséum.
OISEAUX A ACCLIMATER. 17
Le missionnaire signale cet oiseau comme un gibier très
estimé sur le marché de Pékin, où il arrive surtout de Man-
tchourie.
« Les Eulophes à cou jaune ou Song-ky, dit-il, se ren-
contrent en petit nombre dans les montagnes boisées du
N. 0. de la Chine, depuis la Mantchourie jusqu'au Thibet
oriental, ainsi que dans la chaîne de l'Ourato. Ils ne quittent
guère les taillis et les fourrés, où ils vivent solitaires ou par
couples, se nourrissent des graines de divers végétaux et par-
ticulièrement de conifères. Leurs allures sont celles des Fai-
sans. Ils constituent un excellent gibier, et, chaque hiver, les
Chinois prennent au collet un certain nombre de ces oiseaux
qu'ils apportent au marché de Pékin ; les résidents euro-
péens préfèrent avec raison ces Gallinacés aux autres Phasia-
nides du pays. »
Cet oiseau a la tête et la gorge d'un noir grisâtre avec une
teinte d'ocre sur le vertex et une partie des plumes qui com-
posent sa huppe occipitale. Sur les joues s'étend une grande
tache blanche suivie d'une tache jaune encore plus large, oc-
cupant les côtés et le dessus du cou. Une teinte d'un gris
cendré avec de longues taches noires en forme de fer de lance
règne sur le dos, le croupion, les côtés de la poitrine et l'ab-
domen, le bas-ventre et les cuisses. Sur la partie inférieure
de la gorge, une large bande marron qui se prolonge entre
les jambes. Rémiges brunes, bordées de jaune d'ocre en de-
hors. Scapulaires et couvertures alaires variées de brun, de
gris et d'olivâtre. Tarse armé d'un éperon très aigu. Queue
étagée. Plumes pour la plupart de forme lancéolée.
Chez la femelle, la tête n'offre point de reflets d'un vert
métallique, la huppe est plus courte, la gorge et la tache la-
térale du cou sont d'un blanc jaunâtre, auquel succède vers
le bas une teinte rosée. Les parties supérieures du corps sont
mouchetées de gris, de noir et de roux, et les parties infé-
rieures, un peu plus claires que le, dos, sont dépourvues de
bande marron.
Une variété qui serait propre au Chensi se distinguerait de
l'oiseau type par les côtés du cou d'un roux très foncé, la
4» SÉRIE, T. III. — Janvier 1886. 2
18 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
tache latérale blanche peu développée et entourée de toutes
parts par le noir métallique, la bande médiane marron moins
étendue""sur le ventre, les teintes noires plus développées sur
le dos et sur les ailes.
Le premier couple d'Eulophe à cou jaune importé vivant
en Europe, a été envoyé au Jardin zoologique d'Acclimatation
de Paris par M. Dabry, à la fin de 1867.
Les expériences dont cet oiseau a été l'objet de la part
d'un certain nombre d'éleveurs prouvent que nous nous trou-
vons en présence d'une espèce très robuste et qui otîre des
titres sérieux à être essayée comme oiseau de chasse, car
elle ne craint ni la neige, ni les ti-mpératures rigoureuses qui
se produisent souvent, en hiver, dans nos contrées.
« Par sa fécondité et sa rusticité, dit M. Joseph Gornely
qui a étudié avec soin l'Eulophe à cou jaune et dont la com-
pétence en matière d'élevage est bien établie, cet oiseau est
destiné à peupler les chasses et à nous fournir un nouveau
gibier exquis. »
EULOPHE DE DARWIN
{Pucrasia Darwini Swinhoë).
Pucrasia Darwini, Swinhoë, Proc. Zool. Soc. (1872), p. 552. — Elliot, Mov.
of Pluis. (1872), livr. VI, pi. — David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877).
p. 409.
Cette nouvelle espèce d'Eulophe fut découverte par
M. Swinhoë, dans les montagnes du Tchéldang. Elle est éga-
lement sédentaire et assez commune dans le Fokien, où elle
vit dans les endroits boisés et escarpés.
Son plumage rappelle, comme ton général, celui de l'es-
pèce précédente, mais il s'en distingue, à première vue, par
l'absence des taches jaunes sur les côtés du cou et par les
teintes métalliques de la tête moins vertes et plus bleuâtres.
La femelle ressemble beaucoup à celle de l'Eulophe à cou
jaune, mais le noir domine davantage dans les teintes du
plumage.
OISEAUX A ACCLIMATEU. 19
Régime, mœurs et allures comme l'espèce précédente. Les
Chinois lui donnent le même nom « Song-ky », Poule de
pins.
TRAGOPAN DE TEMMFNCK
(Cerioniis Temminckil Blyth).
Satyra Temminckil, J. E. Gray et Hardwick, Illust. Ind. Zool. (1830-34), t. I
pi. 50 —Ceriornis Temminckii, Blyth, C«i. B. Mus. As. Soc. Beng. (184-9)'
p. 240. — Sclater, Proc. Zool. Soc. (1863), p. 123. — Swinhoë, iôi'rf. (186.3),'
p. 307.— Gould, Birds of Asia (1869), livr. XXI, pi.— Swinhoë, Proc. Zool.
Soc. (1871), p. 123. — Elliot, Mon. of Plias. (1871), livr. Il, pi. — David et
Oustalet, Ois. de la Chine (1877), p. 418.
Le Tragopan de Temminck est un des plus beaux du genre
et semble former une transition, pour l'éclat du costume,
Tète et rabat du Tragopan de Temminck [Ceriornis Temminckii Blyth).
entre le splendide Tragopan satyre et le Tragopan de Cabot
plus modestement paré. La forme et la distribution des taches
du plumage le rapprochent de cette dernière espèce, mais ses
couleurs sont bien plus brillantes.
La peau nue qui entoure les yeux est bleu-indigo avec le
20 SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION.
loriim et les sourcils verts; le rabat est aussi bleu passant au
vert bleu sur les bords, qui sont ornés de taches carrées d'un
rouge pourpre. Les cornes sont d'un vert bleuâtre avec la base
d'un bleu indigo. Au printemps, vers la fin d'avril, les mâles
entrent dans une excitation amoureuse très grande et font une
cour des plus assidues et des plus démonstratives aux femelles.
Le rabat, qui le reste de l'année est comme contracté et dissi-
mulé au-dessous de la gorge, se déploie alors, à intervalles,
d'une façon tout à fait surprenante. Il s'étale magnifiquement
sur la poitrine, variant d'intensité dans ses teintes rouges,
bleues et vertes, pendant que les cornes, brillamment colorées,
se dressent de chaque côté de la tête. La longueur de ces
cornes atteint jusqu'à O^.O? et celle du rabat O",!?. L'effet
produit par le développement de ces appendices est fort
étrange et on ne peut guère s'en faire une idée sans l'avoir vu.
En même temps, l'oiseau redresse les plumes du corps du
côté opposé à celui où se trouve la femelle, de sorte que ces
plumes élégamment tachetées sont ainsi que les autres expo-
sées au regard de la compagne qu'il veut séduire. Car cet
étalage d'ornements, ces parades passionnées ont pour but
d'attirer l'attention de la femelle, d'exciter son admiration
et de la charmer en exerçant sur elle une sorte de fascination.
C'est pour la même raison que nous voyons dans nos volières
le Faisan doré, lorsqu'il fait sa cour, étendre et relever sa
magnifique fraise, la tourner obliquement vers la femelle, de
quelque côté qu'elle se trouve, afin de développer devant elle
une large surface de plumes brillantes et de la captiver par
ce manège amoureux.
La riche coloration du plumage du Tragopan de Temminck
vient encore ajouter à ces moyens de plaire. Un beau rouge
marron, orné de petites taches arrondies d'un gris-perle
ourlé de noir, règne sur les parties supérieures du corps, et de
grandes taches ovales d'un gris bleuâtre au centre des plumes
sont répandues sur le rouge des parties inférieures. Enfin la
coloration de la tête, d'un noir profond, est relevée par la
teinte rouge-brique des plumes de l'occiput et du cou.
La femelle, pour qui on met en jeu de si brillants atours,
OISEAUX A ACCLIMATER. 21
est, elle, au contraire, pauvrement vêtue. Le brun, le noir, le
roux, le gris, çà et là quelques taches blanchâtres, sont les
teintes modestes de son costume. Elle n'a point de rabat sur la
gorge, d'éperons aux tarses, point de huppe ni de cornes sur
la tête.
Le jeune mâle lui ressemble. Il fait une sorte de noviciat
sous un habit dont l'humilité ne fait guère prévoir les
splendeurs de celui qu'il est destiné à porter plus tard. C'est
seulement à la troisième année que sa livrée est complète.
Dans le cours de la deuxième année, son plumage prend bien
des teintes rouges sur le cou et la poitrine; en même temps
apparaissent sur les plumes du dos et de l'abdomen des taches
d'un gris bleuâtre, mais il est loin encore de posséder toute
la perfection de sa parure.
Ce bel oiseau, selon le père David, habite le sud-ouest de
la Chine, jusqu'au Chensi méridional inclusivement, mais
n'est nulle part très répandu. Il vit sur les montagnes boisées
et se tient dans les taillis, où il se nourrit de graines, de fruits
et de feuilles. Son cri, très sonore, peut être rendu par les
syllabes « oua » deux fois répétées; c'est de là que lui vient
son nom chinois de « Oua-Oua-Ky ». On l'appelle encore « Ko-
Ky, Kiao-Ky », « Poule à cornes », à cause des appendices
colorés qui décorent sa tête, et « Sin-tseou-Ky », « Poule
étoilée », à cause des taches dont est marqué son plumnge.
C'est un gibier très estimé en Chine, d'autant plus qu'il est
rare et ne peut être capturé qu'au piège ou au collet. Les
Chinois le représentent fréquemment dans leurs peintures sur
papier de riz et pendant longtemps on l'a considéré comme
le fruit de l'imagination fantaisiste de leurs artistes.
On peut dire que le Tragopan de Temminck a pris une place
délinitive dans nos faisanderies. Depuis que M. John Reeves (1)
l'a introduit en Angleterre, un grand nombre de reproduc-
tions ont été signalées.
Selon l'opinion d'un éleveur, dont les succès témoignent de
l'expérience et de Thabileté, « ces oiseaux sont d'une rusticité
(1) Toutefois c'est au concours actif de M. Dabry que l'on doit le premier
Tragopan de Temminck arrivé vivant en Europe.
22 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
remarquable et leur élevage n'est pas sensiblement plus dif-
ficile que celui des Poulets. Les larves de fourmis leur parais-
sent moins nécessaires qu'une verdure variée, herbe tendre
principalement (i). »
« Je ne saurais trop dire, ajoute ailleurs le même éleveur,
quelle bonne couveuse et quelle excellente mère est la Poule
Temminck. Elle se familiarise rapidement et est aussi facile
que la meilleure des nourrices. Elle fait ses pontes dans des
nids en élévalion; les petits qui naissent avec les plumes de
l'aile volent à terre sans accident, trente-six ou quarante-huit
heures après l'éclosion. Chaque soir ils remontent au nid sur
les invitations de la mère, qui les y abrite pendant presque
deux mois et plus tard les garde près d'elle sur le per-
choir (2). »
La grande douceur de caractère dont ces oiseaux font
preuve à l'égard de l'homme, pai'aît bien constatée. Un autre
éleveur dit en effet : « Une des particularités des Trngopans
de Temminck et Satyres est Texlrême familiarité de ces
oiseaux : ils viennent littéralement manger dans la main et
accourent du bout de leurs volières dès qu'ils me voient
«ntrer (3). »
A ces mœurs sociables vient s'ajouter la possibilité de
croiser les espèces entre elles; ainsi on a obtenu fréquem-
ment des hybrides du Tragopan de Temminck et du Tragopan
Satyre.
Ces intéressants oiseaux se présentent, on le voit, dans
d'excellentes conditions pour être promplement et sûrement
soumis à l'homme.
(1) A. Delaurier aîné, Lettre adressée à M. le directeur du Jardin zoologique
d'Acclimatation (Bulletin de la Soc. d'Ace, de France, 1877, p. 395).
(2) Éducations d'oiseaux exotiques faites à Angoulême en 1878 et 1879
Bulletin de la Soc. d'Ace, de France, 1880, p. 88).
(3) Andelle, Élevage d'oiseaux exotiques (Bulletin de la Soc. d'Ace, de France,
novembre 1878).
OISEAUX A ACCLIMATER. 23
TiiAGOPAN DE Cabot (Ceriornis Caboti Goiild).
€eriornis Caboti, Gould, Proc. Zool- Soc. (1857), p. Ul.— Birds of Asia (1858),
livr. X, pi. — Swinhoë, Ihin (1865), p. 350. — Elliot, Monogr. of Phas. (1 71),
livr. IV, pi. — David et Ouslalet, Ois. de la Chine (1877;, p 419.
Gould déciivit le premier celle espèce d'après un spécimen
de provenance incerlaine apparlenanl au docteur Cabot, de
Boston. Plus lard, en 1865, pendant un séjour à Hong-Kong,
M. Swinhoë s'en procura un autre individu dont il donna une
description dans Vlbis, mais sans pouvoir indiquer sa véri-
table patrie. Nous savons maintenant que cet oiseau est propre
aux montagnes boisées du sud-est de la Chine, où il remplace
l'espèce précédente. En 1873, le P. David le trouva en assez
grand nombre dans la chaîne qui sépare le Fokien du Kiangsi,
et envoya son signalement au Muséum d'histoire naturelle de
Paris sous le nom provisoire de Ceriornis modestus à cause
des couleurs relativement peu éclatantes de son plumage.
Si l'on compare le ïragopan de Cabot à ses congénères
Temminck et Satyre, sa livrée paraît, en effet, modeste,
bien qu'elle offre, dans certaines parties, une assez grande va-
riété de tons. Le dessous du corps est d'un jaune d'ocre uni-
forme, avec quelques taches rousses et noires sur les flancs et
les cuisses. Une couleur noire tachée de blanc, de jaunâtre,
de gris et de roux règne sur les parties supérieures. Ces
teintes un peu sombres sont relevées par la coloration rouge-
garance de la peau nue du tour des yeux et du milieu du ra-
bat. Ce dernier est entouré d'une bande d'un rose pâle, avec
des raies et un liséré d'un bleu pâle. Les cornes sont d'un
bleu de cobalt. Au-dessous de l'oreille, de chaque côté,. une
tache d'un roux vif tirant au rouge, tranche sur un noir pro-
fond.
La femelle, plus petite que le mâle, est, comme dans l'es-
pèce précédente, variée de noir, de roux et de gris.
Le jeune mâle revêt la livrée de l'adulte dès la fin de l'au-
tomne de la première année.
Mœurs du Tragopan de Temminck. Chair excellente.
24 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACGLIMATATION.
LopiioPiiORE DE Levys (Lophophorus Lhuysii) .
Lopliophorus Lliuysii, J. Verreaiix et A. Geoffroy Saint-Hilairc, Bull. Soc. Ace.
(1866), p. 223. — J. Verreaux, ihid. (1867), p. 706. — Sclater, Proc. ZooL
Soc. (1868), p. 1, pi. 1. — Ibis (1870), 297. — A. David, Nouv. Air.h. du
Muséum, Bull, VII. — Swinhoe, Proc. Zool. Soc. (1871). — Gould, Birds of
i4sw (1873), livr. XXV, pi. — David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877),
p. 403.
Dans la séance du 20 avril i8G6, M. Alberl Geoffroy Saint-
Hilaire, annonçant à la Société d'Acclimatation l'arrivage
d'oiseaux qui avaient été adressés à notre Jardin zoologique
par M. Dabry, appela l'attention de la Société sur une espèce
nouvelle de Lophophore dont on trouva la dépouille à côté de
celles de l'Itagine dans la caisse d'animaux en peaux que notre
consul à Hankow envoyait à un ami. M. Geoffroy proposa de
Tèle de Lopliophore de Lliuys (Lopliophorus Lhuijsii J. Verreaux).
dédier ce bel oiseau, qui se rapproche extrêmement de son
congénère plus anciennement décrit, à M. Drouyn de Lhuys ,
président de la Société d'Acclimatation, et de le désigner sous
le nom de Lophophore de Lhuys (Lopliophorus Lhiujsii).
En 1867, M. Jules Verreaux donna une description détail-
lée de ce Lophophore, insérée dans le Bulletin, et adopta la
dénomination que M. Albert Geoffroy Saint Hilaire, le pre-
mier, lui avait appliquée.
OISEAUX A ACCLIMATER. 25
La taille de cet oiseau est supérieure à celle du Lophophore
ordinaire. Son bec est plus long et plus fort, ses pattes plus
vigoureuses. Il n'a pas de huppe proprement dite comme son
congénère de l'Himalaya ; mais la tête est ornée en arrière
d'une touffe de longues plumes occipitales, d'une teinte pour-
pre à reflets métalliques. Les plumes de la nuque et du dos
ont un ton de cuivre doré très brillant. Le vert à reflets et le
bleu métallique dominent sur les ailes ainsi que sur la queue.
Les parties inférieures du corps sont noires, glacées de vert.
Les mâles ne revêtent cette livrée splendide que dans leur
deuxième année ; avant cette époque ils ressemblent à la fe-
melle. Celle-ci a le plumage brun, presque semblable à celui
de la femelle du Lophophore resplendissant, mais d'une
nuance beaucoup plus foncée.
D'après le P. David, ce magnifique oiseau habite les régions
les plus élevées de Moupin, du Kokonoor oriental et les fron-
tières occidentales du Setchuan. Il vit en petites troupes dans
les prairies découvertes au-dessus de la région des forêts, et
vient se percher sur les arbres pour dormir. Sa nourriture
habituelle consiste en substances végétales et surtout en ra-
cines succulentes qu'il arrache adroitement au moyen de son
bec robuste et évasé ; comme il recherche particulièrement
celles d'un Fr ilillari a i^une appelé Pae-mou, les indigènes
lui ont donné le nom de Pae-mou-ky. Dans ce pays on nomme
aussi Ho-lhau-ky « Poule charbon ardent », le mâle adulte,
revêtu de sa livrée métallique.
C'est un oiseau très farouche et dont le vol est assez puis-
sant. Son cri, qu'il faut entendre de très grand matin et lors-
que le temps est à la pluie, consiste en trois ou quatre notes
pei'çantes et bien détachées.
Son aire de dispersion s'étend dans une grande partie du
Thibet oriental ; mais il est rare partout et il est à craindre
qu'il ne tarde pas à disparaître cçmplètement. Les Chinois,
en effet, chassent très activement et prennent au moyen de
collets ce superbe Gallinacé, dont la chair est très délicate.
Les spécimens que le P. David a envoyés au Muséum d'his-
toire naturelle ont été tués à 4-500 mètres d'altitude.
26
SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Tétraphase sombre {Tetraophasis obscurus Elliot).
Lopliopliorus obscurus, J. Verreaux, Nouv. Arch. du Mus., Bull. (1869). —
Tetraophasis obscurus, Elliot, Mon. of Phas., t. 1, pi. — A. David, Nouv.
Arch.du Mus., Bull. (1871), p. 11. — Swinhoë, Proc. Zool. Soc. (1871), p.
3;i9. — Gould, Bmii of Asia (1874), liv. XXVI, pi. — David et Oustalet,
Ois. de la Chine (1874), p. iOi.
Cet oiseau fut découvert par le père Armand David pen-
dant son voyap^e au Thibet. Il adressa, au Muséum d'histoire
Tétraphase sombre {Tetraophasis obscurus '^Wmi).
naturelle de Paris, cinq individus de sexes et d'âges diffé-
rents qui furent examinés avec soin par M. J. Verreaux et
déterminèrent cet ornithologiste à ranger cette nouvelle
espèce parmi les Lophophores. Plus tard M. Elliot créa pour
elle, avec raison, un genre particulier.
Le Tétraphase sombre paraît être assez répandu dans les
montagnes du Kokonoor oriental, où il vit en petites compa-
gnies dans l'intéiieur des forêts, se nourrissant comme les
OISEAUX A ACCLIMATER. 27
Crossoptiles et les Lophophores de racines succulentes qu'il
arrache avec son bec robuste. Les chasseurs du pays le dési-
gnent sous le nom de Yancj-ko-hij, « Poule des royaumes
d'Occident ».
Celte espèce, à première vue et par les teintes de son
costume, rappelle beaucoup l'aspect des Tétraogales. Le plu-
mage est, dans son ensemble, d'un brun-olive, passant sur
certaines parties du corps au gris cendré ; mais l'accident le
plus remarquable de cette livrée, en somme assez modeste
pour un Phasianide, est un grand rabat d'un brun marron
qui s'étend sur la gorge.
La femelle, plus petite que le mâle, ne porte pas d'éperons
et les flancs n'offrent pas de ces taches rousses que l'on
observe chez le mâle.
Ithagine de Geoffroy {Ithaginis Geoffroy i J. Verreaux),
Ilhagiiiis Geoffroy!, J. Verreaux, Bull, de la Soc. dWcc. (1867), p. 706. —
Elliot, Mon. of Phas. (1871), t. Il, pi. — Gould, Birds of ksïa, (1872),
liv. XXIV, pi. — David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877), p. 401.
L'envoi que fit en 1866 M. Dabry comprenait, comme nous
l'avons dit, outre des espèces vivantes adressées au Jardin
zoologique du Bois de Boulogne, une collection de peaux
d'oiseaux destinées par l'expéditeur à un de ses amis qui
s'empressa de les mettre sous les yeux de la Société d'Accli-
matation. Parmi les dépouilles qui composaient cette inté-
ressante et précieuse collection se trouvaient cinq exemplai-
res d'une espèce d'Ithagine nouvelle, quatre mâles et une
femelle. Elle fut décrite par M. Jules Verreaux dans le Bulle-
tin de la Société et dédiée par lui à M, Albert Geoffroy Saint-
Hilaire. « Nous sommes heureux, dit à cette occasion M. J.
Verreaux, d'imposer à ce bel oiseau, le second d'un genre
resté si longtemps avec un seul représentant, le nom illustre
de Geoffroy, comme un témoignage de notre estime et de
notre amitié pour M. Albert Geoffroy Saint-IIilaire. »
Cet oiseau a la face noire. Dans tout le reste du plumage
le gris ardoisé domine, relevé par des raies noires et blan-
28 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
ches au centre des plumes. Sur les côtés de la poitrine, l'ab-
domen et les sous-caudales règne une belle couleur d'un
rouge-carmin atténuée par une teinte grise à l'extrémité de
chaque plume. Les pattes et les éperons sont d'un rouge de
corail. Le bec est noir avec la base rouge, de même que les
narines et la peau nue qui entoure les yeux. Des plumes
déliées d'un gris ardoisé foncé forment une sorle de huppe.
Ithagine de Geoffroy {Ilhaginis GeolJroiji J. Verreaux).
La femelle plus petite que le maie et dépourvue d'éperons
aie rouge des pattes et des narines moins vif et tout le plu-
mage brun vermiculé de noir et de gris avec une teinte
ardoisée.
« Je n'ai rencontré l'Ithagine de Geoffroy, dit le père
David, que dans les forêts les plus élevées du Setchuan occi-
dental et du pays des Mantzes; mais cette espèce paraît habiter
une grande partie du Thibet oriental. Elle vit en troupes
plus ou moins nombreuses près de la limite supérieure de la
OISEAUX A ACCLIMATER. 29
région des forêts, et se tient de préférence au milieu des
banibouseraies sauvages. Sa nourriture ordinaire consiste en
bourgeons, en feuilles et en graines ; mais l'estomac de trois
individus que j'ai tués en avril, quand la neige couvrait en-
core tout le pays, ne renfermait que de la mousse. Ces jolis
oiseaux se perchent volontiers sur les arbres : leur naturel
est très sociable, et, quand les couvées sont écloses, on voit
fréquemment plusieurs couples se réunir pour veiller en-
semble sur leur jeune famille. Les Chinois désignent cette
Ithagine sous le nom de « Tsong-ky, Poule des buissons. »
Ithagine de la Chine {Ithaginis sinensis David).
Ilhaginis sinensis, A. David, Ann. Se. nat. (1873), 5» série, t. XVIII, art. n° 5.
— (1874), ibicL, t. XIX, art. n° 9.
Cette espèce nouvelle d'Ithagine, la troisième du genre, a
été découverte par le père Armand David. Elle habite les
plus hautes montagnes du Chensi méridional. On la trouve
dans le centre du Tsinling en compagnies assez nombreu-
ses, au milieu des bois et des bambouseraies, à une hauteur
de 3500 mètres. Ces oiseaux, qui se rencontrent dans toute
cette région, jusqu'au Honan, sans être nulle part très répan-
dus, ont, du reste, absolument les mêmes mœurs que ceux
de l'espèce précédente.
Les indigènes les désignent sous les noms de Hoa-Ky,
« Poule tleurie » et Song-hoa-ky, a. Poule fleurie des sapins. »
Le plumage de celte espèce rappelle beaucoup celui de
rilhagine de Geoffroy; mais il en diffère principalement par
une grande plaque d'un jaune d'ocre sale sur le devant du
cou et par la couleur rousse de la moitié des ailes qui dans
rithagine de Geoft'roy est verte. D'autres différences reposant
sur des caractères moins apparents servent encore à distin-
guer les deux espèces.
{A suivre.)
II. TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ
NOTES
POUR SERVIR A
L'HISTOIRE DES AQUARIUMS
Par M. H. BOUT.
?^n1876, kl Chambre des députés décida, sur la proposi-
tion de M. de Tillancourt et de plusieurs de ses collègues, que
l'on pourrait désormais introduire l'élude de la pisciculture
dans le programme d'enseignement des fermes-écoles.
On comprenait enfin que, si la pisciculture, qui prospérait
dans tous les autres pays de l'Europe et jusque dans les par-
ties les plus reculées du monde, avait toujours trouvé si peu
de faveur en France, cela tenait à l'ignorance des moyens et
des ressources de cette science, ignorance où le public se
complaisait, malgré les efforts persévérants et les travaux
remarquables des savants.
Les esprits n'étant pas tournés dès la première jeunesse,
par une étude sérieuse, vers ces connaissances spéciales, ne
pouvaient s'astreindre plus tard à porter un regard attentif
sur des démonstrations auxquelles il était plus simple de ne
pas ajouter foi. On écoutait un instant d'une oreille distraite
et puis l'on n'y pensait plus. On ne se disait pas que cette in-
différence, fort bien portée, était coupable envers l'intérêt
général, envers la prospérité de la patrie. On ne voulait pas
songer aux résultats désastreux de ce parti pris d'incrédulité.
M. de Tillancourt et ses collègues, dans leur exposé des mo-
tifs, en révélaient les conséquences lorsqu'ils disaient :
« L'Angleterre, depuis qu'elle a développé la pisciculture,
trouve annuellement dans ses eaux douces pour plus de
200 millions de francs de poissons. Nous n'obtenons pas la
centième partie de ce produit de nos deux cents rivières. »
La conclusion était facile à tirer. Il fallait vaincre la force
HISTOIRE DES AQUARIUMS. 31
d'inertie puisée dans l'ignorance. La Chambre crut y arriver
en édictant la mesure rapportée plus haut.
Mais, si l'on réservait aux seules fermes-écoles l'enseigne-
ment des connaissances que l'on voulait propager, on ne
s'adressait encore qu'cà un nombre d'hommes des plus res-
treints, qui d'ailleurs pouvaient toujours se soustraire à cet
enseignement, puisqu'il ne devait être que facultatif.
Nous écrivions à cet égard, en 1879, dans une analyse ra-
pide des étapes et des procédés de la pisciculture, les lignes
suivantes : « Il serait à désirer que l'étude de cette science
entrât dans les programmes universitaires et que les nom-
breux problèmes scientifiques, industriels et économiques
que soulève cette question complexe de la culture des eaux,
fussent exposés aux jeunes gens des écoles par des professeurs
éminents. » Il serait à désirer aussi, ajouterons-nous, que les
grades, qui sont la consécration des études, ne puissent plus
être conférés sans que les candidats aient prouvé qu'ils ont
retenu les leçons à eux faites sur ces matières.
Nous pensions, nous pensons toujours, qu'un jeune homme
qui sortirait d'un lycée, n'ignorant plus ce que c'est qu'un
poisson, connaissant l'industrie, les besoins, les maladies,
les mœurs, nous dirions presque les passions de l'étrange
population des eaux, n'affecterait plus la même indifférence
ni le même scepticisme, et serait capable de rendre, à un mo-
ment donné, de grands services à la science qui nous occupe
et à ses semblables.
Qu'on nous permette de revenir aujourd'hui sur ce sujet
et de dire qu'au point de vue de ce complément d'instruction
pratique que nous croyons devoir préconiser avec ardeur, il
nous semble qu'on pourrait attendre de grands avantages de
ces établissements si curieux, qui se sont élevés un peu par-
tout depuis un certain nombre d'années et que l'on désigne
sous le nom d'aquariums.
L'aquarium, que le savant anglais Warington a, non sans
à-propos, défini en disant que c'est une « organisation qui se
suffit à elle-même », est un appareil où des animaux et des
végétaux aquatiques sont entretenus dans des conditions se
32 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
rapprochant le plus possible de celles que ces animaux et ces
véo"étaux trouvent dans la nature. En d'autres termes, l'aqua-
rium est le résumé du monde liquide, c'est le panorama, c'est
le musée vivant des eaux, et c'est devant ce musée, devant ce
panorama que, pour être fructueuses, doivent être faites et
écoutées les leçons d'ichtyologie et de botanique aquatique.
Or, si l'on s'inspirait de notre désir, chacune de nos grandes
villes serait bientôt dotée d'un établissement de ce genre, qui
serait ouvert tous les jours de l'année et dont l'entrée serait
gratuite. Bientôt enfin chaque Faculté, chaque lycée posséde-
rait son aquarium particulier, lequel, du reste, bien que
spécialement réservé à l'instruction des jeunes gens, pour-
rait, à défaut d'autres, être, à de certains jours, livré au pu-
blic et servir à des conférences accessibles à tout le monde.
Et qu'on ne nous objecte pas les sacrifices pécuniaires à
faire, car ce serait une grande erreur de croire qu'il est né-
cessaire de dépenser des sommes considérables pour avoir un
appareil remplissant toutes les conditions requises pour ser-
vir à des études sérieuses.
D'après M. Lloyd, fhomme qui a construit presque tous
les grands aquariums d'Angleterre après avoir débuté par ce-
lui de notre Jardin d'Acclimatation, et dont la compétence en
la matière n'est pas récusable, on peut construire un bon
aquarium sans dépenser plus de 200 livres sterling, soit
5000 francs.
Il n'est pas question, comme on le voit, de constructions
dispendieuses engloutissant quelquefois des centaines de
mille francs sans donner les résultats attendus, et il n'est
pas autrement utile, en effet, si l'on a seulement en vue
l'étude pour laquelle le luxe et le plaisir des yeux ne sont pas
indispensables, d'élever des édifices immenses d'un entretien
coûteux et dans lesquels, s'ils ne sont pas absolument par-
faits, les observations consciencieuses sont souvent difficiles.
Sans avoir la prétention d'écrire un traité complet des
aquariums, ce qui pourra tenter des plumes plus autorisées
que la nôtre, nous pensons qu'il ne sera pas sans intérêt, au
point de vue de la vulgarisation de ces appareils, de faire un
HISTOIRE DES AQUARIUMS. 33
exposé rapide des principes scientifiques sur lesquels repose
leur construction.
De même que le vivier primitif fut un simple panier en
osier, de même l'aquarium a commencé par être un simple
flacon de verre, et il n'y a pas de longues années qu'il était
encore à l'état rudimentaire.
En Europe, la première mention qui soit faite d'un aqua-
rium se trouve dans un ouvrage allemand sur le microscope,
par Ledermuller, paru en 1760-61-62. On y voit la descrip-
tion d'un bassin contenant des plantes et des animaux. Des
bulles d'oxygène paraissent s'exhaler des plantes sous l'in-
fluence de la lumière, et les animaux semblent se trouver
dans un état de parfaite santé. Un siècle plus tôt, il était déjà
de mode d'avoir chez soi des Anémones de mer, ainsi qu'on
peut le voir dans les ouvrages de Tremblay et de Baker; toute-
fois, on ne connaissait en aucune façon, alors comme plus
tard même, l'utilité de l'emploi des plantes pour l'aération
de l'eau, et, si l'on en mettait dans le réservoir, c'était uni-
quement pour l'ornementation. En 1790, sir John Graham
Dalyell commençait à collectionner quelques poissons de mer
dans le but de les étudier, et continuait ses études dans sa
propriété d'Edimbourg jusqu'à sa mort, survenue en 1850.
Mais il changeait l'eau deux ou trois fois par semaine et ne
connut jamais l'usage des plantes.
On ne peut pas considérer ces quelques tentatives isolées
comme le véritable point de départ des aquariums, puisqu'on
n'en avait pas encore découvert et appliqué rationnellement
les données scientifiques.
D'après M. Gosse, l'honneur de la première application à
l'aquarium, du principe de l'absorption de l'acide carbo-
nique par les plantes et de la restitution de l'oxygène par ces
mêmes plantes, revient à M. Warington, qui, en mars 1850,
fit part à la Société de chimie de Londres du résultat de ses
premières expériences.
Mais ceci n'est point exact, et c'est un de nos nationaux
qui, le premier, a dégagé et fait connaître l'un des plus im-
portants principes de la science des aquariums.
4' SÉRIE, T. m. — Janvier 1886. 3
34 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
En effet, dès 1830, M. Charles des Moulins (de Bordeaux)
proposa de mettre dans les vases, où l'on voulait conserver
vivants des poissons d'eau douce, des plantes aquatiques
flottantes ou submergées, de manière que ces végétaux s'as-
similassent le carbone en décomposant l'acide carbonique
que produit la respiration des animaux et en dégageant l'oxy-
gène dont ces derniers ont besoin pour leur existence.
Quelques années après, le professeur Dujardin pensa à ap-
pliquer à l'eau de mer les conseils donnés par M. des Moulins
pour l'eau douce. Le succès répondit à ses tentatives, et, pour
la première fois en 1838, il rapporta, dans de légers flacons,
des poissons de mer vivants.
L'aquarium, dans le sens exact du mot, était enfin définiti-
vement inventé,
A la même époque, en 1837, M. Ward installa à Londres
un aquarium d'eau douce, où les animaux vivaient et étaient
conservés en bonne santé grâce à l'emploi des planles. En
1842, le docteur George Johnston (de Berwick upon Tweed)
établit une sorte d'aquarium minuscule consistant en 6 onces
d'eau de mer contenue dans un petit bocal, et dans lequel il
plaça des plantes et des poissons. L'eau ne fut pas changée
durant un espace de huit semaines, sans qu'il en résultât au-
cun dommage pour les habitants. En 1847, M"' Thynne, qui
n'avait point entendu parler des essais que nous venons de
rapporter, voulut conserver des poissons de mer à Londres.
Les difficultés qu'elle éprouva à se procurer une eau toujours
nouvelle et les observations qu'elle avait faites, la portèrent
à introduire, dans le but bien défini de donner aux poissons
ce qui leur manquait, c'est-à-dire l'oxygène, des plantes dans
ses réservoirs. C'est alors seulement que M. Robert de Wa-
ringlon commença, avec la même intention et le même succès
que M"" Thynne, ses expériences sur les animaux d'eau douce.
Au commencement de l'année 1852, il les renouvelait sur les
poissons de mer et les plantes sous-marines. Vers le même
temps aussi, M. Gosse commençait à Londres des expériences
identiques. Il publiait en 1854, sous le titre V Aquarium ou
les Merveilles de la mer dévoilées, un ouvrage qui obtint en
HISTOIRE DES AQUARIUMS. 35
Angleterre un succès de popularité sans précédent, et qui fut
la cause première de cet engouement pour les choses de la
mer, qui s'étendit pendant un moment à tous les habitants
du Royaume-Uni.
Cet ouvrage avait pour objet de signaler les services que
rendait tous les jours à la science l'établissement de Regent's
Park.
Après avoir lu le livre de M. Gosse, tout le monde voulut
posséder un aquarium pour vérifier ses assertions et répéter
ses expériences.
A en juger par la date récente de l'origine scientifique de
l'aquarium et par la simphcité de son point de départ, l'essor
pris depuis par cet appareil est vraiment incroyable ! Quelle
figure feraient les modestes flacons de verre de Dujardin près
des constructions grandioses que nous avons vues s'élever un
peu partout depuis vingt-cinq ans? Et ce n'est pas seulement
par le développement des dimensions de ces édifices, que le
progrès est remarquable, c'est encore par le perfectionnement
des moyens d'alimentation et de purification de l'eau.
Au point où nous en sommes, l'aération s'obtient unique-
ment par les plantes. Nous allons voir ce moyen devenir in-
suffisant dès que les proportions de l'établissement seront un
peu considérables, et nous allons nous trouver en présence
de deux grands systèmes de construction, consistant : le pre-
mier dans l'alimentation de l'aquarium par une eau toujours
renouvelée, le second, dans l'introduction, une fois pour tou-
tes, de la quantité de liquide suffisante et dans le maintien, à
l'aide de procédés mécaniques, de l'équilibre nécessaire à la
vie des animaux. Le second de ces deux systèmes, inauguré à
Paris et préconisé par M. Lloyd, est certainement appelé à
être un jour exclusivement employé.
Le but unique que l'on doit se proposer étant, comme nous
venons de le dire, de maintenir l'eau qui alimente les bassins
dans les conditions indispensables à la vie aquatique, les pre-
miers constructeurs d'aquariums se sont tenu naturellement
1(3 raisonnement suivant: « Mettons notre établissement en
communication directe avec la mer ou avec un cours d'eau,
36 SOCIÉTÉ NATIONALE d'AGCLIMATATION.
de manière à alimenter les lacs d'une eau courante se renou-
velant sans cesse. Comme cette eau sera prise sur les lieux
mêmes où vivent les poissons que nous voulons conserver en
captivité, elle se trouvera dans les conditions biologiques les
meilleures, puisqu'elle sera une partie du grand tout. »
Ils étaient dans l'erreur. Les aquariums établis d'après ce
principe, ont toujours été imparfaits et d'un entretien fort
coûteux. La mortalité y a été très grande et la vue a constam-
ment été gênée par l'opacité du milieu.
Cela se comprend: l'appel d'une masse d'eau assez consi-
dérable pour alimenter des réservoirs et des bassins de di-
mensions importantes ne peut se faire sans que les fonds
soient énergiquement remués. L'eau arrive donc dans les bacs
chargée de détritus végétaux, animaux et calcaires de toute
espèce, qui ont pour résultat de rendre cette eau impropre à
la vie des poissons et, le plus souvent, trouble à n'y pouvoir
distinguer aucune forme, à n'y saisir aucun détail.
Dans la mer, dans un fleuve, si telle région ne convient
pas à un animal, il peut émigrer, changer de lieu. Dans l'a-
quarium, c'est-à-dire dans un milieu des plus restreints, le
poisson est dans l'impossibilité de fuir et, pour peu que vous
lui donniez un habitat chargé à une dose quelconque d'élé-
ments délétères, vous l'empoisonnez sans rémission dans un
délai plus ou moins court.
Or, pour alimenter un aquarium d'eau de mer, vous ne
pouvez, quoi que vous fassiez, que prendre cette eau au bord
du rivage, c'est-à-dire dans la zone où elle est contaminée par
les déjections des villes. De même pour l'eau douce. On peut
avoir choisi la source avec le plus grand soin; cette source
peut être ordinairement absolument pure. Il suffira, si c'est
à un fleuve ou aune rivière que l'eau est puisée, d'un excès de
matières en décomposition ou de produits chimiques amenés
tout à coup par le courant pour tuer toute la population. Si
l'eau provient d'une source souterraine, elle pourra être sur-
chargée de calcaires ou de sels métalliques, suivant les ter-
rains à travers lesquels elle passera. Le résultat sera encore
mortel pour le poisson. Conclusions : dépenses considérables
HISTOIRE DES AQUARIUMS. 37
et imprévues de renouvellement, sans compter les murmures
du public qui ne voit que peu ou point.
Ce qui fait surtout le prix d'un aquarium situé aux environs
de la mer, ce n'est pas que l'eau nécessaire à son alimenta,
tion puisse être facilement renouvelée, c'est simplement que
la première eau, celle qui doit être la seule employée, peut
s'acquérir à bon marché. Il en est de même des animaux à
introduire.
Les essais n'ont du reste pas tardé à faire ressortir les in-
convénients qu'offrait le mode de construction basé sur le re-
nouvellement de l'eau et, bien que ce dernier ait encore
aujourd'hui des partisans convaincus, il est généralement
condamné par les gens véritablement compétents.
Ce système étant reconnu défectueux, on s'est demandé par
quels moyens plus parfaits on pourrait le remplacer. On a ob-
servé alors ce qui se passait dans la nature. On a vu que la
masse des eaux était toujours la même depuis le commence-
ment des siècles ; que celles-ci étaient toujours propres à la
vie des myriades d'organismes qui les peuplent et qu'il n'y
avait pas d'apparence qu'elles cessassent de l'être jamais. On
a vu en outre que le mouvement continuel des particules
dont la réunion formait les eaux constituait une puissance
mécanique de malaxement, d'épuration et d'absorption de
l'oxygène à nulle autre comparable. On en a conclu avec rai-
son que, si l'on parvenait, par un procédé quelconque, analo-
gue à ceux que la nature emploie, à maintenir une masse d'eau
dans les conditions exigées pour le maintien de la vie, une
telle eau n'aurait jamais besoin d'être changée.
Le problème posé, la solution n'en était pas éloignée. On
se dit que, puisque le mouvement était dans la nature le
moyen le plus puissant d'oxygénation et de purification, il
fallait imprimer à la masse d'eau remplissant les bassins un
mouvement factice et continuel, qui aurait pour effet d'ame-
ner successivement toutes les molécules liquides au contact
de l'air, et de permettre à l'oxygène d'en brûler toutes les
impuretés, en même temps que de s'y dissoudre en quantité
suffisante pour les besoins des animaux.
38 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
On reconnut de même qu'on pouvait rendre l'action consi-
dérablement plus puissante encore en lançant à travers la
masse, et de haut en bas, des jets d'air doués d'une grande
force et divisés au point de ressembler à une fine poussière,
mais non pas, comme on l'a fait en certains endroits, de bas
en haut et en grosses bulles.
M. Lloyd, dans un opuscule intitulé Observations sur les
aquariums publics, relate une expérience des plus con-
cluantes et des plus curieuses qu'il a faite à ce sujet. Nous
lui laissons la parole.
« Dans l'annexe orientale de l'Exposition internationale te-
nue à Londres en 1862, je fis, sur une masse d'eau bourbeuse,
chargée de matières animales et végétales en pleine décompo-
sition, des expériences en vue de comparer la valeur respec-
tive de chacun des deux systèmes de purification préconisés.
» Je commençai par lancer dans un bac contenant
800 litres de cette eau, 200 litres d'air par minute, pendant
six heures par jour et pendant six jours consécutifs, d'après
le système d'aération par grosses bulles. Xu bout de ce
temps, alors que plus de 400000 litres d'air avaient été in-
jectés en exigeant une dépense de force de déplacement de
400000 litres d'eau sans grand effet, je réunis à ce bassin,
dont l'apparence était à peine modifiée, un second bac de la
même capacité rempli d'eau encore plus corrompue que la
première, absolument noire, puante et complètement empoi-
sonnée par la présence de l'hydrogène sulfuré et bicarburé.
Je mis alors toute la masse en mouvement et je dirigeai vers
la surface de l'eau, de manière qu'elle fût frappée avec force,
à une très petite distance et sous un angle léger, un jet d'air
très puissant, mais n'ayant pas plus d'un dixième de pouce
de diamètre.
» Ce courant, qui n'employait que 240 litres à l'heure ou
4 litres par minute, fut maintenu pendant 10 heures, à la fin
desquelles, après une dépense totale de force ne dépassant
pas 2400 litres d'eau à une pression de 50 livres par pouce
carré, toute mauvaise odeur avait disparu par l'oxygénation.
Le courant fut renouvelé deux fois et le troisième jour l'eau
HISTOIRE DES AQUARIUMS. 39'
était claire et limpide et pouvait recevoir des animaux. »
M. Lloyd ajoute : « Une bouteille avait été remplie de cette
eau avant sa clarification. Elle fui hermétiquement bouchée
et conservée ainsi. Elle est toujours dans le même état et
ressemble à de l'encre. Mais, bien qu'il y ait plus de quinze
ans de cela, elle pourrait encore aujourd'hui être purifiée et
rendue propre à la respiration des animaux. »
Dans de vastes aquariums qui contiennent une nombreuse
population dévorant une grande quantité de nourriture et re-
jetant une quantité d'excréments également considérable, on
ne pourrait donc utilement employer le système d'aération
par grosses bulles qu'à la condition d'augmenter le nombre
des orifices laissant- pénétrer l'air de telle sorte qu'il s'en
trouvât au moins un par mètre carré à la base des bassins.
Mais l'installation de larges courants d'air agissant sur des
espaces aussi rapprochés les uns des autres, serait d'abord
une chose à peu près impraticable et exigerait, en tous cas,
une dépense de force hors de proportion avec le résultat ob-
tenu. En outre, le passage incessant dans tous les points des
bassins de ces bulles d'air nuirait beaucoup à la vue et trou-
blerait continuellement le poisson.
Ainsi d'un côté, aération insuffisante, de l'autre, des in-
convénients aussi graves et une dépense énorme.
De plus, avec ce système, on ne peut éviter l'enlèvement
à la main des dépôts que forme l'accumulation des résidus de
la nourriture et des déjections des animaux. C'est un surcroît
de travail, de dépense et de gêne pour le poisson. Avec le
procédé contraire, aucun travail manuel n'est nécessaire
pour le nettoyage des fonds , tout disparaît par le mouvement
et le contact de l'air. 11 suffit de passer de temps en temps
une éponge emmanchée au bout d'une perche sur les glaces
pour les débarrasser de la matière verte (conferves) et encore
peut-on être aidé dans ce travail par les Lymnées, les Planor-
bes, les Buccins, les Haliotides, etc.
Un des plus grands perfectionnements apportés dans la
construction des aquariums, établis d'après le système de cir-
culation, consiste dans l'adjonction d'un réservoir placé à
40 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
une certaine profondeur sous terre, de manière qu'il reste
toujours à une température égale. L'eau, dans son mou-
vement circulatoire, passe du réservoir dans le premier bas-
sin; de celui-ci, dans tous les autres successivement, et, du
dernier, retourne dans le réservoir et ainsi de suite, en sorte
que sa température n'est que fort peu influencée par les va-
riations thermométriques. De plus, l'obscurité dans laquelle
l'eau passe alternativement a pour effet de ralentir la produc-
tion des conferves.
C'est M. ^Edward Demenay qui, selon M. Lloyd, a été le
premier à faire l'application de la chambre à eau obscure aux
aquariums. L'expérience a démontré qu'il fallait donner à ces
réservoirs une capacité égale à cinq fois celle de la totalité
des bacs.
L'attention s'était déjà portée, avec M. Gosse, sur un autre
point, qui était de savoir quelles proportions il fallait donner
aux dimensions respectives des bacs. On arriva bientôt à éta-
blir une règle à peu près fixe, et d'après laquelle la plupart
des aquariums sont construits aujourd'hui. Pour l'eau douce,
la hauteur du liquide ne doit jamais dépasser la largeur des
bassins; pour l'eau de mer, cette hauteur ne doit pas être su-
périeure à la moitié de la largeur.
Une autre question s'est posée ensuite. De ce que, dans un
aquarium de grandes dimensions, la puissance oxygénatrice
des plantes devient insuffisante, s'ensuit-il qu'elles soient inu-
tiles et qu'il faille les dédaigner? Loin de là. Leur action
vient en aide au mouvement pour la vivification de l'eau. De
plus, elles entrent pour une grande part dans l'alimentation
des animaux aquatiques. H y a donc lieu, avant d'introduire
le poisson, et une fois que l'eau se trouve dans les conditions
de limpidité requise, de répartir dans les bassins certaines
variétés de plantes que l'on prendra parmi celles qui sont les
plus vivaces et qui ont la puissance d'absorption la plus con-
sidérable. Parmi celles-ci, il faut citer, pour l'eau douce, les
Épis ou Potamots, les Volants d'eau, les Renoncules, les Va-
lisnéries, les Lustres d'eau, les Callithrix, les Morènes, les
Plantains, etc.
HISTOIRE DES AQUARIUMS. M
Parmi les plantes de mer, les meilleures sont les Ulves»
rUlve verte et VUlva latissima, et la Mousse chondrille.
Mais, si l'emploi des plantes est de toute nécessité, il n'est
pas bon toutefois de laisser la végétation croître avec excès.
Les plantes aquatiques meurent facilement et d'autant plus
facilement qu'elles se trouvent en plus grand nombre dans
un espace plus restreint; il en résulte tout d'abord une sur-
veillance continuelle, car il faut se garder de les laisser se
décomposer dans l'eau. En outre, l'accroissement excessif de
la végétation ne tarde pas à donner au liquide une teinte vert
opaque, qui rend l'examen des animaux peu facile. Enfin une
végétation trop touffue forme pour le poisson des abris où il
est très difficile de l'apercevoir et où il pourra mourir sans
que l'on s'en doute.
D'ailleurs on ne perd rien à être réservé dans l'emploi de
la verdure, car, sous l'influence de la lumière, la flore con-
fervoïde ne tarde pas à se produire et vient en aide aux
plantes dont on a orné les bassins, si bien que l'on est sou-
vent, ainsi que nous l'avons dit, obligé de la modérer.
On règle, du reste, facilement les progrès de la végétation,
queUe qu'elle soit, en disposant la lumière avec plus ou moins
d'économie.
Au point de vue du poisson, on doit savoir aussi qu'une
grande lumière, l'exposition aux rayons directs surtout, est
extrêmement dangereuse, sauf pour quelques espèces exo-
tiques, tels que le Gourami, l'Arc-en-ciel, etc. Trop de lu-
mière aveugle le poisson, attaque ses couleurs et devient
pour lui une cause de nombreuses maladies. L'excès contraire
n'est, du reste, pas moins préjudiciable. Une trop grande
obscurité amène bientôt le dépérissement de la population
et de la végétation, et ne tarde pas à faire de tous les bacs de
sombres cloaques, qui ne sont bientôt plus qu'un vaste cime-
tière où s'ébattent seuls les organismes du monde microsco-
pique.
En ce qui concerne l'aménagement intérieur des bassins
d'un aquarium, l'observation a encore conduit à imiter la
nature, et l'on a parsemé le fond et les parois de ces bassins
42 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
de cailloux, de pierres ou de roches, selon les dimensions,
en ménageant entre les blocs des anfractuosilés représen-
tant, à une échelle réduite, les crevasses et les grottes que
l'on trouve dans la mer. A l'exception des Pleuronectes qui
restent constamment appliqués sur le sable, les autres pois-
sons se trouvent fort bien de ces accidents de terrain qui leur
servent de lieux de repos et d'abris.
L'emploi de ces dispositions devint bientôt général et l'abus
ne tarda pas à se produire. Les rochers, en effet, sortirent de
l'eau. Ils gagnèrent les murs, les plafonds, le sol des aqua-
riums, et les transformèrent en grottes plus ou moins na-
ture , plus ou moins pittoresques. Cela ne manqua pas de
frapper l'imagination du public ignorant transporté ou à peu
près sur les bords de la mer, mais fit sourire les hommes
instruits qui voyaient donnera une chose sérieuse une tour-
nure enfantine et souvent grotesque. Ce nouveau genre fut
très goûté, bien que d'un goût douteux, et la plupart des
aquariums construits depuis cette époque, c'est-à-dire depuis
4866, le furent d'après ces principes d'un art peu sévère.
M. Lloyd s'élève contre ce travers. Il a raison. N'a-t-on en
vue qu'un objet d'amusement? Que l'on construise alors des
grottes, que l'on ménage des chutes, des cascades, des cata-
ractes même, rien de mieux. Ajoutez-y des chemins escarpés,
des pics, des précipices, des ponts branlants, tout ce que vous
pourrez imaginer. Mettez là dedans quelques poissons, les
premiers venus, des Ablettes et des Goujons, aussi bien que
des Carpes et des poissons rouges, et vous aurez tout ce que
vous voudrez, excepté un aquarium.
Si, au contraire, vous désirez avoir un instrument sérieux
d'étude et d'observation, écartez tout ce qui peut nuire à
votre but. Que l'ornementation soit d'un style sobre et élevé,
que la circulation soit facile, les dégagements commodes, les
couloirs larges et frais sans être froids. Dans ces conditions,
les visiteurs, qu'aucune préoccupation étrangère ne distraira,
verront avec fruit ce qu'ils viennent voir, c'est-à-dire le pois-
son chez lui.
Pour nous résumer, nous énoncerons les principales règles
HISTOIRE DES AQUARIUMS. 43
qui doivent présider à la construction et à l'entretien d'un
aquarium. Elles se réduisent, en somme, aux suivantes, qui,
bien appliquées, conduiront toujours à des résultats heu-
reux.
L'eau ne doit jamais être renouvelée. Il faut seulement
compenser la perte produite par Tévaporation. Le maintien
de l'équilibre doit être demandé exclusivement au mouve-
ment et à l'injection de l'oxygène.
L'usage des filtres doit être rendu inutile par une sage ap-
plication des deux moyens ci-dessus.
Il ne doit jamais y avoir dans les bassins une quantité de
déjections et de détritus telle qu'on ne puisse la faire dispa-
raître par une accélération de quelques heures du système
de circulation ; ce qui revient à dire que la surveillance de
l'appareil ne doit jamais être négligée, au point de permettre
une accumulation trop considérable de matières organiques
en décomposition. Les glaces seules doivent être nettoyées à
la main.
La capacité des réservoirs souterrains doit être au moins
de cinq fois celle de la capacité des bacs. Ils doivent être
construits à une profondeur telle que leur contenu ne puisse
jamais être influencé par les variations thermométriques.
On doit faire un emploi judicieux et plutôt modéré de la
végétation.
Enfin le choix de l'exposition doit être l'objet de beaucoup
de soin.
Que si l'on est dans une ville d'intérieur et que l'on veuille
avoir un aquarium marin, mais que l'on soit arrêté par le
prix du transport de l'eau de mer, des expériences nom-
breuses ont démontré qu'il est possible de faire vivre des
poissons dans une eau artificielle. C'est M. Gosse qui a signalé
ce fait curieux, et il a démontré en outre que les substances
chimiques trouvées dans l'eau de mer naturelle, telles que la
chaux, le fer, l'iode, la silice, finissent, au bout d'un certain
temps, par se trouver également dans l'eau artificielle, sans
qu'on les y ait introduites en aucune façon.
Nous nous arrêtons, espérant avoir non pas traité la ques-
44 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
tion comme elle mériterait de l'être, mais du moins indiqué
la voie, et démontré que, si l'on peut parfois encore rencon-
trer certaines difficultés dans la construction des aquariums,
ce ne sont plus que des difficultés d'exécution, les inconnues
théoriques étant aujourd'hui complètement dégagées.
Nous voudrions pouvoir nous flatter que l'avenir nous
amènera la réalisation de nos vœux, en multipliant de pré-
cieux instruments d'études, qui deviendront les vulgarisateurs
de la science des eaux ainsi que des sources de saines distrac-
tions pour les masses, au même titre que les musées et les
bibliothèques.
Si les quelques pages qui précèdent, tout incomplètes
qu'elles sont, pouvaient avoir une certaine influence sur la
solution d'un problème économique, qui de nos jours mérite
tant de sollicitude, nous nous estimerions trop récompensé
de les avoir écrites.
III. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ.
SÉANCE GÉNÉRALE DU 8 JANVIER 1886.
Présidence de M. Amédée Berthoule, Archiviste.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
iM. le Secrétaire procède au dépouillement de la correspondance.
M. le Ministre de la marine et des colonies adresse un exemplaire
du Catalogue des produits des colonies établi à l'occasion de l'Exposition
de 1878, ainsi qu'un Catalogue spécial des produits naturels des éta-
blissements français dans l'Inde. — Remerciements.
— Des demandes de cheptels sont adressées par MM. de la Brosse,
Chandèze, Le Guay, L. Mercier, Le Pelletier de Glatigny, l'abbé Daux,
La Peyre, E. Delloye, F. Galland, Marcel Cote, L. Dupuy, comte de Mont-
lezun, Dupouet, P. Martineau, Larrieu, capitaine Mengin, marquis de la
Rochejaquelein, John 0'Neill,Brelte, Audap, de Confévron, de Bouteyre,
Paul Gredy, A. Hiver, l'abbé Laborde, de Boussineau et Th. Beliemer.
— M. A. Touchard, des Aulxjouannais (Indre), rend compte de la
situation de son cheptel de Gervules, et demande des renseignements au
sujet du renvoi de ces animaux.
— M. Delaurier aîné annonce que les Colombes grivelées (Leucosar-
cia picata) qu'il a en cheptel ont pondu dans la saison dernière. Les
jeunes ont été élevés par des Colombes ordinaires et sont maintenant
(décembre 1885) aussi beaux que les parents. Il est à croire que ces
élèves reproduiront dès le printemps de 1886.
— M. Max von dem Borne-Berneuchen annonce l'envoi qu'il est chargé
de faire à la Société, de la part de la Société allemande de pisciculture,
de 50000 œufs embryonnés de Coregonus marœna, du lac Soldin.
— M. Raveret-Wattel signale, d'après un article publié par V Ottawa
Citizen, le développement donné à la pisciculture dans les possessions
anglaises du nord de l'Amérique. Le Canada, la Nouvelle-Ecosse et le
Nouveau - Brunswick comptent actuellement douze établissements de
pisciculture, dans lesquels ont été mis en incubation, pour la présente
campagne, 68 000000 d'oeufs de Saumon, de Truites et de Corégones de
différentes espèces.
— M. Berthéol prie la Société de vouloir bien mettre à sa disposition
des alevins de Biack-Bass, et demande, en outre, à prendre part aux
distributions d'oeufs ou d'alevins d'espèces exotiques qui pourraient être
faites. Notre collègue ajoute qu'il dispose, dans la vallée d'Yères, d'un
bras de fausse-rivière dans lequel il lui est facile de s'occuper de l'éle-
vage du poisson.
— M. Boby de la Chapelle, de Champloret, par Sainl-Servan (Ule-et-
Vilaine), adresse une demande d'alevins de Saumon de Californie.
— En remerciant de l'envoi qui lui est annoncé d'un lot d'œufs de
46 SOCIÉTÉ NATIONALE d'AGCLIMATATION.
Truite des lacs, M. Després, de Nanleuil-en-Vallée, fait connaître qu'il
compte adresser prochainement à la Société un rapport sur ses travaux
de pisciculture en 1885, et notamment sur les résultats qu'il a obtenus
dans l'élevage du Salmo fontinalis.
— M. le Président de la Société Linnéenne de nord de la France, à
Amiens, adresse une demande d'œufs de Salmonidés.
— M. le marquis de Scey de Brun fait parvenir de nouveaux renseigne-
ments sur le laboratoire de pisciculture qu'il a récemment installé à
Scey-en-Varais, près Ornans (Doubs), et dans lequel il peut mettre en
incubation 100 000 œufs de Truite. Notre collègue saisit cette occasion
pour prier la Société de vouloir bien le comprendre dans les distribu-
tions d'œufs de Salmonidés qu'il lui serait possible de faire.
— M. Mailles adresse la note suivante : « J'ai lu dans le Bulletin de
septembre dernier les lettres de MM. Laisnel de la Salle et Cornély. Je
crois devoir y répondre.
3» Tout d'abord, je tiens à remercier M. Laisnel de la Salle de l'impor-
tance qu'il attache à mes appréciations, relativement aux Bana mugiens.
ï Je déclare avec franchise que la communication de M. Laisnel de la
Salle m'a surpris. En effet, notre collègue ayant fait, au commencement
de l'année, une très amusante histoire de Grenouilles-Bœufs, je pensais
que, lorsqu'il traiterait à nouveau ce sujet, ce serait pour y apporter des
éléments nouveaux. Il n'en est rien. La question de savoir si ces batra-
ciens se sont reproduits ou non au Bois de Boulogne n'a pas fait un pas
en avant. Bien au contraire, d'après des renseignements que je liens de
M. Laisnel de la Salle, et qu'il a oublié, ce qui est très regrettable, de
mentionner dans sa lettre, la susdite question a fait un pas en arrière.
— Je m'explique.
» J'ai eu l'honneur de visiter le charmant petit jardin que notre col-
lègue possède à Neuilly, et oîi ont vécu les fameuses Grenouilles qui
sont la cause, involontaire, j'en suis convaincu, des discussions et des
chocs d'où jaillit l'obscurité.
» Donc M. Laisnel de la Salle, après m'avoir raconté tout ce que nos
collègues connaissent, m'avance certains faits qui, ainsi qu'il est dit plus
haut, ne sont pas mentionnés dans sa lettre. Mes lecteurs pourront
juger mieux, ensuite, cette phrase de M. Laisnel de la S.ille : « Ainsi le
» fait est indéniable » (le fait de la reproduction de Rana mugiens au
Bois de Boulogne).
» 1° Cette année (1885), il n'a pas été possible de trouver un seul têtard
de Bœuf, bien que notre collègue ait ofl'ert aux gardes et autres agents
du Bois une prime de 5 francs par tète.
» 2" M. de la Salle a écrit son spirituel travail sur les Grenouilles-
Bœufs longtemps après qu'il ne les possédait plus, entièrement de mé-
moire, n'ayant pris aucune note.
» 3" 11 en résulte, entre autres inconvénients, que le passage où il est
PROCÈS-VERBAUX. 47
dit que les jeunes Grenouilles mugissaient dès l'année qui a suivi celle
de leur transformation a été reconnu inexact par son auteur, sur l'obser-
vation que j'en fis.
î Pourquoi ces trois révélations très importantes ne figurent-elles pas
dans la lettre parue au i??t//ef m? Quant aux témoignages des gardes, etc.,
que M. de la Salle nous ofïre, je ne pense pas qu'ils puissent servir à
grand'clîose. Celui de notre confrère est bien préférable, et pourtant il
ne peut, à mon avis, suffire, même additionné de tous les cautionnements
que pourraient fournir des personnes étrangères à l'erpétologie. Je n'ai
jamais révoqué en doute la bonne foi et l'honorabilité de M. Laisnel de
la Salie, pas plus que celle des personnes qu'il propose de faire témoi-
gner. J'ai expliqué bien souvent ce qui a pu faire croire, peut-être à
tort, à l'existence de Têtards-Bœufs dans les eaux du lac Saint-James;
je n'ai pas à y revenir.
» Je n'ai pas nié que les Rana mugiens aient reproduit au Bois de
Boulogne, mais j'ai nié, et je nie encore, que ce fait ait été prouvé. Il le
sera, pour l'avenir bien entendu, car pour le passé ce n'est plus pos-
sible, les Têtards- Bœufs, ou ceux du Pelobates fuscus, ne se trouvent
plus dans ce lac; il le sera, dis-je, quand quelqu'un nous montrera de
ces larves vivantes, ici même, à la troisième Section, où ceux des membres
compétents pourront les déterminer; quand, enfin, les récits concernant
l'élevage, la transformation, etc., seront écrits d'après des notes prises au
jour le jour, dans un style prouvant, par ses expressions, que leur auteur
connaît assez les batraciens annoncés pour ne pas faire de confusion.
» Pour ce qui concerne mes déclarations sur l'installation de ces ani-
maux au Jardin d'Acclimatation en hiver et au printemps 1885, je les
maintiens absolument. Ici encore la mémoire, non secondée par des
notes, de iM. Laisnel de la Salle l'a mal servi. Actuellement les Rana
mugiens courent librement dans le parc aux Pingouins, et non moins
librement dans la campagne, quand elles le veulent. Évidemment, on en
prendra encore souvent au Bois. Mais au commencement de l'année,
l'enclos dont j'ai parlé existait encore et renfermait des Grenouilles-
Bœufs. Il a été défoncé, comme je l'ai dit, puis retiré plus tard. Tous
ces faits, d'autres que moi, d'ailleurs, les ont constatés, et ici point n'est
besoin de connaissances spéciales pour témoigner utilement.
» M. Cornély, qui possède de grosses Grenouilles dans son parc de
Beaujardin, veut bien, lui aussi, me faire l'honneur de prendre en con-
sidération les observations que j'ai présentées à l'occasion des repro-
ductions de Rana mugiens signalées de divers côtés.
> Je ne puis répondre que ceci à M. Gornély : Quelles sont les Gre-
nouilles qu'il élève ? Il en a, dit-il, trois espèces. Y a-t-il parmi des
Rana mugiens ?
> Notre confrère parle d'énormes têtards qu'il a vus dans sa propriété.
Sont-ce ceux du Pelobates cultripes , ou bien pense-t-il qu'ils pro-
48 SOCIÉTÉ NATIONALE D* ACCLIMATATION.
viennent de ses Grenouilles, dont il ne sait pas le nom. Car s'il y en a trois
espèces, à la rigueur l'une d'elles pourrait être le Rana mugiens, il est
vrai. Mais rien n'indique que les têtards énormes en proviennent. Si
M. Cornéty veut, ou peut me fournir les renseignements ci-dessus, j'en
serai charmé. S'il peut aussi fournir de ses têtards vivants, ce sera en-
core mieux.
» A mon avis, le Rana mugiens pourrait parfaitement vivre et repro-
duire en France. Au Bois de Boulogne les conditions sont défavorables,
comme situation et provenance des sujets qui, échappés du Jardin zoo-
logique, où ils ont langui et souffert plus ou moins longtemps, doivent
être peu ou pas aptes à la multiplication. Au parc de Beaujardin , au
contraire, les conditions sont excellentes. Il me paraît facile d'y avoir de
bons résultats; peut-être même ont-ils déjà été obtenus. Je clos ici cette
trop longue communication en souhaitant vivement que M. Cornély, ama-
teur distingué, veuille bien nous fournir à ce sujet les éclaircissements
nécessaires.
» En attendant, je déclare que, à moins de faits nouveaux et intéres-
sants, de preuves irréfutables comme celles fournies par l'envoi de
Têtards-Bœufs vivants, je ne m'occuperai plus de cette question de la
reproduction des Rana mugiens en France. »
— Le Conseil ayant, pour satisfaire au désir exprimé par la troisième
Section, adressé aux préfets une circulaire leur demandant des rensei-
gnements sur la situation de la pisciculture dans leurs départements,
MM. les préfets de l'Aube, de l'Ariège, de la Charente, de la Creuse, du
Finistère, de Meurthe-et-Moselle, du Morbihan, du Nord, de la Haute-
Savoie, du Var et de Vaucluse font parvenir des réponses aux questions
qui leur ont été posées.
— M. Mailles demande que son travail concernant la culture dans la
Mousse soit soumis à l'examen de la Commission des récompenses.
— MM. Adrien Bourgarel et Mathieu Boisson adressent une note sur
les plantations d'Eucalyptus, faites à la villa Sainte-Marguerite, et sur
l'utilisation industrielle de ces plantations :
» C'est en 1865, au mois de février, que M. Bourgarel planta pour la
première fois cinq Eucalyptus globulus originaires du jardin du Hanima,
à Alger. 11 n'existait jusqu'alors, dans la région de Toulon, aucune plan-
tation d'Eucalyptus.
» Dès la première année, la végétation des arbustes fut si luxuriante
que M. Bourgarel n'hésita pas à continuer les plantations.
» A l'aide de graines variées rapportées d'Australie par l'amiral Chai-
gneau, les premiers semis comprirent une assez grande variété. Entre
autres, nous citerons au premier rang le Globulus, puis VAmygdalina,
le Colossea, le Goniocalyx, le Leucoxylon, le Piperita, le Robusta,
le Rostrata, le Viminalis.
» Moyennant quelques soins, lors du premier empotage,qui se fait dans
PROCÈS-VERBAUX. 49-
de petits godets, les semis réussirent constamment bien, et bientôt
l'étendue de la plantation atteignit la superficie de 3 hectares, étendue
qu'elle occupe aujourd'hui et qui est en voie d'accroissement.
» La hauteur des Eucalyptus est en moyenne de 20 à 25 mètres; un
certain nombre atteignent 30 mètres, et quelques-uns même semblent
dépasser cette hauteur. Les plus gros mesurent 2 mètres de circonfé-
rence à la base, et tous présentent l'aspect d'une végétation si luxuriante
que le poids moyen des branches chargées de feuillage est de 50 kilo-
grammes, tandis que leur longueur dépasse 5 mètres.
» Les arbres de notre plantation de Sainte-Marguerite ont déjà donné
lieu à plusieurs tailles très sérieuses, ne laissant qu'un tronc de quel-
ques mètres de hauteur et complètement dépouillé de branches. Malgré
la sévérité de ces tailles, les Eucalyptus qui y ont été soumis dévelop-
paient déjà l'année d'après des branches de 3 mètres de long chargées
de feuillage.
ï Si nous ajoutons que la plantation est située dans des terrains schis-
teux, sur le bord de la mer, et qu'elle n'est arrosée que par les pluies
naturellement très rares en Provence, sans que les arbres aient d'ail-
leurs jamais souffert de la sécheresse, nous aurons donné, croyons-nous,
tous les détails intéressants sur la plantation elle-même. »
— M. Hédiard présente des bulbilles de Dioscorea bulbifera remar-
quables par leur grosseur. Six de ces bulbilles forment un poids de
1^3,500, et le plus gros d'entre eux pèse, à lui seul, 350 grammes. Fari-
neux et d'un goût agréable, ces bulbilles se font cuire et se préparent
comme les rhizomes d'Ignames. La plante paraîtrait pouvoir être culti-
vée avantageusement dans notre Midi, car elle donne des produits même
sous le climat de Paris, ainsi que l'ont montré les essais faits l'année
dernière à Grignon par M. Uybowski.
— M. le Secrétaire général demande si les racines ont autant de pro-
fondeur que celles du Dioscorea batatas-
— M. Hédiard répond que, sous ce rapport, les deux plantes sont sem-
blables.
Notre collègue met également sous les yeux de l'assemblée des
fruits de Luffa cylindrica et de L. acutangula, cucurbitacées dont
l'une, la dernière, connue dans l'Inde, à Maurice, à la Réunion, etc.,
sous le nom de Pipengaille, est très estimée des créoles, qui la pré-
fèrent à l'Aubergine. Quant à l'autre espèce, le fruit en est revêtu d'une
écorce toute particulière, dont le tissu léger et souple la rend propre à
divers usages domestiques.
— En remerciant M. Hédiard de cette présentation de produits exo-
tiques, M. le Président signale l'intérêt qui s'attache à de semblables
communications, particulièrement propres à faire connaître nos colonies
et les ressources qu'elles présentent.
— M. Pichot présente à l'assemblée une nappe de peaux de Maras
4" SÉRIE, T. III. — Janvier 1886. 4
50 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
qu'il a reçue du Gliili. Le poil, comparable à celui du Chevreuil, paraît
être un peu cassant. Si le Mara peut arriver à se reproduire abondam-
ment chez nous, c'est probablement surtout comme animal alimentaire
qu'il présentera un véritable intérêt.
— M. Jules Grisard dépose sur le bureau, de la part du R. P. Cam-
l)Oué, missionnaire apostolique à Madagascar, plusieurs échantillons de
Saturnia suraka et de Borocera Madagascar iemis. Le zélé corres-
pondant de la Société a constaté qu'un de ces deux Lépidoptères séri-
cigènes, le Borocera, peut vivre sur VEucalyptus. C'est un renseigne-
ment utile à enregistrer, car il permet d'es|)érer qu'on pourra élever
cette espèce dans le midi de la France. Le R. P. Camboué annonce l'en-
voi prochain de spécimens de VUrania ripheus, qui est certainement
le plus beau Lépidoptère connu.
Un échantillon de cette magnifique espèce, obligeamment communiqué
par M. Fallou, est mis sous les yeux de l'assemblée.
Revenant ensuite sur la comiimnication faite par M. Hédiard,
M. l'Agent général signale la possibilité de cultiver sous le climat de
Paris le Luffa acutangula, plante dont il présente un fruii récolté à
Crosne (Seine-et-Oise) par notre collègue M. Paillieux. Le fruit de cette
espèce est, comme celui du Luffa cylindrica, connu sous le nom de
« Courge à torchon ».
— iM. Raveret-Wattel rend compte du concours d'ostréiculture qui a
eu lieu récemment au Palais de l'Industrie, pendant 1' « Exposition du
Travail», et pour lequel il avait été nommé membre du jury. Il pré-
sente, à cette occasion, un aperçu de la situation actuelle de l'ostréicul-
ture en France, et signale diverses mesures à prendre dans l'intérêt du
développement de cette industrie, entre autres un abaissement dos droits
d'octroi et des tarifs de transport.
— M. Hédiard estime que, non seulement pour les Huîtres, mais en-
core pour une foule de produits, il serait très utile d'obtenir des prix
moins élevés que le tarif actuel pour des envois peu importants. On
n'obtient actuellement de réduction dans les frais de transport qu'à la
condition de faire des envois considérables, ce qui est préjudiciable au
petit producteur aussi bien qu'au consommateur.
— M. Camille Dareste rend compte d'expériences très intéressantes qu'il
a récemment faites concernant l'action nuisible des bruits continus sur
l'incubation des œufs de Poule. Les vibrations produites par un appareil
régulateur de la température, dans les couveuses artificielles, ont suffi
pour faire périr, vers le septième ou le huitième jour, les embryons de
presque tous les œufs (7 sur 8) mis en observation dans un incubateur
(voy. au Bulletin).
— M. le Secrétaire général annonce à l'assemblée que le siège de la
Société sera très prochainement transféré au n" 41 de la rue de Lille, oii
se prépare une installation à la fois plus spacieuse et plus commode que
PROCÈS-VERBAUX. 51
le local actuel. Le nouvel immeuble qu'a fait construire la Société com-
prend, outre les bureaux et la salle des séances, des salles spécialement
affectées aux réunions du Conseil, à celles des différentes Sections et
enlin une bibliothèi|ue formant salle de lecture.
— A l'occasion d'une lettre mentionnée dans la correspondance et re-
lative à des Eucalyptus qui, recépés, paraissent n'avoir nullement souf-
fert de l'opération et donnent des pousses extrêmement vigoureuses,
M. le Secrétaire général signale que cette expérience a été déjà très
souvent faite au Jardin d'Acclimatation d'Hyères. Des Eucalyptus de
sept à huit ans et de 30 à 40 centimètres de diamètre, coupés au niveau
du sol, repoussent avec une vigueur telle qu'il est impossible, au bout
de quelques années, de distinguer les arbres ayant subi l'opération de
ceux qu'on a laissés croître. Aussi n'hésite-t-on pas aujourd'hui à em-
ployer ce moyen pour rectifier la croissance de certains sujets laissant
à désirer sous le rapport de la forme.
— Enfin M. Geoffroy Saint-Hilaire communique d'intéressantes obser-
vations faites au Jardin d'Acclimatation du Bois de Boulogne sur la rus-
ticité du Mara, (|ui a supporté des froids de 21 degrés pendant l'hiver
1879-1880, et qui, sans abri, tapi dans la neige, a parfaitement résisté
à cette épreuve. M. le Secrétaire général ajoute que de nouvelles impor-
tations permettront sans doute prochainement d'obtenir chez nous la mul-
tiplication rapide du Mara, qui, s'il n'est pas destiné à devenir un ani-
mal de chasse, sera tout au moins un animal de grand parc, et qui,
chassé par des Briquets ou des Bassets, donnera un tiré des plus inté-
ressants.
— En levant la séance, qui doit être la dernière dans le local actuel,
M. le Président exprime le vœu que la prospérité conquise par la Société
dans son ancienne résidence se continue dans la nouvelle, et qu'elle se
continue aussi brillante que nos aspirations nous la font désirer.
SEANCE GÉNÉBALE DU 22 JANVIER 1886.
Présidence de M. le manjuis de Sinéty, Vice-Président.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
— M. le Président proclame les noms des membres nouvellement
admis par le Conseil, savoir :
»
M. PRÉSENTATEURS.
Bergman (Ernest), secrétaire de la Société E. Glatigny.
nationale d'horticulture de France, château ' Jules Grisard.
do Ferrières (Seine-et-Marne). ' Ch. Joly.
52 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
MM. PRÉSENTATEURS.
„„ , ( A. Berlhoule.
DoRMEUiL (Auguste), négociant, 38, rue de \ ^ paiHieux
Lisbonne, à Paris. [ Have'ret-Wa'ltel.
., , V . 1 /^ >-. . of- ( •'• Fromage.
Flers (H. de), avocat a la Cour d Appel, do, \ . „ «• c • . u-i •
^ , '. , -^ . f r ' ' ) A.GeoffroYSaint-Hilaire.
rue de nertiii, a Pans. I i r ■ i
( J. Grisard.
, , „ . , T^ f A. Berthoule.
Leroy (Arnould), Sous-inspecleur des Do- \ ., ,^. ,
. . ^ ,,, . . ., I Maurice Girard,
uiaines, a Oran (Algérie). / , , p . ,
' ^ ° V Jules Grisard.
Mézières (Gustave), ancien secrétaire au [ Jules Grisard.
Conseil d'État, avocat, 57, boulevard Mont- | Paillieux.
parnasse, à Paris. ( Raveret-Wattel.
' (^li OfisljrossG
OCDINÉ (Ernest), propriétaire, 59, rue d'Ams- \ ,^ g^^^^^^, Sa.nt-Hilaire.
terdam, à Pans. ( Saiut-Yves Ménard.
— M. le Ministre de l'instruction publique, des beaux-arts et des
cultes adresse une note du Comité des travaux historiques et scienti-
fiques, indiquant divers sujets d'études pour le Congrès des sociétés
savantes en 1886.
— M. P. Vidal, de Chalabre (Aude), adresse deux exemplaires d'un
almanach qu'il publie sous le titre de : Petit annuaire des découvertes
ou inventions et antres connaissances utiles.
— M. Maurice Le Pelletier rend compte de la perte d'une des femelles
de son cheptel de Cerf Cochon.
— M. E. Viéville annonce que la femelle de Bernache de Sandwich,
qu'il avait en cheptel, vient de mourir.
— M. Paul Martineau fait également connaître qu'il vient de perdre
la femelle de son couple de Colombes Lumachelles.
— M. Albouy, conducleur des ponts et chaussées à Ouillan, annonce
qu'il vient de recevoir les cinq mille œufs de Saumon que la Société lui
a fait expédier pour servir à des essais d'empoissonnement de l'Aude.
Ces œufs sont arrivés en bon état.
— M. Berthoule accuse réception et remercie de l'envoi d'œufs de
Coregonus marœna qui lui a été fait.
— M. Wagner, régisseur de l'établissement de pisciculture de Bouzey
(Vosges), écrit à M. l'Agent général : « J'ai l'honneur de vous accuser
réception des 12 500 œufs de Coregonus marœna, qui sont arrivés en
très bel état, le 10 janvier, et qui ont été mis en incubation dès leur
arrivée. Je vous remercie de cet envoi, dont on aura le plus grand soin,
et vous serais bien reconnaissant si vous pouviez m'envoyer des œufs
de Saumon de Californie.
» Nos reproducteurs de Salmo fontinalis, provenant des œufs que
PROCÈS-VERBAUX. 53
vous nous avez envoyés, prospèrent bien et nous ont produit cette
année-ci 3000 œufs,
» On commence à voir et à pêcher des Coregonus marœna de 25 à
30 centimètres de longueur dans les réservoirs de Bouzey et du canal de
Wassy à Saint-Dizier, provenant de nos alevins. En outre, M. le maire
de Gérardmer m'a signalé la présence de Feras et de C. marœna, pro-
venant de nos alevins, dans le lac de Gérardmer. »
— M. Raveret-Wallel signale un article de \sl Bayerische Fischerei-
Zeitung, faisant connaître que le Reichstag vient de voter un crédit de
100 000 marks pour encouragements aux pêcheries maritimes alle-
mandes. La même assemblée a renvoyé à l'examen de la Commission
du budget une demande tendant à faire porter à 30 000 marks (au lieu
de 20 000) la subvention allouée à la Société de pisciculture.
— M. de Confévron, de Flagey (Marne), fait connaître qu'en raison de
l'époque de l'année, il lui est impossible d'envoyer à la Société des Écre-
visses alteintes de la maladie. « Pour le moment, écrit notre collègue, je
ne puis qu'ajouter les remarques suivantes à mes explications antérieures :
au début de la maladie, beaucoup de sujets ont la carapace très dure et
couverte d'un angobe calcaire, rugueux, gris et (lui pourrait être la
gangue dans laquelle s'enferme un parasite. Mais ce symptôme n'est pas
général ; le plus grand nombre des malades deviennent de suite flas-
ques, leur carapace pâlit successivement jusqu'au blanchâtre, et, peu
avant la mort, devient couleur peau d'oignon. »
— MM. les préfets de l'Ain, de r.\rdèche et de la Haute-Loire adres-
sent, en ce qui concerne leurs départements, les renseignements dont
l'envoi leur a été demandé relativement à la pisciculture et au repeu-
plement des cours d'eau.
— iM. Alfred Wailly, de Norbiton (Angleterre), adresse un 'travail
sur les Lépidoptères séricigènes sauvages.
— M. Raveret-Wattel dépose sur le bureau, de la part de M. Dan-
nevig, directeur du laboratoire de pisciculture marine de Flôdevig, près
Arendal (Norvège), plusieurs brochures relatives aux travaux entrepris
dans cet établissement.
— M. Maurice Girard présente un travail dans lequel M. Jules Fallou
rend compte de diverses éducations de Bombyciens séricigènes faites à
Champrosay (Seine-et-Oise), en 1885 (voy. au Bulletin).
— M. le Président fait ressortir l'intérêt que présente ce travail, et
exprime l'espoir que M. Fallou voudra bien continuer à nous tenir au
courant du résultat de ses efforts.
— M. le Secrétaire général donne lecture d'une noie de M""* Lagrénée
sur l'utilisation industrielle du poil de Lapin angora; il communique à
cette occasion plusieurs lettres adressées sur la même question par
M. Jacquier, de Buisson-Saint-Innocent, près Aix-les-Bains, et par M. Pa-
tard-Chalelain, de la Ferté-Macé (voy. au Bulletin).
54- SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
M. Geoffroy Saint-Hilaire dépose ensuite sur le bureau un travail de
M. Noordliœck-Hegt, propriétaire de l'établissement de pisciculture
d'Apeldorn, près Amsterdam. Ce travail renferme d'intéressants rensei-
gnements sur les résultats remarquables obtenus en Hollande, au moyen
tant d'une surveillance active de la pèche que d'opérations d'empois-
sonnement bien conduites (voy. au Bulletin). En même temps qu'il
adresse ce travail, M. Noordœck-Hegt veut bien mettre à notre disposi-
tion 10 000 œufs de Salmo fontmolis, heureux, ajoute-t-il, de témoi-
gner ainsi sa reconnaissance à la Société pour la part importante qu'elle
a prise à l'introduction en Europe de cette précieuse espèce améri-
caine.
M. le Secrétaire général constate avec satisfaction cet hommage
rendu, en pays étranger, aux efforts poursuivis par la Société. « Si la
France, dit-il, est un des pays où l'on se livre le moins à la pisciculture
vraiment fructueuse, quelques personnes, comme M. Noordœck-Hegt,
se souviennent que c'est en France que cette science est née, que c'est
dans le laboratoire du Collège de France qu'elle a pris naissance, et que
c'est en grande partie par la Société d'Acclimatation qu'elle a été vul-
garisée. »
Enfin, M. le Secrétaire général rend compte du désir exprimé par
Son Excellence le gouverneur général du Turkestan, d'introduire dans
ce pays les Vers à soie de l'Ailanle et du Ricin, et de l'envoi qui lui a
été fait, par suite d'une erreur, de cocons d'Attacus cynthia et Pernyi.
Le Chêne n'existant pas dans le Turkestan, l'élève de VAttacus Pernyi
y présente une difficulté spéciale. Ou espère toutefois mener à bien une
éducation, grâce à déjeunes plants de Chênes cultivés à cette intention.
Il convient de rappeler, d'ailleurs, qu'à différentes reprises des résultats
satisfaisants ont été obtenus en donnant aux jeunes Vers des feuilles de
Charme ou d'Aubépine, et ce fait a été porté à la connaissance de M. le
gouverneur du Turkestan.
— M. Pichot donne lecture d'une iiote de M. le comte de Montlezun
sur la Bernache de Magellan (voy. au Bulletin).
— A l'occasion de celte communication, iM. le Secrétaire général
donne des détails intéressants sur l'espèce d'apprivoisement dont parais-
sent susceptibles certains oiseaux, d'un naturel habituellement très
sauvage au moment de la nidification.
M. Geoffroy Saint-Hilaire rend compte ensuite de la naissance récem-
ment obtenue, au Jardin d'Acclimatation, d'un Tapir d'Amérique, et si-
gnale l'intérêt que présente ce fait au point de vue climatologique.
Le Secrétaire des séances,
C. Raveret-Wattel.
IV. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS
PREMIÈRE SECTION.
SÉANCE DU 10 NOVEMBKE 1885.
Présidence de M. Deckoix, Président.
M. Daulreville, secrétaire, s'excuse de ne pouvoir assister à la réu-
nion.
M. Mailles donne lecture du procès- verbal de la dernière séance, en
l'absence de M. le secrétaire, empècbé. — Adopté.
M. Joly demande la parole à l'occasion du procès-verbal. Notre col-
lègue regrette vivement de n'avoir pas été compris dans la distinction
qu'il a cherché à établir entre les Léporidcs hybrides et non hybrides.
M. Joly exprime l'opinion qu'il iloil èlre fort difficile, sinon impossible,
d'obtenir des produits issus des espèces Lièvre et Lapin, vu l'éloigne-
ment spécifique de ces animaux, leur reproduction si différente, tant en
ce qui concerne la durée de la gestation que le développement des
jeunes lors de la mise bas. En terminant, M. Joly déclare que, dans un
concours, un Léporide-Lapin, tout ce qu'il y a de plus lapin, élevé chez,
lui et exposé par un de ses amis, a été primé (l^"" prix).
M. Mailles partage les doutes de M. Joly relativement à la possibilité
d'obtenir des Léporides hybrides. Mais, ajoute M. Mailles, ce point, im-
portant au point de vue zoologique, n'offre qu'un intérêt médiocre pour
les éleveurs, si, comme il iiaraît probable, ces hybrides, s'ils existent,
sont stériles, au moins d'une façon relative; et, dans les cas de repro-
duction, il y aurait divergence et retour vers l'une ou l'autre espèce
procréatrice.
Puisque plusieurs personnes prétendent posséder des Léporides, il
serait, pense M. Mailles, facile d'éclaiicir la question, en demandant
certains renseignements importants, tels que:
1" Durée de la gestation des femelles Léporides;
2" État de développement des jeunes lors de la naissance ;
3" Mœurs des mères, relativement à la construction des nids où elles
doivent mettre bas.
4" Mœurs générales des Léporides, notamment en ce qui concerne le
fouissage.
Les Hases portent de quarante à quarante-cinq jours et mettent bas
des jeunes couverts de poils, se tenant debout et les yeux ouverts.
Les Lapines portent une trentaine de jours et mettent au monde des
petits tout nus, incapables de se tenir et les yeux fermés. En consé-
quence, si les Léporides sont les produits obtenus de l'accouplement des
espèces Lièvre et Lapin, il est impossible que la reproduction de ces
56 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Léporides soit la même que celle des l^apins ou des Lièvres. Elle doit
être à peu près intermédiaire. En tous cas, c'est de ce côté que nous
devons rechercher les preuves.
M, Uecroix est d'avis qu'en zoologie aucune affirmation ne vaut
une preuve. MM. Joly et Mailles appuient vivement l'opinion de M. le
Président, opinion déjà exprimée par M. Mégnin. M. Mailles parle do la
différence de saveur et de fumet soi-disant observée entre la chair des
Léporides et celle des Lapins. Mais cette différence n'a jamais été dé-
crite qu'en termes trop vagues pour être compréhensibles. D'ailleurs,
que peuvent prouver, pour ou contre les faits en discussion, la couleur
plus ou moins foncée, le goût plus ou moins prononcé de la chair des
Léporides? L'influence de la race, du milieu, de la nourriture, etc.,
suffit pour changer considérablement la qualité de la viande.
M. Joly demande à prendre connaissance du rapport fait sur le mé-
moire de M. Gayot, mémoire ayant trait aux Léporides, et récompensé
par notre Société.
M. le Secrétaire donne lecture de ce rapport. De l'avis unanime de
l'assemblée, les preuves y font défaut, mais non les affirmations; plu-
sieurs de ces dernières sont très embiouillées. Enfin, il est question dans
ce rapport d'un certain Bibi, dont l'identité reste obscure; on ne peut
dire s'il est IJèvre ou Lapin. Pourtant il produit, avec des Lapines, des
Léporides. Pourquoi baptiser ces produits, alors qu'on n'a pu détermi-
ner la valeur spécifique du père?
M. Rathelot déclare que, en présence de ces affirmations, notamment
de celles émanant d'hommes tels que M. le D"^ Broca, la question lui pa-
raît décidée en faveur de l'affirmative.
MM. Decroix, Joly et Mailles ne peuvent partager cette manière de
voir. Le savant le plus consciencieux peut faire des erreurs d'observa-
tion ou être trompé par ses collaborateurs.
M. Jules Grisard demande que, vu l'importance du débat qui tend à
mettre en doute un fait généralement admis, la question soit traitée en
séance générale.
M. Joly est désigné par la Section pour la rédaction d'un rapport sur
ce sujet, pour être lu en séance générale ; notre collègue est en outre
chargé de demander des renseignements à M. le Directeur du Jardin
d'Acclimatation pour ce qui concerne les Léporides de cet établisse-
ment.
Le Vice-Secrétaire,
Ch. Mailles.
PROCÈS-VERBAUX. 57
CINQUIÈME SECTION.
SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1885.
Présidence de M. de Vilmorin, Président.
M. Paillieux donne lecture d'une note sur quelques plantes potagères
nouvelles cultivées par lui pendant la dernière saison. (Voy. au Bulletin.)
M. Mailles fait connaître qu'il a cultivé cette année la Brède qui, bota-
niquement, ne lui semble pas différer de la Morelle noire. Cependant
l'ensemble de la plante a un aspect tout à fait particulier qui la fait
distinguer de cette dernière, au premier coup d'oeil Notre confrère a
reconnu que contrairement à l'opinion souvent émise dans divers ou-
vrages, les fruits ne sont pas vénéneux. Quant aux feuilles, elles ont un
goût amer peu agréable.
M. Fallou fait connaître qu'il n'a obtenu aucun bon résultat de la
culture du Haricot radié, le temps froid n'ayant pas permis le dévelop-
pement complet du fruit.
M. le Secrétaire présente diverses graines envoyées à la Société et
mises à la disposition des membres de la Section.
M. Grisard soumet ensuite les 6 premières séries de Vlconographie
de la Flore française, par H. Bâillon.
Chaque série se compose de 10 planches en couleurs et l'ouvrage
complet comprendra environ 40 ou 50 séries.
L'image de la plante est aussi fidèle que possible, et le moins exercé
la reconnaît immédiatement.
D'ailleurs, toutes les fois qu'il a paru nécessaire, quelques figures
analytiques permettent de distinguer l'une de l'autre, deux espèces dont
le port, les dimensions, la coloration sont à peu près semblables, et
que, par conséquent, on serait à première vue exposé à confondre l'une
avec l'autre. L'ouvrnge de M. le professeur Bâillon est destiné aux étu-
diants, aux enfants des écoles, aux débutants et aux personnes qui ne
peuvent suivre les herborisations publiques, à remplacer les avis d'un
maître ou d'un compagnon instruit. Il permettra bien souvent de recon-
naître une plante du premier coup d'œil, sans effort, sans crainte de
s'égarer dans les descriptions des meilleurs livres et surtout dans l'em-
ploi des clefs dichotomiques au milieu desquelles on se perd souvent à
moitié chemin, quelquefois même dès les premiers pas.
Le texte qui est imprimé au dos de chaque figure comprend : le nom
scientifique de l'espèce et de sa synonymie ; le nom de la famille et de
la tribu auxquelles elle appartient; les principaux noms vulgaires qu'elle
porte dans nos diverses provinces. Suit une description renfermant les
caractères essentiels, ceux surtout qui permettent de distinguer la plante
58 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
d'une espèce voisine avec laquelle on serait exposé à la confondre. Plus
bas se trouve le tableau abrégé de la distribution de la plante, avec des
indications spéciales des localités quand elle fait partie de la flore pari-
sienne.
Enfin M. le Secrétaire appelle l'attention de la Section sur un très inté-
ressant article de M. Jules Poisson, inséré dans le journal la Nature,
sur l'utilisation de divers fruits secs ou graines de végétaux dans la con-
fection de passementeries d'un fort bel effet.
Le Secrétaire,
Jules Grisard.
PREMIÈRE SECTION.
SÉANCE DU 8 DÉCEMBRE 1885.
Présidence de M. Decroix, Président.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté, après recti-
fication demandée par M. Joly.
L'ordre du jour appelle les élections pour la nomination du Rureau
et d'un délégué à la Commission des récompenses.
Sont élus :
Président : M. Decroix ;
Vice-Président : M. Mégnin ;
Secrétaire: M. Mailles;
Vice-Secrétaire : M. Trémeau ;
Délégué aux récompenses : M. Mailles.
M. le Président remercie la Section d'avoir bien voulu continuera lui
accorder sa confiance ; il exprime son intention de faire son possible,
secondé par toute la Section, pour que la session qui commence soit
utilement conduite.
M. le Président fait une communication sur la reproduction de l'es-
pèce chevaline et sur les services que rendent et pourraient rendre les
chevaux dans l'armée et dans les services civils (voy. au Bulletin).
A l'occasion de cette communication, M. H. de Pallissaux de Tal-
lobre dit qu'en général les poulains sont mal nourris et mal soignés
par les éleveurs, qui ne veulent même pas leur donner une mesure
d'avoine par semaine. Ce système de négliger les jeunes animaux de
difl'érentes espèces est répandu dans toutes nos campagnes. Les paysans
croient qu'il suffit de bien nourrir ou d'engraisser leurs bêtes quand le
moment de les vendre approche. C'est là une grave erreur et qui fait
obstacle à l'amélioration de tous nos bestiaux.
PROCÈS-VERBAUX. 59
M. Decroix demande à notre collègue s'il peut dire à combien par
jour revient l'entretien d'un cheval dans le Bourbonnais.
iM. de Taliobre répond que, dans celle contrée, on élève pêle-mêle
chevaux, bœufs et vaches, sans soins spéciaux pour les premiers, ce qui
rend impossible une évaluation de ce genre.
Le même orateur parle des mauvais résultats obtenus par le croise-
ment des races de chevaux de Tarbes et anglais. Les produits ainsi ob-
tenus sont mal proportionnés, peu solides, inférieurs, en un mot, aux
parents. Comparés aux chevaux Barbes, dits arabes, ces métis sont moins
rapides que les premiers. Cette manie de croiser nos animaux domes-
tiques avec les races étrangères, principalement avec des sujets anglais,
est encore un fait regrettable qui s'étend aux animaux de basse-cour.
Pour ce qui concerne les chevaux de Tarbes, il n'en existe presque plus
de pure race.
Enfin, notre collègue parle d'un stratagème employé par certains
marchands de chevaux, consistant à faire sauter la dent de lait des
bêtes de trois ans afin de les faire passer comme en ayant quatre.
M. Grisard remet à la Section une dépêche dans laquelle M. Geoffroy
Saint-Hilaire s'excuse de ne pouvoir assister à la séance.
La parole est donnée à M. Joly pour qu'il continue sa communication
relative aux Léporides.
M. Joly déclare que, conformément aux instructions qu'il avait reçues
de la première Section, il adressa une lettre à M. le directeur du Jardin
d'Acclimatation, lui demandant divers renseignements sur les Léporides
de cet établissement.
M. Geoflroy Saint-Hilaire répondit qu'à la séance du 8 décembre il
espérait pouvoir donner verbalement les susdits renseignements.
M. Joly, tout en regrettant que M. Geoffroy Saint-Hilaire ne puisse
assister à la réunion d'aujourd'hui, espère que notre collègue voudra
bien accéder aux désirs de la Section dans un bref délai.
D'ailleurs, M. Joly estime que cette manière de se renseigner ne sau-
rait fournir des documents plus certains que ceux qu'il a pu obtenir par
des voies analogues. Aussi propose-t-il à l'assemblée d'adopter un
moyen beaucoup plus simple et surtout plus elficace. Qu'un couple de
Léporides soit conlié à un membre, et qu'une Commission soit nommée
à l'elTet de surveiller ces animaux et de communiquer à la Section le
résultat de ses observations; lesdites observations faites sur place par
ceux de nos collègues nommés par notre Section auraient plus de va-
leur, dit M. Joly, que tous les renseignements que nous pourrions obte-
nir par d'autres voies.
M. Huel pense qu'il serait préférable de donner, en cheptel, à un
membre de la première Section un Lièvre et une Lapine, et de créer ou
recréer le Léporide.
M. Mailles exprime l'opinion que la proposition de M. Joly lui paraît
60 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
être la préférable des deux, parce que, de l'aveu même des personnes
qui prétendent avoir obtenu des produits issus de l'union du Lièvre et
de la Lapine, il faut, pour y réussir, opérer sur un grand nombre de
couples et attendre souvent fort longtemps. De plus, parce qu'il s'agit
de savoir seulement si, oui ou non, la race dite Léporide existe, en tant
que race fixe, se reproduisant indéfiniment avec ses caractères d'hy-
bride.
M, le Président met les deux propositions aux voix; la Section dé-
cide qu'il y a lieu de nommer une Commission de trois membres, qui
jugera à laquelle des deux propositions elle devra se rallier. En consé-
quence, MM. Iluet, Lataste et Joly sont nommés membres de la Commis-
• sion.
M. .loly avait été également chargé, par la Section, de faire des re-
cherches dans le livre de M. Gayol : Le Léporide et le Lapin de Saint-
Pierre, par E. Gayot, membre de la Société nationale d'agriculture de
France. Notre collègue fait savoir qu'il n'a trouvé, dans cet ouvrage,
que des affirmations concernant l'existence du Léporide. Par contre, les
preuves font défaut.
Les ouvrages de MM. Heech et des D^s Broca et Pigeaux ne fournissent
aucune preuve valable de l'existence de la race léporide féconde et bien
fixée.
En conséquence, iM. Joly ne pourra terminer son rapport sur cette
question que lorsque la Commission qui vient d'être nommée se sera
prononcée.
Pour terminer, notre collègue fait observer que les animaux qu'on
nomme aujourd'hui Léporides Gayot, sont aussi désignés sous celui de
Lepus Darwini.
M. H. de Pallissaux de Tallobre dit qu'un de ses amis a obtenu un
grand nombre de Léporides, et que ces animaux se reproduisent bien.
M. de Tallobre déclare pourtant qu'ayant possédé de ces Léporides,
il n'en a pu obtenir aucun produit.
Sur la demande de la Section, l'auteur de celte communication veut
bien demander des renseignements plus probants à son correspondant ;
M. de Tallobre les fera connaître à la prochaine séance.
Le Secrétaire,
Ch. Mailles.
PROCÈS-VERBAUX. 61
DEUXIÈME SECTION.
SÉANCE DU 8 DÉCEMRRE 1885.
Présidence do M. Paillieux.
Composition du bureau pour rannée 1886 :
Président : M. Huet;
Vice-Président : M. Dautreviile ;
Secrétaire : M. E. Joly ;
Vice-Secrétaire : M. le comte d'Esterno ;
Délégué de la Section à la Commission des récompenses: M. Ra-
thelot.
Lecture est faite d'une lettre de M. G. Rogeron, relative à des détails
d'imprimerie.
M. O'Neil demande des renseignements sur les origines du mot et des
Poules de Padoue.
Littré attribue une origine polonaise à ces Poules.
M. le comte de Okecki, consulté à ce sujet, affirme que ces Poules ne
sont pas originaires de son pays; le climat ne lui paraît même pas favo-
rable pour l'élevage de cette espèce.
De nos jours, bien des objets français portent des noms anglais sans
pour cela nous venir d'outre-M anche.
M. Tliumara cite les noms des Pigeons Romains et Polonais, qui n'in-
diquent pas non plus les pays d'origine pour ces espèces.
M. Rathelot propose qu'à l'avenir les candidats aux récompenses
soient proposés par la section à la Commission après examen des tra-
vaux.
MM. Paillieux et Grisard prennent part à cette discussion.
Le Secrétaire,
E. Joly.
V. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE.
JMotes suv Madagascar.
Extraits de diverses lettres adressées à M. le Président de la Société
par le R. P. Paul Camboué, missionnaire apostolique.
« Tamatave, 21 septembre 1885.
D Je suis heureux de vous annoncer en même temps l'envoi par
celle malle d'un petit paquet renfermant des graines de Riz sec mal-
gache et autres différentes graines, provenant des parages de Vohémar
et de l'île sakalave de Mamoko.
> Parmi les graines venant de Vohémar, la plus grosse, portant le
n" 7, apparlicnt à un arbre nommé par les indigènes Satranij. Elle est
dépouillée de sa coque, qui est très dure; cette graine est, me dit-on,
comestible. Les feuilles du Satranij servent à faire des balais et ont
quelque ressemblance avec celles du Ropa {Sagas Raphia). Mon cor-
respondant de Vohémar m'a aussi envoyé des graines fort belles de ce
dernier végétal; je n'ai pas cru utile de vous les envoyer. Si cependant
vous en désirez, je les joindrai à un de mes envois subséquents.
» Quant aux autres graines venant de Mamoko, aucun renseignement
ne m'est encore parvenu.
j A propos d'entomologie, on m'avait parlé d'une Mouche funeste à
nos Chevaux de gendarmerie à Vobémar. Renseignements pris, j'ai vu
qu'il ne s'agissait que de la Mouche ordinaire, très abondante seulement
dans les parages de Vohémar, par suite des nombreux troupeaux de
Bœufs.
» Si nos Chevaux ont à souffrir et sont malades à Vohémar, ce qui
n'a pas lieu à Tamalave, c'est à la prodigieuse quantité de ces Mouches,
aux refroidissements et surtout à la mauvaise qualité des eaux qu'il faut
attribuer le fait. Ceci vient confirmer, ce me semble, l'observation faite
par M. le Vice- Président de la première Section, dans la séance du
21 avril dernier, au sujet de la mortalité des Chevaux au Tonkin.
» Vous me demandez quelques indications sur nos végétaux : Voase-
faJca, Voavontaka, Voanpena, que je m'empresse de vous transmettre.
» Le Voasefaka est, si je ne me trompe, le Cnestis polyphtjlla. Sa
graine est un poison utilisé par les Betsimisaraka pour faire mourir les
animaux dont ils veulent se débarrasser.
î Le Voavontaka (Biehmia spinosa Han.) semble affectionner les
terrains sablonneux voisins de la mer. Ses gros fruits sphériques, ayant
parfois jusqu'à 12 centimètres environ de diamètre, renferment une
FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 63
grande quantité de graines entourées d'une pulpe acidulée, qui fournit
au voyageur un excellent rafraîchissement ménagé par la Providence
sur nos côtes brûlantes.
» Quant au Voanpena, j'en ignore complètement le nom scientifique,
si toutefois il eu a un. C'est peut-être, un végétal appartenant à la fa-
mille des Strychnées. .\rl)re semblant aussi affectionner les terrains
sablonneux voisins delà mer; il donne un fruit sphérique, mais moins
régulier et plus petit que celui du Voavontaka; les plus gros que j'ai
observés n'avaient pas plus de 5 centimètres de diamètre Ces fruits ne
renferment que peu de graines, parfois une seule, entourées d'une pulpe
épaisse parfumée. Mûres à point, ces graines, mises dans la bouche,
produisent sur le palais, pendant un quart d'heure environ, une impres-
sion parfumée ou aromatisée correspondant un peu à l'effet d'un bonbon
fondant.
)> Le Voanpena est beaucoup plus rare que le Voavontaka dans nos
parages. A la saison des fruits, j'essayerai néanmoins de m'en procurer
quelques-uns encore verts pour les envoyer à la Société. Ils pourront
peut-être ainsi arriver à Paris en état d'être goûtés et de donner d'eux-
mêmes une idée plus exacte.
» D'ailleurs, dès que je serai moins occupé aux insectes, je me pro-
pose de faire des envois et communications relativement à nos végé-
taux, qui, je l'espère, ne seront pas sans quelque intérêt. Notre flore
malgache est si riche et si peu connue ! Je ne manquerai pas, autant
que possible, d'indiquer le nom malgache des plantes envoyées. »
« Tiimalave, 22 octobre 1885.
» J'ai le plaisir de pouvoir vous envoyer aujourd'hui, encore à temps
peut-être, un échantillon complet de l'Asclépiadée dont vous avez dû
recevoir un follicule par un précédent envoi.
» Voici quelques renseignements au sujet de ce végétal, que l'industrie
pourrait, ce semble, utiliser.
» Il est de provenance des parages de Vohémar et Amboanio, d'où il
m'a été envoyé par deux de mes correspondants, les RR. PP. A. Gros et
F. Cayssalié, missionnaires dans ces postes. Son nom indigène est Bo-
kadahy, liane ou plante sarmenteuse. Sa graine passe pour un poison.
» Je joins à cet envoi quelques cocons et insectes à l'étal parfait de
notre Attacus ou Saiurnia Suraka Bdv., en attendant que je puisse
vous expédier les sujets divers destinés à accompagner le mémoire que
je prépare sur nos Séricigènes.
)) p. 5. — En même temps que cette lettre, je vous envoie deux pe-
tites et bien modestes cartes de la mission de Madagascar. Au poste
d'Ambohipo, marqué au nord de Tananarive, nous possédons un beau
jardin d'acclimatation créé par les missionnaires, où nous avons pu ac-
climater plusieurs de nos végétaux d'Europe. »
64 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
« Taiiiatave, 21 novembre 1885.
» J'ai déjà eu l'honneur de vous parler de notre Ver à soie malgache
Bibindandy. Or, en me livrant à diverses observations et éducations de
ce Séricigène, en vue du mémoire que je prépare pour la Société, j'ai
constaté que ce Borocera peut se nourrir et vivre sur VEucaiyptus,
dont un certain nombre de plants ont été récemment introduits à Ta-
matave.
ï. Le fait d'un Ver à soie de l'Eucalyptus ma paru avoir son impor-
tance, surtout à une époque où, d'une part, la culture de ce végétal
australien s'est répandue dans plusieurs contrées du monde, et, d'autre
part, la question des Vers à soie sauvages semble tout à fait à l'ordre du
jour.
» J'ai tenu à vous en informer, afin que, s'il y a lieu, la Société d'Ac-
climatation soit des premières à le signaler.
» Sous peu, d'ailleurs, Monsieur le Président, j'espère pouvoir vous
envoyer de plus amples détails sur notre Borocera Bibindandy, que
j'étudie activement en ce moment. >
Le Gérant : Jules Grisard.
5093. — BOURLOTON — Imprimeries réunies, A, nie Mignon, 2, Paris.
#
TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOClETË.
NOTE
SUR L'ELEVAGE DES AUTRUGHONS
EN ALGÉRIE (VERSANT DE LA MÉDITERRANÉE)
LEURS MALADIES ET LES MOYENS DE LES PRÉVENIR
Par M. LUCIEIV IHERLATO
Ex-sous-directeur du parc à Autruches du Caire
Directeur du parc de A'in-Marraora (province d'Alg:cr)
Monsieur le Secrétaire général,
Par l'attestation ci-jointe qui m'a été délivrée par M. Bergue,
maire de Coléah (Algérie), vous relèverez que les naissances
des Autruchons au parc de Aïn-Marmora pendant la dernière
année de ma gestion ont été de 21 artificielles et 33 naturelles
avec une mortalité de 9 artificielles et 9 naturelles, ayant ainsi
obtenu un résultat de 12 artificielles et 24 naturelles, soit
36 sujets au 8 septembre dernier.
Ce lésultat, considéré jusqu'à présent presque impossible
à atteindre en Algérie, je ne le dois qu'à la vigoureuse appli-
cation, pendant l'élevage, du traitement préventif que j'ai eu
l'honneur de déposer entre les mains de la Société, il y a un
an, sous pli cacheté. Je crois donc avoir atteint le but qui
m'amenait il y a trois ans en Algérie et n'ai plus, dés lors,
aucun motif pour garder secret un procédé qui est appelé,
j'en suis convaincu, à rendre des services dans la branche
agricole. Je vous prie en conséquence de vouloir bien ou-
vrir le pli cacheté portant la devise : « Facile est inteliigere »
à une des prochaines séances de notre Société et en faire
donner lecture.
Mes honorables confrères jugeront si ce travail et les résul-
4' SÉIUE, T. III. — Février 1886. 5
66 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
lats obtenus méritent d'être soumis à la Commission des ré-
compenses.
Je n'ai pas grand'chose à ajouter à ma note cachetée, car
l'expérience de cette année m'a prouvé que le principe ainsi
que l'application et les doses étaient exacts. Du reste les
personnes que la question intéresse plus particulièrement
peuvent toujours s'adresser à moi — je serai bien heureux
de leur être agréable.
Il n'y a qu'une seule remarque que je crois utile de faire
ici — c'est que, contrairement à une assertion contenue dans
ma note, il faut éviter l'emploi du son comme véhicule, — ceci
m'a été prouvé par les essais ultérieurs.
J'ose espérer avoir ainsi contribué à un plus grand dé-
veloppement de cette intéressante industrie non seulement
en Algérie, mais aussi dans toute autre colonie française où,
à cause de l'état constant de forte humidité de l'air, l'élevage
des jeunes Autruchons présentait tant de difficultés, et compte
que la judicieuse application de la méthode mettra bientôt
plusieurs des parcs existants dans la possibilité de concourir
au prix fondé dans ce but par notre Société.
Veuillez agréer. Monsieur le Secrétaire général, l'assurance
de ma plus haute considération.
L. Mer LATO.
ATTESTATION.
Nous, Bergue Barthélémy, maire de la commune de Koléah, arron-
dissement et département d'Alger, soussigné :
Certitions avoir reçu dans le courant de la présente année 1885, de
M. MerJato, directeur du parc d'Aïn-Marmora (Société française pour
l'élevage des Autruches en Algérie), les lettres ci-après mentionnées et
dont le résumé suit, savoir :
1" Lettre du 5 avril déclarant cinq éclosions artificielles ayant produit
cinq poussins alors qu'aucun couple ne couvait.
2" Lettre du 9 même mois déclarant l'éclosion de dix autres poussins
par suite d'incubation artificielle.
3" Lettre du 16 avril déclarant la perte de deux poussins artificiels.
4° Lettre du 24 mai déclarant l'éclosion de six nouveaux Autruchons
artificiels.
SUR l'Élevage des autruchons.- . 67
5' Lettre du 17 juin déclarant l'existence de vingt-trois poussinsnatureis
issus de trois couples qui avaient couvé eux-mêmes.
6» Lettre du 13 juillet déclarant l'existence à ce jour de quinze Autru-
chons artificiels et de trente-trois naturels; dix de ces derniers étant
venus s'ajouter aux vingt-trois signalés dans la lettre ci-dessus.
7° liCttre du Ai août déclarant une nouvelle perte de trois poussins,
dont un artificiel et deux naturels; le nombre des présents à ce jour est
donc de quatorze artificiels et trente et un naturels, soit en tout quarante-
cinq.
8° Lettre du 4 septembre déclarant la perte de neuf poussins, dont
deux artificiels et sept naturels des plus jeunes. Par suite de ces pertes
le nombre des présents à ce jour se trouve donc réduit à:
Poussins artificiels 12 ) ^ .
- naturels 21 j ^°" ""^ *°'"' ^^ ^^-
Parmi les douze artificiels une partie aura bientôt atteint cinq moîs,
l'autre les a dépassés. Les naturels sont tous entre deux et trois mois
d'âge.
Certifions, en outre, qu'après réception de chacune de ces lettres nous
nous sommes rendu audit parc et que nous y avons constaté l'exactitude
des faits et des chiffres qui y sont relatés.
En foi de quoi nous avons délivré la présente attestation à M. Merlato,
pour lui servir et valoir ce que de besoin.
Fait en mairie, à Koléah, le 8 septembre 1885.
Le maire,
Bergue.
Texte du pli cacheté, déposé par M. Lucien Merlato, le 30 décembre 1684
ouvert en séance générale, le 18 décembre 1885.
L'Autruchoa né viable commence à manger enti'e Ifois et
six jouis d'âge. Depuis lors et jusqu'à deux mois, il est assu-
jetti à une faiblesse toute spéciale, qui le rend plus particu-
lièrement sensible dans les organes digestifs. Le petit mange,
mais digère mal et peu. Les aliments se ramassent de plus
en plus dans l'estomac et fioissent par y pourrir. Le peu qui
s'en échappe et passe dans les intestins est dur, compact,
presque sec, et détermine l'inflammation de ces organes.
Mais l'organe qui en souffre le plus, c'est l'estomac, dont les
parois, distendues par l'agglomération de la nourriture, de-
viennent impuissantes à la broyer; il liait par présenter un
état de complète désagrégation.
08 SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION.
f
La décomposition de ces matières donne souvent lieu au
développement de quelques vers qu'on retrouve dans les in-
testins aussi.
L'estomac, toujours rempli, et la présence éventuelle de
vers ont donné lieu à penser, chez certains éleveurs, que
l'Autruchon mangeait trop et qu'il était sujet à des vers mor-
tels, suppositions très gratuites toutes les deux et qui ne
prouvent qu'une chose, c'est qu'on a pris les effets pour la
cause.
Chez l'Autruchon en bonne santé, je n'ai presque jamais
observé de vers intestinaux, et, lorsqu'il y en a, ils ne sont
pas de nature à causer la mort de l'animal. Quant au manger,
on peut dire qu'il n'en a jamais assez. Un Autruchon en bonne
santé ne fait que manger du malin au soir, et la première
règle pour l'élever, c'est qu'il ne manque pas un seul instant
de nourriture.
Donc si, en Algérie, ils ne peuvent pas digérer, c'est à l'es-
tomac, c'est à la vigueur de l'organisme qu'il faut s'en prendre.
Il ne s'agit que de prévenir cet état pathologique qu'on pour-
rait comparer à un état anémique.
J'ai successivement employé :
Le Fer et ses diverses préparations;
Le Quinquina et ses dérivés;
La nourriture animale et, enfin,
La Rhubarbe.
''■ C'est à la Rhubarbe que je dois le succès. Elle est non seu-
lement un remède, mais un préventif très efficace. Je n'at-
tends pas l'apparition visible du mal. Quarante-huit heures
après que les poussins ont commencé à manger et pendant
vingt à trente jours, je leur en donne à raison de 1 décigramme
par jour. Pendant les premiers jours, je délaye la Rhubarbe
;n poudre dans de l'eau et la leur fais avaler de force. Plus
tard, lorsqu'ils man^^enl franchement, je me contente d'en
saupoudrer leur pain ou leur son, toujours dans la même
proportion de 1 décigramme par bête et par jour.
Au bout de vingt à trente jours, suivant la vigueur des
sujets, on peut abandonner ce régime et être sûr que la pre-
SUR l'Élevage des autruchons. 69
mière maladie est évitée. Il ne faut pas supprimer brusque-
ment. Au moment voulu, je commence par ne donner la
Rhubarbe que tous les deux jours pendant une semaine, puis
tous les trois et puis tous les quatre, jusqu'à la supprimer
au bout de quinze jours. Ce qui fait qu'en moyenne chaque
animal a absorbé environ 3 grammes de Rhubarbe en tout.
Comme auxiliaires pour les plus faibles, on peut ajouter le
Fer et le Quinquina, en mettant dans les abreuvoirs quelques
morceaux de métal et en ajoutant, au moment de les rem-
plir, une décoction de 30 grammes de Quinquina par 10 litres
d'eau.
Je n'ai employé que des produits de première qualité. Je
ne garantis pas les mêmes résultats avec des produits infé-
rieurs ou fraudés, qui abondent dans le commerce.
Mais, même sans le secours du Fer et du Quinquina, le
traitement à la Rhubarbe seul suffit à obtenir un bon effet.
Voici donc la première maladie évitée, la seule qui affecte
les Poussins en bas âge.
Du deuxième au troisième mois d'âge, la croissance pro-
cède ordinairement sans incidents, du moins apparents;
mais à partir du troisième mois et jusqu'au cinquième ré-
volu, les Autruchons sont sujets — à quoi — personne ne l'a
dit encore — au rachitisme.
Interrogez tous les éleveurs, lisez tout ce qu'il y a à lire à
ce sujet et tous vous diront que les jeunes ont les jambes trèi
fragiles et se les cassent. En effet, c'est toujours par les mem-
bres locomoteurs que la maladie se manifeste le plus osten-
siblement, le plus (pardonnez le mot) grossièrement.
Examinons de plus près ces manifestations extérieures,
qui amènent inévitablement la morl du sujet :
i° Fracture du tuyau du fémur ou de celui du tibia (cuisse)
sans choc et par le simple fait de la marche ou de la course
de l'animal ;
2° Flexion soit intérieure, soit extérieure, soit même pivo-
tante du tarse (canon) jusqu'à arriver au demi-cercle ou à
renvoyer le pied en arrière ;
3° Enflement extraordinaire du talon (appelé à tort ge-
70 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
noux) avec déboîtement des articulations au bout de quel-
ques jours; ■ ,
^° Enflement du talon, accompagné de fracture dans la
tête du tarse, qui alors perce la peau et apparaît à nu.
Remarque. — Le membre le plus éprouvé est, huit fois sur
dix, le gauche.
• Or, quel que soit l'effet final, tous les squelettes des
animaux qui se sont cassé les jambes présentent les carac-
tères les plus clairs et les mieux définis du rachitisme. Même
chez les sujets dont les jambes ont la meilleure apparence
extérieure, mais qui finissent par s'en casser une (premier
cas), on retrouve toujours une difformité quelconque dans la
colonne vertébrale, les côtes ou le crâne. La fontanelle prinr
cipale de ce dernier conserve une telle souplesse que la cer-
velle repousse sensiblement cette partie du crâne et on dirait
que la bête est coiffée d'une calotte.
Il y a lieu de remarquer que, lorsque le rachitisme a pour
siège spécial l'épine dorsale (animal bossu) ou le crâne, il y
a espoir de voir le sujet se remettre par lui-même. Mais,
lorsque la maladie se porte sur les os des jambes, et c'est la
majorité des cas, tout espoir de guérison naturelle, ou d'arrêt
de mal, est perdu.
C'est pourtant la seule maladie des Autruchons entre trois
et cinq mois. Il fallait y remédier. Mais toute la médecine
était impuissante à combattre le mal. L'hygiène, le change-
ment de local, la sécheresse, les régimes toniques, les phos-
phates, voilà tout ce qu'on avait, et tout ceci est complètement
impuissant. J'ai essayé de tout, sous toutes les formes, de
toutes les manières. Le résultat a toujours été nul. Les phos-
phates donnent les plus piètres résultats. .. ?.-.j
Ce n'est pas le moment maintenant d'analyser les motifs
qui m'ont fait douter de l'exactitude des théories émises
jusqu'à ce jour sur l'ossification des cartilages et les phénor
mènes si bizarres et variés du rachitisme. ■ ;
' Les tout récents travaux exécutés et les succès obtenus à
Vienne (Autriche) me mirent sur la voie et je n'hésitai pas à
employer le phosphore pur comme moyen efficace de régler
SUR l'Élevage des autruchons. 71
rossification et prévenir aussi bien que guérir le rachitisme
en ce sens que cette substance agit directement sur les vais-
seaux sanguins intéressés et empêche la résorption du calcaire
ou détermine et facilite le dépôt normal.
Les résultats que j'ai obtenus jusqu'à ce jour sont réelle-
ment surprenants.
La dose que j'emploie est de 1 milligramme de phosphore
pur par jour et par bête en dissolution dans l'huile, n'importe
laquelle.
Voilà ce que j'ai pu observer:
1° Ce traitement prévient l'apparition du rachitisme sans
avoir la moindre influence funeste sur l'économie géné-
rale.
2" Le mal n'apparaît plus, ou, s'il existait déjà, se trouve
complètement arrêté au bout de vingt jours de traitement,
c'est-à-dire lorsque le sujet a absorbé 2 centigrammes de
phosphore.
3" En augmentant la dose journalière, l'effet n'est pas pour
cela plus prompt, ce qui amène à croire que le phosphore
agit plutôt par sa présence prolongée que par sa quantité
concentrée.
Je considère (pour le moment) que ce traitement, pour
être bien efficace, doit se poursuivre pendant trente à quarante
jours. Lorsque l'action du phosphore n'agit plus efficacement
sur le système d'ossification, il agit sur le plumage et fait
virer au roux chocolat très prononcé la couleur jaune des
bouts des plumes des poussins. Ce changement de couleur,
très visible, s'opère en six à huit jours, et au bout de trente
à quarante de traitement. C'est le moment de cesser l'admi-
nistration du phosphore.
Je ferai remarquer que ce traitement peut être d'une très
grande importance en vétérinaire, car probablement il don-
nera les mêmes bons résultats pour tous les animaux en
croissance dont l'ossification est difficile ou défectueuse.
Je désire, en conséquence, constater que, à la date du
présent dépôt, j'avais :
72 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
1" Déterminé les deux causes d'insuccès dans l'élevage de
l'Autruche en Algérie, savoir :
a) Impuissance digestive de l'estomac;
b) Rachitisme pur et simple ;
2° Fixé la rhubarbe comme préventif de la première ;
3° Employé le phosphore comme préventif et curatif du
second;
4" Rendu en conséquence pratique cet élevage inutilement
tenté en grand depuis plusieurs années ;
5" Introduit le phosphore en vétérinaire comme agissant
directement sur l'ossification.
Fait à Aïn-Marmora (province d'Alger) et déposé sous pli
cacheté, le 30 décembre 1884.
CATALOGUE RAISONNÉ
DES
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS
Par M. Alfred 1¥AILLY.
LNTRODUGTION
Les pertes considérables éprouvées depuis nombre d'an-
nées dans la production de la soie du Ver du Mûrier {Serica-
ria Mori) par suite des terribles maladies qui ont sévi sur les
Vers, ont attiré l'attention des sériciculteurs de divers pays sur
certains Vers à soie sauvages susceptibles de s'élever à l'air
libre dans les pays tempérés de l'Europe.
Les maladies qui ont attaqué les races du Ver du Mûrier,
étudiées à fond et décrites par M. L. Pasteur, forment le sujet
d'un rapport très intéressant de M. Maurice Girard, qui a
paru en 1871 dans le Bulletin de mai-juin de la Société d'Ac-
climatation de France. Ces maladies, dont deux d'entre elles,
la pébrine et la flacherie, sont à la fois héréditaires et conta-
gieuses, ont pour causes principales : la trop grande agglo-
mération des Vers dans les magnaneries ou dans les chambres
où ils sont élevés, le manque d'air suffisant, la chaleur sou-
vent trop élevée du local, et enfin la malpropreté occasionnée
par les déjections des Vers.
Elevés dans les mêmes conditions, les Vers à soie sauvages
sont sujets aux maladies qui attaquent le Ver du Mûrier. Au
contraire, élevés à l'air libre et sur les arbres, ils se trouvent
dans des conditions d'hygiène qui les mettent pour ainsi dire
à l'abri de ces maladies.
Je n'entrerai pas dans de longs détails sur la manière d'éle-
ver les Vers à soie sauvages ou autres Lépidoptères. On trouve
tout ce qu'il est nécessaire de connaître dans des traités en-
tomologiques spéciaux, tels que le Guide de Véleveur de
Chenilles, par E. Berce, suivi d'un Traité spécial de Véduca-
74- SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
tion des Chenilles produisant de la soie, par E. F. Guérin-
Méneville.
L'éducation en petit des Séricigènes peut se faire comme
celle de la plupart des autres espèces de Lépidoptères, dans
des cages ou boîtes décrites dans les traités ci-dessus men-
tionnés; mais il est préférable de se servir de grandes cages>
car alors on peut y mettre de fortes branches d'arbres dont
les tiges sont plongées dans un vase rempli d'eau. Lorsque
les branches ne trempent pas dans l'eau, on est obligé de les
renouveler trop souvent, ce qui nuit beaucoup à la santé et
à la bonne venue des Chenilles.
Lorsqu'on élève les Chenilles dans les boîtes, il faut éviter
avec soin d'arroser le feuillage, comme on le recommande
quelquefois, afin, dit-on, de remplacer la rosée du matin, si
salutaire aux Chenilles. Si l'éducation se fait à découvert sur
des branches plongeant dans l'eau, ou, ce qui vaut mieux
encore, sur de petits arbres en pots, alors l'arrosage du feuil-
lage et des Chenilles est salutaire et il est même presque
indispensable dans les grandes chaleurs. Dans une boîte, tant
grande qu'elle soit, l'arrosage a un effet contraire : l'évapora-
tion étant nulle ou à peu près nulle, il en résulte que le fond
de la boîte se couvre d'une moisissure épaisse, d'un fumier,
qui engendre les maladies et fait périr les Chenilles, si l'on
ne se dépêche de les enlever à temps pour leur donner un
logement plus propre. Nos Chenilles indigènes, plus robustes
et moins délicates, peuvent quelque fois vivre impunément
dans cet état de malpropreté, mais les Séricigènes résistent
rarement à un pareil traitement.
On peut faire de petites éducations en plein air, sur les
arbres, en entourant d'un manchon les branches sur les-
quelles ont été déposées les Chenilles ; mais il faut bien fer-
mer les deux extrémités du manchon, afin d'empêcher les
Insectes nuisibles, les Perce-oreilles surtout, d'y pénétrer.
De temps en temps il faut nettoyer le manchon, surtout après
la pluie, et lorsque la branche a été dépouillée de son feuil-
lage, on la coupe et l'on transporte les Chenilles sur une
autre branche. En plein air, lorsque lés Chenilles ne sont
' SÉRIGIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 75
nullement prolégées, leur plus dangereux ennemi est l'oiseau,
surtout le Moineau. Il faut donc, dans les éducations faites
sur une grande échelle, faire surveiller les Chenilles pendant
toute la durée de l'éducation par un gardien qui tire, de
temps en temps, des coups de fusil pour éloigner les oiseaux,
comme cela se pratique au Japon pendant l'éducation de
XAntherœa Yama-maï.
Un système dont j'ai déjà parlé dans un rapport précédent
et que j'ai adopté pendant nombre d'années pour l'éducation
des jeunes Chenilles, est celui de cloches en verre, dontj'ai une
quantité de diverses grandeurs, et qui toutes ont une ou plu-
sieurs ouvertures au sommet afin de donner de l'air. Ayant eu
tous les ans un nombre considérable d'espèces différentes à
élever, sans ces cloches mon travail eût été impossible. Ces
cloches, dont quelques-unes ont jusqu'à 50 oenlimètres de
hauteur, et qui sont larges en proportion, reposent sur des
soucoupes remplies de sable recouvert d'une feuille de
papier. Les œufs de Vers à soie ou autres Lépidoptères sont
placés sous ces cloches, et vers l'époque des éclosions on intro-
duit, à travers le papier, dans le sable des soucoupes, de pe-
tites branches de la plante qui doit servir de nourriture aux
jeunes Chenilles. Aussitôt leur éclosion, les petites Chenilles
montent de suite sur les branches. A mesure qu'elles gros-
sissent, on en réduit le nombre, selon la grandeur de la
cloche. On peut ainsi élever, jusqu'à leur transformation, un
certain nombre de Chenilles, qui varie selon la grosseur des
espèces ou celle des cloches. Ce système est surtout utile pour
l'éclosion des œufs et l'éducation des Vers pendant le premier
ou les deux premiers âges, car on a ainsi tout le temps néces-
saire pour les enlever de dessous les cloches pour les placer
sur les arbres ou les élever de telle ou telle autre manière. Il
faut éviter sous ces cloches une trop grande agglomération de
Chenilles, et surtout l'humidité qui leur serait fatale. Les
branches ne doivent jamais être plongées dans du sable
mouillé ; sous ces cloches, le feuillage se conserve parfaite-
ment frais dans du sable sec. Rien n'est plus facile que de
maintenir le local propre : il suffit d'enlever la cloche et de
76 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
souffler sur le papier pour faire disparaître toutes les dé-
jections.
Jusqu'à présent, en Europe, on ne s'est occupé sérieuse-
ment que de trois espèces de Séricigènes sauvages : VAnthe-
rœa Yama-maî, du Japon; VAntherœa Pernyi eiVAttacus
cynthia, tous deux originaires de la Chine. De nombreux
rapports sur ces trois espèces ont été écrits et publiés dans
les Bulletins de la Société d'Acclimatation. Ces trois espèces
peuvent s'acclimater même dans les pays très tempérés, et il
en serait de même de plusieurs espèces de l'Amérique du
Nord. Dans la liste que nous allons donner, il est bon de
faire remarquer que toutes les espèces du genre Antherœa,
telles que Pernyi, Roylei, Yama-maî, Mylilla et Polyphe-
mus, auquel les Américains ont donné le nom générique de
Telea, sont toutes à cocon fermé et dévidable. Les cocons du
genre Actias sont fermés aussi, mais ils sont irréguliers de
forme et moins soyeux que ceux du genre Anlherœa. Les co-
cons du genre Attacus, tels que ceux du Pyri et du Carpini
de l'Europe, sont ouverts à une extrémité, de sorte que le
cocon reste le même après la sortie du Papillon. Les Chenilles
de ces divers Séricigènes sauvages sont remarquables par la
beauté et la variété de leurs couleurs ; celles du genre An-
therœa ont de brillantes taches métalliques à la base des
tubercules, argentées, dorées ou cuivrées, selon les espèces.
Quant à la qualité de la soie de diverses espèces de Séri-
cigènes sauvages, plusieurs, lelies que Pernyi, Roylei, Yama-
maï elPolyphemus, peuvent rivaliser avec le Sericaria Mori^
et un rapport sur ce sujet sera, je l'espère, publié par la So-
ciété d'Acclimatation, qui possède des échantillons de soies
dévidées ou cardées des principales espèces.
Les soies cardées par un de mes correspondants de Maccles-
field, en Angleterre, sont si bien travaillées, que même celle
de notre Pyri français semble également fine et belle.
En Angleterre, il n'y a pas de dévidage de cocons ; tous
sont soumis au cardage, et certains filateurs anglais pré-
tendent que la soie cardée vaut mieux et a plus de valeur que
la soie dévidée. Qu'il en soit ainsi ou non, le cardage a tou-
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 77
jours cet immense avantage sur le dévidage, c'est de rendre
utilisables tous les cocons percés, ou ouverts naturellement
ou endommagés.
Espérant que les remarques qui précèdent seront de
quelque utilité, nous allons maintenant donner la liste d'un
certain nombre de Séricigènes sauvages.
ESPÈCES ASIATIQUES
Anlkerœa Yama-maï Guérin-Méneville. — Ver à soie du
Chêne du Japon. Ce Ver à soie sauvage, cultivé sur une grande
échelle au Japon à cause de la beauté et de l'excellente qualité
de sa soie, fut introduit en France en 1861 par Guérin-Méne-
ville. Élevé dans divers pays d'Europe avec plus ou moins
de succès, il a actuellement presque disparu, les éducateurs
l'ayant perdu ou abandonné pour élever une espèce plus
facile, VAnlherœa Pernyi, Ver à soie du Chêne de la Chine;
mais de nouveaux essais d'éducation seront probablement
faits aussitôt qu'une quantité suffisante de graine pourra
être importée directement du Japon. Ce qui a découragé
nombre d'éducateurs, c'est que l'éclosion des Vers avait lieu
le plus souvent avant le développement des bourgeons de
Chêne; en outre, les Papillons pour la plupart refusaient de
s'accoupler en captivité. Il serait. Je crois, facile de remédier
à ces deux graves inconvénients. J'ai déjà, dans quelques-
uns de mes rapports, préconisé l'emploi de petits Chênes en
pots, dans les petites éducations, afin de commencer l'éle-
vage des jeunes Vers, aussitôt après leur éclosion, jusqu'à
la venue des bourgeons de Chêne. D'un autre côté, on évite-
rait les éclosions prématurées en plaçant, pendant tout l'hi-
ver, les œufs dans un sac de mousseline que l'on suspendrait
à l'air libre à une exposition du nord, où ils ne recevraient
jamais un rayon de soleil. Aussitôt les bourgeons de Chêne
suftisamment développés, les œufs peuvent être soumis à une
température douce et humide, afin de les faire tous éclore
aussi rapidement que possible.
Si, malgré les précautions indiquées ci-dessus, les œufs
78 SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION.
éclosent avant que les bourgeons de Chêne éclatent, il faut
aloi"s avoir recours à un autre feuillage. Cette année-ci (1885),
mes jeunes Vers Yama-maï se sont fort bien accommodés
des feuilles du Charme et de l'Aubépine, et un de mes corres-
pondants à Londres m'affirme avoir élevé ses Vers exclusive-
ment sur l'Aubépine jusqu'à la formation du cocon (voy^
Rapport du Bulletin d'août 1885).
Quant à l'autre difficulté, celle d'obtenir l'accouplement
des Papillons, il suffit, pour réussir, de placer les cages à éclo-
sions en plein air ou mieux encore de les suspendre aux
branches des arbres. En chambre, les Papillons du Yama-
maï, comme ceux d'autres espèces, s'accouplent très diffici-
lement. Gomme ceux du Bombyx du Mûrier, les œufs du
Yama-maï se conservent tout fhiver pour n'éclore qu'au
printemps. Mais en réalité, il y a une différence notable. Les
œufs du Bombyx du Mûrier ne contiennent pendant tout l'hiver
qu'un germe; ils restent Hquides. Ce n'est qu'au printemps,
lorsqu'ils sont soumis à la chaleur, que la larve se forme, et
elle sort de l'œuf aussitôt après son développement. L'œuf
fécondé du Yama-maï, au contraire, contient une larve qui
se forme environ trois semaines après la ponte, et la jeune
larve toute développée, au mois d'août ou en septembre,
reste dans l'œuf jusqu'au mois de mars ou d'avril avant
d'éclore. Le Bombyx du Mûrier hiverne donc à l'élat d' œuf,
le Yama-maï à l'état de larve. Les œufs des autres espèces de
Séricigènes dont j'ai fait l'éducation n'ont jamais pu hiverner,
ils ont toujours éclos quelques semaines après la ponte, ou
les larves ont péri dans l'œuf lorsque le temps était trop
froid pour l'éclosion. Les œufs de seconde génération de
VA. Pernyi et de VAttacus cynlhia, pondus en octobre, par
exemple, n'ont jamais été d'aucune utilité pour le printemps
de Fannée suivante. Il en a été de même des œufs de VAn-
therœa mylitta, de VAttacus Atlas et autres.
Les œufs Yama-maï, dans les pays du midi de l'Europe,
peuvent éclore- dès le mois le mars ; dans ceux du Nord, ils
n'écloront qu'en mai. En Ecosse, ils éclosent en juin. Tout
dépend de la température des divers pays, et encore les éclo-
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 79
sions d'œufs, comme de Papillons, sont-elles relardiîes ou
accélérées par les variations de température, comme celles
de nos Lépidoptères indigènes. Il en est de même de la durée
des éducations, rien ne peut se préciser, à moins d'avoir une
température uniforme. En plein air à Londres, la durée d'une
éducation de Yama-maï a été de cent dix jours ; au contraire,
une éducation faite à une température constante de 25 à
27 degrés centigrades n'a duré qu'un mois à peu près.
Une question qui m'est souvent faite, est celle-ci : à quelle
époque éclosent les Papillons de telle ou telle espèce ? Il me
faut de nouveau répondre qu'il est impossible de préciser
l'époque. Une caisse de cocons d'A. mi/litla, par exemple,
m'est expédiée de Calcutta à Londres. Ces cocons récoltés
les uns à Darjeeling, les autres dans l'Assam, et par consé-
quent, de différentes provenances, avaient déjà fait un pre-
mier voyage avant d'être expédiés de Calcutta. Une fois arri-
vés à Londres, ils sont réexpédiés les uns en Europe, les
autres en Amérique, et dans des pays où le climat est plus
froid que dans leur pays d'origine. En réfléchissant, on com-
prendra qu'après de tels voyages et soumis en outre à une
température plus froide, il s'opère un bouleversement dans
l'économie de l'Insecte et que les Papillons ne peuvent éclore
régulièrement. En 1885, le premier Papillon mylilta est éclos
le 12 mai, le dernier à la fin- d'octobre; d'autres cocons ne
sont pas éclos ; ils peuvent hiverner deux fois et même trois
fois. Ce n'est qu'une fois acclimatés qu'ils peuvent avoir des
mœurs régulières, ou à peu près régulières.
Atlaciis cynthia Drury. — Ver à soie de TAilante, origi-
naire de la Chine. Introduit en France par Guérin-Méneville
en 1858, d'où il se répandit dans toute l'Europe, en Afrique,
en Amérique et jusqu'en Australie. Cette espèce, à cocon
ouvert, comme toutes celles du même genre, est naturalisée
en France et aux Étals-Unis de l'Amérique du Nord. Outre
l'Allante {Ailanlhus glandulosa), VAtlacus cynthia peut
s'élever sur le Ricin, le Lilas, le Cytise {Cytisus laburnum),
l'Épine-vinetle. (5er6ms vuigfans), le Cerisier, etc.
80 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
Les Papillons Cynlhia éclosent ordinairement au mois de
juin dans les pays à climat tempéré, et les œufs éclosent de
douze à quinze jours après la ponte à la température ordi-
naire. Dans les pays chauds, l'espèce devient bivoltine et même
polyvolline. Commun en Chine, VAttacus cynlhia se trouve
aussi à l'état sauvage dans l'Inde, à Miissoorie où il vit sur
diverses espèces de végétaux ; dans presque toute la chaîne
de l'Himalaya, dans le Dehra Doon, dans l'Assam, à Gachar
et à Sangor. Les Papillons s'accouplent très facilement.
Antlierœa Pernyi Guévm-Méne\'û\e. — Ver à soie du Chêne
de la Chine. Cette précieuse espèce à gros cocon fermé, et
dont la belle soie peut se dévider, est maintenant élevée
dans presque toute l'Europe. La reproduction du Pernyi est
des plus faciles, les Papillons, lorsqu'ils sont bien conformés,
s'accouplant toujours à l'air libre ou dans un local quel-
conque. On ne saurait trop recommander l'éducation de cette
espèce, qui peut se faire à l'air libre, même dans les pays du
Nord. En Espagne, son éducation a déjà été faite sur une
assez grande échelle ; l'espèce y est bivoltine ainsi que dans
le midi de la France; dans les pays du Nord elle est uni-
voUinc.
Au sud de l'Europe, les Papillons peuvent éclore dès le
mois de mciiS; au Centre et au Nord, en avril ou en mai. Les
œufs éclosent deux, trois et quelquefois quatre semaines
après la ponte. L'éducation à l'air libre dure de six à huit
semaines, et quelquefois plus, selon la température. — Le
Pernyi a éié élevé sur le Prunier, mais c'est sur le Chêne qu'il
faut l'élever. Un de mes correspondants de l'illinois (Étals-
Unis), a vu les Vers de la seconde génération quitter les Chênes
dont le feuillage était devenu dur et coriace, par suite de la
i-rande chaleur et de la sécheresse, et vivre sur les buissons
d'Aubépine qui se trouvaient à côté des Chênes. D'autres
furent trouvés dans un jardin, sur des Pommiers, où ils avaient
atteint une taille énorme.
Anllierœa Roylei Moore. — Ver à soie du Chêne de l'IIima-
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 81
laya. Espèce très rapprochée de l'A. Pernyi ; les Papillons
sont d'une nuance beaucoup plus pâle et verdâtre. La prin-
cipale différence est dans le cocon ; celui de Roylei est recou-
vert d'une énorme enveloppe irrégulière et extrêmement
dure ; le cocon Pernyi^ au contraire, n'ayant aucune enve-
loppe. Les Papillons provenant de cocons importés de l'Inde
éclosent pour la plupart en mai et juin, quelques-uns au
commencement de juillet. Les Papillons Pernyi et Boylei
s'accouplent entre eux comme s'ils n'étaient qu'une seule et
même espèce. Les œufs sont identiques, et il en est apparem-
ment de même des Chenilles. L'éclosion des œufs a lieu après
le même laps de temps et la durée de l'éducation est la
même. Le croisement du Roylei avec le Pernyi produit le
remarquable et robuste hybride que j'ai obtenu en 1881,
susceptible de reproduction et de se propager en formant un
type intermédiaire tenant à la fois du Roylei et du Pernyi.
L'A. Roylei est commun à Simla, à Mussoorie, à Atmorah
et il se trouve aussi à Darjeeling.
Antherœa mylitta ; Attacus mylitta Fabricius ; Attacm
paphia Linné. — Ver à soie connu sous le nom de Tussah,
Tasser, Tussur, etc. Répandu dans toute l'Inde et l'île de
Ceylan, où il vit à l'état sauvage. Il est cultivé sur une grande
échelle dans le Bengale, l'Assam, etc. Les diverses races de
cette espèce diffèrent de taille, les plus gros cocons provenant
généralement de l'Himalaya et autres parties du nord de
l'Inde.
Le cocon fermé est lisse et sans aucune bourre ; il est sus-
pendu par une forte corde de soie qui forme anneau autour
de la branche de l'arbre. En Europe, cette espèce a été élevée
sur le Chêne et le Charme. Dans l'Inde, l'A. mylitta vit sur
un grand nombre d'arbres et d'arbrisseaux, entre autres :
Terminnlia tomentosa, Ziziphus jujuba, Lagerstrœmia In-
dica. Ficus Benjamina, Carissia, Enidia, etc. Le Mylitta a
aussi été trouvé sur le Prunier sauvage.
Les Papillons provenant de cocons importés du nord de
l'Inde commencent généralement à éclore fin juin, mais
4« SÉRIE. T. III. — Février 1886. &
îSS SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
'C'est en juillet et août qu'ils éclosent en nombre; ils conti-
nuent à éclore en petites quantités ou isolément jusque vers
la fin d'octobre ; ils éclosent même pendant l'hiver, si le temps
«st doux. Les cocons peuvent hiverner deux fois et même
■trois fois. Dans les pays du Nord, le Mylitla ne peut s'élever
'à l'air libre, l'éclosion des larves ayant lieu à une époque très
"avancée de l'année. Il faudrait, pour réussir, pouvoir forcer
l'éclosion des Papillons, et maintenir les œufs à une tempéra-
Hure de 25 à 30 degrés centigrades, de manière à les faire
éclore dix à douze jours après la ponte. En Espagne, où j'ai
iniroduil le M y litta en 1884, M. Segin, vice-consul britan-
nique, a réussi à élever, à l'air libre, sur le Chêne, les Vers
provenant d'un accouplement qui eut lieu le 31 juillet. L'éclo-
sion des œufs eut lieu dix jours après la ponte, et les Vers
i commencèrent à filer le 29 septembre. Les Vers provenant de
deux autres accouplements qui eurent lieu, l'un le 13 et l'autre
• le 14- août, périrent tous au milieu de novembre, par suite
d'un changement subit et complet de température, au mo-
ment où ils allaient se mettre à filer.
. Antherœa Assama; A. assamensis Helfer. — A l'exception
tde Dehra Doon, où elle vit sur un arbre connu sous le nom de
V4 Kirkee »^ cette espèce ne se trouve que dans l'Assam, où
'•en langue assamoise elle porte le nom de Muga, qui signifie
. « ambre » à cause de la couleur du cocon. L'A. assamensis
■est cultivé dans l'Assam sur une grande échelle et la soie en
est fort estimée. Dans certaines parties de l'Assam on ob-
tient cinq générations.
L'éclosion des Papillons et celle des œufs a lieu dans les
maisons, après quoi on élève tes Vers à l'air libre sur di-
verses espèces d'arbres. Les Vers sont surveillés pendant
toute la durée de l'éducation et on les rentre au moment où
ils commencent à filer.
^ Le Suïïi {Machilus odoratissima) es,i \3l nourriture favorite
de celte espèce; élevé sur cet arbre, le Ver produit, dit-on, la
plus belle et la meilleure soie. Cette soie est dévidée. Dans
l'Assam inférieur, on l'élève sur le Sualu (Telranlhera mo-
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 83
nopetala). Le feuillage de certaines espèces d'arbres fores-
tiers, tels que le Dighlati {Tel. glauca), le Patichanda {Cin-
namomiim obtusifolium), et le Bamroti (Symplocos gran-
diflora) peuvent aussi lui servir de nourriture, si le feuillage
des deux premiers arbres vient à manquer aux derniers âges.
Le cocon Muga a environ un pouce trois quarts de longueur
sur un pouce de diamètre; il est d'un beau jaune d'or. Il y a
cependant un certain nombre de cocons de couleur foncée.
L'A. Assama vit aussi à l'état sauvage dans l'Assam.
Antherœa Frithii Moore. — N'est probablement qu'une
variété de l'A. mylitla, et doit vivre sur les mêmes végé-
taux. A. Frithii se trouve dans quelques parties de l'Inde, en
Cochinchine, etc., et, selon le capitaine Hulton, à Darjeeling.
Antherœa Perroteti Guérin-Mén. — Espèce découverte à
Pondichéry par M. Perroltet, et qui est tout simplement une
des races ou une variété du Mylitta.
Antherœa Helferi. — Autre espèce dont le cocon res-
semble à celui de l'A. mylitta. Se trouve à Darjeeling.
Antherœa nebulosa Hutton. — Espèce remarquable et
assez commune dans l'Inde centrale, et dont la soie peut riva-
liser avec celle de l'A. paphia (mylitta) (Gap. Hutton).
Bombyx (Theophila) Huttoni Westwood. — Espèce bivol-
tine vivant dans les montagnes sur le Mûrier indigène de
Simla,de Mussoorie et d'Almorah. Le B. Huttoni est très ro-
buste, et il produit un beau cocon blanchâtre. Quoique le Ver
soit trop sauvage pour être élevé en captivité, cette espèce
serait d'une grande utilité pour les éducations à l'air libre,
sur le Mûrier même (Gap. Hutton).
Bombyx {Theophila) Bengalensis Hutton. — Espèce poly-
yolline ressemblant au ^. Huttoni, mais elle vit au Bengale
84 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
sur VArtocarpus Locucha. Cette espèce est plus petite que la
précédente (Gap. Hutton).
Bombyx a f finis. — Découvert en 1869 à Ghota Nagpore
' par M. Kingi ; il vit sur VArtocarpus Locucha, mais le capi-
taine Hutton réleva avec le plus grand succès sur des bran-
ches" de Morus Indica.
Bombyx (Theophila) Sherwilli Moore. — Le Papillon de
cette espèce ressemble beaucoup à celui du B. Huttoni,
mais il est un peu plus grand. Tout ce que l'on sait, c'est
que l'insecte parfait se trouvait dans la collection du major
J.-L. Sherwill; on ignore s'il a été capturé dans les plaines
ou à Darjeeling.
Bombyx (Ocinara) religiosœ Helfer. — Quoique portant le
nom de Bombyx, la description donnée par le docteur Helfer
s'applique plutôt à une espèce d'Ocinara. Le docteur Helfer
l'appelle le Ver à soie Goree^ et M. Hugon le Ver à soie Deo-
mooga. On dit qu'il se trouve entre l'Assam et le Shylet
(Cap. Hutton).
Dans son rapport sur la « soie dans l'Assam » en date du
29 février 1884-, M. E. Slack, Directeur de l'Agriculture,
-.;parle ainsi de cette espèce : « Ce Ver à soie {Bombyx reli-
giosœ) est appelé Deomuga à cause de sa grande taille. C'est
le plus gros de tous les Vers à soie ; il atteint une longueur
de six pouces et demi ; c'est aussi le plus joli. » M. Buckin-
.gham en parle ainsi : « Ce Ver à soie vit sur le Sum (Machi-
lus odoratissima) et quelquefois avec le Muga ordinaire. Au
.deuxième et au troisième âge, il est d'une beauté remar-
quable, avec des rangées de taches d'un bleu de turquoise sur
les côtés. Au quatrième âge, les taches bleues disparaissent
et des taches jaunes d'or les remplacent. De chaque côté du
corps, il y a des bandes qui ont toutes les couleurs de l'arc-
en-ciel, ce qui rend ce Ver à soie de beaucoup supérieur en
'beauté à tous les autres. »
■ Le Ver Deomuga vit, dit-on, trente jours et file son cocon
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 85,,
en trois jours. Le Papillon éclôt au bout de quinze jours
lorsque le temps est chaud, et au bout de trente jours pen-
dant la saison froide ; le Papillon vit quatre jours. Le cocon
est gros (3" x 1 j) ; il fournit une grande quantité de soie
forte et grossière. La dureté du cocon rend le dévidage diffi-
cile et la soie se noue souvent. Le fil du Deomuga est employé
au Bengale à faire des lignes à pêcher. A Cachar, le Deomuga
vit sur le Ficus Indica et sur le Pi'pal {Ficus religiosa). Il
se trouve généralement dans la vallée de l'Assam.
Ocinara lida Moore. — Cette espèce se trouve à Mussoo-
rie ; la Chenille, qui ressemble à une Géomètre, vit sur le
Ficus venosa et le Figuier sauvage. Elle file un petit cocon
blanc sur une feuille ou sur une pierre au pied de l'arbre ; le
cocon est trop petit pour être d'aucune utilité (Cap. Hutton).
Ocinara lactea Hutton. — Cette espèce se trouve aussi à
Mussoorie et elle vit sur le Ficus venosa, filant dans une
feuille un curieux petit cocon jaune. Ce cocon est entouré
d'une dentelle de soie jaune. La Chenille est liàse, tandis que
celle de l'O. lida est velue (Cap. Hutton).
Ocinara comma Hutton). — Le Papillon de cette espèce
est blanc avec une marque foncée en forme de comma sur le
disque des ailes supérieures. Il se trouve dans le Doon à en-
viron 5500 pieds au-dessus de Mussoorie.
îfc'j
Trilocha varians Moore. — Petite espèce découverte â
Ganara, et par M. Grote à Calcutta. N'est d'aucune utilité
pour la soie. V*
Cricula trifenestrata. — Cette curieuse espèce se trouve
dans diverses parties de l'Inde , quelquefois en si grand
nombre que les larves dépouillent entièrement les Mair-
guiers, détruisent aussi le feuillage de VAcacia catechu et'
attaquent même l'arbre à Thé. Se trouve dans le Birman, lé'
Moulmein et à Chota Nagpore, dans l'Inde centrale. Les co-
SS SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
cons se trouvent en las et ils sont tellement assujettis les uns
aux autres qu'on ne peut les séparer pour filer la soie, ce que
leur structure, du reste, ne permettrait pas; c'est pourquoi
on les carde. Ils sont en forme de réseau et d'un jaune d'or.
J'ai fait connaître et élever cette espèce en Europe en 4884?/^
Par moi, les Chenilles de cette espèce furent d'abord élevées
sur le Chêne, le Prunier, le Pommier, le Poirier et le Saule, "
ensuite sur le Prunier exclusivement. Un de mes correspon-
dants les a, je crois, élevées sur le Tilleul.
Dans le rapport de M. Stack, on trouve ce qui suit sur cette
espèce : Amluri ou Ampotoni {Cricula trifenestrata). L'Aw-
luri prend son nom du Manguier ou Am sur lequel il se
nourrit. C'est un des Vers à soie les plus communs de l'As-
sam. Il se trouve dans la vallée, au pied des collines du côté
nord et du côté sud, et aussi à Gachar, où l'arbre à Thé sau-"
vage lui sert de nourriture. Il se trouve aussi fréquemment
sur le Sum ; mais sa nourriture favorite est le Manguier des
forêts ou le Manguier cultivé près des villages. La chrysalide,
comme celles de toutes les espèces de Vers à soie sauvages, est
un mets recherché des Kacharis, des Rabbas, des Mèches et
des Mikirs. LeR. P. Gambouénous a aussi fait savoir que les
Malgaches, à Madagascar, mangent avec délices les chrysalides
des Vers à soie, en friture.
Caligula Simla Westwood. — Le cocon de cette espèce
est en forme de réseau. Il ressemble pour la forme à celui de
Cricula trifenestrata, mais il est plus gros et d'une couleur
foncée, presque noire. Il y a quelques années, je reçus des
cocons vivants de cette espèce, mais toutes les chrysalides que
Ton voyait se mouvoir dans les cocons périrent au bout de
quelque temps. Se trouve à Simla, à Miissoorie et dans la
province de Kumaon, se nourrissant sur le Noyer, le Salix
Babylonica, le Poirier sauvage, etc. Cette espèce se trouve
aussi au Japon, où elle se nourrit sur le Châtaignier comes-
tible.
Caligula thibeta. — Se trouve à Mussoorie, où il vit sur
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 87
VAndromeda ovalifolia, le Poirier sauvage et le Cognassier
commun. Il se trouve aussi dans la province de Kumaon, mais
son nom spécifique est faux, l'insecte ne s'approchant jamais
du Thibet. Le cocon est un réseau grossier à travers lequel on
voit la chrysalide.
Neoris Hultoni Moore. — Espèce découverte par le capi-t
taine Hutlon à Mussoorie, à environ 6500 pieds d'élévation,
vivant sur le Poirier sauvage. Les Chenilles se trouvent en
avril. Le cocon est un réseau qui ne produirait pas de soie.
Attacus Ricini. — Espèce dont le Ver produit la soie con-
nue des indigènes sous le nom de soie arrindy. Le Ver
s'élève sur le Ricin (Ricinus communis). Les principaux en-
droits où cette espèce est cultivée sont: l'Assam, le Bengale
oriental, Rungpore et Dinagepore. Les Mékirs, dans la partie
orientale du Bengale, en possèdent une très belle espèce à
soie blanche. V Attacus Ricini {B . arrindia), selon certains
sériciculteurs, n'est autre que V Attacus cynthia, élevé sur le
Ricin à l'état de domesticité. C'est dans l'Assam que cette es-
pèce est presque exclusivement cultivée, et, comme le Ver du
Mûrier, elle est cultivée à l'état de domesticité, où elle porte
le nom d'Eri, mot qui signifie iîicm. L'espèce vit aussi sur le
Keseru {Heteropenex fragrans); il y a aussi plusieurs autres
arbres, tels que le Gulancha (Jatropha curcas)^ le Gamari
{Gmeiina arborea) et même, dit-on, le Bogri commun ou Ber
{Ziziphus jujuha), sur lesquels le Ver peut s'élever, si le
Ricin vient à manquer.
Actias setene. — Espèce répandue dans l'Inde et l'île de
Ceylan; cocon fermé, mais irrégulier et peu soyeux. Il y a ce-
pendant quelques races à cocon épais et ferme, celle de Ma-
dras, par exemple; la soie en a été, dit-on, dévidée. Le Pa-
pillon de cette espèce est d'une beauté remarquable, ses ailes
sont d'un beau vert tendre et sa forme est celle d'un Papilio
à longue queue, tels que P. podalirius de l'Europe et
P. ajax de l'Amérique du Nord. La Chenille s'élève très bien
88 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
sur le Noyer; elle vit aussi sur le Cerisier sauvage. Dans
rinde, elle vit sur le Poirier sauvage, le Noisetier, le Cedrela
paniculata, le Coriara Nepalensis et plusieurs autres arbres
et arbustes forestiers.
Actias mœnas Doubleday. — Espèce qui se trouve à Dar-
jeeling et dans TAssam. C'est une grande espèce dont on ne
connaît encore ni les habitudes ni le produit. Le Papillon est
vert tendre. • -^'^^ '^
Aclias leto. — Se trouve dans les mêmes contrées et avec
l'espèce précédente. 11 est très probable que Mœnas et Leto ne
sont que la même espèce : Mœnas est le Papillon femelle,
Leto le Papillon mâle ; il n'y a maintenant, je crois, aucun
doute à ce sujet. Les ailes de Leto sont vertes, mais couvertes
de taches d'un brun rougeâtre, qui manquent chez le Pa-
pillon femelle Mœwas.
Saturnia pyretorum. — Se trouve à Darjeeling et à Cachar,
mais c'est tout ce que l'on sait (Cap. Hutton).
Saturnia Grotei Moore. — A été trouvé à Darjeeling et
un ou deux Papillons ont été capturés à Mussoorie. Le capi-
taine Hutton a lieu de croire que la Chenille vit sur le Poirier
sauvage.
Saturnia lindia Moore. — Tout ce que l'on sait de cette
espèce, c'est qu'elle se trouvait dans la collection faite par le
feu capitaine James Lind Sherwill et l'on suppose qu'elle
provient de Darjeeling ou de ses environs; elle est alliée à
Sat. Grotei (Cap. Hutton).
Saturnia cidosa Moore. — De la collection du capitaine
J. L. Sherwill, provient du nord-est de l'Inde. Nous n'avons
aucun renseignement sur cette espèce. Comme elle est très
rapprochée de Sat. pyretorum, je suis porté à croire qu'elle
habite Darjeeling ou Cachar (Cap. Hutton).
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 89'
Lœpa Katinka West. — Papillon jaune d'une beauté re- \.
marquable, découvert pour la première fois dans l'Assam; se"î
trouve aussi, à ce que je crois, à Mussoorie. M. Moore, cepen--
dant, considère l'espèce que je possède comme étant dislincte.o-
On pourrait peut-être en obtenir une petite quantité de soie
(Gap. Hutton).
Lœpa sivalica Hutton. — Espèce étroitement alliée à la
précédente; se trouve à Mussoorie, à 5500 pieds et aussi plus
bas; pourra probablement produire une [petite quantité de
soie (Cap. Hutton).
Lœpa miranda Alkinson. — Belle et bonne espèce, dé-.j
couverte à Darjeeling par M. Atkinson; mais là s'arrêtent les ;
renseignements (Cap. Hutton).
Lœpa sikkimensis Alkinson. — Très belle espèce, décou-
verte à Darjeeling par M. Atkinson ; on peut la distinguer des
autres espèces par sa petite taille et par ses ailes, qui sont
tachetées de marron; on ne sait rien de son économie (C. H.).'
Atlacus Atlas Linn. — Le plus grand des Bombyciens sé-
ricigènes; commun à 5500 pieds d'élévation à Mussoorie'
et dans le Dehra Donn ; il se trouve aussi dans les profondes
vallées des collines environnantes; il est commun aussi à-
Almorah, où le Ver vit sur leKilmorah ou Berberis Asiatica,
tandis qu'à Mussoorie il n'attaque jamais cet arbuste et vit
exclusivement sur les feuilles du Falconeria insignis. Le
Ver de cette espèce est probablement plus facile à élever que
celui de toutes les autres espèces de Bombycides sauvages;
il produit un très gros cocon, riche en soie et d'une couleur
grisâtre; l'espèce abonde aussi à Cachar, dans le Sylhet, et
se trouve à Akyab, dans l'Arracan et aussi en Chine (Note
du capitaine Hutton).
VAtt. Allas est répandu dans toute l'Inde, l'île de Ceylan,
la Chine, le Birman et autres pays jusqu'à Singapore, à l'ex-
trémité de la péninsule malaise; il se trouve également à
90 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
Java, à Bornéo et probablement dans toutes les autres îles de
l'océan Indien. Les diverses races de cette espèce diffèrent
par la taille et le coloris des ailes, les cocons ont aussi une
teinte un peu différente; la Chenille est tiès polyphage.Dans
l'île de Geylan, elle vit de préférence sur le Cannellier {Lau-
rus cinnamomum) et le Milnea Roxburghiana, mais elle
se trouve aussi sur beaucoup d'antres arbres.
En Europe, elle s'élève parfaitement bien sur l'Epine-
vinette {Berberis vulgaris) ; elle peut aussi s'élever sur le
Pommier, le Saule, le Charme et autres arbres et arbustes.
En 1884 je l'ai élevé à Londres, sur l'Allante, à l'air
libre, jusqu'au troisième âge. On ne pourrait élever VAtlas^
à l'air libre, jusqu'à la formation du cocon, que dans les
pays du Midi, mais l'espèce s'élève facilement en captivité.
La Chenille de VAllas, comme celle de VAtt. cynthia, est
couverte sur tout le corps d'une sécrétion, formant une
sorte de farine blanche. VAlt. Atlas et VAtt. cynthia ont
quelques traits de ressemblance; les deux espèces ont été
trouvées vivant sur rÉpine-vinetle , dans la province de
Kumaon. i
Attacus Edwardsii Moore. — Espèce découverte à Dar-
jeeling, de couleur très foncée et d'une taille plus petite. On
ne connaît ni sa nourriture, ni sa vie (Note du capitaine
Hutton). Il est probable que VAtt. Edwardsii n'est qu'une
des nombreuses races ôeVAtl. Atlas.
ESPÈCES D'AFRIQUE
Les Bombyciens séricigènes de l'Afrique, et il y en a un
très grand nombre, sont encore presque tous inconnus
comme sétifères; c'est pourquoi je ne pourrai que citer les
noms de certaines espèces. Au Cap de Bonne-Espérance, il y
en a au moins cinq espèces, dont l'une, la Saturnia Isis
Weslwood, se trouve aussi à Sierra- Leone avec la Sat.
aletida et la Sat. phœdura Dury. A Natal, il y a VActias
mimosœ, dont le Papillon est admirable. Au Sénégal, il y ;a
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 91
\e Faidherbia, à cocon fermé, dit-ori; ce serait alors un
Antherœa; peut-être celte espèce est-elle celle qui est con-
nue sous le nom de Bombyx Bauhiniœ.
Les Séricigènes de Madagascar sont mieux connus, et le
R. P. Gamboué en parle dans son intéressant rapport, qui
a paru dans le Bulletin de juin 1885, de la Société d'Accli-
matation, C'est dans le rapport du P. Camboué que je puise-
rai les quelques renseignements que je vais donner sur les
Vers à soie malgaches. '
Borocera Madagascariensis Boisduval. — Espèce que les
Malgaches appellent Bibindandy (Ver à soie), et dont ils
tirent la soie, qui sert à la confection de leurs magnifiques
étoffes dites Lamba-Landy. Le cocon, qui est grisâtre, a,
chez la femelle, environ 0'",05 de longueur sur O^jOS de
plus grand diamètre ; chez le mâle, il n'a que O^jOS de lon-
gueur sur 0'",015 de plus grand diamètre. L'éclosion du
^ Papillon a lieu une trentaine de jours après la formation de
la chrysalide. La Chenille du Bibindandy est très poly-
phage; mais les Malgaches l'élèvent de préférence sur l'Em-
brevattier {Cytisus cajanus) et sur le Tapia (Tapia edulis) ;
elle vit aussi sur le Goyavier, le Bibacier et le Saule pleureur.
Sur la côte, le R. P. Camboué a trouvé des cocons de Bibin-
dandy sur l'Oranger, le Badamier, et le Fotabe {Baringtonia
speciosa). Sur la côte ouest, on en trouve beaucoup sur les
Palétuviers et autres arbres croissant aux bords de la mer.
Le Bibindandy peut vivre jusque sur les hauteurs de l'in-
térieur de l'île, où il n'y a que 3 à 4 degrés centigrades de
chaleur. C'est le plus important des Vers à soie sauvages de
Madagascar.
Bibindandy dynamboa (Ver à soie des Chiens) et Bibin-
dandy madinika (petit Ver à soie), sont deux espèces de
Borocera se rapprochant du Madagascariensis.
Saturnia Suraka Boisduval ; Caligula Suraka. —
Grande et belle espèce, dont la Chenille atteint 10 centi-
mètres del ongueur et forme un cocon à tissu double en
92 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
treillis, très fort, de couleur jaunâtre, mesurant environ
6 centimètres de longueur sur 3 centimètres de plus grand
diamètre. La Chenille, qui est polyphage, vit très bien sur le
Laurier rose {Nerium oleander). Arrivée au dernier âge, elle
est verte avec plaques noir verdâtre et tubercules épineux ;
tirant sur le rose. L'insecte parfait sort après une trentaine
de jours.
Le P. Camboué a observé sur le littoral est, à Tamatave,
une autre espèce de Saturnia, se rapprochant assez de Su-
raka. La Chenille, fausse Arpenteuse, est d'un beau noir,
garnie sur ses segments de proéminences épineuses, jaunes
sur les huit derniers, rosées sur les premiers. Le corps est
parsemé de taches jaunes de la même couleur que les tuber-
cules. Les stigmates sont noirs, bordés de jaune; les fausses
pattes d'un beau noir luisant. Elle atteint 9 centimètres de
longueur sur 12 millimètres déplus grand diamètre. Elle est
aussi polyphage et vit bien sur le Laurier rose. Le cocon est
plus petit et de couleur plus sombre que celui de S. Suraka.
LISTE D ESPÈCES SÉRICIGÈNES D AFRIQUE
Bombyx Bauhiniœ {1res recommandé).
Bombyx annulipes Boisduval.
Salurniu Cajani Guérin-Méneville.
Bombyx Bhadama Bdv. — Espèce commune à Madagascar.
Les Chenilles vivent en société dans des poches communes
contenant de 500 à 600 cocons, dont la soie grossière est
utilisée.
Bombyx Diego. — Moins connu que le précédent et vivant
de la même manière.
Bombyx Fleuriotii Guérin-Méneville. — A peine connu
et servant à tisser des lambas sur la côte méridionale.
Saturnia auricolor Mabille.
Saturnia fuscicolor Mabille.
Bombyx panda. — Vit comme le Bhadama et produit une
soie très estimée.
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 93
Saturnia vacuna Westwood. — Habite l'Ashantee.
Saturnia mythimnia Weslw. — Port Natal.
Saturnia arata Westw. — Ashantee et Sierra-Leone.
Saturnia belina Westwood. — Zoulouland.
Saturnia hersilia Westw. — Congo.
Saturnia menippe Westw. — Natal et autres parties de
l'Afrique australe.
Saturnia tyrrhea Cramer. — Cap de Bonne-Espérance et
Afrique australe.
Saturnia cytherea Fabricius. — Gap de Bonne-Espérance
et Afrique australe.
Saturnia nenia Westw. — Congo.
Saturnia agathylla Westw.
Saturnia Said Oberthùr. — Belle et grande espèce trou«
vée par M. Raffray à Bagamoyo, en face de l'île de Zanzibar.
Saturnia thyella Zamberia Felder.
ESPÈCES D'EUROPE
Il n'y a en Europe aucun Bombycien qui soit important
comme séricigène. Des six espèces que je vais mentionner,
les trois premières produisent une soie assez grossière, et
il en est de même, je crois, de la quatrième, Cœcigœna. La
Sat. Isabellœ fournit un cocon dont la soie est assez fine,
mais elle est peu abondante. UOtus seul semblerait être une
espèce digne d'attention comme sétifère, mais cette espèce
est plutôt asiatique qu'européenne.
AttacusPyri S. V. Godard; Saturnia pavonia major Linn.
— Europe centrale et méridionale. Se nourrit principale-
ment sur le Pécher, l'Amandier, le Poirier, le Pommier, le
Prunier, l'Orme, le Frêne, etc. En France, la Chenille atteint
toute sa taille dans le courant du mois d'août. Elle forme son
cocon sous les corniches des murs, aux bifurcations des
grosses branches, ou au pied des arbres. Il y a en Algérie une
variété de Pyri, décrite par M. H. Lucas, sous le nom de
Saturnia Atlantica.
' 94- SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Attacus carpin.i S. V. God., Dup., Bdv. ; Saturnia pavonia
minor L. — Dans presque toute l'Europe ; se trouve jusque
dans le nord de l'Angleterre. La Chenille vit sur l'Orme, le
Charme, le Bouleau, le Saule, le Prunellier, la Ronce, la
Bruyère, etc. Cette espèce est plus précoce que la précédente;
les papillons éclosent généralement en avril. Les Chenilles
écloses en mai forment leur coque, qui est pyriforme, vers le
milieu de juillet, dans les buissons.
Attacus spini Borkha.usen; S at. pavonia média Fabricius.
— Allemagne, Autriche, Hongrie. Cette espèce ne peut, dit-
on, s'accoupler qu'à l'air libre. Je n'ai jamais pu obtenir la
reproduction de cette espèce en captivité après plusieurs
. annéCvS d'essai. En 1881, avec une quarantaine de cocons, je
ne pus obtenir que sept ou huit Papillons; les chrysalides,
comme celles de Pyn et de Carpini, restent souvent deux
ans et même trois ans avant d'éclore. Les Papillons de Spini,
en 1881, ont commencé à éclore le 17 avril, les Carpinile SO.
D'après ces dates, le Spini serait encore plus précoce que le
' Carpini. La Chenille vit sur le Prunellier, Prunus spinosa.
Le cocon est plus gros et plus soyeux que celui de Carpini
et est de forme ovale. Le Papillon, qui ressemble assez à
cehii de Pyri, est, comme chez celui-ci, de même couleur et
de même taille chez les deux sexes; il y a, au contraire, une
• différence très marquée chez le mâle et la femelle dé Carpini,
tant pour la taille que pour la couleur.
Saturnia cœcigœna Hubner. — Dalmatie, Turquie, Asie
• ' Mineure. Je n'ai encore aucune donnée sur cette espèce.
■ . Saturnia (Actias) Isahellœ. — Espagne centrale. Magni-
fique espèce découverte par M. Mieg, décrite et figurée dans
les Annales de la Société entomologique, 1850, p. 241,
■ pi. Vlil, par M. le professeur Graells. Le Papillon ressemble
'par la forme à V Actias luna des États-Unis de l'Amérique du
' Nord ; il est d'un be'au vert avec les nervures brunes. La Che-
nille est verte, avec la tête et le milieu des segments bru-
n'vsÉRIClGÈNES SAUVAGES eONWUS. .95
• nâtres; deux taches allongées, rouges, bordées de blanc, se
remarquant sur le bord de chaque segment; elle vit sur le
Pin des forêts, Pinus sylveslris.
Cette belle espèce est loujours maintenue à un prix assez
élevé, et la propagation en est pour ainsi dire interdite.
En 1878, je reçus dix-huit chrysalides d'Espagne; elles
coûtaient 15 francs pièce, mais le prix a baissé depuis cette
époque.
Mon désir était, avec ces dix-huit chrysalides, de repro-
duire et d'élever l'insecte, mais je n'eus aucun succès, pro-
bablement par suite du système employé pour l'envoi des
chrysalides. Il en fut de même de deux autres essais que je
fis les années suivantes. Les chrysalides, avantd'être expédiées
d'Espagne, sont sorties du cocon, enveloppées de petites
bandes de papier de soie, et elles sont ensuite remises avec
un peu de ouate dans le coton préalablement coupé d'une
- extrémité à l'autre. Cette opération est faite dans le but pré-
tendu de voir si les chrysalides envoyées sont bien vivantes et
' aussi afin de les protéger contre les chocs du voyage. Le
résultat de cette opération, faite avec de bonnes intentions,
dit-on, c'est qu'une partie des Papillons qui éclosent sont
avortés, et que la plupart des chrysalides sont détruites par
des parasites diptères auxquels on a ouvert la porte. Avec
mes dix-huit chrysalides d'habellœ^y je. n'obtins qu'un tout
petit nombre de Papillons, tous femelles, à l'exception d'un
mâle, cinq ou six Papillons en tout.
.1 ., ■■ ,
. Bombyx {Lasiocampa) Oins Drury. -^ C'est le Bombyx
séricigène, dont les Grecs et les Romains obtenaient de la
soie, avec laquelle ils fabriquèrent des tissus avant l'intro-
duction du Ver à soie du Mûrier de la Chine. ,Qu'est devenu
ce célèbre Bombyx « Hibou » des anciens? Un de mes an-
ciens correspondants de Sicile, M. J. Pincitore Marolt, de
Palerme, dans un article -qui a paru le 1" août 1873, dans
les Petites nouvelles entomoiogiques, parle de la découverte
i etde lapropagatiiinde ce remarquable Lépidoptère eq Italie,
et dit dans un passage de son rapport : « Le Bombyx Otus
96 SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
est d'uno grande importance, car sa Chenille est séricigène
et susceptible, peut-être, de remplacer le B. (Sericaria)
Mori; la soie qu'on obtient du cocon de cette espèce est
presque aussi belle que celle produite par le Yama-maï; la
véritable patrie de VOtus étant l'Asie Mineure, la découverte
de cet insecte en Italie prouve que nos conditions climaté-
riques et notre flore, au moins en partie, se rapprochent de
celles de l'Orient, et que l'élevage de celte espèce pourrait
être opéré avec succès. — M. Correale, de Scandole, près
Crotone (Calabre), est le premier qui a retrouvé en Italie le
papillon Otus; il a fait quelques tentatives, jusqu'ici couron-
nées de succès, pour élever cette espèce dans un but com-
mercial. Cesobservationsontété publiées par M. le professeur
Cornalia, dans les Annali di Storia naturale, t. VIII, 1865. »
M. Marott ajoute que VOtus n'est pas rare aujourd'hui
(1873) dans la partie méridionale de l'Italie continentale, et
qu'il l'a trouvé aussi aux environs de Monte-Cuccio (Pa-
lerme).
La Chenille vit sur diverses plantes, mais elle préfère le
Lentisque.
Outre l'Asie Mineure, l'espèce se trouve aussi dans la
Turquie d'Europe.
ESPÈCES DE L'AMÉRIQUE
Dans mes divers rapports anglais et français, j'ai parlé de
l'éducation en Europe des principaux Vers à soie sauvages
des États-Unis de l'Amérique du iNord ; quant aux autres; je
'ne pourrai qu'en donner les noms d'après la liste des Pa-
pillons hétérocères de l'Amérique du Nord, par Aug. R. Grote,
président du club entomologique de New-York, et publiée en
mai 188-2.
Telea polyphemus; Telea Hubner, polyphemus Crammer.
'■" — Le meilleur Ver à soie sauvage des États-Unis, à cocon
fermé, comme celui de toutes les espèces appartenant au
genre Antherœa, et dont il a tous les caractères.
SÉRIGIGÈNES SAUVAGES COiNNUS. 97
• La soie blanche du Poli/phemus peut rivaliser avec celle
du Pernyi, mais le cocon est ordinairement moins gros. Eu
Europe, l'espèce a été élevée à l'air libre, avec le plus grand
succès, sur le Chêne. Les Papillons s'accouplent difficilement
en captivité, et je crois que l'on doit opérer avec cette espèce
de la même manière qu'avec le Yama-mal du Japon, c'est-
à-dire placer les cages à Papillons à l'airlibre. Outre le Chêne,
la Chenille peut s'élever sur le Bouleau, le Hêtre, le Saule,
le Noisetier, le Châtaignier, etc. La Chenille, qui est une des
plus belles, a cinq âges; elle est blanchâtre au premier âge.
Aux autres âges elle est d'un beau vert, avec tête brune, mais
sans points noirs comme celle du Pernyi. A la base de tous
les tubercules il y a une plaque argentée à reflets métalliques.
Noms de plantes données par divers entomologistes amé-
ricains, comme servant de nourriture au Polyphème: Quer-
cus, Ulnms, Tilia Americana, Rosa, Acer, Salia),Populus,
Corylus, Betula, Vaccinium, Carya, Juijlans nigra, J . ci-
nerea , Cratœgus, Quercus virens, Prunus Virginiana,
Plalanus, Castanea vesca, Fagus, Tilia Europœa, Carya
tomentosa, Alnus incana, etc.
Platysamia cecropia ; Attacus cecropia Linn. — Platy-
samia est le nom générique donné par Grote à cette espèce
et aux trois suivantes, qui toutes sont très rapprochées.
Cecropia est le plus grand Séricigène des Etats-Unis. Le
cocon, ouvert comme tous ceux du même genre, est entouré
d'une enveloppe irrégulière qui est souvent d'une grosseur
extraordinaire. La Chenille, qui a six âges (quelques auteurs
disent qu'elle n'a que cioq âges), est plus difficile à élever à
l'air libre dans les pays du Nord, que l'espèce précédente.
Elle vit sur nombre d'arbres fruitiers et autres, surtout le
Prunier sauvage, le Saule, etc. La Chenille et le Papillon se
font remarquer par la beauté et la variété de leurs couleurs.
Les Papillons s'accouplent facilement.
Noms des plantes nourricières du Cecropia, en Amérique.
Brodie {Papilio, février 1888) donne une liste de quarante^
neuf espèces de plantes appartenant aux genres suivants :
4» SÉRIE, T. m. — Février 1886, 7
98 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
Tilia, Acer, Prunus, Spirœa, Cratœgus, Pyrus, Amelan-
chier, Ribes, Sambucus, Ulmus, Quercus, Fagus, Corylus,
Carpinus, Betula, Alnus, Salix et Populus. D'autres au-
teurs donnent les genres suivants : Berberis, Liriodendron,
Syringa, Carya, Gleditschia, Rubus, Ceanothus, Ampélop-
sis, Cephalanlhus, Fraxinus, Vaccinium et Rosa.
Plalysamia Ceanothi Behr ; Californica Gr. — Espèce
plus petite que la précédente. L'enveloppe du cocon, qui est
pyriforme, est gris de fer, le cocon intérieur brun et petit
comparé à l'enveloppe, l'espace entre les deux étant assez
considérable. La Chenille de cette espèce a été élevée sur le
Prunier et sur le Saule. Il est probable qu'elle peut vivre sur
les mêmes plantes .que Cecropia et que l'espèce suivante,
Gloveri. Elle prend son nom de Ceanothus de l'une des plantes
sur lesquelles elle vit. La Chenille de Ceanothi, ainsi que
celle de Gloveri, ressemble beaucoup à celle de Cecropia^
surtout aux deux premiers âges. A partir du troisième âge,
la différence la plus sensible est que les tubercules dorsaux
de Ceanothi et de Gloveri sont d'une couleur à peu près uni-
forme, rouge orangé ou jaune, tandis que les quatre pre-
miers tubercules dorsaux de la Chenille de Cecropia sont
rouges et les autres jaunes. Les tubercules latéraux sont
bleus chez les trois espèces. Les Papillons de Ceanothi ont
les quatre ailes d'un brun rouge pour le fond ; au contraire,
les couleurs sont variées chez les deux autres espèces. Les
Papillons ne s'accouplent pas avec la même facilité que ceux
de Cecropia.
Platysamia Gloveri Strecker. — Espèce qui tient le mi-
lieu entre les deux précédentes pour la taille et le coloris
des ailes. L'enveloppe du cocon est d'un gris argenté; le vrai
cocon est brun foncé. L'enveloppe extérieure adhère au
cocon, sans laisser aucun espace entre les deux. Cette espèce
a été découverte dans l'Utah, où des cocons ont été récoltés
sur une espèce de Saule à petites feuilles; elle se trouve
aussi dans l'Arizona,
SÉRICIGÈNES SAUVAGES CONNUS. 99
Platysamia Columbia Smith. — Cette espèce ne semble
être qu'une race plus petite de Gloveri.
Callosamia promethea; Attacus promethea Drury. —
Callosamia est le nom générique donné par Packard. Espèce
dont le cocon ressemble assez à celui de V Attacus cynthia,
mais il est un peu plus petit et plus allongé. La Chenille
s'élève facilement, à l'air libre, sur le Lilas et le Cerisier. En
Amérique elle vit sur les Sassafras (Cerisier sauvage), Cepha-
lanthus, Laurus benzoin, Syringa, Berberis, Betula, Acer,
Quercus, Pinus, Fagus, le Pommier, le Poirier, le Pêcher,
le Liriodendron, les Populus, etc. Selon W.-H. Edwards, la
Chenille de Promethea n'a que trois mues ou quatre âges,
dans la Virginie occidentale. ^\vvMf^ ni'^ .y^^
Callosamia angulifera Walker. — Espèce se nourris-
sant, je crois, sur le Tulipier.
Philosamia Gr.; Cynthia Drury. — C'est V Attacus cyn-
thia, originaire de la Chine, actuellement naturalisé aux
États-Unis.
Attacus splendidus de B.
Saturnia gu'lbinà ; Saturnia KvsLïik ; Galb ina Clem.
Saturnia meûdocino Behrens.
Actias luna ; Attacus lun a Linn. — Actias, nomgénérique
donné par Leach. Espèce qui ressemble assez à VActias
selene de l'Inde, mais elle est plus petite. Le cocon, qui est
fermé comme tous ceux de ce genre, est irrégulier et peu
soyeux. Papillon vert, remarquable par sa beauté. Aux États-
Unis, VActias luna est bivoltin. La Chenille, qui est verte
avec tubercules rouges, a souvent été élevée en Europe, où
elle semble préférer le Noyer; elle est cependant très poly-
phage. Les plantes citées par les entomologistes américains
100 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
comme lui servant de nourriture sont : Juglans cinerea.
Cary a porcina, Quercus, Platanus, Liquidamhar, FaguSy
Belula, Salix, Ostrya Virginica, Castanea, et le Prunier.
Hyperchiria io Fabricius. — La Chenille de cette espèce
se chrysalide dans une coque légère formée à la surface
du sol; elle est couverte de touffes de poils raides qui
piquent comme des orties. Elle s'élève très facilement. Les
Papillons, qui sont fort jolis et qui diffèrent chez les deux
sexes, s'accouplent aussi très facilement en captivité. La Che-
nille, qui est très polyphage, a six âges ; elle a été élevée en
Europe sur le Chêne, le Saule, le Prunier, le Pommier, etc.
En Amérique, on la trouve sur les Populus halsamifera,
Ulmus, Zea mays, Cornus, Sassafras, Quercus, Robinia
viscosa, Cornus florida, Liriodendron, Humulus, Gossy-
pium, Acer, Salix^ Populus tremuloides, Robinia pseudo-
acacia, Cerasus Virginiana, Betula, Fraxinus, Rubus villo-
sus, Trifolium pratense, etc.
Attacus aurota Crammer. — Grande et belle espèce qui
se trouve à la Guyane française, au Brésil et autres pays de
l'Amérique centrale. Au Brésil il y en a une variété qui porte
le nom d' Attacus speculifer. Le cocon, qui est très épais et
soyeux, a la forme de celui de V Attacus atlas. UAurota^
d'après M. A. Michély, a six générations par an à la Guyane
française. Les Papillons éclosent un mois après la formation
du cocon ; les œufs huit jours après la ponte et vingt jours
après a lieu la formation du cocon.
V Aurota a été élevé à la Guyane française par M. Michély
sur l'Oranger et autres Aurantiacées, et sur l'Eucalyptus; il
peut vivre aussi sur l'Allante, le Ricin, le Café diable {Casea-
via ramiflora), le Moubin, le Saint-Jean, le Manioc {Jatro-
.pha Manihfit), l'Acajou, le Bambou.
Attacus hesperus. — Espèce plus petite que la précédente,
et qui peut vivre sur les mêmes plantes que V Aurota. Le
cocon, qui est brun et à peu près de la grosseur de celui de
Y Attacus cynthia, est régulier de forme et sans bourre. La
SERICIGENES SAUVAGES CONNUS.
101
Chenille, dit M. Michély, forme son cocon quinze jours seu-
lement après son éclosion. Il y a cinq espèces de Séricigènes à
la Guyane.
Parmi les espèces américaines, nous devons encore citer
les suivantes :
Saturnia
Sat. Vorul
Sat. Laver
Sat. Gellet
Saturnia j
Eucheira ;
Décrites dans les Transactions of the Ent. Soc. of London
en 1884, par Westwood (t. I, p. 38).
Saturnia orizaba
Westwood. -
— Mexique,
Sat. Vorulla
id.
id.
Sat. Laventera
id.
id.
Sat. Gelleta
id.
id.
Saturnia Zacateca
id.
Bogota.
Eucheira socialis
id
Mexique
Il TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ-
; 1
NOTE
SUR LA FLORAISON ET FRUCTIFICATION
DU JUBiEA SPECTABILIS
par M. Ch. IVAUDIK, de l'Institut.
I I
Le Coquito des Péruviens et des Chiliens, le Jubœa specta-
hilis des botanistes, est incontestablement un des plus volu-
mineux Palmiers qui existent, et, ce qui a lieu de surprendre,
c'est qu'avec ses proportions colossales il se montre, sous nos
climats, tout aussi rustique que le vulgaire Palmier nain du
midi de l'Europe, endurant, comme lui, sans en souffrir
sensiblement, des froids passagers de 10 à 12 degrés centi-
grades au-dessous de zéro.
Il a une autre qualité qu'il partage avec notre modeste
Chamœrops, c'est de savoir se passer d'eau pendant les longues
sécheresses de l'été méridional, ce qui d'ailleurs ne peut guère
étonner quand on sait qu'il nous est venu de pays où la pluie
est un phénomène météorologique relativement rare. A ren-
contre de la grande majorité des Palmiers, il se plaît dans
les terrains secs, et, si on le soumettait au même régime que
le Dattier, auquel il faut tant d'arrosages pendant l'été, il
périrait presque infailliblement.
Voilà certes de quoi recommander le Jubœa aux amateurs
d'arbres de haut ornement dans le midi de l'Europe ; mais il
a un mérite plus sérieux comme arbre saccharifère, ce qui
fait que, dans son pays d'origine, on l'exploite sur une grande
échelle pour en retirer du sucre. On peut même craindre que
cette exploitation, qui n'est pas réglementée, n'aboutisse à la
destruction de l'espèce. Outre sa sève mielleuse, l'arbre pro-
duit en grande quantité des graines, ou petits cocos, de la
grosseur d'une noix, dont l'amande est comestible et peut
fournir de l'huile par pression. Elle sert aussi à l'engraisse-
DU JUBŒA SPECTABILIS. 103
ment des bestiaux. Le grand naturaliste Darwin, qui a visité
le Pérou et le Chili, nous apprend qu'un arbre adulte donne
jusqu'à 90 gallons (408 litres) de sève sucrée.
Si maintenant on tient compte de l'aptitude de l'arbre à
croître sous un climat chaud et sec, sans demander ni culture
ni arrosage artificiel, il vient naturellement à l'esprit qu'il
serait tout à fait à sa place dans les parties du nord de
l'Afrique où, faute d'eau, la culture du Dattier resterait impro-
ductive. Il semble donc probable qu'avec lui on pourrait créer
des Oasis d'un nouveau genre dans le Sahara algérien, si
rebelle aujourd'hui à toute culture régulière. La seule objec-
tion qu'on pourrait y faire, c'est qu'il faudrait du temps pour
que ces Oasis donnassent de l'ombre d'abord, puis des récoltes
de sucre ou de graines, ce qui n'arriverait guère avant la
trentième année. Mais où en serait-on si l'on ne plantait que
pour récolter à courte échéance, sans souci des arrière-
neveux ?
Pour la première fois, depuis qu'il a été introduit en
Europe, le Jubœa spectabilis a fleuri et fructifié en 1885,
non en France, mais au Jardin royal des Necessidades, à
Lisbonne. Ses spadices, longs de plus d'un mètre, se sont
développés en janvier-février et les fruits ont mûri en août.
Les fleurs sont hermaphrodites (ou peut-être monoïques sur
le même spadice, comme dans d'autres Cocoïnées), et ce point
est à noter, car par là on sera dispensé de recourir à la fécon-
dation artificielle, opération délicate et qui n'est pas exempte
de danger lorsqu'il faut la faire sur des arbres de grande
taille et armés de fortes épines, comme les Dattiers. L'individu
qui a fleuri en Portugal, et qui s'apprête à fleurir de nouveau,
est âgé ,d'environ trente-cinq ans. La hauteur de son stipe,
au-dessous de la couronne de feuilles qui en forme la tète,
est de 5™, 60. et sa circonférence, à quelques centimètres du
sol, de 4-'", 40. Cette énorme tige se rétrécit un peu en s'éle-
vant, et, à 1 mètre de sa base, elle n'a plus que 3'" ,60 de tour.
Je tiens ces détails de M. Daveau, ancien employé du Muséum,
actuellement inspecteur du Jardin botanique de Lisbonne.
On trouve quelques Jubœas dans les jardins de la Provence
104 SOCIÉTÉ NATIONALE JD'ACCLIMATATION.
lïiariLime, mais ils n'y sont pas à beaucoup près aussi nom-
breux que d'autres Palmiers qui ne les valent pas, et on ne
comprend guère pourquoi cet arbre remarquable a été si
négligé. La Villa Thuret en possède plusieurs, dont le plus
grand, âgé aujourd'hui de vingt-huit ans, approche beau-
coup de celui de Lisbonne. Sa hauteur, sous la dernière
feuille, est de 1",45, et le reste de la tige, caché par la base
des feuilles, est d'environ 4 mètre. La circonférence du tronc,
à 20 centimètres du sol, est de 4", 50. Les feuilles paraissent
un peu courtes pour celte puissante tige; elles n'ont guère
que 3 mètres de longueur.
Au simple point de vue ornemental, le Jubœa spectabilis,
quoique très beau et très curieux, me paraît inférieur au
Phœmx canariensis, que j'appellerais volontiers le Roi des
Palmiers de pleine terre du midi de l'Europe. Cet arbre
superbe peut être considéré comme acclimaté en Provence,
car il y prend le plus beau développement, n'y souffre pas
du froid et y produit, après fécondation artificielle, des
graines excellentes, qui servent aujourd'hui à le multiplier.
III. EXTRAITS DES PROCES-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ-
SÉANCE GENERALE DU 5 FEVRIER 1886.
Présidence de M. de Quatrefages, Vice-Président.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
— M. Je Président proclame les noms des membres nouvellement
admis par le Conseil, savoir :
MM. PRÉSENTATEURS.
Tj „, ,„„ ,, . . T u j \ o j ( Maurice Girard.
Brelles (le vicomte Joseph de), 8, rue de \
Bagneul, Pans. / £,,..„ ,
° ( SediUot.
ri /i ■ \ • '» • n ■ . Dareste.
Despeltt (Louis), propriétaire, au Domaine k „ . „■
, „ ^ ,uV ^ ,.'; ■ Maurice Girard.
des Yeuzes Hérault). t ,, „, ,
^ ' [ Raveret-Waltel.
( Dareste.
FoREST, huissier, à Angoulême (Charente). | Maurice Girard
( Raveret-Wattel.
AURIOL, professeur d'agriculture, à Oran l . , _,'. ,
. ; . l Jules Grisard.
^ ^^"^^* ( Raveret-Wattel.
iT /r. T • N 1-7 J O ;' Maurice Girard.
Hessneguy (D' Louis), 11, rue du Somme- \ , , .
rard, a Pans. ) „,,.,, .
[ Sedillot.
rv ,11 -^ '.or j n ■ i A. Geoffrov Saint-Hilairc.
DONAT Henn), propriétaire, 35, rue du Ge- g^.^^^ves Ménard.
neral tov, a Pans. / . _
"' 'A. Porte.
1 ,n . \ o 1 j 1 iir j I • . /■ De Bresson.
Jamet (Gustave), 6, place de la Madeleine, a \ . „ „ o • . ni •
. /' ' r > » A. Geoffroy Saint-Hilaire.
( Saint-Yves Ménard.
— M. le Président annonce à l'Assemblée la perte regrettable que la
Société vient de faire dans la personne de M. Nicolas Meyer.
— M. Anibroise Gentil, professeur au lycée du Mans, écrit à M. le
Secrétaire des séances : « J'ai l'honneur de vous faire parvenir par la
poste les Bulletins de la Société d'horticulture de la Sarlhe pour l'an-
née 1886.
» Le comité d'administration m'a prié de solliciter auprès de vous,
pour l'avenir, l'échange de ce Bulletin contre celui de la Société d'Accli-
matation de France, et je serai personnellement très heureux si vous
voulez bien agréer ma demande.
» Notre Société d'horticulture possède des jardins assez vastes pour
que leur entretien nécessite annuellement une dépense d'environ vingt
106 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
mille francs. Nos efforls pour acclimater les plantes intéressantes et
les propager ne sont pas sans résultats ; par ailleurs, nous possédons
déjà quelques animaux dont nous désirons augmenter le nombre.
» Le comité pense que, si la Société d'Acclimatation voulait bien entrer
en relations avec nous et nous confier quelques cheptels, elle y trouve-
rait l'avantage d'étendre ses moyens d'action en même temps que sou
utile influence.
» J'ai promis de]solliciter votre intervention pour arriver à ce résultat,
qui serait, je crois, profitable aux deux Sociétés. Si ma demande n'est
pas importune et si la chose est possible, je vous serais très reconnais-
sant de vouloir bien faire adresser les renseignements nécessaires à
M. le colonel Follic, président de la Société d'horticulture de la Sarthe.
» Je mets à profit cette occasion pour vous donner quelques rensei-
gnements sur les essais de pisciculture dans notre département. Peut-
être pourront-ils vous intéresser, mais ils n'ont pas au fond grande
importance.
» Vous avez sans doute souvenir de cinq mille alevins de Saumon
de Californie qui furent mis dans la Sarthe, en 1878, par M. Carbonnier.
En 1882, sur les indications qui m'avaient été données, je disais : « On
croit en avoir retrouvé quelques-uns. » Malheureusement, aujourd'hui,
je dois ajouter : « Il n'en a pas été vu depuis. »
» Le Conseil général de la Sarthe inscrit à son budget, depuis deux
ans, une somme de mille francs pour essai de repeuplement des rivières.
En 1885, cette somme a été employée à l'acquisition de trente-cinq mille
alevins de Truite, dont quinze mille alevins de Truite des lacs, qui ont
été distribués dans différents cours d'eau. Les Truites des lacs ont été
fournies par l'établissement de pisciculture, de création récente, dépen-
dant de la ferme-école de la Pilletière en Jupilles (directeur : M. de
Villepin).
» Dans son rapport au préfet, M. de Villepin ajoute : « Nous avons
» fait venir les œufs embryonnés de l'Isère; les Truites qui en pro-
» viennent croissent beaucoup plus rapidement que celles des ruis-
» seaux. M. Chabot-Karlen a constaté qu'elles pesaient, à la Pilletière,
» 19 grammes à l'âge de six mois. »
— M. A. Touchard écrit de Chalillon-sur-Indre : « Je suis loin de
trouver que les expériences d'acclimatation faites dans mon parc sur les
Cerfs nains aient parfaitement réussi. Les femelles font, paraît-il, deux
portées par an : une en décembre ou janvier, et une en juin ou juillet.
Je devrais donc avoir au moins quatre ou cinq jeunes et je n'en ai abso-
lument que deux, un mâle et une femelle, et le premier était déjà fort
il y a deux ans.
» Il faut donc en conclure que pas un seul des jeunes nés en hiver n'a
été élevé : ils périssent probablement de froid.
» Mon parc est en côte ; il y a deux hectares de prés et un hectare en
PROCÈS-VEUBAUX. 107
futaie; le reste est en taillis de châtaigniers et de bouleaux très fourrés;
il y a beaucoup d'épines et de ronces; les animaux ont donc de quoi se
cacher et s'y trouver comme à l'état sauvage.
» J'ai constaté que les petits Cerfs nains se tenaient de préférence,
l'été, près des étangs dans les endroits humides; l'hiver, ils sont dans
les endroits secs et élevés; les jeunes sont très farouches; ils se
tiennent dans les ^taillis impénétrables et souvent sous les ronces.
» Le matin et le soir, une heure avant le coucher du soleil, on les
voyait de loin dans les prés; mais il n'était pas possible de les appro-
cher.
» Le vieux couple, moins farouche, se tenait dans les taillis assez
clairs; on l'approchait parfois, surtout la femelle, à 15 ou 20 mètres. ■
» Ces animaux courent très vite, droit devant eux, la tête basse et
presque dans leurs jambes. »
— M. Fremy, directeur du Muséum d'histoire naturelle, adresse à
M. le Président la lettre suivante : « J'ai l'honneur de vous adresser les
remerciements de l'assemblée des professeurs, pour le don que la So-
ciété d'Acclimatation a bien voulu faire à la ménagerie des Reptiles de
six Black-Bass {Micropterus salmoides), présentant un grand intérêt et
avec lesquels on peut espérer obtenir la reproduction de cette espèce
en France. »
— iM. le marquis de Pomereu fait connaître qu'il n'a perdu aucun
des jeunes Black-Bass qui lui ont été remis par la Société, et que ces
alevins sont tous en parfait état.
— Au sujet de cette communication, M. Raveret-Wattel annonce qu'il
a eu occasion de voir les Black-Bass confiés à M. le marquis de Po-
mereu, et que ces jeunes Poissons, qui sont l'objet d'excellents soins,
lui ont paru être, en effet, dans un état des plus satisfaisants.
— iMM. Després, Jacquemart, Léon Lefort, comte de Noinville et
Rathelot, ainsi que la Société départementale de pisciculture du Cher
et la Société messine de pisciculture, accusent réception et remercient
des envois d'œufs de Truite des lacs et de Salmo fontinalis qui leur ont
été faits.
M. Léon Lefort donne, à ce sujet, les renseignements ci-après : « Les
sept cents œufs de Salmo fontinalis, que la Société m'a envoyés, sont
arrivés en parfait état; mais il était temps, car mis le lendemain malin
dans l'appareil Coste, l'éclosion commençait le second jour.
» Je mettrai ces Poissons à l'eau dans un étang de 17 hectares, en
même temps que l'alevin de quatre mille Truites de Lochleven que je me
suis procuré à Seeviese (Allemagne), l'éclosion de ces œufs n'ayant pré-
cédé que de huit jours celle des Salmo fontinalis. Je tiendrai la So-
ciété au courant des résultats. î
— 3I"« veuve Simon, née de Fuisseaux, écrit de Bruxelles : « Je suis heu-
reuse de pouvoir offrir à la Société des cocons vivants d'Attacus Pernyi
408 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
de race univoltine, et des cocons vivants à' A. cynthia, produits de nos
éducations. L'éducation de la race univoltine, créée par mon fils, de-
mande certaines précautions nécessaires pour éviter les éclosions pré-
maturées. Une cave froide est indispensable pour que l'éclosion n'ait
lieu qu'en avril-mai. Pour réussir l'éclosion et prévenir la perte des
jeuiios Chenilles, nous recommandons l'emploi de nos boîtes, dont un
modèle a déjà été envoyé à la Société d'.\cclimatation. L'éclosion se fera
sur l'arbre même, à l'abri des froids, dans le Nord. On ne saurait donner
trop de soins aux jeunes larves; de là dépend le succès de l'éducation.
La race univoltine offrira plus de chances de réussite pour les pays du
Nord, son acclimatation étant déjà faite. Toutefois, cette race étant natu-
rellement bivoltine, nous avons remarqué que, après quelques années
d'éducation, une dégénérescence se produit. Afin de ne pas perdre le
fruit de l'acclimatation obtenue et de conserver la vitalité naturelle, nous
mélangeons au grainage, des cocons bivoltins avec des univoltins.
» Je suis reconnaissante à la Société de son envoi de cocons de
Mylitta et de graine de Cecropia. Nous avons obtenu des Papillons
splendides des cocons de Mylitta, et nous avons pu avoir des cocons
de Cecropia, ce qui nous permettra d'envoyer de la graine à la Société.
» Nous possédons encore une certaine quantité de cocons vivants de
Pernyi.
» L'année passée (1885), nous avons fait une éducation de 100 grammes
de graines de Vers à soie du mûrier de race française, et une de 50 gram-
mes de race belge. Je prépare un rapport sur ces éducations et je serais
extrêmement heureuse si quelques procédés nouveaux, que j'ai adoptés,
peuvent être utiles aux éleveurs.
» M. le comte Danne veut bien me prêter son appui. De son côté, le
directeur du laboratoire de la Chambre de commerce de Lyon nous fait
l'honneur de nous écrire. Ces encouragements, joints à ceux que la So-
ciété d'Acclimatation veut bien nous donner, nous sont très précieux et
nous inspirent une vive reconnaissance. Cette année, nous mettrons gra-
tuitement, comme nous l'avons déjà fait l'année passée, de la graine et
des cocons vivants A'Attacus Pernyi à la disposition des instituteurs
français qui en feront la demande. L'envoi sera accompagné d'une bro-
chure sur VAttacus Pernyi. »
— M. Ch. Naudin adresse de la Villa Thuret (Antibes) une note sur
la floraison et la fructification du Jubœa spectabilis (voy. au Bulle-
tin, p. 102).
— M. Paillieux communique la lettre ci-après qui lui est adressée par
M. Joseph Clarté, de Baccarat : « Je viens vous rendre compte de ma
culture de Stacliys affinis, dont vous avez eu l'obligeance de m'en-
voyer des plants à la fin du mois de mai 1885.
j Cette plante a parfaitement réussi ici; pendant l'été, la végétation
en a été très vigoureuse; j'ai commencé à arracher les premiers tuber-
PROCÈS-VERBAUX. 109
cules au commencement de novembre, et successivement, toutes les
fois que la température l'a permis.
» Depuis le 7 décembre, nous avons eu de la neige presque sans in-
terruption avec de fortes gelées. Plusieurs nuits le thermomètre est
descendu à 16 degrés centigrades; malgré celte neige et ce froid, les
tubercules du Stachys n'ont nullement souffert, même ceux oubliés
sur la terre étaient bien conservés.
» Gomme vous le dites, la production du Stachys est énorme; la
plante sortie de terre présente l'aspect d'une véritable grappe de tuber-
cules.
» Accommodés comme les haricots llageolets frais, les tubercules de
Stachys font un plat exquis ; cuits dans le jus, autour d'un rôti, ils sont
excellents et je crois qu'ils pourront également se prêter à bien des
combinaisons culinaires; puis, ce qui n'est pas un mince mérite, ils
donnent peu d'ouvrage à la cuisinière : les laver proprement, couper
les radicules et dix minutes de cuisson; c'est donc un plat très expé-
ditif.
» Aussi je considère le Stachys affinis comme appelé à un grand
succès dans nos cultures, et à tenir d'ici peu de temps une place impor-
tante à côté de nos meilleurs légumes.
» Je vous serais bien reconnaissant, si, lorsque le moment sera venu,
vous pouviez disposer en ma faveur de quelques bulbilles d'Igname
du Japon à racine courte nommée, au Japon, Hiri-imo, et, botanique-
ment, Dioscorea Decaisneana.
)) Je serais content aussi de connaître le nom japonais du Stachys
affinis. »
— M. le D"^ Jeannel écrit de VilIefranche-sur-Mer : « Je me fais un
plaisir de vous rendre compte du résultat de semis des Haricots cerise
que vous avez eu la bonté de m'envoyer en mars dernier.
î Ils ont été semés le 20 mars dans un terrain bien préparé. Ils ont
végété vigoureusement. La récolte a eu lieu du 1" au 18 juillet; elle
a été extrêmement abondante.
» Les cosses vertes, contenant la graine déjà rouge et bien formée,
sont faciles à cuire et fournissent un légume excellent et très écono-
mique.
» Les Haricots tout à fait mûrs, tirés des cosses jaunies, sont égale-
ment très faciles à cuire et très tendres; l'épiderme est très fin et nulle-
ment résistant. La saveur est agréable, %ans avoir la finesse des haricots
flageolets, auxquels je crois devoir réserver un rang encore plus disr
tingué qu'aux Haricots cerise.
j Je viens de faire un nouveau semis dont j'espère un bon résultai
pour la fin d'octobre.
» Les Pachyrrhisus végètent pauvrement malgré des arrosages jour-
naliers; je ne suis pas assez habile pour les faire prospérer.
110 SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
» Si vous le désirez, je vous adresserai un petit paquet de Haricots
cerise de ma récolte. »
— A l'occasion de cette lettre, M. Hédiard rappelle que le Haricot
cerise a été présenté il y a quelques années à la Société par M. Pail-
lieux. M. Hédiard, qui a cultivé cette variété près de Paris, à Asnières,
l'a trouvée très productive. C'est un Haricot à grandes rames, qui se
mange en cosses, quand la graine est formée; la cosse est tendre comme
celle d'un Haricot mange-tout. M. Hédiard rappelle également qu'il a
présenté l'année dernière une variété dite Haricot saint-ciboire, qui est
également un mange-tout. Ce Haricot est blanc avec une petite macule.
Notre confrère demande que ceux des membres de la Société auxquels
il a remis de la semence de cette variété veuillent bien faire connaître
les résultats qu'ils ont obtenus.
— M. Chappellier dépose sur le bureau une certaine quantité de tu-
bercules de Stachys affinis provenant de sa récolte, et fait l'éloge de ce
légume qu'ont trouvé excellent toutes les personnes auxquelles il en a
fait goûter. Cette plante, très rustique, a résisté à des froids de 16 de-
grés, et peut être laissée en terre pendant tout l'hiver pour être mangée
fraîche. Elle est très productive; trois touffes suffisent pour donner un
plat. C'est, en somme, une excellente acquisition , dont on doit savoir
tout particulièrement gré à M. Paillieux. M. Chappellier ajoute que,
dans le cas où les tubercules de Stachys affinis ne seraient pas farineux,
ils lui paraîtraient offrir une ressource spéciale pour l'alimentation des
diabétiques.
— M. Berlhoule se déclare, de son côté, très satisfait du Stachys affi-
nis, qu'il a cultivé à une grande altitude, dans un climat froid, et qui lui
a donné une récolte abondante. C'est un excellent légume qui tient, sous
le rapport du goût, le milieu entre la Pomme de terre et le Salsifis.
— M. Fallou fait, à son tour, ressortir les qualités du Stachys affinis,
dont la robuste végétation et la production abondante font, à son avis,
une plante des plus recommandables.
— M. le Président fait remarquer qu'il résulte de ces divers témoi-
gnages que le Stachys a fait complètement ses preuves, et il propose de
décerner dos remerciements officiels à M. Paillieux pour cette utile in-
troduction.
Cette proposition est accueillie par d'unanimes et chaleureux applau-
dissements.
— M. Pierre Pichot signale un article publié dans le Gaulois du 24. jan-
vier, et d'après lequel M. Paul Bert aurait, dans une conversation ré-
cente, exprimé l'avis que ni les plantes ni les animaux ne peuvent s'ac.
climater. Il y a là, ajoute M. Pichot, une hérésie que nous ne pouvons
laisser passer sans protester, bien qu'après les travaux des Geofl'roy
Saint-Hilaire, des De Candolle et de tant d'autres savants éminents, quj
ont parlé de l'émigration des végétaux, il puisse paraître, jusqu'à un
PROCÈS-VERBAÛX. 111
certain point, oiseux d'insister sur la possibilité d'étendre l'aire géogra-
phique des plantes.
Notre confrère signale, à cette occasion, l'ouvrage récemment publié
en Angleterre, sous le titre : Wanderings of plants and animais, par
MM. V. Hahn et Stallybrass, dans lequel les auteurs, s'appuyant notam-
ment sur des études philologiques, établissent la marche suivie dans
leurs migrations successives, par les plantes et les animaux, et confir-
ment les observations antérieures des naturalistes.
— M. Maunoury fait remarquer qu'une assertion rapportée dans un arti-
cle de journal doit n'être accueillie que sous toute réserve, et qu'avant de
protester contre l'opinion qui aurait été formulée par M. Paul Bert, il
conviendrait de savoir d'abord si le fait est exact. « Pour moi , ajoute
M. Maunoury, je ne le crois pas. »
— M. Pichot estime qu'il est fort douteux, en effet, que M. Paul Bert
ait cette manière de voir; c'est simplement l'assertion du journal qu'il a
voulu relever.
— M. Maurice Girard considère, au contraire, le fait comme très pos-
sible, attendu qu'il a fréquemment entendu M. Paul Bert émettre une
opinion semblable.
— M. Paillieux rappelle que presque toutes les plantes , presque tous
les légumes que nous cultivons, sont originaires de pays plus chauds que
le nôtre. 11 n'y avait absolument rien dans les Gaules. La majorité des
plantes utilisées aujourd'hui sont d'importation étrangère; ce sont des
végétaux acclimatés.
— M. le Président présente quelques observations au sujet de la si-
gnification à attribuer au mot « acclimatation », et il fait remarquer
qu'il n'y a peut-être dans la discussion qu'une simple question d'inter-
prétation de mots. « Vous avez tous connu, dit M. de Quatrefages, le
savoir extrême de mon bien regretté confrère Decaisne, qui disait aussi
qu'il ne croyait pas à l'acclimatation. Quand on lui parlait de l'introduc-
tion d'une plante, d'un animal dans une contrée étrangère à cette plante
ou à cet animal, que cette plante ou cet animal prospérait et contribuait
à la prospérité du pays, il répondait : « 11 n'y a pas là une véritable ac-
» climatation; il y a une émigration d'une contrée dans une autre, présen-
» tant les conditions nécessaires pour que l'animal ou la plante puisse
» prospérer. »
» H n'y aurait donc là peut-être qu'une discussion de mots à avoir
avec M. Paul Bert. L'opinion de Decaisne était identique à celle de
M. Paul Bert. Decaisne disait ceci : « On ne change pas la nature d'un
> animal. H y a des animaux dont la nature est un peu plus élastique et
» qui peuvent se faire à certaines conditions de vie, en dehors desquelles
» l'espèce avait vécu jusque-là, mais chaque espèce a ses limites d'ex-
9 tensibilité physiologique,! si je puis m'exprimer ainsi. Il en résulte
i qu'il est impossible de dépasser certaines limites. » Nous avons quel-
112 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACGLIMATATION.
quefois discuté avec Decaisne à ce sujet-là. Je ci'ois que les limites de mo-
dification, d'extension physiologique, sont beaucoup plus considérables
que ne l'admettait mon regretté confrère. Je lui citais, en particulier,
quelques faits dont il convenait aussitôt, qu'il acceptait comme pouvant
être, jusqu'à un certain point, considérés comme des faits d'acclimata-
tion. Je lui rappelais cette plante de la Chine, la Chrysanthème, que
l'on a cultivée dans nos jardins pendant bien des années, en faisant tous
les ans venir de la graine du pays d'origine : tous les ans on rapportait
la quantité de graines nécessaire pour peupler nos jaidins et il s'était
établi à ce sujet un véritable commerce d'importation. Mais au bout de
plusieurs années on reconnut qu'un fort petit nombre de fleurs ame-
nèrent leurs graines à maturité. Ces graines furent récoltées et semées.
Elles donnèrent des plantes qui fleurirent en temps utile et peu à peu
l'espèce fut entièrement acclimatée, si bien que le commerce des graines
venant de Chine fut entièrement supprimé. Je lui citais aussi, en exemple,
les Oies d'Egypte,— et ce qu'on rapportait tout à l'heure du petit Cerf
trouvera peut-être une nouvelle application dans ce que je vais dire. —
Lorsque ces Oies furent amenées par Élienne Geoffroy Sainl-Hilaire,
elles pondaient; mais les petits, venant au milieu du froid, ne s'élevaient
qu'avec difficulté. Au bout d'un certain nombre d'années, ces oiseaux
se mirent à pondre un mois plus tard, puis un peu plus tard, et enfin,
aujourd'hui, l'Oie d'Egypte pond à la même époque que celle de nos
pays. 11 y a là, incontestablement, un fait de véritable acclimatation.
L'organisation, la fonction physiologique de l'oiseau se sont pliées aux
nouvelles conditions d'existence que leur faisait le milieu européen. Je
crois que si on se plaçait sur ce terrain de l'interprétation des mots,
peut-être s'entendrait-on mieux avec M. Paul Bert, comme je finissais,
dans bien des cas, par m'entendre avec Decaisne. »
— M. le Secrétaire général rappelle qu'au moyen de sélections bien
conduites, il est possible de créer, chez les végétaux, des variétés plus
ou moins rustiques, résistant mieux au nouveau milieu qu'on leur impose
que ne pourrait le faire la plante primitive, la plante type. « Évidem-
ment, dit M. Geoffroy Saint-Hilaire, les plantes ont une très grande pa-
resse à s'habituer à un nouveau climat.
» Elles ne sont pas aussi mobiles que les animaux et cependant vous
voyez parmi les espèces végétales qui ont été introduites de tous les
ays du monde, et en particulier des pays chauds, comme le rappelait
tout à l'heure M. Paillieux, un très grand nombre de variétés plus rus-
tiques, plus hâtives, plus tardives les unes que les autres. Combien
d'exemples je pourrais citer, en particulier dans les genres Abies et
Pinus.
s Par suite de semis, de sélections faites avec intelligence, nous voyons
des variétés supporter des abaissements de température auxquels l'es-
pèce originelle, l'espèce type, aurait certainement succombé.
PROCÈS-VERBAUX. 113
» Mais tous les individus d'une même espèce sauvage, d'une espèce qui
n'a pas encore été travaillée, façonnée par la main de l'homme, sont-ils
également craintifs des abaissements de température, de la sécheresse,
de l'humidité, et, d'une façon plus générale, de tous les phénomènes
météorologiques? Evidemment non. Ainsi dans le courant de janvier
dernier, nous avons eu à Hyères (Var) des abaissements de tempéra-
ture inusités. Le thermomètre est descendu à — 7 degrés. Comme vous
le savez, nous avons à Hyères un établissement horticole important
dans lequel nous cultivons, en plein air et sous des abris de Cannes
[Arundo donax), des centaines de mille de Palmiers. Que s'est-il passé?
Avons-nous vu les espèces délicates gelées, anéanties? En aucune façon.
A côté d'une plante morte sous l'action du froid, nous en voyons une
autre de même espèce, peu touchée ou même intacte. Exposés aux
mêmes périls ces végétaux ont été inégalement atteints.
» Et quelle est l'origine de ces végétaux? Sont-ils nés de races perfec-
tionnées, améliorées? En aucune façon, car l'exemple sur lequel je rai-
sonne s'applique à déjeunes Kentia dont les graines ont été recueillies
en Australie sur des Palmiers vivant en pleine forêt, à l'état absolument
sauvage.
» Dans les faits de résistance au froid que je signale il faut voir des
faits d'idiosyncrasie, car les individus ressentent d'une façon qui leur
est propre les influences, ils résistent inégalement et on conçoit alors
comment peuvent se créer des races plus ou moins rustiques.
> Pour les animaux, nous ne traiterons pas la question dans son en-
tier. H nous faudrait parler des animaux domestiques qui se sont, pour
la plupart, accommodés à tous les climats, qui sont redevenus sauvages
en plusieurs points du globe et se sont plies aux exigences de ces nou-
velles conditions d'existence.
» Faut-il rappeler ces Saumons américains dont notre collègue, M. Ra-
veret-Wattel, parlait l'autre jour et qui se pèchent dans l'Aude et
l'Hérault, affluents de la Méditerranée, mer dans laquelle jamais
Saumon n'avait pénétré.
» Et ces animaux sauvages (Lapins, Moineaux, etc.), que l'Australie, la
Nouvelle-Zélande, l'Amérique, ont demandés à la vieille Europe, ont-ils
été acclimatés là-bas ? 11 faut bien le croire, puisque après quelques an-
nées ils sont devenus importuns et assez gênants pour qu'on ail dû faire
deselTorts pour les détruire. Mais ces faits sont trop connus, ici surtout,
pour qu'il importe de les développer.
î Ce que je voudrais arriver à établir devant vous, c'est l'impression-
nabililé des animaux, si l'on peut ainsi dire.
> Sous l'action du froid ou du chaud, ils se vêtissent ou se dévètissenl.
Le Yak du Thibet et la Chèvre du même pays perdent, sous notre cli-
mat, le duvet qui, dans leur haute patrie, leur permet de résister à
l'inclénience des saisons.
4e SÉRIE, T. m. — Février 1886. 8
Il^ SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACGLIMATATION.
» Les Moutons à poil ras du Sénégal et du Sahara (Moutons Morvan de
Buffon), que nous appelons Moutons sans laine, souffrent du froid qui
suit leur importation. A la saison suivante, sous le poil, se montre un
duvet très fin et qui par places, sur le dos, les cuisses, les épaules, dé-
passe le pelage normal. Au troisième hiver, le Mouton dit sans laine
porte une demi-toison.
» Quant aux agneaux nés, sous notre climat, de ces bêtes ovines, tout
en conservant les caractères de leur race, ils sont, dès le premier hiver,
pourvus de ce duvet, de cette toison protectrice.
» Ces faits montrent l'animal se modifiant pour ainsi dire tout d'un
coup.
» Ici ce n'est pas une race qui subit peu à peu l'action du milieu am-
biant; c'est le nouvel importé, le nouveau venu, qui est en quelque
sorte saisi par les nouvelles conditions de vie où il est placé.
» Je pouvais donc vous dire en vérité que l'animal était impression-
inable.
> Que se passera-t-il alors pour une espèce, pour une race qui subira
l'action du milieu pendant une suite de générations?
j Messieurs, ai-je besoin de conclure? . . .
j» Permettez-moi d'ajouter encore quelques mots.
» On nous a dit tout à l'heure qu'un savant éminent, qui va représenter
la France au loin, aurait déclaré n'être pas partisan de l'acclimatation.
» Ce propos n'a pas été tenu, permettez-moi de le croire.
» Eh! Messieurs, que serions-nous sans l'acclimatation, nous peuples
civilisés ? Ne profitons-nous pas de l'œuvre des siècles qui nous ont
légué les animaux et les plantes dont nous vivons, au milieu desquels
nous vivons ?
» Et pouvons-nous admirer assez le mouvement qui, depuis le commen-
cement de ce siècle et surtout depuis trente ans, a amené entre tous
les points du globe l'échange des faunes et des flores le plus éton-
nant! »
— M. Hédiard mentionne la rusticité remarquable du Néflier du
Japon, qui est aujourd'hui répandu non seulement en Algérie, mais
encore dans toute la Provence, où il donne des produits abondants.
Notre confrère se propose d'essayer cet arbre sous le climat de Paris.
Un plant de deux ans, qu'il possède à Asnières, a parfaitement résisté à
la neige et aux froids de l'hiver.
— M. le Président fait remarquer que nous sommes entourés de
végétaux et d'animaux qui sont acclimatés. On ne peut pas dire qu'on
n'acclimate pas; tout dépend de la définition que l'on donne du mot.
Il est clair que si le mot acclimalation signifie qu'un végétal et qu'un
animal ne pourraient pas vivre là où ils ne trouveraient pas à s'établir
dans les conditions qui sont absolument nécessaires à leur existence, il
est clair alors qu'il n'y a pas d'acclimatation; mais, s'ils sont suffisam-
PROCÈS-VERBAUX. il5
ment rustiques pour "se prêter à des Jifférences de conditions d'exis-
tence, dilïérences beaucoup plus considérables que nous ne pouvons en
juger à priori, il y aura acclimatation.
— M. Maunoury pense que l'on prête à M. Paul Bert des idées qu'il
n'a pas « J'ai, dit M. Maunoury, assisté dans son laboratoire à des expé-
riences curieuses sur l'acclimatation des poissons d'eau douce dans de
l'eau salée, expériences qui ont réussi. Il y a probablement, comme le
disait M. le Président, une distinction de mots. »
— M. le docteur Brocclii fait une intéressante communication sur
l'Ostréiculture dans le quartier de Marennes. (Voy. au Bulletin.)
— M. Huet présente un travail ayant pour titre : « Exposé des espè-
ces connues et décrites dans le genre Antilope. » (Voy. au Bulletin.)
Le Secrétaire des séances,
C. Raveret-Wattel.
IV. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS
TROISIEME SECTION
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1885.
Présidence de M. Failli EUX,
puis de M. le D' Brocchi, Vice-Président.
En l'absence de tous les membres du Bureau, M. Paillieux est prié de
remplir les fonctions de président, et M. Grisard celles de secrétaire.
L'ordre du jour appelle les élections pour la nomination du Bureau.
Au premier tour sont élus :
Président, M. Léon Vaillant ;
Vice-Président, M. le D' Brocchi ;
Secrétaire, M. Vidal ;
Vice-Secrétaire, M. Mailles.
Il y a ballottage pour l'élection du Délégué aux récompenses ; en
conséquence, il est procédé à un deuxième tour de scrutin où M. Ber-
thoule est nommé.
M. de Confévron envoie des renseignements sur la maladie des Ecre-
visses et, en même lemps, promet d'autres communications sur ce sujet.
M. le D"" Brocchi fait remarquer qu'il lui paraît désirable que ceux
de nos collègues qui s'occupent de cette question envoient les Ecre-
visses aussitôt mortes, et non plus ou moins en état de putréfaction,
comme cela arrive souvent, ce qui empêche de faire les constatations
médicales; sur la demande de la Section, M. le D'' Brocchi veut bien se
charger d'examiner les Écrevisses que la Société recevra.
M. Bouvier, ingénieur en chef du département de Vaucluse, envoie
une lettre dans laquelle il demande à la Société un exemplaire de notre
rapport sur la maladie des Écrevisses.
La Section décide de demander à M. Bouvier de vouloir bien envoyer
des Écrevisses mortes.
M. Raveret-Watlel demande la parole et entrelient la Section au sujet
de la maladie des Écrevisses, dont les causes sont restées inconnues.
Les variations de la température n'y sont évidemment pour rien, puis-
que, de tout temps, /îlles ont eu lieu. Quant aux parasites, dont plu-
sieurs espèces vivent aux dépens de ces Crustacés, on ne sait lesquels
accuser, ni même s'il faut en accuser aucun. Mais le mal tend à dispa-
raître. De petites Écrevisses, échappées au fléau destructeur, reparais-
sent peu à peu. Notre collègue fait remarquer que c'est avec intention
qu'il dit que ces jeunes animaux ont échappé à l'épidémie, car ils se
montrent dans bien des eaux oîi toutes les grosses Écrevisses sont
nftortes, ce qui éloigne toute idée de reproduction récente.
PROCÈS- VERBAUX. 117
M. le Président désirerait qu'il nous soit envoyé des Écrevisses non
malades, aussi bien que de celles qui le sont, des provenances contami-
nées, pour aider dans les recherches sur la cause du mal et sa manière
de débuter.
M. Raveret-Wattel rappelle l'envoi qui fut fait de Saumons de Cali-
fornie, lesquels, lâchés dans l'Hérault, gagnèrent la mer et quelques-
uns reparurent ensuite dans l'Aude.
Cet essai, assez encourageant, détermina la Société, sur la proposi-
tion de M. Raveret-Wattel, à envoyer dans le même département des
œufs de Salmo salar. On sait qu'un insuccès complet fut le résultat ob-
tenu de cet envoi dont les œufs soumis à une eau trop chaude n'ont pu
éclore. Néanmoins, notre collègue pense que les nouveaux Saumons qui
vont être expédiés dans la même localité, d'après la décision prise par
le Conseil, auront un sort plus prospère que leurs malheureux frères.
D'autre part, M. Raveret-Wattel annonce qu'il s'est adressé au ser-
vice des ponts et chaussées, et qu'il en a obtenu un crédit destiné à
seconder notre Société dans ses travaux piscicoles. Ce service construira
un laboratoire d'élevage destiné à recueillir les œufs que fournira la
Société.
M. le Chef de la Société de Navigation est heureux du concours offert
par la Société d'Acclimatation. Il fera son possible pour nous aider dans
nos tentatives de repeuplement des eaux. A cet effet, le personnel de la
navigation sera mis à noire disposition pour la surveillance.
M. Mailles donne lecture des réponses (ju'il adresse aux lettres de
MM. Laisnel de la Salle et Cornély, à propos des reproductions des
Grenouilles-Rœufs. 11 donne aussi lecture des lettres de ces messieurs.
M. Joly réfute un fait mentionné dans la communication de M. Laisnel
de la Salle citée plus haut; il s'agit d'une grosse Perche qui aurait
coupé une Brème de forte taille en deux parties, emportant une de ces
parties et en laissant l'autre.
M. Joly explique que la Perche ayant les dents recourbées, faites
pour retenir une proie et non pour la broyer, et encore moins la cou-
per, ne saurait exécuter un sectionnement dans le genre de celui que
cite M. Laisnel de la Salle.
M. le Président ainsi que plusieurs membres disent qu'en effet, il
n'est pas croyable que la Perche puisse couper en deux une Brème, cette
dernière fût-elle de taille moyenne et la première aussi grosse que peut
l'être une Perche.
M. le D'- Brocchi montre à la Section le tableau qu'il a dressé des éta-
bhssements qui s'occupent de pisciculture, en France; ces établissements
sont au nombre de vingt-neuf, répartis dans vingt-cinq départements.
Ces laboratoires sont dépourvus des nouveaux appareils perfectionnés,
aussi, M. le D^ Brocchi estime qu'il y aurait lieu de répandre, le
plus possible, le travail que M. Raveret-Wattel écrit sur ce sujet.
118 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
M. Rathelot demande à prendre connaissance du tableau dressé par
M. le^D"^ Brocchi.
M. le Président lui répond que ce tableau est à la disposition des
membres, qui peuvent le consulter au siège de la Société.
M. Rathelot explique que, demeurant à Montrouge, il ne lui est pas
facile de venir passer plusieurs heures rue de Lille, pour consulter les
documents ou les livres de la bibliothèque. Notre collègue regrette que
les sociétaires ne puissent, moyennant le dépôt d'une somme quelcon-
que, emporter chez eux les ouvrages et les pièces qu'il sont à consulter.
D'ailleurs, cette consultation a souvent besoin d'être faite à côté des
animaux que l'on étudie, et qui ne peuvent être transportés rue de Lille.
MM. Paillieux et Mailles font observer qu'ils s'associent au vœu de
M. Rathelot pour ce qui concerne les livres, mais non les documents et
les diverses pièces manuscrites qui, égarés, ne pourraient être rem-
placés.
La proposition que M. Rathelot veut transmettre au Conseil est mise
aux voix, avec l'amendement de MM. Paillieux et Mailles.
Six membres seulement prennent pari au vote, trois pour la proposi-
tion et trois contre. En conséquence, la Section passe à l'ordre du jour.
M. de Sémallé demande où il pourrait se procurer des Poi sons-Chats
{Amiiirus nebidosiis, le Cat-Fish des États-Unis). M. Berthéol peut en
fournir à notre confrère.
Le Vice-Secrétaire,
Ch. Mailles.
QUATRIÈME SECTION.
SÉANCE DU 22 DÉCEMBRE 1885.
Présidence de M. Maurice Girard, Président.
Il est procédé aux élections du Bureau pour la session 1885-1886.
M. Mailles déclare ne pouvoir accepter le renouvellement de son
mandat, ayant été déjà nommé membre des Bureaux des première et
troisième Sections.
Sont nommés par acclamation :
Président, M. Maurice Girard.
Vice-Président, M. Fallou.
Secrétaire, M. Sédillot.
Vice-Secrétaire, M. Eug. Joly.
Délégué aux récompenses, M. Fallou.
MM. les Secrétaire et Vice-Secrétaire n'assistant pas à la réunion,
M. le Président prie M. Mailles, Secrétaire sortant, de vouloir bien
rédiger le présent procès-verbal.
PROCÈS-VERBAUX. 119'
M. Fallou présente à la Section plusieurs boîtes contenant des Lépi-
doptères diurnes et nocturnes, ainsi que des cocons, des chrysalides,
des Chenilles et des oeufs. Ce sont :
i° Une espèce diurne :
Urania ripheus.
2" Plusieurs espèces nocturnes :
Saturnia suraka cT et Ç.
Borocera Madagnscariensis (f et ^
Antherœa Pernyi.
Attacus cynthia.
Antherœa mylitta çf et ^.
Actias lima cf et Ç.
Des cocons de Borocera Madagascariensis, à' Antherœa mylitta,
à' Actias luna ; enfin des Chenilles à' Actias luna et des œufs d' Anthe-
rœa mylitta.
Le H. P. Camboué envoie une lettre, dans laquelle il parle des Criquets
dévastateurs de Madagascar, qu'il désigne sous le nom impropre de
Sauterelles.
A cette occasion, M. le Président fait remarquer que le R. P. Camboué
confond les Criquets avec les Sauterelles, et inversement ; en effet, notre
collègue désigne les Orthoptères dont il parle sous le nom de Saute-
relles, puis les traite d'Acridiens. Cette dernière dénomination seule
est bonne; les véritables Sauterelles sont des Lociistiens.
M. Fallou fait connaître les résultats de ses élevages de Bombyciens
séricigènes.
11 donne aussi lecture de différents documents ayant trait à la dénomi-
nation d'une espèce de Bombycien, dont le véritable nom est Antherœa
Frithii ; cette espèce fournit une belle soie, pouvant rivaliser avec
celle du Sericaria Mori.
iM""^ Doué écrit de Chollet (Maine-et-Loire) à M. Geoffroy Saint-Hilaire
qu'elle a constaté les ravages qu'exerce dans les vignes un Charançon,
VOtiorhynchus sidcatus Fabr.
M. Maurice Girard pense que le meilleur moyen de diminuer le
nombre de ces Insectes consiste à les ramasser, le jour, aux pieds des
ceps, cette espèce étant nocturne.
Un de nos collègues d'Algérie se plaint des dégâts causés par une
Fourmi, dont, malheureusement, il n'envoie pas de spécimen. M. le
Président suppose que la Fourmi moissonneuse doit être la coupable.
M. Paillieux dit qu'il a observé que les Haricots qu'il reçoit d'Asie
sont souvent perforés par un Charançon, mais que ceux cultivés en France
sont indemnes.
M. Maurice Girard répond que le Charançon en question est une
Bruche, et que cet Insecte tend à se répandre de plus en plus chez nous.
M. le Président montre à la Section un de ses bons points instructifs,
120 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
représentant le Cossus gâte-bois à ses divers états et parle des dégâts
que fait le Cossus.
M. Fallou dit qu'il a pu constater les ravages de cette espèce, sur les
Ormes des boulevards, avant 1830.
M. le Président dit qu'il a reçu des grains de Blé attaqués par la
Tillea granella, Teigne du Blé. Mais les Coléoptères qui accompagnent
cet envoi et qui sont accusés d'être les auteurs du mal sont parfaite-
ment innocents. Ces Ptinus fur Linné sont venus manger seulement
les vieux habits des Teignes.
M. Fallou fait connaître qu'il a conservé de ces Insectes dans des
flacons bouchés, sans nourriture, pendant trois ans, jusqu'à ce qu'ils se
fussent dévorés entièrement entre eux.
Pour le Secrétaire,
Ch. Mailles,
Secrétaire sortant.
V- FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE.
Société de pisciculture du département du Cher.
La Société de pisciculture du département du Cher a tenu dernière-
ment une réunion générale. La séance, à laquelle s'était rendue une
nombreuse assistance, a été fort intéressante. Plusieurs communications
importantes ont été faites sur l'état des cours d'eau du département,
leur repeuplement et le choix des espèces de poissons qu'il convient de
multiplier dans tel ou tel cours d'eau. D'après les renseignements don-
nés en séance, l'empoissonnement fait au commencement de l'année par
la Société, dans les eaux des environs de Bourges, a porté sur 60000
Carpes et Carpillons. Cet empoissonnement a parfaitement réussi.
Une très instructive conférence sur l'histoire de la pisciculture a été
faite par M. Ancillon, Président de la Société. Signalant l'importance
nationale et économique de la production du poisson, M. Ancillon a éta-
bli, d'après des documents sérieux, que cette production, pour nos eaux
douces, s'élève à 50 millions de francs par an. C'est une quantité relati-
vement minime; répartie par habitant, elle ne représente environ que
1 fr. 4.0. Elle pourrait être facilement portée à 350 millions, si nos
rivières étaient suffisamment peuplées et protégées. C'est, par consé-
quent, 300 millions par an que perd la France en négligeant ses cours
d'eau.
A la suite de cette conférence et après le compte rendu financier pré-
senté par le trésorier, l'assemblée a pris les résolutions suivantes :
1" Le réempoissonnement des rivières du département sera continué
dans la mesure des ressources de la Société ; il aura lieu en Cyprins,
Salmonidés et Crustacés, il sera employé pour ce l'éempoissonnement les
sommes ci-après :
En Cyprins 500 francs
En Salmonidés 300 —
En Crustacés (Écrevisses) 200 —
Total 1000 francs
2" En vue de proléger l'empoissonnement des rivières, il sera payé
une prime de 5 à 20 francs aux agents des ponts et chaussées, gardes
champêtres, gardes-rivières, gendarmes, agents de police, qui auront
fait des procès-verbaux contre les délinquants dans des conditions mé-
ritant encouragement et récompense.
3» Il sera payé une prime de 50 à 200 francs aux instituteurs qui se-
ront parvenus à organiser et constituer des syndicats de propriétaires
en vue de protéger les rivières contre les maraudeurs.
122 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
4° Les maires seront priés d'organiser une surveillance active sur les
places et marchés, afin d'empêcher la mise en vente de poissons trop
jeunes.
5° La Société publiera un bulletin de ses travaux aussitôt que ses
ressources le permettront.
6° 11 sera demandé une subvention en argent au département et à la
ville pour aider la Société dans son œuvre de l'éempoissonnement des
rivières et pour créer à Bourges un établissement de fécondation artifi-
cielle d'éclosion et d'élevacre. R. W.
L'Industrie de la Cochenille au Guatemala.
« L'éducation des Insectes hémiptères de la famille des Pucerons, et
particulièrement le Coccus cacti, ou Cochenille espagnole, est au Gua-
temala une industrie profitable, sinon agréable. De grands espaces
sont consacrés entièrement à la culture de Nopals {Opuntia coccinelli-
fera) sur lesquels vivent les Cochenilles. ''
î Les plantalions que nous visitâmes ont une superficie de près de
mille acres, et le modus operandi de culture est des plus curieux. Ces
Insectes réclament à peu prés les mêmes soins que les Vers à soie.
» Immédiatement avant la saison pluvieuse, de larges raquettes de
Nopal, couvertes de Cochenilles, sont coupées et rangées sous une sorte
de hangar, oîi les Insectes passent les quatre ou cinq mois de la saison
des pluies, à l'abri des intempéries. A la fin du mauvais temps (vers la
mi-octobre), les plantations sont de nouveau peuplées de Cochenilles.
On construit, avec des fibres de bois, des nids où l'on met une douzaine
de femelles, puis ces nids sont suspendus aux épines des Cactus. Ré-
chauffées par le soleil tropical, ces mères sortent de leur torpeur, et
commencent bientôt à pondre avec une rapidité surprenante , chaque
femelle produisant plus de 1000 œufs. Ces jeunes Insectes se répandent
très rapidement sur les Cactus, grossissent vite, et adhèrent si bien aux
raquettes des Nopals, qu'on les prendrait plutôt pour des excroissances
végétales que pour des Insectes.
» Dans ces conditions, on les recueille pour l'industrie, mais seule-
ment les femelles fertiles, qui, seules, peuvent être utilisées. Les mâles
sont peu nombreux: un tout au plus par deux cent cinquante femelles.
» Les femelles sont détachées de leurs raquettes, avec un couteau,
jetées dans un panier, et tuées par une immersion en eau bouillante, ou
cuites au four, ou bien encore, séchées sur un plat de fer brûlant. La
première récolle a lieu vers la mi-décembre, et, à mesure que les géné-
rations se succèdent, on continue à les recueillir jusqu'à la fin de mai. Ces
FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 128
Insectes ont la forme d'une écaille ronde ; le corps est traversé par des
raies profondes; l'abdomen est de couleur mûre sombre; les pattes sont
courtes, noires et fragiles à la partie postérieure. Le niàle seul a deux
ailes ; la femelle est aptère.
» Un homme d'une habileté ordinaire peut récolter environ deux
onces de Cochenilles par jour. Par la dessiccation, elles perdent au moins
les deux tiers de leur poids. Comme il faut au moins 70 000 Insectes
pour faire une livre, et que le prix de vente au détail est seulement de
60 centimes par livre, on comprend que ce travail n'est pas du tout une
sinécure.
» Par la méthode d'immersion des Cochenilles dans l'eau bouillante,
elles prennent une teinte brun rougeâtre, et perdent une grande partie
de ce duvet blanc qui couvre les raies du corps. Desséchées au four,
elles conservent leur duvet et deviennent grises. Séchées sur un plat de
métal brûlant, les Cochenilles prennent une teinte noirâtre. Ceci ex-
plique les diverses dénominations sous lesquelles elles sont connues sur
les marchés, comme « grains d'argent », « grains noirs », et « grains
renards » ; ces dernières, obtenues par la méthode de l'eau bouillante,
sont préférées aux autres. Séchées, les Cochenilles présentent l'aspect
de graines convexes, d'un huitième de pouce (anglais) de diamètre; les
bandes transversales restent apparentes.
» Une autre espèce, la Cochenills sylvestre, vit sur un Cactus sauvage.
Inférieure, comme qualité, à l'espèce Cacti, cette Cochenille est re-
cueillie et vendue pour la bonne espèce cultivée; il arrive aussi, par-
fois, que ces deux Cochenilles se trouvent mélangées, sans que le pro-
priétaire y ait fait attention.
» Quelquefois, un Puceron ravageur apparaît tout à coup et dévaste
des plantations entières ; c'est ce qui est arrivé, il y a quelques années. Il
fallut arracher et détruire les vieux Cactus et en planter de nouveaux.
Enlui, les Oiseaux, les Souris et certains Insectes détruisent les Coccus
cacti; ces derniers sucent tout l'intérieur du corps des Hémiptères, ne
laissant que l'enveloppe desséchée.
Traduit du Montréal Daily Star
par Ch. Mailles.
VI BIBLIOGRAPHIE.
i^a Cité chinoise, par G. EuG. SiMON. 1 vol. in-18, de 390 pages.
Paris, 1885. Nouvelle Revue, boulevard Poissonnière, 23.
Abrité derrière sa Grande Muraille, détourné par sa religion et par
ses coutumes séculaires de tout commerce avec l'étranger, produisant
lui-même et à bas prix tout ce qui pouvait être nécessaire à ses besoins,
l'immense empire chinois était demeuré, presque jusqu'à nos jours,
impénétrable et mystérieux. De hardis missionnaires avaient fini cepen-
dant par franchir ces barrières et par soulever aux yeux étonnés de
l'Europe, un coin de ce voile, jusque-là si sévèrement baissé. Mais la
brèche, ainsi ouverte au prix des plus pénibles efforts et du plus géné-
reux dévouement, était aussi étroite que dangereuse, et il a fallu mal-
heureusement le secours du canon pour la rendre définitivement pra-
ticable.
Le livre que vient de publier M. Eug. Simon, en dépit de l'enthousiasme
un peu accentué qui le distingue, aidera à l'élude du sphinx encore à
peine démasqué, et contribuera sans doute utilement à redresser l'opi
nion si généralement répandue, nous représentant le peuple chinois
comme un peuple barbare, ennemi de toute civilisation, animé d'une
invincible aversion pour l'étranger, et son gouvernement comme un
gouvernement essentiellement tyrannique.
Ce qui frappe tout d'abord, lorsqu'on pénètre dans ce monde nouveau,
c'est l'extraordinaire densité de la population agricole qui atteint, dans
certains districts, jusqu'au chiffre extraordinaire de quinze habitants à
l'hectare. La terre est soumise au régime de la petite culture : la pro-
priété ne dépasse guère une étendue moyenne de 2 à 3 hectares ; on
appelle grandes propriétés celles qui atteignent 100 hectares, et encore
sont-elles extrêmement rares. Sobre, économe, laborieux, le paysan
chinois, confiné sur son petit lopin de terre, le cultive avec ardeur, et
en obtient, à force de soins, et en utilisant avec prévoyance tous les en-
grais à sa disposition, surtout ceux qu'on méprise le plus chez nous,
jusqu'à trois récoltes par an, parfois même davantage. Ce merveilleux
résultat serait dû en partie à la méthode de repiquage, adoptée même
pour la culture du blé, ce qui conduit l'auteur à regretter qu'une si
fructueuse pratique ne soit pas répandue dans tous les pays de culture
des céréales ; mais nous avons peine pour notre part, avouons-le en
passant, à nous imaginer, en présence du renchérissement de la main-
d'œuvre, la possibilité de cultiver de la sorte les champs de la Beauce,
ou les immenses plaines du Far-West. Quoi qu'il en soit, même sur le
domaine le plus exigu, le paysan, après en avoir tiré toutes les res-
sources nécessaires à son existence, arrive encore dans ce fortuné pays
à réaliser d'importantes économies ; et il ne faut pas croire qu'il vive
BIBLIOGRAPHIE. 125
misérablement; loin de là, ses repas sont abondants et variés; sa mai-
son, sans luxe inutile, est installée avec confortable, il veille attentive-
ment à la propreté et à la correction de sa tenue; sa mise n'est pas sans
élégance, et il n'est pas jusqu'à sa démarche aisée que l'auteur ne com-
pare tristement avec l'allure gauche et pesante d'un paysan breton ou
auvergnat! Combien ne devons-nous pas regretter que ce séduisant
modèle soit si éloigné de nous !
L'impôt pèse sur la superficie et varie de 1 fr. 50 à 5 francs par hec-
tare, toutes charges comprises, ce qui ne représente guère que 3 francs
par habitant. A ce point de vue encore, et ici malheureusement le doute
n'est pas possible, la comparaison est loin de nous être favorable. L'in-
dustrie et le commerce sont affranchis de toute charge, et se trouvent
ainsi placés dans des conditions exceptionnellement avantageuses pour
lutter contre la concurrence étrangère. La prospérité et le bien-être qui
résultent de ce système économique ont pour première conséquence
d'adoucir les mœurs, à ce point que la criminalité serait pour ainsi dire
réduite à néant; ainsi à Han-Kéou, ville de deux millions d'habitants,
ou a relevé un seul meurtre en trente-quatre ans! dans le Pé-tclii-li, en
y comprenant Pékin, le Paris de la Chine, c'est à peine s'il y a annuel-
lement douze exécutions capitales. Quant aux infanticides, (ju'on nous
disait d'une si triste fréquence, c'est une pure légende éclose dans le
cerveau des bons pères Jésuites pour le plus grand profit de leur oeuvre
de la Sainte-Enfance !
Voilà certes un tableau enchanteur dès sa première partie, et qui nous
montre un idéal de société que bien peu sans doute auraient cherché en
Chine. Nous aurons garde de suspecter la sincérité de ce lyrisme, que
n'amoindriront pas, espérons-le, les récits de nos soldats du Tonkin.
M. Simon a écrit avec la plus complète bonne foi, comme il le déclare
en tête de son livre; mais enfin, il faut bien reconnaître que tous les
voyageurs ne sont pas revenus de ce pays avec le même enthousiasme.
Il nous souvient même de quelques-uns de leurs récils, légèrement diffé-
rents de cette peinture idéale des mœurs patriarcales du Céleste Empire,
et qui nous donnent à penser que l'imagination de nos missionnaires
est moins féconde qu'on n'a voulu le supposer, et qu'assurément leurs
orphelinats manquent plutôt de places que d'enfants abandonnés à
secourir.
La famille chinoise est organisée sur le modèle d'un Étal politique :
tous les membres réunis forment le pouvoir délibérant, le père repré-
sentant le pouvoir exécutif. La mère elle-même n'est pas sans avoir
une grande autorité : elle assiste aux assemblées avec voix délibéra-
tive et exerce en outre les fonctions importantes de ministre des
finances; elle tient les cordons de la bourse, dit M. Simon, et c'est à elle
qu'humblement le mari doit s'adresser pour en obtenir l'argent néces-
saire à ses menues dépenses. Pauvres maris! La famille s'assemble à
126 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATWN.
des péi-iodes déteriTiinées pour célébrer avec solennité le culte des an-
cêtres. D'autres fois, elle s'érige en tribunal domestique pour juger
tous les litiges, voire même les délits et les crimes commis par un de
ses membres; son code pénal lui permet de prononcer la flagellation,
l'exil, l'excommunication, c'est-à-dire l'exclusion de la famille. Si le
coupable a encouru la peine capitale, plutôt que de le renvoyer devant
les tribunaux de TÉtat, qui, seuls, pourraient la prononcer, on lui laisse
le choix entre l'excommunication ou le suicide, et c'est cette dernière
peine qui est le plus ordinairement choisie.
Les tribunaux publics jugent en appel au civil les décisions des tri-
bunaux domestiques, et prononcent au criminel les châtiments suprê-
mes; mais, auprès de ces tribunaux, ni procédure, ni ministère public,
ni avocats! L'empereur exerce le droit de grâce; néanmoins, il ne doit
statuer qu'après s'être soumis, trois jours durant, au jeune et à l'absti-
nence! Quel sujet de méditation pour certains chefs d'État!
Le métier des armes est peu en honneur; cependant, depuis que l'au-
teur en a étudié de près l'organisation militaire, la Chine a fait à cet
égard d'immenses progrès, et si, il y a quelque vingt-cinq ans, elle
s'est montrée impuissante contre les invasions étrangères, il faut recon-
naître que, depuis lors, elle s'est singulièrement aguerrie, et qu'il est
imprudent de la tenir aujourd'hui pour une quantité négligeable, comme
nous en avons fait naguère la fâcheuse expérience.
Dans un chapitre intitulé le Travail, M. Simon, après avoir exposé
l'état des croyances religieuses, donne des détails vraiment pleins d'in-
térêt sur les diverses professions, libérales ou manuelles, qui toutes
sont entourées d'une égale considération, sur l'organisation des corpo-
rations de métiers, analogues à celles qui existaient jadis en France, et
«nfin sur l'industrie qui, le plus souvent, s'unit intimement à l'agriculture
dans la maison même du cultivateur.
L'exposé de l'organisation politique est bien de nature à causer de
l'étonnement à ceux qui considéraient le Gélesle-Empire comme le der-
nier refuge de la tyrannie et du despotisme. Tout homme est électeur
aussitôt parvenu à la majorité; les assemblées de citoyens sont libres,
indépendamment de toute convocation ou autorisation du gouvernement;
«lies élisent les conseils qui administrent la circonscription territoriale
d'où elles dépendent, canton, arrondissement, province; ces conseils
sont élus pour trois ans, mais essentiellement révocables ; la gratuité est
de leur essence. C'est là que s'arrête la représentation du peuple ; en
dehors de la province, aucun corps électif n'entoure le gouvernement
central.
Le principe de la responsabilité de tous les fonctionnaires, depuis le
dernier mandarin jusqu'à l'empereur lui-même, est absolu, et s'étend
non seulement à tous les actes de leurs fonctions, mais encore aux
événements causés par force majeure, tels que sécheresses, inondations.
BIBLIOGRAPHIE. 127
soit parce que le plus souvent une bonne administration aurait pu les
prévenir, soit par cette simple raison qu'il convient d'établir une étroite
solidarité d'intérêts entre ces fonctionnaires et les populations adminis-
trées par eux. Quant à ceux qui n'auraient pas su prévenir une guerre
inutile, ou qui laisseraient l'ennemi envahir le sol de la patrie, le sui-
cide serait la seule expiation possible! En un mot, les bases essentielles
de la politique chinoise sont : la liberté, la solidarité et l'unité, et bien
des nations dites civilisées pourraient la prendre pour modèle,
Oîi l'auteur est moins enthousiaste, c'est à l'endroit de nos récents
démêlés avec la Chine, à propos du Tonkin ; il estime, à bon droit, que
le Tonkin est trop complètement dans la sphère chinoise par sa situation
géographique, sa constitution, sa langue, ses mœurs, pour nous rester
fidèle, à moins de sacrifices ruineux pour nous, le jour où le colosse
voisin, plus aguerri qu'aujourd'hui, transformant son armée de défense
en armée d'invasion, en mobiliserait les innombrables phalanges. On
estimerait facilement, d'autre part, le profit que notre commerce pourra
retirer de cette nouvelle colonie, en prenant comme point de compa-
raison les résultats obtenus depuis la conquête de la Cochinchine, dont
presque tout le commerce se fait en dehors de la mère-patrie. Pour ce qui
est de la Chine elle-même, ses exportations ont plus que doublé depuis
1860, tandis que ses importations s'y sont maintenues à un chiffre insi-
gnifiant.
Le livre se termine par une idylle pleine de charmes. Si élevé que
soit le mur de la vie privée en Orient, M. Simon est parvenu à le fran-
chir. 11 a su gagner l'affection d'une famille de bons et honnêtes culti-
vateurs d'un village voisin de Fou-tchéou ; il a pu, plusieurs années
durant, vivre dans son intimité, apprendre son histoire, une histoire
dont les débuts remontent à huit siècles en arrière ! étudier sa consti-
tution, son fonctionnement et ses diverses transformations, et pénétrer,
en un mot, jusqu'aux arcanes les plus secrets. L'histoire de la famille
Ouang-ming-tse est, après tout, celle de toutes les familles chinoises:
aussi bien ne saurait-on lire une étude ethnographique plus attachante
ni plus complète et plus instructive.
En somme, si nous nous sommes permis certaines critiques, sur un
engouement peut-être exagéré à divers égards, et à l'occasion d'attaques
un peu trop passionnées, croyons-nous, pour être justes, le livre de
M. Eugène Simon n'en reste pas moins empreint d'une remarquable
originalité ; il est riche en fails nouveaux, en observations et en docu-
ments de toute nature, et pourrait assurément servir de cadre à un plus
grand ouvrage. Am. Bp:kthoule.
128 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
Journaux et Revues.
(Analyse des principaux articles se rattachant aux travaux de la Société.)
Revue maritime et coloniale, janvier 1886. Paris, libr. militaire de
L. Baudoin et C".
Nous relevons, dans la statistique des pêches maritimes de l'année
1884, quelques-unes de ses données les plus intéressantes, qui présentent
malheureusement des résultats inférieurs dans leur ensemble à ceux de
l'année précédente.
Les grandes pêches à Terre-Neuve et en Islande furent entravées au
début par la présence dans ces parages d'une quantité considérable
d'icebergs détachés de leur point de formation à la suite d'un hiver
polaire moins rigoureux que de coutume; les prix de vente ayant,
d'autre part, été avilis sur les marchés d'Europe, le produit total de
l'année n*a atteint que 87 millions contre 107 en 1883, représentant
36 millions de kilogrammes de Morues, 46 millions de kilogrammes de
Harengs, 411 millions de Sardines, etc.
L'mdustrie de la pèche sur les côtes de la France se répartissait, en
1884, entre 47 877 établissements, couvrant une superficie de 1 3 500 hec-
tares; il a été vendu 529 768 767 Huîtres de toute espèce, au prix de
13577 000 francs. Si ces chiffres sont un peu inférieurs à ceux de 1883,
en revanche la récolte du naissain a été extrêmement abondante, faisant
ainsi prévoir de bons jours pour les gourmets.
La pêche en mer sur les côtes d'Algérie a produit une somme de
3 757 000 francs, à peu de chose près égale à celle du précédent exer-
cice. Notons seulement ce fait regrettable que la pêche de corail tend à
en disparaître complètement; déjà aujourd'hui elle n'est plus guère
pratiquée qu'aux environs de la Galle; cela tient moins à l'appauvris-
sement des bancs coralifères qu'à la découverte de gisements nouveaux
dans les eaux de la Sicile. Espérons que les nouveaux règlements ma-
ritimes rendront sa prospérité passée à cette branche de l'industrie
côtière.
Le nombre des sinistres n'est toujours que trop élevé ; c'est ainsi que
quatre cent treize pêcheurs ont, au cours de cette même année, péri en
mer, payant un lourd tribut à la tempête.
Am. B.
Le Gérant: Jules Grisard.
152. — BoURLorOiN. — Iinprinieries réunies, A, rue Mignon, 2, Paris.
I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ
UTILISATION INDUSTRIELLE
DU POIL DES LAPINS ANGORAS
Par M. A.-C;E0FFK0Y SAII\T-IiILililRE
L'intéressante communication faite par M"' Lagrenée (l),
sur l'utilisation industrielle du poil des Lapins angoras, nous
a remis en mémoire l'exploitation du même produit qui se
l'ait auprès d'Aix-les-Dains, à Brison-Saint-Innocent (Savoie).
M. Jacquier, de la maison Jacquier et G'% à qui nous nous
sommes adressés, nous a écrit : ,
(( L'industrie que nous exploitons a pris un grand déve-'
loppement. Nous expédions nos produits en grand nombre à
Paris, Lyon, Marseille, en Angleterre, Belgique, Suisse, Ita-
lie, Amérique, etc.
» Nous en avons beaucoup vendu à S. M. la reine d'Angle-
terre pendant son séjour à Aix.
y Les Lapins angoras que nous exploitons appartiennent à
la grande race; ils ne vivent pas à Pair libre. Ils sont entrete-
nus dans des locaux fermés et sont réunis on grand nombre,
et nous les séparons lorsque nous voulons les faire repro-
duire.
y> Les mâles et les femelles produisent tous deux une même
quantité de laine (soie). Les mâles ne sont pas castrés. »
On voit, d'après cette lettre, que l'élevage des Lapins est
très différent à Saint-Innocent de ce qu'il est à Frocourt, cbez
M"" Lagrenée, puisque les premiers vivent enfermés, les se-
conds en plein air, exposés à toutes les intempéries.
Nous avons cru devoir nous adresser également à 31. Pa-
lard-Chalelain, de La Ferté-Macé (Orne), qui, en 188.3, avait
(1) Voyez au Bulletin, 1885, p. 642.
4' SÉRIE, T. IlL — Mars 188G. U
130 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
écrit à la Société qu'il possédait deux mille Lapins angoras,
et qu'il se proposait d'en augmenter encore le nombre.
M. Patard-Cliatelain a très obligeamment répondu à nos
questions par la lettre suivante :
« Monsieur,
» J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de
m'adresser.
» Il est certain que l'élevage du Lapin angora peut laisser
de beaux bénéfices, à condition toutefois d'être entrepris avec
un certain nombre de têtes, et en produisant soi-même, par
la culture de la terre, la nourriture des animaux. Si j'avais
continué à acheter les grains et fourrages, le poil aurait été
mangé bien avant d'être bon à récolter : je suis donc devenu
cultivateur malgré moi.
» Il en a été de même pour la filature. Pendant cinq ans,
depuis 1880, j'ai cherché des filateurs pour faire mon travail.
J'y ai subi toutes sortes de dommages : les uns ont abîmé
mon angora au point qu'il était considéré, après lilature,
comme du déchet de coton; peut-être même prélevait-on une
partie de mon produit pour la remplacer par de la laine ou
du coton. Le fait est arrivé au moins une fois. Après cinq ans
de recherches, d'essais tentés dans plus de vingt filatures,
j'ai dû faire comme pour la culture : j'ai acheté un matériel
que j'ai approprié à mon travail et je produis un fil qui est
très recherché.
À) Cependant, je crains que le prix n'en soit trop élevé pour
bien des bourses, d'autant plus que les intermédiaires pren-
nent généralement de gros bénéfices sur les articles nou-
veaux. J'en, arrive donc à redouter le placement de mon pro-
duit.
» Je cherche à diminuer le prix de revient du poil en aug-
mentant ma production, et j'ai la certitude que, au prix de
25 francs le kilogramme filé, cet article se vendrait facile-
ment. Mais l'élevage en grand peut seul donner ce résultat.
» En ce moment, le poil brut vaut environ 20 francs le ki-
logramme, cà condition d'être bien propre et de ne contenir
DU POIL DES LAPINS ANGORAS. 131
aucune partie feutrée. Le rendement d'un bon Lapin adulte
s'élève à 250 ou .iOO grammes par an, et peut augmenter sui-
vant les soins donnés à l'animal ; mais ce rendement peut
diminuer de beaucoup par l'absence de ces mêmes soins.
» En résumé, le revenu moyen peut être évalué cà 5 francs
par tète, mais il faut compter sur la nourriture d'hiver, qui
est considérablement plus onéreuse que celle de l'été. J'estime
que six semaines d'hiver coûtent plus à passer que les six
mois d'été : c'est là que se présente la nécessité absolue de
produire soi-même la nourriture.
» Pour me résumer, j'ai entrepris une industrie qui m'a
coûté beaucoup de patience, d'étude, d'observation et d'ar-
gent. L'élevage en grand est très difficile, et les essais de fila-
lure ne m'ont encore donné aucun bénéfice.
» J'ai néanmoins le ferme espoir que mon industrie pren-
dra de l'importance et sera profitable à la patrie. C'est cette
certitude qui m'a soutenu, et qui m'a rendu fort dans les
moments très durs que j'ai traversés Ma devise a été et est
restée : Ténacité.
» Je suis heureux, Monsieur, de vous transmettre ces ren-
seignements et je vous prie d'agréer, etc.
» Signé : Patard-Giiatelain,
» La Ferté-Macé (Orne). »
L'ensemble de ces renseignements, joint cà ceux fournis par
M""^ Lagrenée, donne à penser que l'utilisation des poils de
Lapins angoras est entrée aujourd'hui dans la pratique de
l'industrie. Les fils d'Angora sont employés tantôt sans mé-
lange, tantôt réunis aux fils dits de Cachemire ou de Vigogne.
Il y a là une application très intéressante d'un produit qui
avait été longtemps négligé. >
NOTE
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES
Par M. le comte A. de MOXTLEZUK
La bienveillance avec laquelle mes noies sur les Palmi-
pèdes lamelliroslres ont été accueillies l'an dernier, m'a en-
couragé cà offrir à la Société d'Acclimatation une notice sur
le genre Bernache ou Brenta.
Gomme par le passé, afin d'obtenir des renseignements
aussi précis que possible, je me suis adressé aux sources les
plus autorisées : à M, Geoffroy Saint-Hilaire, directeur du
Jardin zoologique du Bois de Boulogne; h M. Oustalet, doc-
teur es sciences, aide-naturaliste au Muséum d'histoire natu-
relle de Paris; à M. P. L. Sclater, secrétaire général de la
Société zoologique de Londres; à M. lluet, aide-naturaliste
chargé de la ménagerie du Muséum d'histoire naturelle de
Paris; à M. le directeur du Koninklijk Zoologisclt Genoot-
schap d'Amsterdam; à M. le directeur de la Société royale de
zoologie d'Anvers (Belgique). Ces Messieurs ont répondu avec
un empressement dont je ne saurais trop les remercier, à
toutes les demandes que j'ai eu l'honneur de leur adresser.
Si mon travail a quelque mérite, c'est en grande partie à
ces Messieurs qu'il le doit, et je tiens à leur témoigner ici
toute ma reconnaissance.
' FAMILLE DES ANATIDES
Sous-famille des Ansérinés. Genre Bernache, Bernicla ou Brenta.
En suivant l'ordre adopté par M. Georges Gray dans son
catalogue intitulé : Hand list of hirds, on remarque que la
sous-famille des Ansérinés comprend les genres Cereopsis,
Ânser, Brenta et Nettapus. Ces genres eux-mêmes renfer-
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 133
ment des subdivisions ou sous-genres qui tirent leurs noms
de l'aspect particulier des sujets qui les composent ou de
leurs habitudes.
Le genre Bernache ou Brenta réunit en une sorte de
faisceau les groupes ou sous-genres Brenta, ClUamidochen,
Leucoblepharon,Leucopareia, Buflbrenta, Cyanochen, Tœni-
diestes, Chloephaga ; ces groupes, dont je lais mention à
cause de leurs étymologies et par raison d'ordre, ne me
semblent pas présenter un bien grand intérêt au point de
vue de l'étude des espèces qu'ils renferment; aussi ne ferai-je
que les effleurer.
Les Bernaches se distinguent des Oies par les caractères
suivants : le bec est toujours plus court que la tête, il est
aussi moins allongé, moins conique, plus droit et plus mince
que celui des Oies; il présente une légère dépression en
avant des narines, placées à égale distance du dessus du bec
et des bords de la mandibule supérieure; cette dernière
est terminée par un onglet médiocre et fortement recourbé ;
les lamelles qui garnissent sa face inférieure ne sont point
apparentes; les ailes sont longues, aiguës, et portent le plus
souvent un miroir apparent, à reflets métalliques, ce qui
n'arrive pas en général chez les Oies.
La queue est arrondie ;'le bas des jambes emplumé; le
tarse plus long que le doigt médian. Les teintes du plumage
sont plus riches, plus vives et plus variées que chez les Oies;
elles diffèrent d'un sexe à l'autre, enfin les Bernaches recher-
chent plus que les Oies le voisinage des bords de la mer.
Le catalogue de M. G. Gray fait mention de dix-huit espèces
ou variétés de Bernaches, parmi lesquelles on distingue trois
espèces européennes, la Bernache Gravant, la B. leucopsis^
ou nonnette, et la B. ruficollis; les deux premières habitent
également l'Amérique, et la troisième, l'Asie. Deux espèces
appartiennent à l'Océanie, la B. jiibata et la Bernache de
Sandwich. Une seule espèce est d'origine africaine, c'est la
B. cyanoptera ; les douze autres, B. nigricans, B. Cana-
densis, B. Hutchinsii, B. leucopareia, B. anlarcHca,B. Ma-
gellanica, B. dispar, B. inornata, B. poUocephala , B. rubi-
134- SOCIÉTÉ NATIOiNALE D'ACCLIMATATION.
diceps, B. melanoptera et B. Canagica, sont entièremenl
américaines.
Toutes les espèces que je viens d'énumércr, quelle que
soit la partie du monde qui les ait vues naître, ont toutes, en
général, les mêmes habitudes. Elles recherchent et affection-
nent les lacs qui avoisinent les bords de la mer et sont essen-
tiellement herbivores. A l'état sauvage, elles se nourrissent
de jeunes pousses d'herbes, de plantes aquatiques et de pe-
tits mollusques; elles ne dédaignent pas les insectes et les
vermisseaux qu'elles rencontrent en fouillant les racines sur
le bord de l'eau.
A l'état domestique, les Bernaches acceptent toutes sortes
de grains, mais elle ne sauraient se passer d'une abondante
verdure, qui doit toujours servir de base à leur alimentation.
N" 1. Bernaghe Gravant.
(Bernicla brenta (i), n" 10575.)
Brenta, sous-ijenre a du catalogue de G. Gray.
Étymologie. — Brenta, de ppivGoç, ou, espèce d'oiseau'
aquatique, oie. Le nom de cravant, selon Gesner, ne serait
autre que celui de Graueente, en îtllemand, canard brun.
Synonymie. — Anas bernicla Linn. — Anas brenta
Briss. — Anser torquatus Friscli. — Anser brenta Pall. —
Bernicla brenta Stéph. — Bernicla melanopsis Me. Gill. —
le Cravant Buff. {Brent ou Brand goose Lath.), etc.
La Bernache cravant habite les régions arctiques du globe ;
on la rencontre, à l'approche de l'hiver, dans presque toutes
les contrées de l'Europe tempérée, mais principalement en
Hollande, où elle abonde en hiver et au printemps. Elle
arrive, périodiquement, vers la fm de l'automne, dans les
départements du nord de la France, et descend parfois par
petites troupes dans les départements du Centre et du Midi.
La Bernache cravant niche dans le Nord, très avant vers le
(1) Voy. Procced. Zool. Soc, 18GI, p. 101, 365; — 1863, p. 323; —1865^
p. 753; — 1873, p. 638; — 1877, p. 32; — 1880, p. 317, 502, 534.
SUR LES PALMIPEDES LÂMELLIROSTRES.
135
pôle. Elle construit son nid sur le bord de l'eau. Cet oiseau
est très aquatique, les voyageurs qui l'ont observé disent
qu'il nage des journées entières. Le docteur Jaubert, dans
son ouvrage intitulé : Richesses ornithologiqiies du midi de
la France, fait remarquer que la chair de la Bernache Gra-
vant est excellente et qu'elle devient encore plus savoureuse
lorsqu'elle passe de la vie sauvage à l'état domestique.
Description.
La Bernache cravant a le bec noir à onglet noir, l'œil brun
foncé, la tête et le cou noirs, le haut de la poitrine noir tirant
Bernache cravant {Lternicla Brenla).
légèrement sur le brun en se rapprochant du sternum ; sur la.
teinte noire du cou et presque vers le milieu de sa longueur,
faisant suite à la gorge, se dessine une tache blanche plus oa
moins grisâtre, disposée en forme de hausse-col renversé;
cette tache contourne, de chaque côté du cou, sur les deux
136 SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
tiers environ de sa circonférence et ne s'élend pas sur la
partie postérieure.
Les plumes du dos, les pennes scapulaires, ainsi que
toutes les couvertures des ailes, sont d'un gris brunâtre, bor-
dées d'une teinte gris fauve ; celles qui recouvrent le sternum
et le haut de l'abdomen sont brunâtres, terminées par une
bordure plus claire, cendrée, roussàtre; enlin, celles des
flancs sont de teinte un peu plus foncée que les précédentes,
également bordées à leur extrémité d'une nuance plus claire,
elles recouvrent les cuisses de leurs larges contours disposés
en forme d'écaillés ; le plumage du bas-ventre et les sous-
caudales sont d'un blanc pur, les grandes rémiges ont une
teinte bi'un noirâtre, les reclrices sont noires, les tarses et
les pieds sont noirs tirant légèrement sur le brun. Le mâle
mesure 0'j,66 de longueur, l'",33 d'envergure, 0"', 38 à l'aile,
0"','l 1 à la queue.
La femelle est semblable au niAle, mais les teintes de son
plumage sont un peu moins accusées, sa taille est aussi un
peu plus faible.
La tache blanche du cou n'existe pas chez les jeunes; toutes
les parties du corps qui sont noires chez les adultes sont chez
eux d'un noir grisâtre se rapprochant de la teinte générale
du dos, leurs pieds sont noirs, légèrement rougeâtres.
Reproduction.
La ponte de la Bernache cravant a lieu en avril et mai ; ces
oiseaux pondent de six à neuf œufs à coquille mince, d'un
blanc terne et jaunâtre, ils mesurent environ 0"',076 au
grand diamètre et 0'",052 au petit diamètre. L'incubation
dure de trente à trente-trois jours.
Cette espècGi se trouve au Jardin zoologique du Bois de
Boulogne, dans ceux de Londres et d'Amsterdam, mais ne s'y
est pas reproduite. M. le directeur du Jardin zoologique d'An-
vers (Belgique) a obtenu sa reproduction.
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 137
N° 2. BeRNACHE NOIRATRE.
{Bernlcla nigricans (1), u° 10570. Black Brent goose.)
Celte Bernache semble n'être qu'une variété américaine
de la Bernache cravant. Brehm(2) s'exprime ainsi à son égard,
dans le paragraphe qu'il consacre à cette espèce : « Celle qui
habite l'Amérique, et qu'on a voulu regarder comme consti-
tuant une espèce à part ne diffère pas de celle qui vit dans
l'hémisphère oriental. »
J'accepte pour le moment la manière de voir de cet auteur,
en attendant qu'il soit possible de mieux établir les carac-
tères distinctifs des deux espèces.
N° 3. Bernache a crinière.
{Bo'niclà jubata, n° 10577.)
Chlamidochen, sous-genre b du catalogue de G. Gray.
Elijmologie. — Chlamidochen, de ^Xapç, u5oç, chia-
myde, /-/^v, -/ivôç, oie (oie à casaque ou à chlamyde). — Ju-
bata, du mot latin jicbatus, qui veut dire garni d'une crinière,
indique que cet oiseau a aussi une sorte de crinière qui orne
îa partie postérieure de sa tête.
Synonymie. — Chlamidochen juhala Lath. — Anser
jubata, — Bernicla jubata, — Chloëphaga jubata, — Ber-
nache cà crinière (Maned goose), — de Zoological garden.
Celte espèce est quelquefois désignée sous le nom de Ber-
nache mariée, qui semble n'avoir aucune raison d'être et
qui doit provenir de ce que l'on a confondu le mot maned
goose avec maried goose.
La Bernache à crinière est originaire d'Australie; plusieurs
spécimens de cette espèce ont été introduits au Jardin zoolo-
(1) Voy. Proceed. Zool. Soc, 1880, |.. 502, 504, 535.
(2) Brehm,i>.li\, 742.
138
SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
gique de Londres en 1864 (1). Depuis cette époque, on ren-
contre cet oiseau dans presque tous les jardins zoologiques
et chez quelques éleveurs. M. Courtois, demeurant à Paris,
rue d'Aboukir, n" 111, qui élève avec un succès toujours
croissant les nouvelles espèces de Palmipèdes, obtient régu-
lièrement la reproduction de cette espèce : un seul couple lui
a donné jusqu'à trente-cinq œufs dans le courant de la même
Bernache à crinière {Bernicla jubata).
année. J'ai depuis un an environ des Bernaches à crinière qui
m'ont été cédées par lui à l'âge de six mois; elles n'ont point
reproduit l'an dernier, mais pondront probablement le prin-
temps prochain. Elles sont excessivement familières et ne
paraissent pas le moins du monde éprouvées par les rigueurs
de l'hiver. Leur nourriture consiste en jeunes pousses
d'herbes et en graines variées, blé, maïs, avoine, orge et
petit millet.
(1) Proceed. Zool. Soc, 1864, p. 587.
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 139
Description.
Le mâle a le bec brun noirâtre, à onglet noir; l'œil brun
foncé, la tête ainsi que la partie supérieure du cou brun
marron; à partir du crâne et en suivant les contours supé-
rieurs du cou, le plumage brun est disposé en forme de cri-
nière et sa nuance est plus foncée. La partie inférieure du
cou, le sommet du dos, ainsi que le baut de la poitrine, sont
d'une teinte grise tirant sur le fauve, tachetée de brun noi-
râtre à l'extrémité médiane des plumes, avec taches plus
accentuées sur celles qui recouvrent le jabot. Les plumes du
scapulaire sont grises, lancéolées, à. reflets blanchâtres, de
même que celles du manteau; quelques-unes d'entre elles
ont les barbes extérieures noires et leur juxtaposition forme
deux bandes noires qui partent de chaque côté du cou et
vont directement se rejoindre avec les rectrices en décrivant
un angle très aigu, ce qui donne à l'oiseau un cachet tout
particulier. Les rectrices sont d'un noir vif, ainsi que le plu-
mage qui recouvre le croupion et le ventre ; la couleur noire
s'étend également aux sous-caudales et se prolonge jusque
vers le milieu du sternum.
Les grandes rémiges sont noires et les ailes recouvertes
par les plumes des flancs qui sont très finement vermiculées
de noir sur une teinte gris-perle très claire; le miroir est
d'un beau vert brillant, extérieurement bordé de blanc; les
pattes sont grises, de nuance claire, et légèrement verdâtre.
La femelle a le bec gris tirant sur le brun, à onglet plus
foncé; son œil est brun foncé, entouré en dessus et en dessous
par quelques plumes grises; une ligne brun foncé part de
l'œil et va rejoindre la partie postérieure du crâne en se des-
sinant sur la teinte brune qui recouvre la tête et le cou. Les
plumes disposées eu forme de crinière sont bien moins appa-
rentes que chez le mâle; à la couleur brune du cou succède
une teinte plus grise, qui se fond dans un plumage gris ma-
culé de blanc sale ; les taches 'ou macules qui occupent les
extrémités des plumes sont plus rapprochées vers le jabot,
plus grandes cl plus espacées sur les flancs; le miroir de
140 SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
l'aile est moins vert que chez le mâle; sa bordure blanche est
plus large; les rectrices sont noires ainsi que les plumes qui
recouvrent le croupion; les sous-caudales, les plumes du
ventre, ainsi que celles de la partie inférieure de la poitrine,
sont blanches; les pattes sont grises, à peine verdâtres; vue
dans son ensemble, et en dehors des caractères que je viens
d'énumérer, la femelle présente les mêmes dispositions de
plumage que le mâle, mais ses teintes sont bien moins vives,
sa taille est aussi un peu plus faible.
Longueur totale de l'oiseau, 0"',50; longueur de l'aile,
0"\'iS; longueur de la queue, 0™,14.; longueur du bec,
O^jOSS ; longueur du tarse, 0'",0b.
Reproduction.
La ponte a généralement lieu en mai ; le nombre d'œufs
varie de huit à douze; ils mesurent 0'",059 (l) au grand dia-
mètre et 0'",041 au petit diamètre; ils sont de couleur
blanche, à peine jaunâtre.
N° 4. Bernache du Canada.
{Bernicla Canadensis ("2), n"^ 10578.)
Leucoblépharon, sous- genre c dn catalog-ue de G. Gray.
Élymologle. — Leucoblépharon, de Xeuxôç, ou, blanc,
pXétpapov ou, paupière (oie à paupière blanche). — Cana-
densis, qui désigne l'espèce, indique qu'elle est originaire du
Canada.
Synonymie. — Bernicla Canadensis Linn.,Wills. — Anas
Canadensis L. — Oie à cravate Butf. — Cygnopsis Cana-
densis Brehm. — Aîiser Canadensis (Canada goose).
La Bernache du Canada est originaire de l'Amérique du
Nord. Les voyageurs qui l'ont observée s'accordent à dire
qu'on la rencontre principalement entre le 50' et le 67' degré.
(1) Mesures prises sur un œuf qui m'a été donné par M. Courtois.
(2) VoY. Proceed. Zool. Soc, 186Û, p. 418; - 1861, p. 368, 264; - 1862,
p. 325; — 1868, p. 211 ; — 1873, p. 467, 63'J; — 1880, p. 317.
SUR LES PAr.MIPÈDES LAMELLIROSTRES. 141
Brelim raconte que, depuis l'apparilion des blancs, ces oi-
seaux se retirent de plus en plus vers le nord ; il dit que quel-
ques-uns nichent dans les grands marais des États du centre
de l'Anirrique. Audubon, qui, pendant plusieurs années con-
sécutives, a observé les Bernaches du Canada, dit qu'elles
sont excessivement vigilantes; leur vol est très élevé, presque
toujours hors de la portée des armes à feu ; dans leurs migra-
liernaclie du Caiiuda [Dentirla Cdiunlciisis).
tions, elles se disposent généralement en forme de triangle;
à l'état domestique, la Bernache du Canada se reproduit assez
facilement. Bulfon rapporte, dans son ouvrage, que, de son
temps, on les comptait par centaines sur le grand canal de
Versailles, où elles vivaient familièrement avec les Cygnes; il
ajoute qu'elles se tenaient moins souvent sur l'eau que sur
les gazons du bord du canal. Dans l'Amérique du Nord, on
trouve la Bernache du Canada dans presque toutes les fermes
à l'état domestique; sa viande passe pour être très bonne.
Description.
Bec noir grisâtre ta bordures plus claires et à onglet gri-
sâtre; œil brun noirâtre; tête et cou noirs avec une sorte de
14-2 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
cravate blanche qui occupe tout le dessous de la gorge, et re-
monte en pointe vers la région de l'oreille, en affectant de
chaque côté une forme angulaire, dont le sommet correspond
à la jonction des vertèbres du col avec le crâne. A la couleur
noire succède brusquement et en ligne droite horizontale
une nuance blanche qui passe insensiblement au gris en se
rapprochant du sternum; la poitrine est grise, légèrement
raéchée de gris plus clair; les flancs sont couverts de plumes
d'un gris roussatre, terminées par une bordure plus claire ;
les tectrices, les pennes scapulaires, les plumes du dos, sont
également grises, mais d'une nuance plus sombre; elles sont
toutes extérieurement bordées et terminées de nuance claire;
le ventre est blanc, ainsi que les sous-caudales; le croupion
est noirâtre, terminé par une bande blanche qui précède les
rectrices; ces dernières sont noires, ainsi que les grandes ré-
miges ; les unes et les autres ont leurs extrémités brunâtres;
les pattes sont gris de plomb, passant un peu au brun.
Dans cette espèce, les deux sexes sont semblables ; la femelle
est cependant un peu plus petite et les nuances de son plu-
mage sont moins vives. Voici les mesures moyennes de ces
oiseaux prises sur un mâle : 0"',96 de longueur, i'",74 d'en-
vergure; longueur de l'aile, 0",50; longueur de la queue,
0^19.
Reproduction.
C'est généralement en mars et en avril que la ponte a lieu;
les Bernaches du Canada pondent ordinairement de six à huit
œufs, d'un blanc jaunâtre; ils mesurent 0'",09 de longueur
sur O^jOBS de large; l'incubation dure de trente à trente-trois
jours, suivant les conditions atmosphériques.
La Bernache du Canada existe au Jardin zoologique de
Londres depuis 1831 ; M. P. L. Sclater constate, dans son cata-
logue des Anatidœ (1) du 15 juin 1880, que cet établisse-
ment n'avait pas encore obtenu la reproduction de cette
espèce. La Société royale de zoologie d'Anvers obtient au con-
traire annuellement sa reproduction.
(1) Proceed. Zool. 5oc., Species of Anatidœ, p. 502.
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 143
N" 5. Bernicla HuTCHiNsii Rich. (1).
(G. Gray, n° 10579, Hutchins's goosc.)
N" 6. Bernicla Leucopareia Brandt.
(G. Gray, n" 10580.)
C'est seulement comme mémoire que je mentionne ces
deux numéros du catalogue de Gray, car ils ne se rapportent,
d'après l'opinion de la plupart des auteurs, qu'à des variétés
de l'espèce qui précède.
N" 7. Bernache nonnette (2).
{Bernicla leucopsis, n" 10581.)
Leucopareia, sous-genre d du catalogue de G. Gray.
Étymologie. — Leucopareia, de Xsuxôç, blanc, irapeta, àç,
joue (oie à joues blanches), se rapporte au groupe d'Oies ou
de Bernaches qu'il désigne. — Leucopsis, de Xeuxôç, blanc,
o4»i(;, face, figure, visage, désigne spécialement l'espèce qui
a la face blanche.
Synonymie. — Anser leucopsis Bechst. — Anas ery-
thropus Linn. — Anser erythropus Gmel. — Bernache
nonnette Degland et Gerbe. — Anser bernicla Leach. —
Bernicla leucopsis Boie. — Bernicla erythropus Steph. —
Bernicla Briss {Bernicle goose).
La Bernache Leucopsis désignée par Belon sous le nom de
Nonnette, à cause de son plumage agréablement coupé de
blanc et de noir, habite les contrées les plus froides des deux
continents; on ne la rencontre dans les différentes contrées
de l'Europe tempérée que comme oiseau de passage en no-
vembre, décembre et janvier; pendant les hivers rigoureux,
(1) Proceed. Zool. Soc, 1880, Species of Anatidte, p. 502. — Proceed. Zool.
Soc, 18(iO, p. 418; —1868, p. 211.
(2) Voy. Proceed. Zool. Soc, 1859, p. 477 : — 1860, p. 341, 183; — 1863,
p. 323; - 1880, p. 317, 500, 501.
1M
SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
elle descend quelquefois dans les départements du nord de la
France, mais on ne la voit que très rarement dans ceux du
Centre et du Midi, A l'état sauvage, ce Palmipède ne se repro-
duit que dans les régions les plus reculées et les plus froides;
ses mœurs ont été longtemps ignorées, ce qui avait favorisé
les contes qui s'étaient accrédités sur son origine mystérieuse.
D'après les uns, il naissait spontanément dans certains co-
Bernache nonnelte (Bernicla leucopsis).
ri ai m
quillages; d'après les autres , c'est dans les bois pourris
des vieux navires qu'il prenait le jour.
Les Hollandais, dans une navigation au 80' degré, furent,
d'après M. de Buffon, les premiers qui découvrirent leurs
nids.
A l'état domestique, la Bernache nonnette s'apprivoise
facilement et se reproduit lorsqu'elle se trouve dans des con-
ditions favorables; elle est non seulement un oiseau d'orne-
ment des plus gracieux, mais elle est encore très recherchée
pour la délicatesse de sa chair.
SUR LES PALMIPÈDES LA.MELLIROSTRES. 145
Description.
La Bernaclie nonnette a le bec noir h onglet noir, l'œil brun
foncé, le front, la gorge et les joues d'un blanc plus ou moins
pur, suivant l'âge et les sujets. Dans cette espèce, les lorums
sont noirs suivis d'un trait noir arrivant à l'œil et tranchant
sur la couleur blanche ; le verlex, le sinciput,la nuque, le cou
et le haut de la poitrine sont noirs; les plumes du dos, les
pennes scapulaires, les couvertures des ailes, petites, moyennes
et grandes, sont d'un gris cendré, terminées de blanc rous-
sâtre, avec une bande sombre vers l'extrémité; le croupion
est blanc, ainsi que les plumes du dessus et du dessous de la
queue; le ventre est blanc; les flancs sont gris, ondes de
teintes plus claires; les grandes rémiges et les rectrices soni
noires ; les pattes enfin sont d'un noir plus ou moins pur. Cet
oiseau mesure d'ordinaire 0'", 67 de longueur; son aile a 0"", 39;
sa queue, O^jlS.
Reproduction.
La Bernache leucopsis se reproduit en captivité ; elle pond
de six à dix œufs blanchâtres qui mesurent ordinairement
de 0'",08 au grand diamètre et0'",05 au petit diamètre. L'in-
cubation dure de trente à trente-trois jours environ. Dans ses
notices sur les métis d'Anatidés, M. de Sélys Longchamps
signale des cas d'hybridité par l'accouplement de cette espèce
avec la Bernache du Canada et les Oies cendrées et à front
blanc. M. le directeur du Jardin zoologique d'Anvers a souvent
obtenu la reproduction de ce Palmipède, qui pond le plus sou-
vent six œufs. La Bernache leurcopsis figure sur les listes du
Jardin zoologique de Londres depuis 1833; elle s'y est repro-
duite pour la première fois le ^3 mai 1848.
■i* SÉRIE, T. III — Mars 1886. 10
J4r6 SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
N" 8. Bernache de Sandwich (1).
[Bernicla Sandivichensis G. G. n» 10582.)
Suite du sous-genre Leucopareia.
Étymologie. — L'étymologie de Leucopareia est déjà don-
née au numéro qui précède. La désignation Sandivichensis
indique que cette Bernache se trouve plus particulièrement
aux îles Sandwich.
Synonymie. — Leucopareia Sandivichensis Yig. — Leu-
copareia Hatvaiiensis Eyd. et Soûl. — Chloëphaga Sandwi-
chensis. — Bernicla Sanclwichensis Jard. et Selb. (Sand-
wich-Island goose).
Cette Bernache est originaire des îles Sandwich. M. Vigors
détermina, le premier, cette espèce d'après un couple de ces
oiseaux qui vivaient dans les jardins de la Société zoologique
de Londres; ils avaient été offerts par lady Glengall (2)
en 1832. En 1834, lord Derby en reçut aussi une paire à
Knowsley (3), où ils se reproduisirent ainsi que dans les
Jardins zoologiques de la Société ; depuis cette époque, la
reproduction de cet oiseau a été souvent obtenue en Angle-
terre et en France.
Description.
Dans cette espèce, le bec est de couleur noire, à onglet noir;
l'œil est brun foncé ; la face, jusqu'à l'articulation de la man-
dibule inférieure, la gorge ainsi que le dessus de la tête sont
de couleur noire ; la nuance noire du crâne se prolonge en
diminuant progressivement de largeur sur toute la partie su-
périeure du cou et forme en quelque sorte l'appendice de
la coiffure. Au plumage noir du masque et à partir de la
région de l'oreille, succède brusquement une nuance brun
roussâtre, qui vient elle-même se fondre dans la teinte fauve
(1) Proceed. Zool. Soc, 1859, p. 206; — 1875, p. 488; — 1880, p. 504, 535.
(2) Ibid., 1833, p. 63 et Rep. du cons., 1883, p. 13.
(3) Ibid., 1834, p. 41.
SUK LES PALMIPEDES LAMELLIROSTRES.
147
du cou ; le plumage de ce dernier présente cette particula-
rité qu'il est divisé par de nombreuses incisions verticales
qui laissent apparaître la couleur suie du duvet inférieur.
La base du cou est brune et tranche avec la couleur fauve qui
précède pour se fondre ensuite avec la teinte gris foncé légè-
rement roussâtre qui recouvre la poitrine. Les plumes grises
Bernache de Sandwich (BernicZa Sandivichensis).
du dos et des ailes sont bordées de gris plus clair, ce qui leur
donne l'aspect de larges écailles ou de contours nuageux mal
fondus; les rémiges secondaires sont gris foncé, les grandes
rémiges gris noirâtre; le croupion est gris noir terminé par
un peu de blanc à la naissance des rectrices, qui sont de cou-
leur noire ; le ventre est blanc ; les cuisses sont grises avec un
peu de noir au-dessus de l'articulation des tarses, elles sont
recouvertes par des plumes de môme teinte et de même
disposition que celles du dos, mais plus grandes ; les pattes
sont gris foncé, légèrement roussâtre.
148 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
Les deux sexes sont semblables ; cependant, avec un examen
attentif, on remarque que le mâle a le cou légèrement plus
long et que ses allures, sans être agressives, sont plus har-
dies. Une sorte de frisson ou de frémissement particulier par-
court par moments le plumage de son cou, chose qui n'arrive
pas chez la femelle. Il mesure 0"',65 de long ; son aile a 0"',31 ;
sa queue, 0'^,16; son bec, du front à la pointe, 0"",040 ; son
tarse, 0'",015.
Reproduction.
La Bernache de Sandwich est une des espèces qui sont le
mieux acclimatées. On peut espérer arriver dans peu de
lemps à sa domestication complète. Douée d'un caractère plus
sociable que ses congénères, elle résiste parfaitement aux
hivers rigoureux et sa reproduction est assurée à la condition
de lui procurer des pacages abondants ou tout au moins de la
verdure en quantité suffisante. La ponte a généralement lieu
vers la fin de mars; le nombre d'œufs varie entre six et huit;
ils sont de couleur blanche et mesurent 0"',08 de long sur
0™,05 de large.
D'après les comptes rendus faits à la Société d'Acclimata-
tion par M. Huel, aide-naturaliste chargé de la ménagerie du
Muséum d'histoire naturelle de Paris, les éclosions de cette
espèce ont eu lieu, en 1881, le 20 mai (1); en 1882, le
19 avril; en 1883 (2), les 16 mars et 15 avril; d'après les
notes d'observations prises au Jardin de la Société zoologique
de Londres (3), de 1835 à ce jour, les éclosions ont varié du
21 mars au 30 mai, mais elles ont eu lieu plus généralement
en avril. En rapprochant ces observations de celles qui ont été
faites par d'autres observateurs, on peut conclure que les
Bernaches de Sandwichpon dent généralement du 1" février
au 5 avril, suivant les variations atmosphériques et les con-
ditions favorables où elles se trouvent. Le Jardin zoologique
(1) Bulletin de la Société d'Acclimatation, 1882, p. 553.
(2) Ibid., 1883, p. 325.
(3J List of the certainly knoivn species of Anatidœ, 1880, p. 504, 505,
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 14-9
de la Société royale de zoologie d'Anvers obtient régulière-
ment la reproduction de cette Bernache.
N° 9. Bernache a cou roux.
{Bernicla nificollis G. G. (1), n" 10583.)
Ru/ibrenta, sous-genre e du calalog-iie de G- Gray.
Étymologie. — Rufibrenta, mot hybride, de rufus, roux,
et de ppévToç, ou, oie (oie rousse).
Ruficullis, de rufus, roux, collum, cou, désigne l'espèce
qui a le cou roux.
Synonymie. — Anser ruficollis Pall. — Anas torquata
Gm. — Bernicla ruficollis Boié. — Rufibrenta ruficollis
B. P. — Anas ruficollis et torquata, Gmel. (Red-Breasted
fjoose).
La Bernache a cou roux est originaire du nord-ouest de
i'Asie; elle est commune sur les bords de la mer Caspienne
■et s'avance dans ses migrations jusqu'à la mer Noire. Quel-
ques individus de cette espèce ont été tués accidentellement,
en France et en Angleterre, pendant les hivers très rigoureux.
Temminckdit que ces oiseaux nichent dans les contrées du
nord de la Russie, sur les bords de la mer Glaciale et à l'em-
bouchure des fleuves Obi et Lena.
Description.
Bec brun à onglet noir; œil brun jaunâtre à paupières
noires; dessus de la tète et dessus du cou d'un noir profond,
avec un peu de blanc au front, en arrière des yeux et entre
ces derniers et le bec ; gorge noire avec une sorte de pointe
de même couleur qui descend de chaque côté du cou jusqu'à
la moitié de sa longueur. Le noir de la nuque est séparé de la
bande noire dont je viens de parler par un peu de blanc
qui s'étend de la tempe jusqu'à la partie inférieure du cou.
Le devant du cou et sa base sont d'un beau roux, ainsi que le
(1) Voy. Proceed. Zool. Soc, I8G3, p. 323; — 1877, p. 806; — 1880, p. 502
150
SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION.
sommet de la poitrine. A la teinte rousse succède une sorte
de ceinture blanche qui retourne jusqu'au dos ; les flancs et
le haut de l'abdomen sont noirs; les côtés du croupion et les
plumes qui précèdent les rectrices sont blanches, de même
que le bas-ventre et les sous-caudales ; les ailes sont noires,
avec bordures blanchâtres à l'exliémité des rectrices ; les rec-
trices sont noires, ainsi que les pattes.
^^_Hy\Oj)UKE
Bernache à cou roux (Bernicla ruficoUis).
Longueur totale de l'oiseau, 0"',59 environ ; son aile me-
sure O"',.^^; sa queue, 0"\16; son bec, 0™,035; son tarse,
0™,055.
Reproduction.
La Bernache ruficolUs se reproduit dans les régions bo-
réales; ses œufs sont blanchâtres et mesurent 0"',07 au grand
diamètre et 0"\04G au petit diamètre.
En 1853, le Jardin zoologique de Londres reçut en échange
une femelle de Bernache à cou roux; elle vécut plusieurs an-
SUR LES PALMIPÈDES LÂMELLIROSTRES. 151
nées en compagnie d'un mâle de Bernache cravant, mais ne
reproduisit pas (1).
La Société royale de zoologie d'Anvers ne possède pas cette
espèce, mais elle existe au Jardin zoologique d'Amsterdam.
M. le directeur de cet établissement a bien voulu m'informer
que ces oiseaux avaient été capturés il y a deux ans, à la suite
d'une tempête du nord-est, à l'île Texel (Hollande).
N" 10. Bernache aux ailes bleues.
{Bernicla cyanoptera (i), n° 10584.)
Cijanoclien, sous-genro f du catalogue do G. Gray.
Élymolocjie. — Cyanochen, de /.uavoc, ou, bleu ; x'qv^ '/jvoç,
oie (oie à plumage bleu).
Cyanoptera, de /.ûavoç, bleu, et de i^Tspôv , plume, aile,
indique que l'espèce qu'il désigne a les ailes bleues.
Synonymie. — Cyanochen cyanoptera Rupp. — Bernicla
cyanoptera Rupp. {Blue-Winget goose).
Les Bernaches aux ailes bleues ont été découvertes par le
voyageur Riippel. Il existe deux spécim.ens de cette espèce
dans les galeries du Muséum d'histoire naturelle de Paris. Je
n'ai pu me procurer de renseignements exacts sur l'époque
de leur introduction en Angleterre et en France. En 1(S80,
celte belle espèce de Bernache n'existait pas encore au Jardin
zoologique de Londres; cependant, à cette époque, M. Cor-
nély disait qu'il espérait recevoir prochainement des oiseaux
de cette espèce de la Nubie supérieure.
Descriidlon.
Bec brun noirâtre; dessus de la tôte brun clair; face et
gorge blanchâtres ; plumes des parties supérieures du cou de
couleur brune tirant sur le grisâtre ; dos couvert d'ondula-
tions roussâtres, formées par la bordure des plumes, qui est
(1) Lisl of the certainhi biown species of Anatidœ, 1880, p. 502.
(2) Voy. Proceed. Zool'. Soc, 1880, !>. 40i, 531-.
152
SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
de nuance plus claire ; plumage des parties inférieures de
nuance plus claire, tirant sur le gris jaunâtre tacheté de brun,
passant au blanchâtre vers la gorge et au blanc pur sur les
sous-caudales ; petites et moyennes couvertures des ailes
Bernache aux ailes bleues (Bernida cyanoptera).
d'un gris bleu cendré; pennes secondaires noires glacées de
vert métallique; grandes rémiges et rectrices d'un brun noir
mat; pattes brunes, cf Cet oiseau mesure 0",70 de long ; ses
ailes, 0'",39; sa queue, O",^; son bec, 0'",04 ; et son tarse,
0™,07.
Reproduction.
Il ne m'a pas été possible d'obtenir le moindre renseigne-
ment sur la reproduction de cette espèce, qui n'existe pas
dans les jardins zoologiques.
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 153
N°i'l. BeRNACHE ANTARCTIQUE,
(Beniicla antarctica (1) G. G., n° 10585.)
Tœnidiestes, sous-genrc g du catalogue de G. Gray.
Elymologie. — Tœnidiestes, nom proposé par Reichenbach,
vient de iratvîa, bandelette, et de âtsGTTjXwç, séparé, par allu-
sion aux bandelettes distinctes qui se trouvent dessinées sur
le plumage de la Bernache antarctique Ç. — Antarctica, de
àvTÎ, contre, àpxTiicô;, nord, qui est opposé au pôle arctique,
c'est-à-dire qui est au sud.
Synonymie. — Anas antarctica Gmel. — Bernicla an-
tarctica Sleph. Gould. — Tœnidiestes antarctica Baunister.
— Anas hybrida Molina. — Anas Magellanicus Sparrm. —
Tœnidiestes candidus {Antarctic rjoose Forster, Kelp goosé).
La Bernache antarctique est originaire de l'Amérique du
Sud. M. l'abbé Molina désigne cette espèce sous le nom
à' Anas hybrida, qui peut avoir la priorité sur celui à' Anas
antarcticay généralement admis; mais MM. Sclater {^) et
Salvin, tout en reconnaissant que le nom proposé par M.. Mo-
lina peut être le plus ancien, trouvent qu'il est peu approprié
à l'espèce ; ils sont d'avis que l'on doit bien se garder de
changer une dénomination aussi bien établie que celle à'an-
tarctica. Forster a remarqué cette espèce dans la ^Terre de
Feu, où elle a été observée depuis par tous les voyageurs qui
ont écrit sur les Oiseaux de ce pays, notamment par Darwin,
qui l'a aussi rencontrée dans les îles Falkland et sur la côte
occidentale de l'Amérique du Sud, en remontant vers le nord
jusqu'à l'île Chiloé. La Bernache antarctique vit exclusive-
ment sur les parties rocheuses du bord de la mer, ce qui lui
fait donner par les marins le nom de Rock-goose (Oie des
rochers).
Darwin raconte que, dans les détroits retirés de la Terre de
(1) Voy. Proceed. Zool. Soc , 1857, p. 128; — 1859, p. 477; — 1860, p. 388;
— 1867, p. 320, 334, 339; — 1872, p. 36G; — 1879, p. 310: - 1880, p. 504; —
1881, p. 13.
(2) Ibid., 1876, t. II, p. ,308-369.
154
SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION.
Feu, le mâle, blanc comme la neige, invariablement suivi de
sa compagne aux couleurs plus sombres, qui se tient à ses
côtés sur le sommet d'une roche lointaine, forme un trait
caractéristique du paysage de ce pays.
Philippi et Landbeck disent que cette espèce se trouve éga-
lement sur les côtes occidentales, et ajoutent qu'on la ren-
Bcrnaclie antarctique [Bernicla antarclica).
contre parfois jusqu'à Valdivia. Les observations les plus ré-
centes de Burmeisler établissent que ses migrations vers le
nord ne s'étendent pas au delà de la baie de Santa-Cruz, où
elle séjourne pendant l'hiver.
Un seul spécimen de cette espèce fut importé en Angleterre
en 1868. Jusqu'en 1870, les efforts que l'on avait faits pour
l'introduire dans les jardins zoologiques de Londres avaient
eu peu de succès; un seul de ces oiseaux put arriver vivant
en 187-2(1).
(1) See Rev. List of vert., 187'2, p. 24.">
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 155
Description.
Le mâle est blanc ; il a le bec noir et les pattes jaunes; il a
environ 0™, 61 de long; ses ailes mesurent 0"',38; sa queue,
0"',13; son bec, 0™,043 ; ses tarses, 0'",076 ; son doigt médian,
Y compris l'ongle, 0'",088.
La femelle est de couleur brun noirâtre; elle a le vertex et
la nuque de couleur brune ; le front, les côtés de la tête et le
cou, de même nuance, vermiculés de blanc; la partie posté-
rieure du dos, le croupion et la queue, blancs ; les rémiges
primaires, noires; les pennes secondaires, les petites couver-
tures des ailes ainsi que les plumes subalaires, blanches; les
grandes tectrices, extérieurement terminées par une teinte
verte formant le miroir de l'aile ; le dessous de la poitrine,
les flancs, ainsi que la partie supérieure du ventre, sont dis-
tinctement traversés de rayures ou bandelettes blanches; le
fond du ventre est blanc, ainsi que le tour de l'anus.
La longueur totale de la femelle est d'environ 0'",61 ; ses
ailes mesurent 0'",35; sa queue, 0'",13; son bec, 0'",043; ses
tarses, 0"',067; son doigt médian, 0"',08.
Rejjyoduction.
Il ne m'a pas été possible de me procurer des renseigne-
ments sur la reproduction de ces oiseaux.
N° 12. Bernache DE Magellan.
{Bernicla Magellanica (1), n° 10586.)
Chloëphaga, sous-genre h du catalogue de G. Gray.
Elymologie. — Chloëphaga, de y}^ôfi^ herbe, et cj^aye^v,
manger, indique que les Bernaches dont les noms vont suivre
sont essentiellement herbivores. Le mot Magellanica., qui
caractérise l'espèce, indique que celte dernière est originaire
du détroit de ce nom.
(1) Voy. Proceed. Zool. Soc, 1867, p. 339; — 1872, n. 306, 549; — 1875,
p. 488.
156 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMÂTATION.
Synonymie. — Oie des terres MagellaniquesBuff. — Anas
Magellanica Gm. — Anser pictus et Mcujellanicus Vieill.
— Chloëphaga Magellanica Eyton. — Bernicla Magellanica
Gay. — Anas picta Gm. — Anas leucoptera Gm. — Anser
leucopterus Vieill. — Bernicla leucoptera Less. (Painted
Duck Cook. — Upland goose).
La Bernache de Magellan (l) est originaire du détroit de
ce nom ; elle habite aussi les îles Falkland et l'île Staaten.
D'après Darwin, cet oiseau est commun à la Terre de Feu
et aux îles Falkland ; il y vit dans l'intérieur des terres par
couples ou par petits troupeaux, s'approche rarement de la
mer, fait son nid dans les îlots et se nourrit presque entière-
ment de végétaux. Les marins lui donnent le nom d'Oie des
hautes terres.
Le capitaine Abbott et quelques autres voyageurs disent
que celte espèce est commune dans les îles Falkland ; mais,
contrairement à l'opinion de Darwin, Abbott prétend qu'elle
se reproduit dans tout le pays aussi bien que dans les îlots
voisins. La Bernache de Magellan a été introduite au Jardin
zoologique de Londres en 1857. C'est le gouverneur Moore (2)
qui envoya le premier couple des îles Falkland. Un second
couple de ces oiseaux fut reçu en 1861 ; ils se reproduisirent
pour la première fois en 1863; depuis cette époque, cette
espèce s'est reproduite assez régulièrement. Le mâle et la
femelle présentent des caractères tellement distincts, que l'on
pourrait croire à première vue que chaque sexe est une es-
pèce différente. Le plumage du mâle est blanchâtre et celui
de la femelle est au contraire brunâtre ; le mâle a les pattes
d'un gris noirâtre et la femelle les a jaunes.
MM. SclateretSalvin (3) disent que la variété chilienne de
cette Oie a été décrite par Philippi et Landbeck sous le nom
de Bernicla dispar. La principale, et même la seule distinc-
(1) Sclat., Pioceed. Zool. Soc, 1857. p. 128; — 1858, p. 289;— 1860,
p. 387.
Gould, Pioceed. Zool. Soc, 1859, p. 96 ; — Sclat. et Salv., Ibis, 1868, p. 189 ;
— 1870, p. 500.
(2) List of tke cerlainli/ known species, 1880, p. 502, 503.
(3) Proceed. Zool. Soc, 1876, p. 3Gi.
SUR LES PALMIPEDES LAMELLIROSTRES.
157
lion que l'on puisse faire pour celte variété, c'est que le mâle
est rayé de bandes noires dans tout le dessous du corps ; mais
ils ne considèrent pas ce caractère comme absolument suffi-
sant pour séparer les deux variétés.
Description.
Le mâle a le bec noir, la tête et la partie supérieure du cou
Bernaclie de Magellan {Bernicla Magellanica).
de couleur blanche; chez quelques sujets, le dessus du crâne
et le tour de l'oreille sont légèrement ombrés de gris très
clair; l'œil est d'un noir de jais ; vers le milieu du cou appa-
raissent de petites rayures transversales de couleur noire, qui
tranchent sur le fond blanc et qui s'accentuent progressive-
ment en allant vers la poitrine, où elles deviennent de plus
en plus larges. Ces rayures ou bandelettes, disposées en forme
d'écaillés, se manifestent sur l'ensemble du plumage jusqu'à
la naissance des ailes ; les cuisses sont également recouvertes
déplumes plus grandes et plus fortement rayées de blanc et
158 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aGCLIMATATION.
de noir ; la poitrine et la partie antérieure du dessous du corps
sont aussi rayées de noir; les plumes du manteau sont grises ;
celles qui le précèdent sont bordées de gris foncé et de blanc;
les rémiges secondaires sont blanches ; le miroir de l'aile est
apparent, à reflets vert bronzé ; les grandes rémiges sont
noires ; les plumes de l'abdomen, ainsi que celles du dessous
de la queue, sont blanches; la partie postérieure du dos est
blanche ; les rectrjces sont noires ; les ailes sont armées d'une
sorte d'éperon arrondi, de la grosseur d'un petit pois, placé
près de l'articulation du fouet; les pattes sont de couleur
noir grisâtre. La longueur totale du mâle est d'environ 0"°, 66 ;
ses ailes mesurent O^jM; sa queue, 0'",14; son bec, O^jO^;
ses tarses, 0'",10; son doigt médian avec l'ongle, 0"',08.
Le plumage de la femelle présente les mêmes dispositions
que celui du mâle ; mais les rayures sont noires sur une teinte
brun fauve, qui elle-même passe entièrement au blanc sur
les plumes des couvertures des cuisses, en tout semblables à
celles du mâle ; le bec est noir ; le cou, marron ; l'abdomen est
rayé ou grivelé de noir et de blanc, d'une teinte plus foncée
que celle du mâle ; les grandes rémiges sont noirâtres ; les
plumes du manteau sont d'un gris légèrement fauve, et les
rémiges secondaires, blanches; le miroir des ailes est vert
cuivré ; le croupion est noir, ainsi que les rectrices ; l'œil est
noir; les pattes sont d'un beau jaune, il est à remarquer que
les plumes grises qui précèdent celles du manteau sont rayées
de noir et bordées de fauve. La femelle a une longueur totale
d'environ 0™,66 ; ses ailes ont 0'",405; sa queue, 0'",139 ; son
bec, 0'",04; ses tarses, O-^jOS; son doigt médian avec l'ongle,
0'",076.
Reproduction.
Les Bernaches de Magellan se sont reproduites dans presque
tous les jardins zoologiques d'Europe, au Jardin zoologique
de Londres, au Koninklijk Genootschap d'Amsterdam, au
.lardin zoologique d'Anvers, à la ménagerie du Muséum d'his-
toire naturelle de Paris. M. Courtois, membre de notre So-
ciété, a aussi obtenu sa reproduction.
SUR LES PALMIPÈDES LAME LLIROSTRES. 159
Ces oiseaux nichent et pondent, vers la fin de mars, de
trois à huit œufs de couleur blanc jaunâtre, qui mesurent
ordinairement O^jOO de long sur 0'",055 de large ; la femelle
couve elle-même ses œufs, dont l'incubation dure de trente à
trente-trois jours.
N" lo. Bernache de Magellan, variété chilienne.
(Bernicla diapar (1) G. G., n" 10587).
Étymologie. — Le mot latin dlspar, différent, qui désigne
cette variété ou espèce, a probablement été choisi pour indi-
quer qu'elle diffère en quelques points de l'espèce qui pré-
cède.
Synonymie. — Bernicla Magellanica Cassin. — • Bernicla
dispar (2) Ph. et Landb. — Chloëphaga dispar (3) Sclat.
(ChUian goose).
Philippi et Landbeck assurent que cette Oie se rencontre
fréquemment en hiver dans les provinces centrales du Chili.
Burmeister dit que cette espèce se trouve dans la Sierra
Tinta, près de Tandil, au sud de Buenos-Ayres.
En octobre 1871, la Société zoologique de Londres acheta
à M. Weisshaupt, avec d'autres animaux chiliens, un couple
de cette variété de Bernache de Magellan; la femelle étant
morte, le raàle fut prêté à un correspondant de cette Société,
qui obtint la reproduction de cet oiseau avec une femelle de
Bernache de Magellan ; les produits obtenus par ce croisement
n'étaient pas aussi fortement rayés que dans l'espèce Bernicla
dispar, mais ils présentaient aux extrémités des plumes des
taches noires bien apparentes. Les observateurs qui ont étudié
comparativement les deux variétés disent que les femelles de
l'une et de l'autre sont entièrement semblables. Il existe à la
ménagerie du Muséum d'histoire naturelle de Paris un couple
(1) Voy. Proceed. Zool. Soc, 1880, p. 503.
(2) Burm., Proceed. Zool. Soc, 1872, p. 3G6; — Sclat., /tis, 1861, p. 122.
(3) Proceed. Zool. Soc, 1867, p. 320, 331. - Sclat, etSalv., Proceed. Zool.
Soc, 1876, part. II, p. 364. 365 ; — 1866, p. 364.
100 SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION.
de Bernicla cUspar. M. Huet, aide-naturaliste chargé de la
ménagerie, espère que ces oiseaux se reproduiront au prin-
temps prochain ; on pourra, si ses prévisions se réalisent,
comparer les produits de cette espèce avec ceux de la Ber-
nache de Magellan proprement dite ; si les mêmes caractères
se perpétuent, on pourra conclure à la distinction des deux
espèces; dans le cas contraire, on devra reconnaître que
B. dispar n'est qu'une simple variété de B. Magellanica,
M. le Directeur du Jardin zoologiqiie d'Anvers a bien voulu
me faire savoir qu'il possédait cette espèce, mais qu'il n'avait
pas encore obtenu sa reproduction.
N° 14. Bernicla inornatâ(I).
(G. Gray, n" 10588.)
Élymologie. — Le mot inornatus, de in privatif et de
ornatus, paré signifie : sans parure. Cette espèce ressemble
beaucoup à l'espèce suivante [B. poliocephala) ; elle n'en est
peut-être qu'une variété. Les renseignements qu'il m'a été
permis de recueillir ne sont point assez précis pour pouvoir
bien caractériser l'espèce.
N" 15. Bernache a tête grise (2).
(Bernicla poliocephala G. G., n» 10589.)
Élymologie. — Poliocephala, de icoÀtoç, gris, et xscpaX-^^
•?];, tête, se rapporte à un des principaux caractères de cette
espèce, qui a la tête grisâtre.
Synonymie. — Anas inornatus $ King (3). — Bernicla
inornata Gay et Mitch. — Chloëphaga poliocephala Gray,
Sclater (4). — Bernicla poliocephala Burm (5). — Anas po-
(1) Voy. Proceed. Zool. Soc, 1858, p. 289, 290; — 1860, p. 387; - 1872.
p. 366; —1880, p. 503.
(2) Ibid, 1860, p. 212; - 1872, p. 549 ; - 1880, p. 503; - 1881, p. 13.
(3) Ibid., 1830-31, p. 15.
(4) Ibid., 1857, p. 128.
(5) Ibid., 1872, p, 366.
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 161
Uocephalus Bann. — Bernicla Chiloensis Vh. et Lantlb.
{Ashy-headed (joosé).
D'après les notes publiées par MM. Sclater et Salvin (I), la
Bernicla poliocephala iiabite le détroit de Magellan, Rio-
Négro, rîle Chiloé et les îles Falkland. On a cru primitivement
que cette espèce était la femelle de l'oiseau décrit par le ca-
pitaine King sous le nom (VAnas inornalus, et dont Gray et
Mitcbeli ont donné une excellente figure dans l'ouvrage in-
titulé Gênera of birds.
Gray fut le premier qui découvrit l'erreur ; il donna à cet
oiseau un nom définitif, en laissant à Sclater le soin de décrire
cette espèce et d'établir les distinctions d'une manière évi-
dente. Le fait de la ressemblance des sexes dans cette espèce
et l'espèce voisine a pu être constaté sur des oiseaux vi-
vants qui se sont reproduits dans les jardins de la Société
zoologique de Londres. La Bernache poliocephala ne pa-
raît pas être aussi commune dans l'extrémité méridionale
de l'Amérique et dans les îles Falkland, que veut bien le
dire M. Darwin, qui raconte que ces îles sont le lieu de
rendez-vous de ces oiseaux, que l'on voit rôder sans cesse
isolément.
Le capitaine Abbott, pendant ses trois années de séjour
dans les îles Falkland, n'a observé que trois individus de cette
espèce et encore furent-ils rencontrés isolément parmi des
troupeaux d'Oies des montagnes (Bernicla Magellanica). Il
suppose que ces oiseaux étaient venus de la côte de Patagonie.
M. Leconte, envoyé aux îles Falkland comme délégué de la
Société zoologique de Londres, pour se procurer des sujets
vivants, ne put rapporter quime seule peau de ce Palmipède.
D'après Burmeister, cette Bernache habite dans la Patagonie,
où elle est très commune. Philippi et Landbeck assurent que
la véritable patrie de cet oiseau, qu'ils désignent sous le nom
de Bernicla chiloensis, est l'île de Ghiloé, où elle se reproduit.
Pendant l'hiver, elle émigré plus avant vers le nord et on la
rencontre à Ancud à l'état domestique.
(1) Proceed. Zool. Soc, 1876, part. II, 366, 367.
i' SÉRIE, T. Iir. — Mars 1880. H
162 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
Description.
Tête, cou et plumes du scapulaire de couleur gris de plomb -^
poitrine et partie supérieure du dos, couleur marron avec
plumes extérieurement bordées de noir; abdomen, tectrices
subalaires, pli de Taile et petites tectrices blancs; rémiges
primaires noires ; rémiges secondaires blanches intérieure-
ment, tachées de brun sur les barbes externes des plumes ;
grandes tectrices noires à reflets extérieurs vert brillant et
à extrémités blanches; fond du dos et queue noirs; flancs
transversalement rayés de blanc et de noir; région anale, cou-
leur marron; bec noir; pieds jaunes à l'extérieur, brun,
noirâtre à l'intérieur. Longueur totale, environ 0"\609; aile,
0'",342; queue, 0'",127; tarse, Û"\068; doigt médian avec
ongle, 0'%063. La femelle est semblable au mille.
Reproduction.
Cette Bernache a été introduite au Jardin zoologique de
Londres, en 1833(1); elle s'y est reproduite de 1852 à 1869,
époque à laquelle les sujets furent malheureusement perdus.
Les pontes avaient lieu dans la première quinzaine d'avril
et les éclosions du 20 mai au 9 juin. M. Huet, aide-naturaliste
chargé de la ménagerie du Muséum d'histoire naturelle de
Paris, a reçu un couple de cette espèce, dans le courant de
1884. Il espère d'autant plus obtenir la reproduction pro-
chaine de cette Bernache, que les sujets qui lui ont été cédés
sont nés chez M. Courtois, notre collègue.
Le Koniuklijk zoologisch yenootschap d'Amsterdam et le
Jardin zoologique d'Anvers ne possèdent pas cette Bernache.
N" 16. Bernache a tète rougeatre.
{Bevniclarubldiceps (2) G. G., ii" ]U590.)
Étymologie. — Le mot ruhldiceps, de ruhidus, rougebrun,.
(1) List of the certainlij knoivn species of Anatidœ, 1880, p. 503.
(2) Voy. Proceed. Zool. Soc, ISSU, p. 503, 504.
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 1 6S
el caput, tête, indique que Toiseau qu'il désigne a la tête
et une partie du cou de cette couleur.
Sijno7iymie. — Bernicla inornala Gray. — Chloëphaga
rubidiceps Sclat (1). —Anser rubidiceps Schl. — Chloetro-
phus riibidiceps Bann (Rudd>/-headed çjoose).
Cette espèce est connue aux îles Falkland sous le nom
d'Oie de Brent ; d'après le capitaine Abbott, elle est moins
commune que les autres espèces; cependant il dit en avoir
rencontré des troupeaux considérables dans certains pa-
rages ; à North Camp il en observa un grand nombre qui mar-
chaient par couples. Dans cette espèce le mâle est plus grand
que la femelle ; pendant que cette dernière construit son nid
parmi les buissons, il se tient sur le bord des étangs les plus
voisins.
La ponte de cette Bernache a lieu dans les premiers jours
d'octobre et se compose ordinairement de cinq œufs, rarement
de six ; les petits acquièrent toute la beauté de leur plumage
pendant la première année; on les distingue à la couleur du
miroir de l'aile, qui est terne au lieu d'être vert brillant.
Description.
Dessous du corps, tête et cou de couleur cannelle, avec
plumes de la poitrine et des flancs bordées de noir; anus en-
touré d'une marge noire ; partie supérieure de la base du cou
de teinte grise parsemée de nombreuses bandes noires et
cannelle ; plumes qui forment le milieu du scapulaire pré-
sentant une tache noire cà leur face subterminale; fond du
dos, croupion et queue de couleur noire à peine teintée de
vert ; grandes rémiges noires ; rémiges secondaires et petites
couvertures des ailes blanches; grandes tectrices à reflets
extérieurs vert métallique, tirant sur le bronze, terminées de
blanc; bec noir; iris presque noir; tarses jaunes à l'exté-
rieur, noirâtres à l'intérieur. Longueur totale, environ 0'",584-
aile, 0^342; queue, 0-,li4; bec, 0™,038; tarse, 0"\m;
doigt médian avec l'ongle, 0'",07.
(I) Proceed. Zool. Soc, 1860, p. 387;— J876, p. 3(i7.
164 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
Reproduction.
Celle espèce réussit, dil-ou, fort bien en captivité; elle fut
introduite (1) pour la première fois, en 1860, au Jardin zoolo-
gique de Londres. Deux couples de ces oiseaux furent reçus
des îles Falkland, mais ils ne se reproduisirent que de 1865
à 1870; à partir de celte époque cette Bernache fut perdue
et ne figura plus au Jardin zoologique. Les pontes avaient
lieu en mars et avril ; les éclosions varièrent du 30 avril
au 6 juin, suivant les années.
Celte espèce n'existe en ce moment ni à la ménagerie du
Muséum d'histoire naturelle de Paris, ni au jardin zoolo-
gique d'Amsterdam, ni à celui d'Anvers.
N" 17. Bernache aux ailes noires (2).
{Bernicla melanoptera G. G., n° 10591.)
Élymologie. — Melanoptera, de [xéXaç, noir, et nTspôv,
aile (bernache aux ailes noires).
Synonymie. — Anser melanopterus Eyton. — Bernicla
melanoptera Gay. — Chloëphaga melanoptera Burm (3). —
Oressochen melanopterufi Bannister. — Anser motitanus
Tsch. — Anser anticola Tsch {Andean goose).
MM. Sclaler et Salvin (4) rapportent les observations sui-
vantes : cette belle Oie se trouve dans les hautes Andes du
Pérou et de Bolivie ; elle a été observée sur le lac de Tilicaca,
à Tincla et à Pilumarca,à une élévation de il à 14 000 pieds
anglais, soit 3355 à 4270 mètres au-dessus du niveau de la
mer, dans la contrée appelée par Tschudi la région Puna ; on
la trouve aussi dans les provinces centrales du Chili; elle
descend dans les plaines pendant l'hiver, mais se retire, en
été, sur les hauteurs des Cordillères, sans dépasser toutefois
(1) Proceed. Zool. Soc, 1860; — 1876, p. 367.
(2) Ibii(., 1867, p. 3-20, 331; — 188^, p. 153; — 1874, p. 55i ; — 1880,
p. 504.
(3j Ibid., 1872, p. 365.
(i) Ibid., 1876, p. 363.
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 165
les limites où commencent les neiges perpétuelles. Celle es-
pèce a été observée à Quintero, dans la province de Santiago ;
elle s'y trouvait en si grand nombre, sur une petite surface
d'eau, près du célèbre passage Portillo, que cet endroit est
appelé Valle de los Pinquenes {Pinquen désigne cette es-
pèce). On ne la trouve guère au delà du 35* degré de latitude
septentrionale.
Trois spécimens de cette belle espèce ont vécu dans la
ménagerie de la Société zoologique de Londres, mais aucun
de ces oiseaux ne semblait jouir en captivité d'une aussi bonne
santé que les autres Oies de l'Amérique du Sud.
Description.
Blanche; rémiges noires; pennes scapulaires et queue d'un
noir tirant sur le vert ; grandes tectrices de teinte pourprée
à l'extérieur et formant le miroir de l'aile ; petites couver-
tures des ailes blanches; plumes du haut du scapulaire mar-
quées de brun, celles du bas brunes passant au noir verdûlre.
L'oiseau vivant a le bec couleur de chair à onglet noirâtre,
les pieds rouges, l'iris de couleur sombre. La femelle est
semblable au mâle, mais plus petite. Le mâle mesure environ
0"\76 de long; son aile a 0"\4-4-, sa queue, 0"\16; son bec,
0",043; ses tarses, 0"\093; son doigt médian, 0"\08.
Reproduclion.
Cette espèce existe aux Jardins zoologiques d'Anvers et de
Londres, mais ne s'y est pas encore reproduite.
N° 48. liERNACHE CANAGICA (i).
{Bernicla canagica G. G., n° t0592.)
Étymologie.— D'après les renseignements que je tiens de
la bienveillance de M. Oustalet, le mot canagica a été em-
ployé par un auteur russe, Sewaslianoff, qui s'en est servi
(1) Voy. Proceed Zool. Soc, 1880, p. 501.
166 SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGCLIMATATION.
comme d'un nom spécifique, en décrivant l'espèce {Anas ca-
iiagica) (1) ; plus tard ce nom a été repris par Brandt (2) ; il
semble n'être qu'une forme latine modifiée de Kamlchatika,
•qui indiquerait que cette Bernaclie a pour patrie le Kam-
tchatka; mais on ne saurait rien affirmer sans avoir consulté
préalablement l'ouvrage deSewastianoff, qui est très rare.
Synonymie. — Anser canagicus Schwartz. — Chloëphaga
canagica Elliot. — Anas canagica Sewaslianoff. — Anser
inclus Pall. — Anser canagicus Brandt. — Chloëphaga cana-
gica Eyton. — Derniela canagica (.3) G. Gray {Emperor goose).
La Bernache canagica habite le nord-est de l'Asie et le
nord-ouest de l'Amérique, on la rencontre aux îles Aléou-
tiennes et sur les côtes du Kamtchalka. Dans ses migrations
elle arrive parfois jusqu'aux limites orientales de l'Europe.
M. E. Verreaux (4) a reçu, à deux reprises différentes, des
oiseaux de cette espèce, comme faisant partie du genre Oie ;
d'autres, au contraire, la prennent pour type du sous-genre
Chloëphaga.
Description (5).
Tête blanche, cette couleur se prolongeant sur la nuque et
le haut du cou en arrière ; dessus du corps d'un gris bleuâtre;
couverture supérieure des ailes de la couleur du dos, avec
une bordure blanchâtre ou blanche ; gorge noire tachetée de
blanc, parfois d'un noir sans taches; dessous et côtés du cou
bruns; ventre blanchâtre, onde de cendré; régions anale et
sous-caudale d'un blanc pur; rémiges primaires brunes;
rémiges secondaires noirâtre à racliis blanc, avec une tache
et un liséré de même couleur ; rectrices blanches ; bec rou-
geâtre ou jaunâtre en dessus, noirâtre en dessous, grisâtre
sur les côtés, avec les onglets blancs bordés de noir; pieds
d'un brun roussâtre pâle ; ongles noirs ; iris bleuâtre. Taille (6) ,
(1) Nova acta academiœ Petropolitensis, 1800, t. Xill.
(2) Bulletins de V Académie de Saint-Pélersbourfj, 1836, (. I.
(3) Gen. of Birds, 1844, t. III, p. 607.
(4) Degland et Gerbe, p. 40ï!.
(5) Description extraite de Degland et Gerbe, p. 492.
(6) D'aj)rès Baird.
SUR LES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 167
•O'",660 environ; longueur de l'aile, 0'",390; longueur de la
queue, 0'",liO; longueur du bec,0"',04'0; longueur du tarse,
O'",075.
Reproduction.
Je n'ai pu me procurer de renseignements précis sur la
reproduction de la llernaclie canarjica. Celle espèce n'existe
pas dans les Jardins zoologiques de Londres, d'Amsterdam et
d'Anvers.
II. TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ
LES SAUTERELLES A MADAGASCAR
SUR LE RIZ MALGACHE
Par le R. P. CAMBOUÉ
Missionnaire apostolique.
Dans une intéressante communication au sujet des Saute-
terelles de passage, insérée dans le Bulletin de juin 1884,
M. Decroix disait en terminant : « Je suis heureux que cette
petite communication ait appelé votre attention sur ces in-
sectes, dont il y a sans doute à tirer parti. » Quelques mois
plus tard, en effet, M. le général comte de La Croix de Vaubois
écrivait à la Société : « Je dirai, relativement à l'alimentation
que les Sauterelles peuvent fournir, que j'ai remarqué que la
volaille, à l'époque de leur passage, ne s'en dégoûte jamais, et
je crois qu'elle s'en nourrirait très bien ultérieurement si on
avait le soin de les conserver convenablement ; d'autant plus
que, dans le désert, les indigènes les gardent pour leur nour-
riture particulière. Ils en font des conserves à l'huile après
avoir préalablement arraché la tête, les pattes et les ailes. »
J'ai pensé, dès lors, que quelques mots sur les Sauterelles
à Madagascar, leur capture et leurs usages, pourraient peut-
être intéresser la Société.
Les Sauterelles de passage paraissent généralement au
printemps sur les hauteurs des provinces centrales de la
grande île africaine. Pour les Malgaches, ces Acridiens, qu'ils
nomment dans leur langue Valala (1), sont en même temps
un fléau et une ressource ; un fléau, à cause des ravages qu'ils
font aux récoltes; une ressource, à cause de la précieuse
substance alimentaire qu'ils fournissent non seulement pour
(l) Œdipoda migrato ria.
LES SAUTERELLES A MADAGASCAR. 169
les animaux domestiques, mais encore pour les populations.
Tant il est vrai qu'ici-bas, dans tout événement fâcheux, la
sage Providence du Dieu créateur dispose toujours quelque
côté profitable et place un remède à côté du mal.
Aussitôt que les Malgaches aperçoivent le nuage des Sau-
terelles qui s'avance, ils se hâtent de se porter aux endroits
recouverts de hautes herbes, par où ils conjecturent que les
insectes passeront. Dès qu'ils les voient arriver, ils mettent le
feu aux herbes. Les Sauterelles de passage, dont le vol est
lourd et bas, tombent alors en grand nombre, surprises par
la chaleur et asphyxiées par la fumée. Hommes, femmes et
enfants se hâtent d'en faire amples provisions, abandonnant
ce qu'ils ne peuvent emporter aux Goaika {Corviis scapula-
tiis) et aux Papango {Milvus jEgyptius), très friands de cette
nourrit iH'e.
Les Sauterelles sont ensuite jetées dans de grandes mar-
mites, où on les soumet à une bonne étuvée, après quoi elles
sont étendues au soleil sur des nattes jusqu'à ce qu'elles
soient parfaitement sèches. C'est alors qu'après qu'on leur a
enlevé les pattes, les ailes et la tête, elles sont triturées ou
bien emmagasinées telles quelles, pour les besoins du mé-
nage ou l'approvisionnement des marchés, où elles sont une
denrée courante. Les Sauterelles peuvent se conserver ainsi
pendant un temps très considérable.
Les Malgaches mangent les Valala, ou simplement assai-
sonnées de piment et de sel, ou mieux frites à la graisse, et
encore bouillies ou cuites avec du Riz et de la viande de vo-
laille ou de bœuf; ils les préfèrent même à celle dernière. Ils
en font aussi du Bo ou bouillon, dont ils assaisonnent le Riz,
leur principale nourriture.
Que l'on n'aille pas croire que ces insectes à Madagascar
soient seulement la nourriture des pauvres et du bas peuple.
Au palais de Tananarive, la table royale elle même, qui se
pique de progrès à l'instar des grands services européens,
ne les dédaigne point. La défunte reine, Ranavalona il, qui
avait ses chasseurs pour lui procurer le plus lin gibier de ses
forêts, ses pêcheurs pour lui apporter le meilleur poisson
170 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
de ses lacs et rivières, avait aussi une bande de femmes qui
couraient la campagne pour lui ramasser des Sauterelles.
Et, sur ce point, la nouvelle souveraine des Hovas, la jeune
Ranavalona IH, doit sans doute suivre les usages de l'an-
cienne.
Quelque temps, en effet, avant le commencement des hos-
tilités entre la France et la cour d'Imérina, la reine actuelle,
qui n'était alors que la petite princesse Ratrimo, dirigea un
jour sa promenade, accompagnée du jeune prince son mari,
vers le Jardin d'acclimatation de la Mission, situé à Ambo-
hipo, non loin de la capitale. Là, sans se douter des honneurs
royaux qui l'attendaient à bref délai, la future reine des Ho-
vas poursuivait gaiement les Sauterelles, qu'elle enfermait
ensuite dans un étui de Zozoro (Ci/perus œqualis), pour en
faire, à son retour chez elle, confectionner un plat de son
goût.
Les Malgaches, en effet, non contents de faire servir à leur
nourriture les Sauterelles de passage, mangent aussi diverses
autres espèces de ces insectes acridiens, entre autres un Cri-
quet de grande taille, appelé ici Anipangahe. Ils font toute-
fois exception pour une espèce, des plus belles cependant à
la vue, qu'ils nomment Valalanamboa.
J'ai voulu me rendre compte par moi-même de la valeur
d'un mets si estimé des Malgaches. Plusieurs de mes con-
frères missionnaires en ont aussi fait l'expérience. Par elle-
même, la Sauterelle de conserve malgache est d'un goût assez
fade, mais, bien assaisonnée et grillée à l'huile ou à la graisse,
elle ne serait pas à dédaigner.
Les Sauterelles, préparées comme je viens de l'indiquer
dans cette petite communication ou bien de toute autre façon,
peuvent-elles constituer une ressource alimentaire? Ne pour-
rait-on pas, du moins, les utiliser pour la nourriture des
animaux? Je laisse à plus compétent le soin de décider l'une
et l'autre question. Je ferai simplement remarquer, en ter-
minant, que dès l'antiquité la plus reculée, nous voyons les
Sauterelles usitées comme aliment. Dans le Lévitique, par
exemple, au chapitre qui énumère les animaux dont pouvait
LES SAUTERELLES A MADAGASCAR. 171
se nourrir le peuple d'Israël (1), nous Irouvons la Sauterelle
Locusta et quelques autres espèces du genre.
Puisque j'ai parlé du Riz, la Société s'occupant tout par-
ticulièrement en ce moment de cette graminée, qu'on me
permette de dire ici, en passant, quelques mots au sujet du
Riz de Madagascar. Les indigènes de la grande île africaine
et des petites îles voisines en cultivent plusieurs espèces, le
Riz de marais comme le Riz sec ou de montagne, qu'ils nom-
ment, le premier Vari/ ank'oraka, le second Vary nntavy.
Ce dernier est indiscutablement le plus estimé, et c'est même
le seul usité, dit-on, pour la table royale. Le R. P. de la Vais-
sière, dans son récent ouvrage : Vingt ans à Madagascar,
décrit ainsi en quelques lignes la culture de l'un et de l'autre
de ces Riz :
« Riz de maltais. — Quand le moment est venu de travailler
sa rizière, on voit le Malgache, une grande bêche à la main,
commencer par délbncer profondément le sol, qu'il soulève
par grandes mottes, afin de lui faire prendre l'air et le soleil.
Dans ce but, il va même jusqu'à empiler ces mottes les unes
sur les autres. Il les brisera ensuite, les éparpillera et les
émiettej'a à coups de bêche. S'il est soigneux, il aura soin d'y
répandre du fumier. C'est alors qu'il amènera l'eau destinée
à former, de ces débris de mottes et de fumier soigneuse-
ment foulés et nivelés au moyen de ses pieds et de sa bêche,
la boue sur laquelle il plantera son Riz. Généralement le Riz
est semé d'abord en un petit coin de terre préparé avec un
très grand soin. Quand il est à l'état d'herbe un peu grande,
on l'en retire brin par brin et on le replante dans la nouvelle
rizière.
» Les terrains marécageux sont réduits à l'état de terre
propre à recevoir le Riz par le piétinement des Bœufs qu'on
force de passer ou de repasser dans les marécages, jusqtfà
ce qu'ils aient parfaitement fait disparaître les herbes dans la
vase et pétri convenablement le sol. »
« Riz sec ou de montagne. — Les habitants de la forêt
(1) Lévitique, cli. xi, v. 2:2.
172 SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
mettent le feu aux arbres et sèment ensuite leur Riz sans
grande difficulté. Tenant d'une main un petit btiton aigu,
avec lequel ils font un trou dans la terre; ils y laissent tom-
ber de l'autre quelques grains de Riz et les recouvrent avec
le pied. Voilà tout leur travail. Aux éléments à faire le reste.
» Tous les Malgaches récoltent généralement le Riz par
bottes ou petites gerbes ; les femmes apportent ces gerbes
dans une aire préparée d'avance, et au milieu de laquelle se
trouve, comme chez les Juifs, une pierre ou un tronc d'arbre.
Battre le Riz, c'est le frapper contre cette pierre ou ce tronc
d'arbre jusqu'à ce que le grain se détache de l'épi. »
En même temps que cette petite communication, j'envoie à
la Société quelques graines du Riz antavy ou Riz sec, dont
on pourrait peut-être tenter avantageusement la culture en
Europe.
Note. — Il est fort peu probable que dans la communication précédente il
s'agisse de Sauterelles ou Locusla. D'autre part, nous doutons que l'espèce soit
la même que celle qui ravage le nord de l'Afrique et en particulier l'Algérie
et qui est VAcricUurn perignmtm Olivier, s'étendant des côtes de la Chine à
l'est jusqu'à celles du Maroc et du Sénégal à l'ouest. On ne connaît pas les-
limites méridionales de son habitat. On a essayé d'utiliser les Criquets d'Al-
gérie pour la pêche de la Sardine, mais ils ont été peu appréciés par ce
Poisson, plus gourmet que gourmand, et qu'on attire avec de la rogtie ou œufs
salés de Morue, qu'il préfère de beaucoup à tout autre appât.
(Note de la Commission de publication.)
EXTRAITS DES PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ
SÉANCE GÉNÉRALE DU 19 FÉVRIER 1886.
Présidence de M. le marquis de Sinéty, Vice-Président.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
— M. le Président proclame les noms des membres nouvellement
admis par le Conseil, savoir :
MM. PRÉSENTATEURS.
„ ,. j, •-, • . 4 [ Comte d'Eprémesnil.
IJOUGERE (Ferdmand), propriétaire a Angers a. Geoffroy Saint-Hilaire.
(Maine-et-Loire). ( Mac-AUister.
Chouin (Maurice), inspecteur de l'exploita- f A. Geoffroy Saint-Hilaire.
tion du chemin de fer du Nord, à Com- | Saint-Yves Ménard.
piègne (Oise). V E. Wuirion.
A. Berthoule.
GUERNE (Jules de), 2, rue Monge, à Paris. Baron F. Billaud.
, A. Geoffroy Saint-Hilaire.
^ . , ... / Vicomte de Causans.
iiEYNAUD (Baron Lucien), propriétaire au i
Puy (Haute-Loire). [ R^averet'-Wattel.
— M. le Secrétaire procède au dépouillement de la correspondance.
— M. Denizet rend compte de la perte du mâle de son cheptel de Fai-
sans vénérés.
— M. Martineau annonce le renvoi du mâle de son cheptel de Colombes
Lumachelles.
— M. le Directeur du Jardin d'Acclimatation communique la lettre
ci-après, qui lui est adressée par M. Pays-Mellier : « Depuis plusieurs
années, j'ai un grand nombre d'Aras et de Cacatois que j'installe chaque
été, dans le jardin, à la chaîne, sur des perchoirs. Pendant l'hiver, je
rentre les Aras, ainsi que les Perroquets frileux, dans des volières vi-
trées, à l'abri des froids. Dans une de ces volières, qui n'a que 3 mètres
de profondeur sur 2", 50 de largeur et 3 mètres de hauteur, nous re-
marquions déjà depuis longtemps la grande affection que se témoignaient
deux Aras : l'un bleu et jaune {Ara rauna), l'autre rouge à ailes jaunes
(Ara canga). Ces deux oiseaux ne se quittaient pas, et le mâle rauna
ne laissait pas approcher les autres Aras de la femelle canga. Vers le
17 janvier 1885, je m'aperçus que la femelle canga hérissait ses plumes,
qu'elle ne mangeait plus et qu'elle paraissait bien malade. Le 19 au ma-
tin, en effet, je la trouvai tombée à terre et mourante. Le pauvre mâle
venait sans cesse auprès d'elle, la caressant avec son bec et l'appelant;
uiais elle restait insensible à ces témoignages d'affection. Ce même
174' SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
jour, mon faisandier me dit qu'il venait de découvrir la maladie de la
femelle Ara, et il montra un œuf dont il avait pu débarrasser le mal-
heureux oiseau, qui s'était alors de suite senti guéri. Le 21, nous trou-
vâmes, dès le matin, et par terre, un second œuf qui n'était pas cassé.
La femelle Ara était gaie et bien portante. Vile, je fis mettre ces deux
œufs dans une des grandes cavités qui se trouvent dans le mur de la
volière, en forme de boîtes, pratiquées tout exprès pour la nidification
des gros Perroquets. Malheureusement, je n'avais pas eu la précaution
de laisser seuls mes deux Aras, et, dès le lendemain 2^1, je vis un Na-
sique qui emportait un œuf et le cassait avec son long bec pointu; le
second œuf avait été cassé également. Mais le couple Ara ne s'était ja-
mais occupé des œufs; plusieurs fois, j'avais pris la femelle, qui est très
douce, et je l'avais posée dans le trou où ils se trouvaient, sans jamais
réussir à l'y faire rester. Ce qui est étonnant dans cet accouplement de
deux Aras d'espèce différente, c'est que, dans la volière, le mâle rauna
a pour compagnons trois autres Ara rauna, qui sont en parfait état
et qu'il n'a jamais voulu laisser approcher.
» J'espère obtenir une nouvelle ponte bientôt; mes oiseaux sont très
bien portants; mais, cette fois, je serai plus prudent, car ce couple
Ara va se trouver seul et bien installé dans sa volière. Je pense donc
avoir, cet été, l'heureuse chance de vous annoncer la réussite de deux
petits Aras, et cela sera d'autant plus intéressant que, très probablement,
cette reproduction sera la première obtenue en France. »
— M. Dautre ville écrit à M. le Président : « Je vous ai adressé en
temps utile, avec prière de le soumettre à la Commission des récom-
penses, le dossier complet relatif à la poudre toni-nutritive granulée,
destinée à remplacer les œufs de Fourmi dans l'élevage des Faisans. Je
vous envoie aujourd'hui un échantillon du produit en question, tel qu'il
sera désormais livré. La composition, qui avait fait exclusivement jus-
qu'ici l'objet de mes recherches, est toujours la même, il n'y a de chan-
gement apporté que dans la forme. Le mode opératoire et les appareils
de fabrication sont définitivement adoptés; d'oîi il résulte que la poudre
toni-nutritive, telle qu'elle est présentée aujourd'hui, réunit celte fois,
je crois, toutes les conditions désirables du programme.
» Les petits granules sont tous à peu près de la même forme, d'une
couleur uniforme, d'une composition homogène, et ne sont plus souillés,
comme par le passé, par une poudre plus fine, qui avait fait l'objet
d'observations de la part des éleveurs qui ont expérimenté cet aliment
artificiel. »
— MM. Bernard-Talhandier, Berthéol, P>oudent, Buttin et Focet ac-
cusent réception et remercient des œufs de Salmonidés qui leur ont été
adressés.
— M. Lefebvre, membre de la Société linnéenne du Nord de la
France, écrit d'Amiens : « Je pense être utile à la Société d' Acclimata-
PROCES-VERBAUX.
175
lion en lui envoyant 3000 œufs de Saumon, que je reniettiai demain
matin au chemin de fer. Ces œufs, dont j'ai opéré la fécondation, pro-
viennent de Saumons pris dans la Somme. Si vous en désiriez un plus
orand nombre, je pourrais encore vous en envoyer plusieurs milliers,
contre des œufs de Saumon de Californie ou de Truite du Loch Leven,
et, à défaut de ces espèces, de la Truite des lacs. »
M. Binder, professeur de pisciculture à l'École pratique d'agricul-
ture de Saint-Ilemy (Haute-Saône), adresse les Comptes rendus de cette
École, dans lesquels sont exposés les résultats des travaux piscicoles
entrepris par ledit établissement pendant les années 1884 et 1885. —
Remerciements.
— En réponse à une lettre qui lui a été récemment adressée par la
Société, M. Zipcy, sous-directeur de la ferme-école de Cliavaignac
(Haute-Vienne) et professeur de pisciculture dans cet établissement,
veut bien promettre de tenir la Société au courant de ses travaux pisci-
coles. — Remerciements.
— M. Bernard-Taihandier, d'Ambert (Puy-de-Dôme), demande des
renseignements au sujet de la nourriture à donner aux alevins de Sal-
monidés, et fait en même temps connaître les nouvelles dispositions
qu'il a adoptées pour ses appareils d'éclosion et pour ses bacs d'ale-
vinage.
— M. Albouy, conducteur des ponts et chaussées, qui surveille à
Ouillan l'incubation des œufs de Saumon envoyés par la Société pour
un essai d'empoissonnement de l'Aude, écrit à M. le Secrétaire général :
« J'ai l'honneur de vous accuser réception de la caisse renfermant
3000 œufs de Saumon que vous m'avez adressée. En les mettant dans
les auges, j'ai dû en enlever 120 qui étaient complètement blancs. Dans
le premier envoi, il n'y en eut que 50 de gâtés. Avec ceux que nous avons
enlevés depuis, ce nombre s'est élevé à 93. Maintenant, il n'y en a guère
que 1 ou 2 à enlever tous les jours, quelquefois aucun. J'espère que le
nouvel envoi se comportera de la même manière. »
— M. Seth Green, surintendant de l'établissement de pisciculture de
Kochester (iNew-York), adresse un numéro du journal The Daily Press,
d'Albany, renfermant un article sur les travaux de pisciculture exécutés
dans l'État de New- York.
— M. A. -M. Grève, vice-consul de France à Bergen, adresse les ren-
seignements ci-après sur le prix des poissons salés, préparés en Nor-
vège, qui pourraient èlre utilisés pour la nourriture de la Truite et
d'autres Salmonidés, dans les établissements de pisciculture :
«... Le baril, du poids de l'20 à 130 kilogrammes, et contenant de
1000 à 1200 poissons:
Sprats salés (en saumure) 20 francs.
Harengs 25 —
» Je me permets d'attirer, en outre, votre attention sur la rogue de
176 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
Morue, qui est la nourriture favorite de la Sardine; il en est expédié
d'ici aux ports de Bretagne des quantités considérables tous les ans. Le
cours actuel de ce produit est de 40 à 45 francs le baril, pesant en-
viron 130 ou 140 kilogrammes, rendu à destination. Vous pouvez éga-
lement avoir de la rogue de qualité inférieure à des prix proportionnels,
ainsi que la deuxième qualité, à 26 ou 28 francs.
» Un autre appât, qui est aussi très employé par les pêcheurs de notre
côte, et qui par conséquent doit êtr*^ une nourriture très aimée des
poissons de mer, c'est la Moule. Il est vrai que celle-ci n'est point jus-
qu'à présent l'objet de commerce, et n'a par conséquent aucun prix
coté ni ne se trouve prête à être fournie; mais la côte en est pleine, et
si l'on pouvait trouver à la rendre utile, ce serait un avantage pour
la population du littoral. Il faudrait en ce cas, je pense, sortir la chair
de la Moule et la mettre en saumure, ou la saler très légèrement, en
petits fûts. Dans le cas oii vous jugeriez utile de l'essayer, je serais
prêt à vous y aider.
» Au moment de nos grandes pêches, il arrive le plus souvent sous
la côte des masses de Seiches, que les pêcheurs prennent et coupent en
morceaux. C'est une nourriture très recherchée de la Morue, mais il
est souvent difficile de s'en procurer. »
— M. Bigot adresse un rapport sur ses éducations d'Attacus Yama-
mai, Pernyi et Cynthia, faites à Pontoise pendant l'année 1885.
— M. le baron von Mueller, botaniste du gouvernement à Melbourne,
fait parvenir un envoi de graines d'Atriplex nummiilarium. — Remer-
ciements.
— 31, LéonDuval adresse deux exemplaires d'un traité sur la Culture
pratique des Azalées de llnde, ouvrage qui a obtenu une médaille
d'argent de la Société régionale d'horticulture du Nord de la France.
— M. Eferthoule donne lecture d'une note de M. Dautreville sur la
composition chimique du Stachys af finis. Il résulte des renseignements
fournis par cette note que non seulement le nouveau légume constitue
un aliment très sain, mais qu'il pourrait, en outre, rendre des services
pour l'alimentation spéciale des diabétiques.
— M. Decroix fait la communication suivante : « Messieurs, permettez-
moi de vous parler encore une fois — la dernière probablement — de
l'usage alimentaire de la viande de cheval, sur lequel Isidore Geoffroy
Saint-Hilaire a autrefois appelé l'attention de notre Société.
» Sous notre illustre fondateur, l'hippophagie est restée, en France,
dans le domaine théorique. C'est un comité spécial, le Comité de la
viande de cheval, qui l'a fait entrer dans la pratique, après quatre an-
nées de luttes contre l'opposition des uns et l'indifférence des autres.
î Notre Société a puissamment secondé les efforts de ce comité,
d'abord parce que plusieurs de nos collègues, notamment MM. de Qua-
trefages, Albert Geoffroy Saint-Hilaire, le comte d'Esterno, etc., en
PROCES-VERBAUX. 177
faisaient partie, et, d'autre part, parce qu'elle a versé à la souscription
(le propagande une somme de 500 francs (décision du Conseil en date
du 20 janvier 1865).
» Aujourd'hui, la question de l'iiippophagie est jugée ; il y a des
boucheries chevalines dans toutes les grandes villes. Il y en a actuelle-
ment plus de cent dans le département de la Seine; elles ont livré à la
consommation, en 18S5 : chevaux, 16506; ânes, 381; mulets, 53-
total, 16 940, soit une augmentation de 20U sur 1884.
» Mais le fait sur lequel je désire appeler plus particulièrement au-
jourd'hui votre attention, c'est sur le changement d'attitude des inspec-
teurs de la boucherie à l'égard de la nouvelle industrie.
» Un des grands obstacles à l'installation et à la propagation des
boucheries chevalines, c'était le mauvais vouloir des inspecteurs de cette
époque, presque tous anciens bouchers (l'ordonnance de police con-
cernant les boucheries spéciales est datée du 9 juin 1866).
» Depuis cette époque, le service de l'inspection a été confié à des
vétérinaires, plus à même d'apprécier scientifiquement la valeur nutri-
tive du nouvel aliment, et surtout plus à même de reconnaître les ma-
ladies qui peuvent rendre la chair des animaux impropre à l'alimen-
tation.
» Comme preuve à l'appui de cette assertion, j'ai l'honneur d'offrir à
la Société, de la part des auteurs, MiM. Villain, vétérinaire, chef du ser-
vice de l'inspection de la boucherie de Paris, Rascou, vétérinaire-con-
trôleur, elles vétérinaires-inspecteurs, un ouvrage qui vient de paraître
sous le titre de : Manuel de l'inspecteur des viandes.
» Ainsi que le nom le fait pressentir, les auteurs se sont occupés de
tout ce qui concerne les viandes; mais la viande de cheval y est traitée
de main de maître, dans un très long article signé de l'un des inspec-
teurs, M. Bourrier.
» Pour ne point abuser de votre bienveillante attention, je n'entre-
prendrai point de faire l'analyse de ce travail; je me bornerai à vous
en nommer les principaux paragraphes :
» Historique. — Les apôtres de l'hippophagie, ordonnance de police
du 9 juin 1866. — Abattoirs, échaudoirs, animaux livrés à la consom-
mation.— Qualités de la viande de cheval, de mulet et d'âne. — Valeur
nutritive, maniement, rendement. — Caractères distinctifs de la viande
des solipèdes avec celle de l'espèce bovine. — Examen du cheval vi-
vant et du cheval abattu. — Tableau des saisies; motifs. — Maladies
contagieuses. — Catégorie des viandes, préparations culinaires et mé-
dicinales; saucissons. — Utilisation de la viande de cheval pour les
animaux. — Avantages de l'usage alimentaire de la viande de cheval.
— Enfin, l'hippophagie dans les différents pays de l'Europe.
3 Par cette citation sommaire, vous pouvez juger, Messieurs, avec
quel soin la question a été étudiée et mise à la portée d»s inspecteurs et
4* SÉRIE, T. 111. — Mars 1880. 12
178 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
des consommateurs, par des hommes dont la compétence est hors de-
doute.
» Comme ce travail a une grande utilité et peut contribuer puissam-
ment à la réalisation de ce vœu de notre fondateur : « Faire que le che-
val ne soit plus seulement auxiliaire, mais de plus alimentaire », j'ai
l'honneur de proposer le renvoi de l'ouvrage de MM. Villaiu, Bas-
cou, etc., à la Commission des récompenses. »
Le renvoi est prononcé.
— M. Bernay, consul de France à Tauris, qui assiste à la séance,
fait la communication suivante :
« M. le Secrétaire général m'a demandé de faire connaître ici la cul-
ture de la Vigne de Perse ; c'est eu effet un sujet qui doit intéresser la
viticulture de notre pays, car il va soixante espèces de Vignes en Perse.
Je ne vous les énumérerai pas toutes, ce serait trop long, je vous par-
lerai seulement des meilleures : nous avons là-bas trois principales
espèces de Vignes, la première produit d'énormes grappes à grains
noirs, longs et gros comme la moitié du pouce, dont on fait un vin ex-
trêmement capiteux et coloré, ce raisin est nommé « chàhâni », c'est-à-
dire royal; la deuxième, « askéri », donne des grappes plus petites que
la précédente, les grains sont de grosseur ordinaire, très sucrés,
juteux et l'enveloppe en est si mince qu'il est difficile de les détacher
lorsqu'ils sont un peu mûrs; les pépins sont presque invisibles; c'est
surtout un raisin de table très apprécié des Persans ; on en fait un vin
blanc très capiteux et de très bonne qualité. — Nous avons une troi-
sième espèce de Vigne, celle-là produit d'énormes grappes, dont les
grains sont longs de quatre à cinq centimètres : on la nomme « riche
baba » (barbe de vieux) dans le sud de la Perse et « guélin barmaghi >
(doigt de mariée) dans le nord. Les personnes pauvres en font leur
principale nourriture, car on ne fait pas de vin avec ce raisin, qui man-
que de jus et de fondant.
» J'ai apporté en France quelques bouteilles de vin de Tauris fabri-
qué par moi, je suis donc sur qu'il n'y a aucun ingrédient étranger
dedans; je pense que c'est un vin [qu'il serait utile de faire connaître
parce qu'il peut offrir des ressources pour la consommation. Je me
propose aussi d'envoyer des boutures des principales espèces de Vignes
de Perse, à Trébizonde; je m'entendrai avec quelqu'un qui les mettra
dans des pots, les fera raciner et les enverra ensuite en France ; il est
grandement à désirer que la culture des Vignes persanes soit répandue
dans nos pays.
» Le phylloxéra n'a pas encore pénétré en Perse, je crois que cela
tient à une chose capitale, c'est que là-bas les Vignes sont plantées dans
des sillons profonds d'un mètre et demi à deux mètres ; on les arrose en
hiver et au printemps, au moyen d'eau courante qui baigne les racines
et même les ceps pendant un jour ou deux chaque fois. En été, on pro-
PROCES-VERBAUX. 479
cède au même arrosage, seulement une fois par semaine, car il ne pleut
plus pendant les mois de juin, juillet, août et septembre dans le sud et
le centre de la Perse; dans le nord, il y a quelquefois des orales au
commencement de l'été, l'eau est donc fort rare dans cette contrée.
» Il est difficile, dans ces conditions, que les insectes qui s'attaquent,
en général, aux racines des Vignes, ne soient pas noyés. Le plant de la
Vigne est exposé ordinairement sur le côté sud du talus dont je viens
de parler; quoiqu'il fasse très chaud dans ce pays-là, les Persans croient
que cette exposition donne une meilleure qualité de raisin.
» Les Céréales en Perse forment la principale richesse du pays, je
dirai même la seule richesse. La Perse en exporte beaucoup en Russie
(au Caucase) et en Turquie; l'Avoine et le Seigle n'y sont pas cultivés;
le Blé est arrosé comme la Vigne, toujours par irrigation.
» Il y a dans le centre et surtout dans le nord de la Perse, une espèce
de Jujubier qui produit un fruit ayant la forme, la couleur et la o-ros-
seur du gland; à l'intérieur est un noyau analogue à celui de la datte;
ce fruit est extrêmement farineux et sucré, les Persans et les Arabes de
Bagdad en font une grande consommation. Cet arbre croît partout st
sans aucune culture; il pourrait être introduit en France et planté dans
des terrains sans valeur. Outre que ce jujube est nourrissant, il est sou-
verain contre la diarrhée et la dysenterie.
» La Perse est un pays curieux sous le rapport des chasses ; le gibier
y foisonne surtout dans les forêts du Karadagh qui avoisinent Tauris :
sur le littoral de la Caspienne dans le Mazandéran et le Ghilan il y a
toute espèce de gibier, depuis le fauve le plus redoutable jusqu'au
Lièvre. On chasse encore en Perse avec l'oiseau de proie, c'est-à-dire
avec le Faucon; il y en a plusieurs espèces pour la chasse, mais chacune
d'elles a sa spécialité. Ainsi, avec le Faucon qui sert à chasser la Per-
drix, on ne chasse pas l'Outarde ou la Gazelle. Le Faucon pour la chasse
à la Gazelle est dressé lorsqu'il est tout jeune; on l'habitue à prendre
sa subsistance dans l'orbite d'une Gazelle empaillée, et, au bout d'«n
certain temps, lorsqu'il voit celle Gazelle, il se précipite sur sa tête
pour y prendre son repas; à la chasse, lorsque la Gazelle part à une
certaine distance, on lance le Faucon dessus, l'oiseau se perche alors
sur la tête de sa victime et lui crève les yeux ; le chasseur arrive et
s'empare de la Gazelle, qui se roule désespérément sur le sol.
» La chasse aux Outardes est plus curieuse encore; le Faucon est
lancé sur l'oiseau : si c'est une vieille Outarde, elle reste en place sans
bouger, elle attend le Faucon, et, lorsque celui-ci arrive à une certaine
distance, à portée comme nous dirions chez nous, elle se retourne et lui
lance un jet de fiente à la tète ; le Faucon reste là tout penaud et l'Ou-
tarde s'en va ; il est impossible de chasser ce jour-là avec le même
oiseau. Quelquefois, lorsque c'est une jeune Outarde, elle s'élève à pic
et lutte corps à corps avec le Faucon, dont elle a souvent raison.
180 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
» Nous avons, eu Perse, la grosse Perdrix royale {Tctraog allas cas-
jjiMS); on la trouve un peu partout, mais spécialement dans la partie
des monts Elbourz qui avoisine Téhéran. La Perdrix royale ne vit pas
dans la plaine, mais seulement sur les montagnes les plus escarpées ;
elle est aussi grosse qu'une forte Poule d'Inde; son plumage est exac-
tement celui de la Perdrix grise; le goût de sa chair en est peu diffé-
rent; elle a cependant un parfum un peu plus fort, car cet oiseau se
nourrit d'une espèce d'oignon qui, paraît-il, ne croît pas dans les plai-
nes, c'est pour cela qu'il n'y descend jamais : il y mourrait. J'ai essayé
d'en apprivoiser, j'en ai gardé pendant quinze jours, un mois, et au
bout de ce laps de temps, celte Perdrix mourait faute de pouvoir lui
donner sa nourriture habituelle. Cette Perdrix est très sauvage, on ne
peut guère l'approcher que par surprise, les chasseurs sont obligés de
s'embusquer pendant des journées entières avant d'en tirer une, de
sorte que nous en mangeons rarement. C'est un gibier assez cher pour
la Perse, nous le payons six francs pièce. La Perdrix royale est beau-
coup plus rare dans l'Azerbaïdjan, à cause du froid sans doute. Le shah
de Perse a essayé d'en acclimater dans les régions plus basses, au Jar-
din zoologique de Téhéran, il n'y a pas réussi; mais, par contre, il a ob-
tenu ua vrai succès en acclimatant les Francolins en Perse. Sa Majesté
en a fait venir d'Arabie en 1870, elle est parvenue à les faire multiplier
dans la vallée de Djadjeroud, située à huit lieues dans l'est de la capi-
tale. Cette vallée inhabitée est traversée par une rivière qui entretient
une certaine fraîcheur pendant les grandes chaleurs de l'été. Ces Fran-
colins ont été protégés au début par ordre du souverain, mais aujour-
d'hui, sa suite peut les chasser dans cette chasse réservée. »
— A l'occasion du procès-verbal, M. Maurice Girard rapporte que,
dans une conversation qu'il a eue, il y a une douzaine d'années, avec
M. Paul Bert, ce dernier émettait l'opinion qu'il est inutile de chercher
à acclimater des plantes ou des animaux; que mieux vaut les laisser
dans leur propre pays, et tâcher de les améliorer sur place; qu'en ce
qui concerne notamment les Vers à soie, par exemple, il est bien pré-
férable de se procurer de la soie en Chine ou au Japon que de chercher
à en produire en France, où elle coûte plus cher, par suite du prix très
élevé de la main-d'œuvre. « Je crois, ajoute M. Maurice Girard, qu'il y
a du vrai dans l'opinion de M. Paul Bert, relativement aux Vers à soie ;
car nous nous trouvons, en Europe, dans une situation très défavo-
rable par rapport à la Chine, où la main-d'œuvre est à vil prix. Il me
semble donc que, dans les tentatives d'acclimatation de Bombyciens
séricigènes, nous n'avons à nous préoccuper que du Ver à soie du
chêne delà Chine {Attacus Perntji), lequel peut s'élever en plein air,
sur les arbres, sans entraîner, pour ainsi dire, d'autres frais que celui
de la récolte. >
- - M. Geoffroy Saint Hilaire fait remarquer que si le renchérissement
PROCÈS-VERBAUX. , 181
de la main-d'œuvre, d'une part, et de l'autre la facilité actuelle des
moyens de transport ont modifié la situation économique d'une foule
d'industries se rattachant à l'élevage des animaux, il ne s'ensuit pas que
l'acclimatation n'ait rendu et ne puisse rendre encore des services
considérables. « Dans la dernière séance, dit M. le Secrétaire général,
nous avons établi que M. le professeur Paul Bert ne pouvait pas avoir
tenu le propos qui lui avait été attribué. Aujourd'hui M. Maurice Girard
vient placer la question sur un autre terrain en rappelant ses conver-
sations passées avec le ministre résident du Tonkin.
» Suivant notre collègue, M. Bert penserait « qu'il faut laisser les ani-
» maux utiles là où ils sont et se contenter d'en faire venir les pro-
)> duits ».
» Vous me permettrez, Messieurs, de dire que cette affirmation équi-
vaut à nier l'utilité de l'acclimatation elle-même.
y> Mais laissez-moi vous présenter quelques exemples, ils vous démon-
treront mieux que les plus longues explications ce qu'il faut penser du
principe posé par 31. Bert.
» S'il suffisait d'importer de leurs pays d'origine les produits des ani-
maux utiles, il n'aurait pas fallu introduire de Chine les Vers à soie
qui ont enrichi je ne sais combien de générations de sériciculteurs
européens, et Daubenton aurait eu .tort d'acclimater, en France, les
Mérinos d'Espagne.
» Mais il ne faut pas discuter cet aperçu que je qualifie seulement de
curieux.
» Ceci m'amène à envisager la question à un point de vue tout à fait
différent et sur lequel je me réserve de revenir longuement un de ces
jours prochains.
)) Il y a trente-deux ans, quand la Société a été fondée, les questions
relatives à l'acclimatation, ou d'une façon plus générale les relations
d'échange entre les peuples, étaient-elles ce qu'elles sont aujourd'hui ?
Non.
» Alors, il y avait le plus sérieux intérêt à ce que chaque peuple pût
produire sur son propre sol les marchandises dont les pays étrangers
avaient le monopole.
ï La sériciculture française a permis aux fabriques de soierie de se
procurer, sans passer la frontière, de quoi se suffire.
» Daubenton a cherché à affranchir la Franco du tribut qu'elle payait
à l'Espagne pour ses laines fines.
» En est-il de même aujourd'hui?
» Depuis trente ans les moyens de transport ont pris une extraordi-
naire activité et les relations économiques des peuples ont été boule-
versées.
» La production des laines est onéreuse dans les pays où le sol a une
grande valeur et nos filatures sont alimentées par tous les pays du
182 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
monde où les moutons de la vieille Europe ont été successivement
acclimatés.
» La Chèvre d'Angora, que nous avons acclimatée d'Asie Mineure en
France, est arrivée trop tard, car, pendant qu'elle devenait bêle fran-
çaise, on l'acclimatait au Cap, et les usines qui emploient la laine de
mohair (Bradford, iloubaix, etc.) sont aujourd'hui pourvues de mar-
chandises par les troupeaux d'Angora do l'Afrique australe, auxquels
nos troupeaux français ont fourni des étalons.
» Cela revient à dire, Messieurs, que de notre temps, avec les progrès
accomplis, toute marchandise aisément transportahle doit être produite
dans des conditions de rigoureuse économie.
» Nous voyons aujourd'hui la Chèvre d'Angora, originaire d'Asie Mi-
neure, devenue un animal africain (Cap) et américain (Plata) ; le Mouton
mérinos, originaire d'Espagne, prospère en Australie; les Bœufs, origi-
naires du vieux Monde, multipliés en nombre infini en Amérique et
menaçant nos marchés européens.
» L'acclimatation d'une part, les facilités de transport de l'autre, sont
venues bouleverser l'ancien état de choses. »
— A l'occasion de la lettre de M. le docteur Jeannel, relative au
Haricot Cerise du Japon, M. Paillieux croit devoir signaler que c'est à
tort qu'on lui attribue l'introduction de celle variété en France. « Le
Haricot Cerise, dit notre confrère, a été introduit par M. Sisley, de
Lyon, qui l'a envoyé à la Revue horticole^ de laquelle je tenais les
graines. »
— M. Paillieux donne lecture d'une note sur l'Ananas, sa culture et
ses produits. (Voy. au Bulletin.)
— M. Raveret-Wattel fait une communication sur la station aquicole
de Wood's Hole (Massachusetts) et sur la multiplication artificielle de la
Morue. (\^oy. au Bulletin.)
Le Secrétaire des séances,
C. Raveret-Wattel.
4V. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS.
PREMIERE SECTION.
SÉANCE DU 5 JANVIER 1886.
Présidence de M. HuET.
31. Decroix s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. M. Mégnin
n'étant pas présent à l'heure de l'ouverture de la séance, M. Huet veut
hieii présider.
Le procès-verbal est lu et adopté, avec rectification proposée par
31. Lataste et appuyée par la majorité des membres présents.
M. Lataste donne lecture des notes qu'il a prises en faisant des re-
<",herches dans les différents ouvrages qui ont traité la question des
Léporides. II en résulte, d'après lui, que l'existence de ces animaux n'a
pas été suffisamment démontrée, et que, jusqu'à nouvel ordre, il n'y
a pas lieu d'admettre que les Léporides existent ou aient existé, entant
"(lue race hybride.
M. A.-Geofl'roy Saint-Hilaire entretient la Section au sujet des ani-
maux qualifiés Léporides, qui vivent au Jardin zoologique. Ils offrent
l'aspect des Lapins, et les femelles donnent le jour à des petits, nus et
aveugles, comme ceux des Lapins ordinaires. Rien n'autorise à croire
^jue cette race soit issue de l'accouplement des espèces Lièvre et Lapin.
Notre collègue ajoute qu'au Jardin d'Acclimatation on n'a jamais réussi
à créer des Léporides. M. A. -Geoffroy Saint-Hilaire parle ensuite des
Lièvres qui ont donné plusieurs générations, en captivité, chez un éle-
veur, à|Versailles ; il raconte aussi que, lorsqu'on élève ensemble des
Lièvres et des Lapines, ou des Lapins et des Hases, il arrive presque
toujours un moment où le Lièvre ou la Hase tue la Lapine ou le Lapin.
M. Joly fait observer qu'il a constaté le contraire, et que tous les au-
teurs, y compris 31. Gayot, qui se sont occupés de la question, ont re-
marqué que c'est le Lapin ou la Lapine qui tue son compagnon.
Cette observation de 31. Joly est appuyée par plusieurs membres.
31. A. -Geoffroy Saint-Hilaire répond qu'il peut en'être ainsi quand on
réunit ces animaux dans un âge déjà avancé, mais non lorsqu'ils ont été
élevés très jeunes ensemble.
Après avoir entendu ces divers rapports, la Section, à l'unanimité,
pense que la conclusion de 31. Latasti; doit être adoptée, et que, l'exis-
tence des Léporides restant des plus douteuses, il y a lieu, comme il a
été décidé antérieurement, de recommencer les expériences.
Le Secrétaire,
Gh. Mailles.
184 SOCIÉTÉ NATIONALE d'AGCLIMATATION.
TROISIÈME SECTION.
SÉANCE DU 13 JANVIER 1886.
Présidence de M. Paillieux.
MM. les Président el Vice-Président s'étant fait excuser, M. Paillieux
veut bien les remplacer.
M. le Vice-Secrétaire donne lecture du procès-verbal de la précédente
séance. M. Raveret-Wattel demande une rectification, après quoi le
procès-verbal est adopté.
M. Vidal n'assistant pas à la séance, M. Mailles continue à remplir les
fonctions de Secrétaire.
M. Raveret-Wattel fait savoir à la Section qu'un laboratoire de pisci-
culture sera construit dans le département de l'Aude, à Quillan, près
du bureau du conducteur des ponts et chaussées ; les appareils rece-
vront les eaux de l'Aude, lesquelles s'aéreront en tombant d'une cer-
taine hauteur.
Les appareils du système allemand, perfectionnés, seront les seuls
utilisés.
Avec une dépense d'environ 200 francs, 10 000 alevins pourront être-
jetés, annuellement, dans l'Aude.
M. Paillieux remercie notre collègue du zèle qu'il a déployé en cette
circonstance et en bien d'autres.
M. Berthoule fait remarquer que les premiers Saumons envoyés dans
le Midi, et dont quelques-uns remontèrent l'Aude, appartenaient à l'espèce-
américaine, le Salmo.Quinnat, qui vit dans des eaux dont la température-
est analogue à celle de la Méditerranée; noire Salmo salar, au con-
traire, existe normalement dans des eaux plus froides. Mais toutes
les tentatives faites pour l'introduire dans le bassin de la Méditerranée
sont jusqu'à présent restées infructueuses.
M. Raveret-Wattel explique que les essais, tentés sur le Salmo salar,
dans le Midi, ont souvent été mal faits; on a jusqu'ici employé des eaux
trop chaudes pour faire éclore les œufs. Il en est résulté, ou que les em-
bryons n'ont pu se former, ou que les alevins n'ont pas vécu. Toutefois,
1\[. Raveret-Wattel estime que le Sabno Quinnat serait préférable, pour
cette région, au Saumon ordinaire, comme le pense M. Berthoule; mais
il serait bien difficile de se le procurer à présent. En effet, depuis que
l'on a réussi, aux États-Unis, à propager le Salmo salar dans de nom-
breux cours d'eau tributaires de l'Océan Atlantique, on ne s'occupe plus
d'y introduire le Salmo Quinnat. 11 faudrait donc faire venir de Cali-
fornie les œufs de ce dernier poisson, ce qui serait très onéreux. Mais
PROCÈS-VERBAUX. 185
. Aquarium du Trocadéro a obtenu la reproduclion de cette espèce, et
c'est même le seul établissement en Europe oii le fait ait été constaté
pendant plusieurs années de suite. Malheureusement les alevins doi-
vent être jetés dans la Seine, en amont de Paris, et nous avons lieu de
craindre qu'ils n'y périssent tous à bref délai.
M. Berthoule exprime le désir que notre Société fasse venir de nou-
veau des Saumons d'Amérique et qu'elle demande le concours du gou-
vernement à cet effet, ce qui serait sans doute possible en faisant valoir
l'utilité de cette importation destinée à doter la Méditerranée d'une
espèce nouvelle et précieuse.
M. Raveret-Wattel pense que, si les Salmo sa/a?' réussissent, il sera
inutile de faire venir à grands frais des Salmo Quinnat.
M. Paillieux dit qu'il eiit été facile de jeter les alevins du Trocadéro
dans des cours d'eau plus favorables que ne l'est la Seine.
M. Rathelot fait remarquer que la chair du Salmo Quinnat est
blanche, tandis que celle du Salmo salar est rougeàtre.
M. Raveret-Wattel répond que celte couleur pâle de la chair du Sau-
mon américain est le résultat d'une décoloration qui tient au milieu
dans lequel le poisson a vécu; en Amérique, au contraire, cette espèce
présente une coloration d'un rouge plus intense que celle du Saumon
d'Europe. Notre collègue ajoute que les œufs de cette espèce, blancs
en Europe, sont rouges en Amérique.
M. Rathelot pense qu'il ne suffit pas de lâcher des alevins dans nos
cours d'eau : il faut, pour obtenir des résultats utiles, fournir delà
nourriture à ces jeunes poissons ; notre collègue signale les alevins de
Carpe comme très propres à remplir ce but. Au moins les Carpes
craignent moins les eaux trop chaudes que les Saumons, et elles con-
viendraient pour celles où M. Valéry-Mayet échoua en employant des
alevins de Saumon.
M. Rathelot ajoute que le Gardon pourrait être également utilisé
pour les Salmonidés.
31. Berihéol fait remanjuer que la Vandoise, ayant une ponte très
précoce, fournirait une nourriture aux jeunes Saumons au moment
voulu.
M. Berlhoule fiîit connaître que la Société vient de recevoir de Berlin
des œufs de Coregonus marœna, arrivés en bon état.
A cette occasion, M. Berthoule parle des mœurs de ce poisson et de
la manière de le pêcher.
M. Raveret-Wattel dit que ces œufs ont été envoyés emballés par le
procédé américain; il donne la description de ce système d'emballage.
M. Paillieux fait observer que ce mode d'envoi offre un grand intérêt.
M. Berlhoule signale les difficultés que l'on a à surmonter pour élever
les Corégones, poissons très sensibles à la moindre blessure.
M. Raveret-Wattel donne la description d'un système d'élevage avec
186 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
lequel on perd bien moins de jeunes Corégones qu'en employant les
procédés ordinaires.
M. Rathelot pense qu'il serait utile que les instituteurs primaires en-
seignassent les éléments de pisciculture aux enfants. On pourrait adres-
ser une demande, à cet effet, au ministre de l'Instruction publique.
M. Raveret-Wattel répond que cet enseignement ne peut guère être
demandé aux instituteurs, qui ont déjà fort k faire, et que c'est le
ministre de l'Agriculture qui devrait, s'il y a lieu, être saisi d'une
demande en ce sens.
M. Berthoule parle de plusieurs établissements de pisciculture, dont
quelques-uns sont très beaux; d'autres, plus modestes, donnent cepen-
dant des produits rémunérateurs.
M. Raveret-Wattel dit que ces petits et modestes laboratoires sont
très intéressants, productifs et propres à encourager le goût de la
pisciculture, car ils donnent des résultats fort satisfaisants. Quant aux
établissements luxueux, les frais de toutes sortes dépassent géné-
ralement les bénéfices; c'est ce qui fait croire au grand nombre que la
pisciculture n'est pas une spéculation avantageuse.
Le Vice-Secrétaire,
Ch. Mailles.
QUATRIÈME SECTION.
SÉANCE DU 19 JANVIER 1886.
Présidence de M. Maurice Girard, Président.
Après la lecture du procès-verbal qui est adopté, M. le Président
annonce la mort de M. Moleyre, préparateur au laboratoire d'entomo-
logie, qui publiait actuellement dans nos BuUetinsua mémoire sur les
Insectes comestibles. Le laboratoire d'entomologie avait perdu quelques
jours auparavant un autre de ses préparateurs, M. Delorieu.
M. le Président présente, au nom de M. Wailly, un travail sur les Sé-
ricigènes,qui sera soumis à la Commission des récompenses.
M. Fallou annonce aussi le second volume de M. Natalis Rondot,
sur les Vers à soie sauvages (ouvrage publié aux frais de la Chambre
de commerce de Lyon).
M. Fallou présente à la Société une note sur le Molytes coronatus.
M. Fallou a pu, en détruisant un certain nombre de femelles, préser-
ver ses plantations de nouveaux dégâts, tandis que ces dégâts ont con-
tinué dans les propriétés voisines.
M. Fallou croit que l'espèce vit aussi dans le Panais.
PROCÈS -VERBAUX. 187
iM. Mailles désirerait savoir le nom d'un Locuslien très commun dans la
région centrale de la France.
M. le Président fait remarquer qu'il est très difficile de se prononcer
sur le nom d'un Insecte dans des conditions aussi vagues, et engage notre
collègue à se procurer des échantillons de cette espèce.
M. le Président a reçu de M. Lesueur, dans des paquets de cheveux
provenant de l'industrie, la Tinea crinelle, espèce qui attaque habituel-
iement le crin des matelas et la laine.
.^I. Lesueur a trouvé également un parasite de cette espèce que
M. 31. Girard a reconnu être un Ichneumonien.
Le Secrétaire,
M. SÉDILLOT.
CINQUIÈME SECTION
SÉANCE DU 26 JANVIER 1886.
Présidence de M. Henry de Vilmorin, Président.
I^e procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
II est procédé à la nomination du Bureau et du délégué dans la Com-
mission des récompenses.
Sont désignés par acclamation :
Président : M. H. de Vilmorin.
Vice-président : M. Aug. Paillieux.
Secrétaire : M. Jules Grisard.
Vice-secrétaire : M. Jean Dybowski.
Délégué dans la Commission des récompenses : M. le D'' Mène.
M. Paillieux donne lecture de lettres émanant de MM. le D'' Jeannel,
Frère et Clarté, rendant compte de la culture des graines qu'ils ont re-
rues au printemps de 1885.
A propos de cette communication, M. Chappellier dit qu'il a cultivé
le Stachys affinis avec succès. C'est un légume excellent et qui produit
beaucoup ; une ou deux touffes suflisent à la confection d'un plat.
Notre confrère a remarqué que le Stachys n'est pas féculent, et il
appelle l'attention de la section d'une façon toute spéciale sur ce point
ijui présente un très grand intérêt, les diabétiques pouvant en faire
usage sans inconvénient.
M. Paillieux rappelle qu'il a fait faire l'analyse duSoyaqui, lui aussi,
ne présente pas trace de fécule, et il avait même pris un brevet au sujet
de son emploi comme aliment pour les diabétiques, mais il a dû laisser
tomber ce brevet, le Soya renfermant de l'inuline qui se convertit
également en sucre.
188 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
M. Berthoule a également cultivé le Stachys en Auvergne où il a
constaté sa parfaite rusticité. Il fournit un excellent appoint au pota-
ger; très fondant, très savoureux, il rappelle à la fois le fond d'Arti-
chaut et le Salsifis.
M. Soubies a aussi parfaitement réussi.
M. Paillieux est heureux de constater ce résultat, car il faut bien
l'avouer, de pareils et si complets succès sont assez rares.
M. Mailles a cultivé le Stachys dans un sol des plus mauvais, des
plus sablonneux. Malheureusement les Vers blancs ont détruit la plus
grande partie des touffes; celles qui ont été épargnées ont donné un
résultat satisfaisant.
Notre confrère pense que M. Dautreville se chargerait volontiers de
faire l'analyse du Stachys et s'offre de le lui demander. La section
accepte avec reconnaissance.
M, Paillieux donne lecture d'une note sur l'Ananas, sa culture et ses
produits (voy. au Bulletin). Puis il est procédé à la dégustation de
vin d'Ananas qui est trouvé excellent.
Cette communication donne lieu à quelques observations de la part
de MM. Chappellier et Grisard.
M. Marquiset rend compte de ses cultures de Kudzu. (Voy. au Bul-
letin . )
Le Secrétaire,
Jules Grisard.
PREMIÈRE SECTION.
SÉANCE DU "2 FÉVRIER 1886,
Présidence de M. Decroix, Président.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. Lataste présente quelques modifications au procès-verbal du
22 avril dernier, rectifications que son voyage dans le Haut-Sénégal l'a-
empêché de présenter plus tôt : page 390 du Bulletin, i^ paragraphe, il faut
lire : Sénégal et non Afrique; lisez aussi: Noirs et non Arabes. Même
page, 1^ paragraphe, M. Lataste n'a pas dit que le venin du Crapaud
soit actif seulement pour les petits animaux; il l'est également pour
les ^ros, puisqu'on a tué des Chiens par son emploi. Mais ce venin ne
peut servir, pour le Crapaud, que comme moyen défensif, ce Batracien
ne pouvant le projeter à distance, comme le croient quelques personnes.
Même page, même paragraphe, il faut lire : Parotides au lieu de
Carotides.
Ensuite M. Lataste donne lecture de la note suivante, note que lui a
PROCÈS-VERBAUX. 18!)
communiquée, jadis, M. Ancey, de Marseille ; M. I^ataste fait cette
lecture à propos de la communication de M. Maurice Girard, dans la
séance générale du :2i mai 1885, sur les Lapins sauvages noirs de la
forêt de Villers-Cotterets ; M. Lataste fait observer qu'il ne prend nulle-
ment la responsabilité des explications que M. Ancey ajoute à la simple
constatation des cas de mélanisme :
« Entre autres points de noire région, il se trouve des Lapins sauvages
noirs, dans la propriété de Caseneuve, près Pélissanne (Bouches-du-
Rhône). Ces Lapins, quoique fort rares, y ont été parfaitement observés
de tout temps, et, l'année dernière, on en a tué deux et vu quatre dans les
mêmes endroits que les Lapins gris ordinaires. Celui qui écrit ces lignes
en a pris un au mois de juillet, en pleine colline, à la main, il ne devait
pas avoir plus d'un mois. Remis aussitôt en liberté, ce petit Lapin alla
se réfugier dans un amas de pierres.
» Ces animaux ont le poil franchement noir sur tout le dessus du
corps ; le ventre et le dessous de la queue sont gris de fer. Ils offrent
cette particularité que, tandis que le Lapin sauvage gris devient raide
quelque temps après avoir été tué, ceux-ci restent souples et flasques.
» Il n'y a pas de Lapins domestiques dans les environs depuis fort
longtemps, et nous n'avons jamais rencontré, dans nos chasses, de variété
autre que la noire en question. Les vieux bergers du pays, prétendent
que ces Lapins noirs sont les produits de femelles grises ordinaires,
qui, étant pleines, ont élé impressionnées par la vue des emplacements
où l'on a fait du charbon, et oîi le sol est entièrement noir. Ces empla-
cements se trouvent çà et là, sur notre terrain oîi poussent le Chêne vert,
le Chêne à kermès, et le Pin maritime. »
M. Huet donne lecture d'une lettre dans laquelle un de nos collègues
parle de Cerfs-Cochons.
Ces animaux se seraient montrés moins féconds que ceux du Muséum
de Paris.
A cette occasion, M. Huet dit que les onze femelles de la ménagerie
ayant été tuées par un Chien, deux autres femelles, provenant du Jardin
d'Acclimatation, ont été données au mâle qui restait. Ces nouvelles venues
se sont montrées aussi fécondes que les autres. En général, il y a deux
mises bas, de un ou deux petits chacune, en treize ou quatorze mois
environ.
M. Joly demande si le Conseil a accordé les cheptels de Lièvres et de
Léporides que la section avait demandés.
M. Berthoule répond que ces cheptels sont accordés.
M. Berthoule parle des Léporides, que M. Égal a obtenus des couples
Lièvre-Lapine et Lapin-Hase.
Notre collègue ajoute que M. Égal pourrait peut-être disposer à notre
profit de quelques-uns de ces Lé})orides, ou même, sans doute, des
couples de parents ayant produit ensemble.
190 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
Après discussion, la section, à la majorité, décide qu'il y a lieu de
profiter de ces bonnes dispositions ; les animaux que M. Égal voudra
donner seront reçus avec beaucoup de reconnaissance.
En définitive, l'expérience aura lieu, et sur des couples de Lapins et de
Hases, et de Lièvres et de Lapines, d'une part, et sur des couples de
Léporides tels qu'ils existent actuellement.
Comme il se pourrait que M. Joly, désigné déjà pour recevoir ces
animaux, en eût un nombre assez considérable, M. Huet, dans ce cas, se
chargerait de quelques-uns.
Cette dernière décision est prise après une discussion à laquelle plu-
sieurs membres prennent part; les uns étant d'avis qu'il faut réunir
tous les animaux chez un seul éleveur, afin de faciliter la tâche de la
Commission de surveillance, et les autres faisant valoir, au contraire,
les avantages résultant de la dispersion, afin d'éviter les épidémies, et,
surtout, afin d'agir sur des milieux divers, avec des moyens divers. La
décision prise est donc un moyen terme.
M. Ménard parle des déceptions qu'il a eues chaque fois qu'il a suivi
une piste de Léporides soi-disant hybrides, soit au Jardin d'Acclimata-
tion, soit chez des amateurs ou éleveurs de profession ; en fin de compte,
notre collègue s'est toujours trouvé, après information et examen, en pré-
sence de Lapins, race dite Léporide. M. Ménard craint que les Léporides
de M. Égal ne soient que des Lapins de celte rare.
M.Geoffroy Saint-Hilaire partage les craintes de M. iMénard, et déclare
également qu'il n'a jamais pu rencontrer que des Léporides-Lapins.
M. de Sémallé ne croit pas à l'existence d'une race hybride fixe,
d'autant plus que, jusqu'ici, tous les hybrides observés n'ont pu conserver
longtemps leur caractère intermédiaire.
M. Lataste émet le vœu qu'un prix soit accordé à la personne qui, la
première, obtiendra des produits hybrides des espèces Lièvre et Lapin.
MM. Rathelot et Berthoule soutiennent cette proposition, laquelle est
combattue par MM. Paillieux,Huet et Joly. Mise aux voix, la proposition
de M. Lataste est adoptée.
M. Ménard est nommé membre de la Commission de surveillance, ce
qui porte à quatre le nombre de nos collègues désignés, par la section,
pour suivre les essais de constitution ou de reconstitution de Léporides
hybrides.
Le Secrétaire,
Ch. Mailles.
V. BIBLIOGRAPHIE.
I
Élevage des animaux de basse-cour, par Ernest Lemoine, 2^ édit.,
iii-18, fig. Paris, G. Masson, éditeur.
Si quelqu'un pouvait avec profit étudier la basse-cour et rendre cette
étude utile et attrayante en la vulgarisant, c'est, à coup sûr, l'auteur de
ce nouvel ouvrage. Placé, pour ce faire, dans des conditions absolu-
ment privilégiées, à une faible distance de Paris, sur les bords d'une
paisible rivière, ayant à discrétion, avec l'eau et l'espace, toutes les res-
sources matérielles nécessaires, aidé du précieux concours de la ména-
gère la plus zélée et la mieux entendue, guidé lui-même par un juge-
ment sûr et par une grande persévérance de volonté, M. Lemoine a
créé en plein parc, sous l'abri de vieux arbres, un établissement d'éle-
vage de tous points remarquable, véritable haras de volailles, duquel
on a pu dire qu'il était sans second en France.
Convaincu à bon droit de l'excellence des espèces indigènes, l'auteur
a su se garder d'un engouement irréfléchi pour les races étrangères,
observant d'ailleurs soigneusement les unes et les autres, et s'attachaut
à faire entre elles un choix judicieux, tout en se livrant dans leur éle-
vage au plus minutieux travail de sélection.
C'est à Crosne, sur les'rives de l'Yerre, dans un parc de 8 hectares,
que M. Lemoine a établi ses parquets au nombre de plus de cent, en
leur dispensant généreusement l'eau et l'espace, l'ombre et la lumière.
Ces parquets, dont l'étendue varie de 100 à 500 mètres carrés, sont de
véritables jardins, plantés d'arbustes, semés de vertes pelouses, et dé-
coupés par des allées soigneusement sablées. Le logement des volailles
n'a pas été aménagé avec moins de soins et de prévoyance, quoique sans
un luxe inutile ; tout est fait avec goût et avec économie, en vue de
riiygiène des animaux et de leur facile surveillance.
La première partie du livre de M. Lemoine est consacrée à la des-
cription de chacun des détails de l'installation du poulailler, après quoi
l'auteur passe à l'étude de ses habitants : sans phrases, en quelques
mots, il indique les caractères distinctifs des principales races, françaises
d'abord, étrangères ensuite, dans des termes suffisamment précis pour
permettre, même à la ménagère la plus novice, le peuplement le mieux
compris de sa basse-cour, recommandant de préférence à son choix les
variétés indigènes, et la stimulant à leur amélioration par une rigou-
reuse sélection dans chacune d'elles, plutôt que par leur croisement.
Vient ensuite une étude, instructive pour beaucoup, en tous cas pleine
d'intérêt, sur la physiologie de l'œuf, dont on peut suivre le développe-
ment presque jour par jour, depuis sa formation première jusqu'à l'heure
de l'éclosion.
192 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Nous compléterons celte note en ajoutant que M. Lemoine a eu le bon
foùt de remplir son livre de dessins pittoresques et la bonne fortune
d'en pouvoir confier l'exécution au crayon d'Allongé.
A. Berthoule.
II. Journaux et Revues.
(Analyse des principaux articles se rattachant aux travaux de la Société.)
■/Algérie agricole. Phijtolaquc, par le docteur Bertherand,
n° de février.
Le Phytolaque {Phytolacca decandra), plus vulgairement connu sous
Jes noms de Raisin d'Amérique ou d'Épinard des Indes, appartient à la
famille des Phytolaccacées. Cette plante, répandue dans la plupart des
régions tropicales, et assez commune sur le littoral algérien, est inté-
ressante à plus d'un titre; sa racine pivotante, sur laquelle se développent
de nombreuses radicelles, la rendrait, par cela même, d'une utilité sé-
rieuse en beaucoup d'endroits, pour fixer les terrains exposés aux glis-
sements.
Sa baute tige rameuse, très feuillée, à verdure persistante, est assez
ornementale pour lui avoir mérité en Espagne le nom de Belombra. Ses
jeunes pousses servent dans quelques pays à l'alimentation, mais elles
ont une saveur acre, difficilement supportable pour un palais délicat.
La floraison se produit en été et se prolonge assez avant dans l'au-
tomne; les fleurs sont disposées en longues et nombreuses grappes d'un
bel efi"et; le fruit, sorte de baie à dix loges monospermes, vert d'abord,
rouge foncé au moment de la maturité, donne, par écrasement, un jus
épais couleur d'améthyste, utilisé en teinturerie, quelquefois même pour
la coloration des vins, ce qui, d'après le docteur Bertberand, ne serait
pas sans inconvénients pour la santé.
Ses propriétés médicales sont contestables; c'est tout au moins un
purgatif énergique. On l'emploie même en Amérique pour le traitement
des ulcères atoniques et de quelques autres afl'ections.
Quoi qu'il en soit, cette étude botanique du docteur Bertherand, en
raison des diverses utilisations possibles du Phytolaque, nous a paru
mériter d'être signalée.
B. A.
Le Gérant: Jules Grisard.
5ÎI04. — BouRLOTON. — Imprimeries réunies, A, rue Mignon, 2, Paris,
I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ.
L'APPAREIL GHESTER
POUR L'INCUBATION ARTIFICIELLE DES OEUFS DE MORUE A LA STATION AOUICOLE
DE WOOO'S HOLE (MASSACHUSETTS)
Par m. C. RAl'ERET-YVilTTEL
Secrétaire des séances.
J'ai déjà mentionné, dans un travail présenté à la So-
ciété (I), les premiers essais tentés par la Commission des
pêcheries des Étals-Unis, à Gloucester (Massachusetts), pour
la multiplication artificielle de la Morue, et j'ai fait connaître
les résultats très encourageants déjà obtenus, c'est-à-dire
l'empoissonnement de la rade de Gloucester, où les pêcheurs
constataient une abondance tout à fait extraordinaire déjeunes
Morues.
Ces travaux, toutefois, n'étaient pas encore entrés positi-
vement dans le domaine de la pratique,. par suite de certaines
difficultés pi'ovenant de l'extrême légèreté des œufs de Mo-
rue, lesquels flottent ou, tout au moins, restent en suspension
dans l'eau de mer (2). Il en résulte que si l'on cherche à faire
éclore ces œufs dans des appareils à courant continu, ils sont
bientôt entraînés hois des appareils par le courant, ou bien
ils vont s'accumuler et s'étouffer mutuellement contre les
petits grillages en toile métallique que l'on oppose à leur
fuite. Si, au contraire, on les met en incubation dans des ap-
pareils à eau stagnante, l'asphyxie des embryons se produit
rapidement, faute d'une aération suffisante de l'eau qui les
baigne.
(1) Rapport sur la situation de la pisciculture à ["étranger (Bull. Soc. Ac-
clim., octobre 1882, p. 505).
(2) A la station aquicole de Wood's Hole, où la densité de l'eau de mer est
de 1.025, les œufs tloltcnt à la surfaco pendant queli[iies jours, puis ils s'en-
foncent un peu. Sur un autre point de la côte, à Cold Spring Harbor où la
densité de l'eau n'est que 1.U22, les œufs restent en suspension s'il y a un
léger courant; mais ils s'enfoncent si l'eau est tranquille.
4e SÉRIE, T. III. — .Avril 1886. 13
194 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
A la slation aquicole de Gloucester, on avait bien, il est vrai,
cherché à tourner ces difficultés au moyen des appareils dont
j'ai donné la description (1). De petites hélices, mises en
mouvement dans les bacs d'éclosion au moyen d'une machine
à vapeur, maintenaient les œufs en suspension dans ces ap-
pareils par les contre-courants qu'elles déterminaient. Mais,
outre que ce système avait l'inconvénient de faire périr beau-
coup d'œufs, qui se trouvaient trop violemment agités, il
était dispendieux ; d'abord, à cause de la force motrice dont
il nécessitait l'emploi, et, en second lieu, parce que les appa-
reils, en grande partie métalliques, devaient être nickelés pour
éviter l'action de l'eau de mer qui, sans cette précaution, eût
bientôt complètement détérioré le mécanisme et produit une
oxydation tout à fait funeste aux œufs.
Il restait donc à trouver une méthode véritablement pra-
tique pour faire éclore les œufs flottants, et en particulier les
œufs de Morue.
Le problème vient d'être résolu d'une façon tout à fait sa-
tisfaisante, pendant la dernière campagne, à la station aqui-
cole de Wood's Hole, établie par la Commission des pêcheries
des États-Unis, sur la côte du Massachusetts.
La station de Wood's Hole est un établissement de recher-
ches biologiques, analogue à nos stations de Roscoff et de
Banyuls, où sont étudiées l'anatomie et les mœurs des diffé-
rentes espèces animales aquatiques, mais où l'on s'occupe,
en outre, de la propagation des poissons et des crustacés ma-
rins servant à l'alimentation de l'homme. Ce laboratoire était
tout désigné pour renouveler les tentatives laites à Glou-
cester et essayer de nouveaux procédés. Beaucoup d'appa-
reils furent mis en expérience, mais aucun n'a donné de ré-
sultats comparables à ceux qu'on obtient avec le système
définitivement adopté aujourd'hui, lequel est dû à l'inven-
tion d'un des agents de la Commission des pêcheries, M. le
capitaine H.-C. Chesler. Cet appareil est on ne peut plus
simple, et, comme il ne présente aucune partie métallique,
(1) Loc. cit., p. 511,
''"'l'appareil chester. 195
rien n'est à craindre de l'action de l'eau de mer. Voici en
quoi consiste cet appareil, dont la figure ci-contre donne une
coupe dans le sens de la longueur :
Un bac en bois A mesure 2", 50 de long, 0",70 de large et
80 centimètres de profondeur. A 35 centimètres environ de
chaque extrémité de ce bac se trouve une cloison en bois, qui
s'arrête à 10 centimètres environ du fond. Ces deux cloisons
laissent entre elles un espace libre de l^jSO de longueur, dans
lequel sont placés 6 ou 8 bocaux e à large coi, que des tas-
seaux, non représentés dans la ligure, maintiennent l'ouver-
ture en bas et dans une situation verticale. Ces bocaux sont
de forme cylindrique et d'une contenance de 16 litres. Cha-
cun d'eux présente, au fond, une ouverture circulaire de
2 centimètres à peu près de diamètre, qui a été ménagée
juste au centre. Les bouchons de ces bocaux sont remplacés
par un morceau de canevas solidement tendu et fixé sur le col
à l'aide d'une cordelette. La disposition des tasseaux ou sup-
ports est telle que le fond des bocaux est à peu près de niveau
avec le bord supérieur du bac. Chaque bocal, qui mesure en-
viron 42 centimètres de hauteur et 22 centimètres de dia-
mètre, peut recevoir de 500000 à 1 000000 d'œufs de Morue,
qu'on y introduit, au moyen d'un entonnoir en verre, par
l'orifice circulaire pratiqué dans le fond.
Les œufs, fécondés avec les précautions nécessaires, étant
mis en place, voici comment l'appareil fonctionne : Le bac
19C SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
est rempli d'eau de mer non filtrée par le robinet d. Quand
le niveau de l'eau atteint le point a, le siphon c commence à
fonctionner et, comme son débit est beaucoup plus considé-
rable que celui du robinet, il ne tarde pas à abaisser le ni-
veau de l'eau au point h. Mais aussitôt il cesse d'être amorcé
et ne fonctionne plus. Le robinet, qui continue toujours à
couler, ramène bientôt l'eau à son premier niveau. Alors, de
nouveau, le siphon se met à déverser l'eau et, ainsi de suite,
de dix minutes en dix minutes : c'est le temps que le robinet
met à remplir l'appareil. Or, comme les bocaux ne sont fer-
més, ainsi qu'il a été dit plus haut, que par un simple cane-
vas, les variations de niveau qui se produisent dans le bac
ont lieu également à l'intérieur des bocaux. Ces oscillations
de l'eau, ces mouvements alternatifs de bas en haut et de haut
en bas, agitent suffisamment les œufs pour les maintenir
en suspension, leur fournir l'aération nécessaire, en un mot,
les entretenir en bon état et en assurer l'éclosion. Les pertes
sont insignifiantes et s'élèvent tout au plus à 5 pour 100.
L'appareil fonctionnant automatiquement, la surveillance
se réduit à fort peu de chose, et tout le travail consiste à en-
lever de temps en temps, à l'aide d'un siphon, les dépôts qui
peuvent se former au fond du bac ou sur le canevas qui ferme
les bocaux. Un seul homme suffit aisément pour surveiller
l'incubation de 100 millions d'œufs. Ces œufs montent et des-
cendent alternativement d'environ 42 centimètres, sans se-
cousses, sans chocs nuisibles, et l'évolution embryonnaire
s'y effectue dans les meilleures conditions possibles. L'incu-
bation demande de 41 à 12 jours, dans une eau marquant de
7 à 9 degrés centigrades.
Chaque bocal pouvant, ainsi qu'on l'a vu plus haut, rece-
voir jusqu'à 1 million d'œufs, et chaque bac servant à loger
au besoin huit bocaux, c'est 8 millions d'œufs à la fois qu'un
seul appareil suffit pour faire éclore.
L'appareil, à la fois très simple et très ingénieux, de M. le
capitaine Chester constitue un progrès considérable par rap-
port à tous les autres systèmes précédemment employés pour
l'éclosion des œufs de Morue, et il peut être utilisé même
l'appareil ciiester. 197
pour d'autres espèces, notamment pour les œufs du Tassard
(Ci/bium tnaculatum) (1), poisson très estimé aux États-
Unis, où il est connu sous le nom de Maquereau espagnol
[Spanish mackereï).
La station de Woods's Ilole possède dès maintenant un
outillage complet du système Chester, et la quantité d'œufs
qu'il lui est possible de faire éclore, pendant les trois mois
que dure le frai de la Morue, peut s'élever à près d'un mil-
liard. En présence de ce chiffre, on comprend les services
que peut rendre un semblable établissement.
Dans les conditions naturelles, en effet, les œufs de Morue,
qui flottent à la surface des eaux, sont exposés à toutes sortes
de chances de destruction qu'on évitera par la pratique de
l'incubation artificielle. Souvent entraînés parles vents et les
marées à des distances considérables des baies et des anses
où ils ont été pondus, des quantités prodigieuses de ces œufs
sont rejetées sur le rivage par les vagues et laissées à sec au
moment du reflux. Ainsi exposés cà l'air, ils périssent bientôt,
surtout par les rudes températures des régions septentrio-
nales; à peine hors de l'eau, ils sont atteints par la gelée. A
certains moments, on peut dire, sans exagération, que chaque
vague qui déferle sur le rivage cause la perte de plusieurs
millions d'œufs. Ceux qui échappent à cette cause de destruc-
tion sont, dans l'eau, exposés à la voracité de myriades d'ani-
maux de toute espèce qui hantent les mêmes parages.
Si l'on lient compte de toutes les causes qui contribuent à
la destruction des œufs de Morue, on peut affirmer que, sur
un million de ces œufs, quelques-uns seulement réussissent.
Dans les appareils d'éclosion, au contraire, c'est à peine,
ainsi qu'on l'a vu ci-dessus, si la perte s'élève à 5 pour 100.
Devant un pareil résultat, la conclusion est facile.
(1) La durée de l'incubation des œufs est, chez ce poisson, beaucoup moins
longue que chez la Morue : l'éclosion se produit généralement au bout de vingt-
quatre heures.
ÉDUCATIONS DE BOMBYCIENS SÉRÏCIGÈNES
FAITES A CHAMPROSAY (Seine-et-Oise) EN 1885
Par M. J. FALLOIJ
ATTACUS CEGROPIA
Le 20 mai 1 885, j'ai reçu de la Société nationale d'Acclima-
tation des œufs d'Attacus cecropia.
Les Chenilles sont écloses dans les premiers jours de juin,
je leur offris pour nourriture les végétaux que cette espèce
affectionne ordinairement et avec lesquels je l'ai élevée plu-
sieurs fois avec succès, même à l'état libre. Ces Chenilles ont
refusé de manger, et sont toutes mortes dans leur premier
âge.
J'ai tout lieu de croire que ces œufs devaient être le pro-
duit de parents provenant de plusieurs générations déjà éle-
vées en captivité. Ces faits sont généralement bien connus, et
se présentent chez nos espèces indigènes. J'ai souvent élevé
en captivité des espèces communes de nos Lépidoptères, qui
après la troisième ou quatrième génération ne se reprodui-
sent plus. Quelquefois même avant la troisième génération il
se produit déjà des sujets étiolés impropres à la reproduc-
tion. Je pourrais citer un certain nombre d'espèces dans ce
cas, mais elles sont trop connues pour en donner ici la liste.
ANTHER^A MTLITTA
Le 20 mai 1885, je recevais aussi de la Société d'Acclimata-
tion dix cocons d'A. mylitla.
Un Papillon mâle est éclos le 29 juin de la même année.
Puis une femelle n'est sortie que le 4 août suivant, elle a
vécu six jours et est morte sans se défraîchir. Les autres
cocons n'ont pas donné leurs Papillons. Le 8 décembre, j'ou-
ÉDUCATIONS DE BOMBYCIENS SÉRICIGÈNES. 199
vris le plus léger cocon et constatai que le Papillon était mort
dedans; il m'en reste sept qui par leur poids peuvent me faire
supposer que les Papillons en sortiront l'été prochain, car
ces retards d'éclosions se produisent chez la plupart des Lé-
pidoptères Bombyciens et sur des espèces d'autres genres,
même les plus exiguës.
ACTIAS LUNA
Le 28 août 1885, la Société nationale d'Acclimatation m'a
envoyé une centaine d'œufs de VAdias luna, je regrette que
la majeure partie me soit parvenue écrasée dans l'enveloppe
qui les contenait par les timbres de la poste, et qu'il n'en
reste que trente en bon état.
Vingt-huit Chenilles seulement sont écloses du 4 au iO du
mois de septembre (1), je leur ai offert pour nourriture les
végétaux indiqués par plusieurs auteurs. Ces plantes sont les
Bouleau, Prunier, Cerisier, Noyer, Saule, Orme. Le Noyer
est le seul arbre dont les feuilles ont été aussitôt attaquées
et avec lesquelles j'ai pu continuer à élever les Chenilles.
Leur premier sommeil a eu lieu du 9 au 16 septembre, le
cinquième et dernier aux premiers jours du mois d'octobre;
durant toutes ces phases aucune maladie ne s'est déclarée
non plus qu'aucun décès.
Du 22 au 30 du même mois une dizaine de Chenilles ont
filé leur cocon. Les premières gelées étant venues attaquer
les feuilles de Noyer, les Chenilles refusèrent d'en manger.
Aux premiers jours de novembre le temps devint sombre, la
température plus froide, les Chenilles restèrent engourdies
sur les feuilles, il n'y avait plus que 8 degrés de température
dans la chambre où je les élevais. Je la fis chaufter, et, lorsque
la température s'éleva, mes élèves reprirent de la vigueur ;
de 15 à 18 degrés, elles cherchaient de nouveau cà manger,
mais elles ont persévéré à ne pas vouloir de feuilles gelées,
préférant revenir sur les feuilles desséchées mais non conge-
•; .,1. i.
(I) Je ne donne pas ici la description de cette Chenille, mais l'ayant relevée
à tous les âges, je pourrai l'ajouter à celte note si la Société le juge à propos.
200 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
lées. Du 10 au 19 novembre, après un assez long jeûne, elles
ont essayé à filer, mais leur transformation en chrysalide n'a
pu s'accomplir.
Notre confrère, M. Wailly, dans son intéressant mémoire
sur ses éducations d'Attaciens séricigènes inséré au Bulletin
de la Société d'Acclimatation, n" 8, p. 413, 1885, nous a fait
connaître qu'il a élevé avec succès, en chambre, VActias
luna; mais M. Wailly n'indique pas à quelle température il
les a soumises; il me paraît donc y avoir un certain intérêt à
soumettre à la Société ce que l'expérience de cette année m'a
appris. C'est que la Chenille de VActias luna est très ro-
buste et non coureuse; elle peut être élevée en captivité sans
aucune fermeture, ne cherchant pas à quitter les feuilles du
végétal qui lui sert de nourriture; qu'elle peut être mise aussi
bien en plein air qu'en chambre, pourvu qu'elle soit pla-
cée dans un milieu humide et à une température de 15 à
20 degrés.
ANTHER^A PERNYI
En 1883, dans mon rapport présenté à la Société d'Accli-
matation, à propos d'une éducation d'A. Pernyi, je faisais
remarquer que j'avais placé en pleine forêt, sous un abri en
toile d'un mètre cube, 270 Chenilles, et qu'il m'avait fallu,
pour leur assurer une abondante nourriture, les transporter
sur six cépées nouvelles.
J'émettais alors l'opinion que ce procédé avait été préju-
diciable à la santé des Chenilles, puisque la maladie n'est sur-
venue qu'au moment où elles étaient adultes et par consé-
quent trop agglomérées sur les branches de Chêne, à ce
moment presque dépourvues de feuilles.
Désirant vérifier si l'idée que j'avais émise était valable, je
tentai cette année une nouvelle éducation. Je fis pour cela
une demande d'œufs d'A.Pernyi à un de nos confrères,
M. Le Roy, à Lille, qui s'occupe avec succès de l'éducation
de différentes espèces de vers sauvages séricigènes. Le 24 mai
1885, je reçus de lui vingt-cinq œufs : vingt-deux' vers sont
ÉDUCATIONS DE BOMDYCIENS SÉRICIGÈNES. 201
sortis dans les premiers jours du mois de juin; aussitôt éclos,
je les transportai dans la forêt de Sénart, dans un taillis clos,
endroit que j'avais choisi à l'avance et que M, Ricli, inspec-
teur de la forêt, a bien voulu appi'ouver.
Les Chenilles placées sur une cépée touffue de Chêne,
furent enfermées dans mon abri en toile mesurant, comme je
l'ai déjà fait connaître, un mètre cube. Ces Chenilles ont,
dans ces conditions, sans aucun autre soin, accompli
toutes leurs phases; aucune maladie n'est venue les atteindre;
elles ont toutes filé leurs cocons dans les premiers jours du
mois d'août, et je les ai récoltés au commencement de sep-
tembre. A ce moment la cépée dénudée de ses feuilles offrait
un aspect étrange de dessiccation; il ne restait plus une
seule feuille, les dernières ayant été employées par les Che-
nilles pour la confection de leurs cocons. Car on sait que
plusieurs espèces du ^^enve Antherœa et autres commencent
pour la formation de leurs cocons par rassembler quelques
feuilles, qu'elles lient solidement ensemble; ces feuilles sont
ensuite réunies au cocon : comme la Chenille l'attache tou-
jours de manière à être suspendue verticalemeut à la bran-
che, et non à la feuille qui l'a nourrie, on pourrait admettre
que les feuilles entourant ainsi le cocon doivent leur servir
d'abri et par conséquent préserver les chrysalides jusqu'à
Téclosion des Papillons.
Enfin, le 17 septembre, un seul Papillon mâle est éclos; les
autres cocons vont passer l'hiver dans cet état et les insectes
parfaits n'en sortiront que vers le mois de mai 1886; on
pourrait donc conclure, il me semble, d'après ces nouvelles
expériences :
1° Que la réunion d'un trop grand nombre de sujets ras-
semblés dans un espace trop restreint peut être une des
causes de l'atteinte de certaines maladies ;
2" Que, depuis 1882, nous avons pu observer que l'espèce
qui nous occupe, lors de son introduction sous notre climat,
était bivoltine; que, par suite d'éducations successives en
plein bois, elle est presque devenue univoltine, ce qui peut
faire espérer que désormais VAntherœa Pernyi, s'il n'est
202 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
pas encore complètement acclimaté sous notre climat, le sera
dans peu, si l'on persévère à en faire des éducations en plein
air sur des buissons de Chênes plutôt que sur des branches
coupées.
D'après le volume que j'ai cité plus haut, c'est-à-dire un
mètre cube de Chêne pour vingt Chenilles, il est facile de
calculer ce qu'il faudra pour le nombre que l'on aura à éle-
ver, sans les déranger, ce qui est important pour la réussite
des éducations.
ATTACUS CYNTHiA Drury (Vera G. Mén.)
Depuis quelque temps plusieurs naturalistes amateurs
ont cru remarquer que sous le climat de Paris VAttacus Cyn-
thia était en dégénérescence; que par conséquent il ne pro-
duisait plus de cocons aussi soyeux; que les Papillons étaient
moins grands; que leurs couleurs étaient moins vives que
lors des premiers sujets élevés sous notre climat.
N'ayant pas fait l'éducation de cette espèce depuis 1879,
je priai un de nos collègues, M. Ramé, qui l'avait élevée en
1884-, de me confier quelques œufs de cette espèce. Les Che-
nilles sont écloses les premiers jours du mois de juillet 1885.
J'en plaçai une vingtaine sur un faux Vernis du Japon, Ai-
lanthus glandulosa, haut d'environ cinq mètres. Mais je ne
les vis que peu de jours et elles disparurent sans que je
pusse connaître au juste la cause de leur disparition, mais je
crois pouvoir l'attribuer aux oiseaux, particulièrement aux
Mésanges et aux Becs-fms, qui ont été très nombreux cet été
dans mon jardin grâce aux ruisselets d'eau qui y circulent et
aux bosquets très touffus. Ces oiseaux sont restés cantonnés
tout l'été et certaines espèces ont produit deux couvées, de
sorte que cette année il m'a été impossible d'élever à décou-
vert aucune espèce de Chenilles de Lépidoptères, soit indi-
gènes ou exotiques.
Désirant cependant m'éclairer sur la prétendue dégénéres-
cence de VAttacus Cynthia,]^ pris le parti d'élever les Che-
nilles qui me restaient sur des branches coupées. Je les ins-
ÉDUCATIONS DE BOMBYCIENS SÉRICIGÈNES. 203
lallai en plein air couvertes d'un spacieux grillage. Là elles
ont accompli toutes leurs phases et ont filé de beaux cocons.
Deux Papillons femelles sont éclos du 4 au 6 octobre 1885.
Ces Papillons ne le cèdent en rien aux premiers exemplaires
introduits en Europe vers 1856.
Les Papillons des cocons restants ne devront sortir que
vers le mois de juin 1886. J'espère alors pouvoir consta-
ter sur un plus grand nombre de sujets parfaits s'il y a eu
dégénérescence.
■ Note de la Commission de publication. — Eu voyant les efforts persévérants
et souvent couronnes de succès de ceux de nos collègues qui ont entrepris de
doter notre pays de nouveaux Vers à soie, on est amené à se demander si Ton
ne pourrait pas utiliser pour leur soie les espèces indigènes du grand genre
Attaciis. Elles sont au nombre de trois. L'une est le Grand Paon de nuit [A.
piri Linn.), abondant aux environs de Paris, ne vivant plus dans l'extrême
nord de la France et dont la grosse Chenille mange le Poirier, l'Orme et le
Platane. Son cocon est riche en soie brune, très fortement incrustée, et filé au
mois d'aoijt contre les corniches des murs et dans Therbe ou la mousse au pied
des arbres. On pouvait voir dans la collection publique du Muséum rangée dans
la galerie par Latreille, une paire de gants de soie brune ou plutôt de filoselle
due au cardage de ces cocons. Une seconde espèce, de toute la France, Midi,
Centre et Nord, le seul Altacus qui soit en Angleterre naturellement, est le
Petit Paon de nuit (A. carpini Linn.), dont la Chenille mange le Charme et
l'Aubépine. La soie est plus fine et moins incrustée que celle de l'espèce précé-
dente; mais le cocon est pauvrement garni. Une troisième espèce, aussi à cocon
incrusté, est le Moyen Paon de nuit [A. spini Linn ), qui ne se trouve pas en
France, mais seulement dans quelques parties de l'Allemagne. Ces trois espèces
européennes ont des cocons naturellement ouverts à un bout, où le fil est re-
.plié par la Chenille en entrée de nasse, comme dans le cocon asiatique de l'es-
pèce si bien acclimatée du Ver à soie de l'Ailante, Attacus Cynthia Drury, vera
Guérin-Méneville. Nous n'avons donc pas chez nous d'espèces séricigènes à
cultiver sans soins ni frais ; nous devons donc continuer à travailler dans la
voie si bien suivie par nos collègues MM. X. Wailly et .1. Fallou.
LES ORCHIDÉES DE SERRE FROIDE
Par M. P. ZEILLER
Le sujet de celte note peut paraître au premier abord
un peu étranger à l'objet des travaux de notre Société. Cepen-
dant, comme celle-ci s'attache à vulgariser aussi bien les
plantes d'ornement que les végétaux utiles, il m'a semblé que
l'acclimatation dans nos serres de cette belle famille des Or-
chidées ne devait pas être pour elleime question indifférente.
Le Jardin d'acclimatation en juge bien ainsi, car en hiver et
au printemps sa magnifique serre s'embellit de la floraison
de quelques espèces, les plus répandues, et montre au public
ce qu'elles valent pour la décoration des appartements.
Les Orchidées ne sont plus, comme le répètent à l'envi les
journaux en rendant compte des expositions d'horticulture,
a. l'apanage des princes de la finance ». Cela n'est plus vrai
même des Orchidées de serre chaude, qui demandent cepen-
dant des locaux et des soins assez dispendieux. Mais celles de
serre froide, importées chaque année en quantités considé-
rables d'Asie et des deux Amériques, multipliées en Europe
par la culture, ne demandent ni soins extraordinaires ni lo-
caux spéciaux, et sont tombées à des prix qui les mettent à la
portée de toutes les bourses.
Sans doute ce sera toujours un grand luxe d'avoir une serre
d'Orchidées; mais tout le monde peut, et tout le monde de-
vrait avoir des Orchidées dans sa serre, ce qui n'est pas la
même chose. La plus modeste serre, destinée à rentrer les
Géraniums, les Fuchsias, les Bégonias qui ornent nos jardins
en été, peut donner l'hospitalité à nombre d'espèces d'Orchi-
dées, aussi variées que belles. En Belgique, en Angleterre, il
n'y a pas une serre sans quelques Orchidées; les Anglais en
ont jusque dans leurs serres à Vigne. En France, jusqu'à pré-
sent, on a bien peu mis à profit cette nouvelle ressource pour
parer nos serres, ressource d'autant plus précieuse que les
ORCHIDÉES DE SERRE FROIDE. 205
paniers ou les terrines suspendues où on cultive ces filles de
l'air n'enlèvent presque pas déplace aux anciennes habitantes.
On ignore aussi que cette singulière famille, qui déroge en
apparence à toutes les lois de la végétation, y déroge surtout
par l'étonnante durée de ses fleurs ; les espèces dont la fleur
ne dure qu'un mois ont une floraison relativement courte; la
moyenne est de six semaines à deux mois; VEpiclendrum vi-
tellinum garde ses fleurs fraîches pendant trois mois ; j'ai eu
des fleurs de Lycaste Skinneri ouvertes le 5 janvier et fanées
seulement le 25 avril, après 110 jours de durée; celles des
Cypripedmm longifolium, Rœzli, Sedani, etc., durent 120,
150 et jusqu'à 190 jours.
Certaines espèces fleurissent plusieurs fois dans l'année, et
la fanaison des fleurs est le signal du développement de
fleurs nouvelles; ainsi du Maxillaria grandiflora, qui a em-
baumé ma serre pendant cinq mois du parfum de ses admi-
rables fleurs blanches; ainsi du Lycaste Skinneri, qui m'a
donné cette année trois floraisons successives, de deux à trois
mois chacune; ainsi de VOdotiloglossum Rossi majus, qui
est resté en fleurs chez moi 260 jours dans un an.
J'ajoute que les Orchidées fleuries ne souffrent aucunement
de passer dans un salon tout le temps de leur floraison. Il
m'arrive souvent d'y conserver pendant deux mois la même
plante en fleurs, au point de faire croire à certaines personnes
que je me livre à la culture des plantes en papier. Elles de-
viennent, à ce titre, les plus brillantes de nos plantes d'ap-
partement, et rien n'égale, comme milieu de table, une cor-
beille d'Orchidées fleuries.
Enfin, les différentes espèces de cette famille fleurissent à
des saisons différentes; avec un petit nombre d'espèces choi-
sies convenablement, on aura des fleurs toute l'année, et
spécialement tout l'hiver : en novembre, décembre et janvier,
le Cypripedium insigne, le Lycaste Skinneri, le Sophronitis
grandiflora^ le Dendrobium nobile, les Masdevallia Tova-
rensis et triangularis ; en février, mars et avril, le Cœlogine
cristata, VAda aurantiaca, le Dendrobium japonicum, les
Masdevallia Estradœ ei Lindeni , le Cattleya citrina; en mai,
206 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
juin et juillet, les Cypri'pedium harbatum et villosum, les
Odontoglossum Alexandrie et Pescatorei, les Masdevallia
amabilis et Veitchiana, VOncidium cucullatum, VEpiden-
drum vitellinum ; en août, septembre et octobre, les Maxil-
laria grandiflora, les Oncidium crispum et concolor, les
Stanhopea^ V Odontoglossum grande, le Lœlia anceps, etc.
Qu'on lise à ce sujet le beau livre de M. le comte de Puydt :
les Orchidées, histoire iconographique (1); il est admira-
rablement fait pour donner une idée générale des Orchidées
et en propager le goût, et ses magnifiques illustrations per-
mettent au lecteur de faire déjà un choix dans les genres
qu'il veut cultiver.
Mais il existe un autre ouvrage, plus modeste d'apparence,
qui est indispensable à qui veut commencer à cultiver cette
famille : c'est le Traité théorique et pratique de la culture
des Orchidées, par M. le comte Fr. du Buysson (2); il donne
la description détaillée de plus de mille espèces d'Orchidées
exotiques, le mode de culture, le compost, la température
qui conviennent à chacun. C'est le guide le plus complet et le
plus précieux; avec lui, aucune diflîculté, aucune incertitude
n'est possible.
Dans ce nombre de mille espèces environ qui sont aujour-
d'hui au commerce, il y en a près de deux cents pour la serre
froide, appartenant à trente-trois genres différents :
2 Acineta,
3 ou 4 Dendrobiura,
1 Acropera,
1 Disa,
1 Ada,
5 ou 6 Epidendrum,
1 /Erides,
1 Helcia,
i Angrœcum,
8 Lselia,
i Anguloa,
8 Lycaste (tout le genre),
3 Arpophylluiïi,
36 Masdevallia (tout le genre),
1 CaUleya,
6 Maxillaria (id.)
2 Cœlogine,
2 iMesospinidium (id.)
4 Cymbidium,
1 Miltonia,
10 Cypripediuin,
1 Nanodes,
(1) Chez Rothschild, rue des Saints-Pères, 13, Paris. Prix : 35 francs.
(2) Librairie centrale d'agriculture, rue desËcoles, 62, Paris. Prix: G francs.
ORCHIDÉES DE SERRE FROIDE. 207
-40 à 450(Jonloglossum (tout
le genre),
20 Oiicidium,
2 Pilumna,
1 Pleione,
3 Restrepia,
i Sobralia,
2 Sophronitis,
i k 5 Stanhopea,
2 Thuiiia,
i Trichopilia,
2 Zygopetalum.
Un bon nombre de ces espèces se vendent de 5 à 6 fi-ancs ;
toutes les autres, 8, 40, 12, ou rarement 15 francs; ce sont
donc, comme je l'ai dit, des plantes à bon marché. A cet égard,
du reste, le plus simple est de renvoyer les amateurs aux ca-
talogues des grandes maisons qui cultivent les Orchidées,
MM. Thibaut et Kéleleer, à Sceaux; Godefroy-Lebeuf, à Ar-
genteuil; Van Houtte, Aug. Van Geert et la Compagnie conti-
nentale d'horticulture, à Gand.
La seule difficulté, pour celui qui veut commencer cette
culture, réside dans le choix des espèces; toutes ne sont pas
également belles, également faciles; toutes ne sont pas régu-
lières dans leur floraison. Celles que l'expérience m'a fait
regarder comme les meilleures à ces divers égards sont en
première ligne (pour n'en nommer que dix) :
*Le Ly caste Skinneri,
le Maxillaria grandi (lora,
les Cypripedium barbatum, insigne et villosum,
le Cœlogine cristata,
les Odoîitoglossum Alexandrœ et Rossi majus,
les Masdevallia Tovarensis et amabilis.
Tous les horticulteurs se font d'ailleurs un devoir d'indi-
quer eux-mêmes quelles sont les espèces qui conviennent le
mieux au genre de serre et à la température dont on dispose.
Je m'estimerais heureux si la lecture de celte note enga-
geait quelques-uns de nos confrères à essayer cette culture,
aussi intéressante qu'originale, aussi brillante que peu ré-
pandue. Les plantes sont plus reconnaissantes que les hom-
mes, et les Orchidées, entre toutes, récompensent bien large-
ment des quelques soins dont elles sont l'objet.
OBSERVATIONS
SUR LES ORCHIDÉES DE SERRE. FROIDE
ParUm. GODEFROT-LEBEUF, A.-GEOFFROY SAl!VT-HILi\IRE
et DU1.4L,
(Extrait du Compte rendu stéuographique.)
M. Godefroy-Leheuf : Dès que j'ai su que M. Zeiller devait
taire une communication à la Société d'Acclimatation, j'ai
demandé qu'on m'autorisât, ainsi que MM. Truffant etDuval,
à mettre sous les yeux de mes collègues un certain nombre de
plantes cultivées en serre froide. M. Truffaut, retenu par ses
affaires, n'a pu répondre k l'appel.
Les plantes que nous avons l'honneur de présenter peuvent
toutes être cultivées en serre froide. En matière d'Orchidées,
nous appelons serre froide une serre dans laquelle la chaleur
peut descendre en hiver jusqu'à + 3 et même + 2 degrés.
C'est un préjugé de croire que toutes les Orchidées demandent
de la chaleur. La plupart de nos Orchidées de serre froide
souffrent, au contraire, de l'aridité et de la température de
nos étés. La température normale oscille entre 4- et 18 degrés
au maximum. L'hiver, il est très facile de maintenir 18 de-
grés ; en revanche, il est fort difficile, quand la température
extérieure pendant l'été atteint 25 degrés, de maintenir une
température ne dépassant pas 18 degrés. Aussi atténuons-
nous les dangers de la surélévation de température en mouil-
lant les sentiers, en ombrant, en fermant les ouvertures, etc.
Dans les Orchidées froides, il y a deux sections distinctes.
Celles qui proviennent des régions sèches, celles des plateaux
du Mexique par exemple, celles qui habitent les régions hu-
mides, les Orchidées alpines de l'Amérique Centrale et du
Sud. Autant les premiers supportent facilement nos étés ar-
dents, autant celles des régions montagneuses en souffrent.
Si les Orchidées se répandent lentement en France, ce n'est
ORCEIIDÉES DE SERRE FROIDE. 209
pas parce que nous ne savons pas les cultiver, mais parce
que nous nous faisons une idée fausse des soins qu'elles ré-
clament. Le jour où on sera convaincu que les Orchidées sont
aussi faciles à cultiver que les Géraniums, leur procès sera
gagné.
L'importation des Orchidées, qui oblige une seule maison
anglaise à avoir dix-huit collecteurs, entraîne un mouvement
commercial considérable. La Société d'Acclimatation doit
encourager ce genre de commerce, parce que l'importation
des plantes d'agrément est une source de renseignements qui
conduiront à l'importation de plantes ou d'animaux d'un in-
térêt plus pratique. Il est fort probable que le superbe Faisan
de Rheinhard sera introduit par un des collecteurs d'Orchi-
dées qui actuellement se préparent à. explorer les chaînes du
Tonkin et de l'Annam.
Les Orchidées fleurissent à toutes les époques de l'année;
toutefois le moment le plus favorable pour la floraison des
Orchidées froides s'étend de février à juin. Nous avons fait de
notre mieux pour présenter quelques plantes en fleurs, quoi-
que l'époque actuelle puisse être considérée comme la plus
pauvre en fleurs d'Orchidées.
Dans leurs pays d'origine, elles croissentsur les arbres, sur
les rochers, dans les parties généralement aérées et exposées
en pleine lumière. L'indifférent peut parcourir des forêts
qui contiennent des quantités énormes d'Orchidées sans en
voir une seule. Elles se sont placées au sommet des arbres, là
où le soleil les éclaire et où elles hument l'humidité et l'air
sain qui leur sont indispensables. C'est ainsi que, pour im-
porter VOdontoglossum Aleœandrœ, on a été obligé de cou-
per des milliers d'arbres, perte peu sérieuse dans des pays
où les moyens de transport pour l'exploitation des bois font
absolument défaut.
Si les plantes alpines, et j'entends parce terme les plantes
de la Colombie, de l'Equateur, toutes les espèces des Andes
demandent de l'air, de l'humidité et une chaleur modérée,
la cultuie des plantes des plateaux mexicains, qui générale-
ment poussent en plein soleil, sur les arbres ou les roches ex-
4* SÉRIE, T. m.— Avril 1886. 14
210 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
posés à une chaleur sèche pendant plusieurs mois, est mal
comprise. Elles réclamenl de l'air, de la lumière et du soleil.
Ce sont les plantes par excellence à acclimater dans la région
méditerranéenne. Elles ne craindront pas la chaleur de nos
étés, et leurs bulhes bien aoûtées leur permettront de fleurir
abondanunent pendant l'hiver et de résister à la température
de la région de l'Oranger.
Notre intention n'est pas de dire, pendant les moments
que vous avez bien voulu nous accorder, quels sont les soins
que ces plantes réclament ; nous avons simplement désiré
monlrer à nos collègues les plantes les plus faciles à cultiver,
celles précisément qui, par suite de la multiplicité des impor-
tations, sont devenues aussi abordables à l'amateur que les
variétés nouvelles de Coleus et de Géraniums. Contrairement
à ces genres de plantes, plus une Orchidée vieillit, plus elle
augmente de valeur.
Nous restons à la disposition de tous nos confrères pour
les renseigner sur les soins que chaque espèce réclame, et
nous serons heureux de les guider aussi bien dans la culture
de ces plantes que dans les introductions que leurs rapports
avec les pays d'origine leur permettraient de tenter.
Liste des plantes présentées en fleurs par MM. Godel'roy-
Lebeuf et Duval :
Brassavola caudata, Brésil.
Ctelogyne cristata, Ncpaul.
Colax jiigosus, Brésil.
Cijnibidium ehurneum, As.saiii.
Cypripediutn Boxalli, Birmanie.
— insigne, Nepaul.
— Chantim, Nepaiil.
Houllelia Brocklelmrstiana, Brésil.
Lœlia autumnalis, Mexique.
— albida, Mexiijue.
— cmceps, Mexique.
— Daijanà, Brésil.
Lijcasle Skinneri, Guatemala.
Masdevallia Davisi, Equateur.
— Hanyana, Colombie.
Masdevallia ignea, Colombie.
— Tovarensis, Venezuela.
— Veitclii, Pérou. I
Maltaria Cloivesl, Brésil.
Odontoglossum Alexandrœ, Colombie.
— Bicloniense, Mexi((ue.
— cordiitum, Mexi(iue.
— gloriosum, Colombie.
— grande, Guatemala.
— Insleaiii, Mexique.
— Pescatorei, Colombie.
— Rossi, Mexique.
Oncidium onnthorhijnchum, Mexique.
— Bogersi, Brésil.
Zygopetaluin Mackayi, Brésil.
ORCHIDKES DE SERRE FROIDE. 211
M. A. -Geoffroy Sainl-Hilaire : M. Godefroy-Lebeuf a fait
ressortir avec beaucoup de vérité les services que rend à la
géographie, en général, et à l'histoire naturelle, en particu-
lier, le collecteur d'Orchidées. M. Zeiller, dans sa note, vous a
montré très clairement le concours que les Orchidées peuvent
donner à la décoration des serres, et, même à la décoration
des appartements, en vous démontrant, par des chiffres abso-
lument précis, la durée étonnante de ces tleurs,et, par con-
séquent, l'agrément qu'elles peuvent donner à nos demeures.
Il y a un autre point de vue, qui me paraît n'avoir pas été
indiqué, à l'occasion de cette très intéressante présentation,
et que je vous demande la permission de vous signaler. De-
puis vingt ans, ou, pour parler d'une façon plus précise, de-
puis douze ans, il s'est produit dans le Midi de la France un
mouvement très important au point de vue de l'horticulture :
on a introduit, dans les jardins du littoral méditerranéen,
toute une flore exotique, si bien que, dans beaucoup de pro-
priétés de Cannes, de Nice, d'Hyères, aujourd'hui la flore na-
turelle, ou plutôt la flore normale actuelle de nos jardins, qui
est, pour la plus grande partie, une flore acclimatée, a abso-
lument disparu pour faire place à une flore exotique, et en
particulier à la flore australienne.
Pour cultiver ces plantes de l'Australie, ces Palmiers, ces
végétaux divers, qui font aujourd'hui l'ornement des parcs
et des jardins de la Provence de la région de l'Oranger, pour
un certain nombre d'entre elles au moins, des précautions sont
nécessaires. Ainsi dans la villa Vigier, célèbre par les spé-
cimens remarquables qu'elle contient, on a ménagé des abris
sous des Eucalypius, sous des Oliviers, pour pouvoir ajouter
aux plantes cultivées en plein air, à tous vents, des espèces
plus délicates. Ainsi les Fougères de l'Amérique du Sud, les
Fougères de l'Australie, sont venues chercher la protection
des feuillages qui les préservent du rayonnement nocturne et
des vents violents. Peu à peu, les Orchidées viendront, à
leur tour, ajouter à la décoration de ces jardins nouveaux;
elles apporteront le concours de leur floraison à ces sites
que l'art a su rendre absolument agréables.
212 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
AI. Godefi'oy-Lebeuf VOUS disait tout à l'heure que les Or-
chidées supportent un abaissement de température de 2, S de-
grés au-dessus de zéro. Les Orchidées employées dans l'ave-
nir pour la décoration de ces abris, de ces fougeraies, étant
faciles à transporter, pourraient être rentrées si l'on prévoyait
des froids un peu rigoureux. D'ailleurs ces froids durent
bien rarement plus de deux ou trois jours. Dans ces régions
favorisées, nous avons des abris de Cannes et de Bambous,
sous lesquels nous cultivons un certain nombre de plantes
qui seraient trop délicates pour être exposées sans protection
aux ardeurs du grand soleil, à la violence des grands vents
et à l'action des petites gelées de ces pays. Ainsi, dans notre
jardin d'IIyères, nous avons des abris qui couvrent environ
20000 mètres, et sous lesquels nous cultivons un certain
nombre d'espèces qui ne pourraient vivre tout à fait en plein
air.
Sous ces abris, sous ces claies protectrices, les Orchidées,
et surtout les Orchidées sèches, celles qui ont besoin de peu
d'humidité, celles du Mexique par conséquent, rendront les
plus grands services, elles apporteront un élément de déco-
ration utile, sinon un élément commercial important. La
communication de M. Zeiller me paraît donc très intéres-
sante, d'abord par les faits qu'elle vous signale et ensuite par
l'attention qu'elle fixera, j'espère, sur l'utilisation qu'on peut
faire des Orchidées pour la décoration de nos jardins du
Midi.
M. Duval : M. Geoffroy Saint-Hilaire a dit quelques mots
sur les Orchidées de serre froide et surtout sur leur emploi
dans le Midi. Si j'ai demandé à prendre la parole, c'est paice
que la plupart des plantes que je présente ici ont été culti-
vées dehors l'été dernier. Un proverbe dit : Aux innocents les
mains pleines. Je crois que c'est vrai en ce qui me concerne.
Voilà trois à quatre ans à peine que je cultive les Orchidées.
J"ai l'ait pour elles ce que certains cultivateurs ont fait à Paris
pour d'autres plantes; lorsque les Anglais ont introduit
WAnUiurium Scherzerianum, celui-ci a été longtemps en An-
gleterre uno plante aristocralique comme les Orchidées, et
ORCIIIDÉKS DE SERRE FROIDE. 213
n'était abordable que pour les bourses bien garnies. Quand
cette plante a passé sur le continent, les horticulteurs fran-
çais, nous devons le dire à leur louange, comme les Truffant,
les Thibaut et bien d'autres, l'ont popularisée, et ils en ont
fait ce qu'elle est devenue : une plante de premier ordre au
point de vue commercial. Depuis, les cultivateurs de Paris
qui s'occupent des fleurs coupées, et, entre autres, le plus
célèbre, M. Ragonot, se sont mis à faire de VAnlhurium pour
la fleur coupée pour les bouquets et corbeilles. Intelligem-
ment comprise, sa culture s'est développée dans des propor-
tions considérables. Eh bien, il en sera de même pour les
Orchidées. Nous ne sommes absolument que des cultivateurs;
nous travaillons dans un but tout à fait commercial, nous
sommes un peu les maraîchers de l'horticulture, nous fai-
sons des plantes pour les halles ou le marché parce qu'elles
rapportent de l'argent, et nous tachons de le faire dans les
meilleures conditions de prix possible pour les populariser
et en vendre beaucoup; il faut donc absolument, quand une
plante nous arrive dans les mains, il faut que cela marche,
car, si ça ne marche pas, nous l'envoyons promener (Rires).
Eh bien, voilà con^ment nous avons jusqu'à ce jour entendu
la culture des Orchidées... je dis : nous, parce qu'il n'y a pas
que moi; en somme, je ne puis pas revendiquer seul le droit
de cultiver les Orchidées. Depuis que nous cultivons ces jolies
plantes dans les environs de Paris, depuis que nous nous
sommes emparés des Orchidées, nous arrivons à faire ce que
vous voyez, des plantes comme les Odontofjlossum Alexandrœ
que je vous apporte là. J'en ai une trentaine en fleurs, et
M. Bergman, le grand jardinier en chef du château de Fer-
rières, ayant visité nos cultures dernièrement, s'est trouvé
tout à fait étonné devant notre serre les portes toutes grandes
ouvertes; il y avait, dans la serre, 3 ou 4 degrés au-dessus
de zéro. Voilà trois semaines que cela dure comme cela ; la
porte a toujours été ouverte toute grande. Ces Oihnloylossum
Alexandrœ ont donc fleuri, à peu de chose près, dans une
atmosphère aussi froide que celle du dehors; les fleurs n'ont
rien eu à souffrir de cela, et, au contraire, je crois qu'elles
214 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
n'en sont que plus belles. Eh bien, en plus (me basant sur
quelques renseignements qui m'avaient été donnés), l'année
passée, beaucoup de ces plantes ont été mises dehors, notam-
ment une cinquantaine à'Àlexcuidrœ, une grande quantité de
Cattlei/as, une grande quantité de plantes mexicaines. J'ai
fait l'aire chez moi un immense abri sous lequel nous culti-
vons les Fougères, les Fougères du Brésil, entre autres les
Cibotium, les Alsophilla, les Dichsotiia, etc. 11 y a longtemps
que nous faisons cette culture, qui nous a très bien réussi ; et
c'est sous cet abri que nous avons mis nos Orchidées de serre
froide et de serre chaude. Celles-ci ont très bien poussé et se
sont très bien comportées; j'ai envoyé à M. Godefroy-Lebeul
une liste de plantes qui ont fleuri dehors, ce qui est beaucoup
plus joli comme résultat. Nous avons eu, sous l'abri, des
Odonloglossum Alexandrœ, des Caltleyas Mossiœ, des Cal-
tleyas crispa, Gaskeliana Doiveana (c'est une plante assez
rare), et une masse d'autres.
Donc j'appuierai très fortement ce qu'a dit M. Geoffroy, je
suis sûr que dans le Midi les Orchidées réussiront très bien.
La seule chose peut-être à laquelle il faudrait faire bien at-
tention, c'est quand le vent soufflera du côté du beau pays
qu'on appelle l'Algérie; il ne faudrait pas trop leur laisser
supporter ce vent-là, surtout pour les plantes de la Colombie,
qui sont des plantes de montagne; on aura plus à les garantir
contre cela que contre l'abaissement de la température, car il
nous est arrivé que, le 16 août, à Versailles, le thermomètre
a été fort bas, presque à zéro, chose qui ne s'est peut-être
jamais vue, mais c'est un fait absolument vrai; mon chet
de culture m'écrivait (j'élais à ce moment à Lyon) qu'on
avait ramassé, le malin, un peu de givre sur les paillassons...
Eh bien, toutes les Orchidées de serre froide étaient encore
dehors et je tremblais très fort de les trouver anéanties ou
très fatiguées; il n'en a rien été; les plantes étaient en très
bon état, l'abaissement s'était fait moins sentir, il est vrai,
sous l'abri qu'en plein jardin, mais enfin les plantes n'ont
rien eu. J'ai eu le plaisir, il y a quatre jours, d'avoir la visite
d'un Anglais, d'un des plus grands cultivateurs d'Orchidées,
ORCHIDÉES DE SERRE FROIDE. 415
avec son chef de culture, M. Sanders. qui m'a dit, à propos
de nos Masdevallia, qu'il n'en avait jamais vu sur le conti-
nent d'aussi beaux que les nôtres. « Comment laites-vous, avec
votre climat, pour avoir des plantes comme cela? — Elles ont
été dehors tout l'été, cette année, et on les a absolument
noyées d'eau; on les bassinait avec les Fougères, comme on
le fait avec les plantes très communes, et on les a soustraites
au hàle et aux vents, et cela a très bien réussi. » La grosse
affaire, comme dit M. Godefroy-Lebeuf, c'est d'empêcher que
la sécheresse de l'air, que l'aridité de l'atmosphère ne nuise à
ces petites plantes, qui, pour la i)Uipart, sont originaires des
prairies et demandent sûrement à être dans une buée conti-
nuelle. Je suis bien persuadé que, d'ici à quelques années, si
nous pouvons avoir la chance de ne pas être tributaires des
Anglais pour ces plantes, de les faire venir direclement des
pays, d'être, en un mot, des importateurs, et alors, consé-
quence forcée, de ne pas les faire payer trop cher, non seule-
ment nous aiderons à la popularisation de ces adorables
plantes, mais nous aurons développé le goût de leur culture,
et nous aurons victorieusement détruit la légende qui con-
sistait cà croire que les Orchidées sont difficiles à cultiver,
d'autant plus que nous n'avons pas pour habitude de cacher
nos procédés, et qu'il est toujours très facile de trouver chez
nous autres, maraîchers de l'horticulture, comme je l'ai dit
en commençant, de trouver toujours, dis-je, les renseigne-
ments qu'on voudra bien nous demander; nous ne cachons
rien et nous ne faisons pas de la culture à portes fermées;
nous ne demandons pas mieux que de les ouvrir toutes gran-
des à tous les amis des plantes, amateurs ou horticulteurs,
pour la plus grande gloire des plantes et de l'horticulture
française.
II. EXTRAITS DES PROCÈSUERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ-
SÉANCE GENERALE DU 5 MARS 1886.
Présidence de M. Saint-Yves Méxard, Trésorier.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
— M. le Président proclame les noms des membres nouvellement
admis par le Conseil, savoir :
MM. PRÉSENTATEURS.
r> /i m • j \ oc 1 p (Comte d'Eprémesnil.
Belbeuf (le Marquis de), 35, rue Jean-Gou- \ , ^ /v. o • ..-. •
, \ • A.GeoftroySaint-Hilaire.
ion, a Pans. / ,, ■ i c- ■.
•' [ Marquis de Sinely.
_.,„., ^ , , „ , . A, Bertboule.
Bernay (Emile Henri , Consul de France a \ . ^ ^ . , . , „., .
rr • \i, N . oo j r. 'ni A. Geoffroy Saint-Hilaire,
Tauris(Perse), et 83, ruede Pasfv, a Pans. / ,, . j „. ,,
^ ' -^ lAIarquis de Sinety.
Laurent (Marcel), propriétaire, 12, rue Fran- ( A. Geoffroy Saint-Ililaire.
çois I", à Paris, et au château delà Ferlé- < Marquis de Sinéty.
Vidame (Eure-et-Loir). ( de Vatimesnil.
Mayen (Alfred), directeur de la Compagnie f Douât.
d'assurance « La Prévoyance », 23, rue de ] A.Geoffroy Saint-Hilaire.
Londres, à Paris. ( Saint-Yves Ménard.
Rogier (René), banquier, 69, rue Bannies, à \
Orléans (Loiret). )
A. Bertboule.
A.Geoffroy Saint-Hilaire.
Saint-Yves Ménard.
r. /n ' m ■ M- N • ', • , E. Caiolv.
Roman (René Maximilien), propriétaire, au \ ,
1 «, J r" /v \ ■ A. ijertiioule..
château de Gur^s^ (Yonne). / ,, • , o- ..
^° ^ ' [ Marquis de Sinéty.
— M. le Président annonce que, sur l'initiative de la Société centrale
de médecine vétérinaire, une souscription publique vient d'être ouverte
pour élever un monument à la mémoire de M. Henri Bouley, notre re-
gretté Président, et il donne lecture de la circulaire suivante, qui a été
adressée à cette occasion au Conseil :
« Paris, le 10 janvier 1886.
» Monsieur,
» A la nouvelle de la mort de M. Henri Boulev, la .Société de méde-
cine vétérinaire de la Gironde, a la première émis « le vœu qu'un mo-
» nument fût élevé à sa mémoire par l'initiative de la Société centrale,
» comme expression des sentiments de reconnaissance et de respec-
» tueuse vénération que tous les vétérinaires de France seront heureux
PROCÈS-VERBAUX. 217
» de manifester en aveur du grand Maître qui honora si dignement,
î toute sa vie, la profession de vétérinaire ».
» Le jour même des funérailles, le Président de notre Société rece-
vait l'avis de ce vœu, qui était d'ailleurs dans le cœur et dans l'esprit
de tous nos collègues, et, dès sa première réunion, la Société centrale
a été unanime pour nommer une Commission chargée de l'exécution.
0 (]etle Commission a décidé :
» i" Que par ses soins un monument serait élevé à la mémoire de
M. Bouley;
» 2» Que ce monument serait placé à l'École d'Alfort, où s'est écoulée
la plus grande partie de sa vie scientifique et professionnelle;
» 3° Qu'il serait fait apt»el, par voie de souscription, à tous les Vété
rinaires de France et de l'Étranger, au corps médical, à toutes les Com-
pagnies savantes auxquelles M. Boulev a appartenu, à tous les amis
de la science et à tous les amis particuliers, si nombreux, du savant à
jamais regretté, pour participer à cette souscription, à laquelle la So-
ciété de la Gironde s'était déjà inscrite pour une somme de deux cents
francs.
3) En conséquence, nous venons vous informer que la souscription
est ouverte à la librairie Asselin et Houzeau, place de l'Êcole-de-
Médecine, à Paris, éditeurs du Recueil de Médecine vétérinaire, dont
M. Bouley a été pendant cinquante ans le rédacteur en chef, en vous
priant de vouloir bien y prendre part.
» Cette souscription sera close après un,'délai de trois mois.
» Veuillez agréer l'assurance de nos sentiments les plus distingués.
les membres de la commission executive :
MM. GouBAUX (Arm.), Directeur de l'École Vétérinaire d'Alfort,
Président.
Cagny (Paul), Membre de la Société centrale de Médecine
vétérinaire.
Leblanc (C), id.
Mathieu (E.), id.
Prévost (Cli.), id.
Sanson (André), id.
Signol, id.
Webeb , id.
W Meubiot.
Léon IlouzEAU.
» Le Conseil, saisi de cette communication, ajoute M. le Président, a
inscrit la Société d'Acclimalation, sur la liste des souscripteurs, pour la
218 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
somme de 200 francs; puis il a décidé qu'eu dehors de celle manifesla-
lion, aucune souscription ne serait organisée dans le sein de la Société
d'Âcclimat;Uion ; mais il a exprimé le vœu que tous les membres fus-
sent mis au courant de celte situation, et que chacun pût, s'il lui con-
venait, prendre part individuel! enienl à la souscription. »
— M. Jules de Guerne adresse des remerciements au sujet de sa ré-
cente admission dans la Société.
— M. E. Joly accuse réception et remercie de l'envoi qui lui a été fait
d'une hase et d'un mâle de T.apin argenté.
— M. Pays-Mellier écrit de la Pataudière : « Dans une noie publiée
dans le Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation de novembre ,
dernier, M. E. Delloye, de Hauchis (Belgique), annonce que son cheptel
de Cerfs nains de Chine a réalisé les espérances dont il faisait part en
février dernier et qu'un rejeton vif et gai était né.
» Notre honorable confrère ajoute : « Ce petit animal semble très rus-
» tique et d'un élevage facile, pourvu que la mise bas se fasse à des
» époques où la température est assez douce ; c'est ainsi que j'attribue
» la mort des deux autres jeunes obtenus précédemment à la rigueur
s de la température, au moment de leur naissance.
5 Je ne doute pas que ces petits Cervidés ne se reproduiront avec
» grande facilité dans nos forêts, dès que, par des reproductions succès-
» sives, les époques du rut et de la mise bas seront en concordance avec
» nos saisons.
» Celle espèce semble très prolifique, car la femelle reçoit les avan-
» ces du mâle aussitôt la mise bas et à toute époque de l'année. C'est
» ainsi que, cette fois, le mâle a poussé les cris qui caractérisent l'épo-
» que du rut peu de jours après la naissance et qu'il poursuivait déjà la
» femelle de ses assiduités.
» Il est difficile de préciser, d'après mes dernières observations,
» l'époque et la durée de la gestation ; en tout cas celle-ci ne paraît pas
» dépasser six mois. »
j A cela je réponds que le Cerf nain de Chine {Cervulus Reevesii)
est d'une rusticité à toute épreuve ; que la mort des deux jeunes obte-
nus par M. Delloye ne doit pas être attribuée à la rigueur de la tempé-
rature, au moment de leur naissance, parce qu'ici, à la Pataudière, j'ai.eu
des naissances en plein hiver, par les plus grands froids, et que nous
trouvions les jeunes, nés dans la nuit, quelquefois dans la neige, se
promenant gaillardement et suivant la mère dès le matin.
» Le mâle, en efi^et, poursuit la femelle de ses assiduités, aussitôt la
mise bas, et la durée de la gestation est de six mois. Ainsi on a tou-
jours deux mises bas par an régulièrement, mais d'ua jeune seulement
à chaque fois.
» On peut laisser ensemble plusieui's mâles de ces jolis petits ani-
maux, car, bien que polygames, ils ne se querellent point contrairement
PROCÈS-VERBAUX. 219
aux autres espèces de Cerfs, qui, aux époques du rut, deviennent furieux
et terribles et qui se tuent bien souvent entre eux.
» J'ai un petit troupeau de Cerfs nains de Reeves dans un tout petit
enclos et les mâles, plus nombreux que les femelles, vivent tous en-
seml)le, sans jamais être séparés de ces dernières.
» Malheureusement, les Biches de cette espèce produisent ici tou-
jours plus de mâles que de femelles.
» CeKe charmante espèce si prolifique sera donc assurément une
bien précieuse acquisition pour nos forêts, si l'on peut (ce que j'espère)
la faire assez connaître, assez apprécier surtout, et la répandre de
façon à enrayer cette routine et cette incréilulilé qui en France, plus
que partout ailleurs, empêchent tout essai en acclimatation et tout
progrès. »
— M. le capitaine Mengin rend compte de la perte du mâle de son
cheptel de Colombes poignardées.
— 31. Audap adresse un compte rendu de ses éducations de Canard
Pilet. (Voy. au Bulletin.)
— M. iMichaux, professeur de pisciculture à l'école pratique d'agri-
culture des Merchines, par Vaubecourt (Meuse), veut bien promettre
son concours à la Société en vue de la propagation de l'industrie aqui-
cole : « Depuis trois ans, écrit M. Michaux, l'enseignement de la pisci-
culture est entré dans le programme des études à l'École d'agriculture
des Merchines, et chaque année 6 à 70J0 œufs sont mis en incubation
dans le laboratoire annexé à l'École; les uns sont fécondés par les
élèves et leur professeur, les autres, achetés tout embryonnés.
s L'espèce traitée pendant la saison d'hiver est la Truite, et le produit
des opérations est lancé dans les cours d'eau où ce poisson est déj.à
répandu. »
— M. Plouin écrit d'Hécourt (Eure) : « Mes essais de pisciculture, en
1884 et 1885, ont assez bien réussi, malgré de nombreuses difficultés.
Cette année me donne plus de satisfaction. Nous avons eu en janvier
une nuit à 10 degrés au-dessous de zéro et, grâce au local, sans chauf-
fage, je suis resté à 5 degrés et toujours à 3 degrés pour l'eau. C'est une
grande préoccupation de moins, une difficulté vaincue.
» Je ne puis me procurer l'eau qu'en l'élevant, mais c'est un détail. Je
n'ose pas espérer créer une chute; cependant c'est possible, (juestion de
temps et d'argent. J'ai mis sur les claies 1^2 000 œufs; "20U0 ont été
mauvais. Ce qui me reste est en très bon état. J'ai un tiers d'éclos, les
deux autres tiers, retardés par une fécondation plus récente et par la
température de l'eau, écloront plus tard, soit d'ici vingt ou vingt-cin(|
jours.
î Je pourrai, de celte façon, gagner le temps chaud, ce qui me per-
mettra d'avoir les petits insectes d'eau dont les alevins sont très
friands. Je compte bien n'en perdre que très peu, de 5 à 10 pour 100.
220 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
» Noire rivière (la Dure) est très bonne pour la Truite. J'en ai vu de
toutes grosseurs, mais alors la pêche appartenait à l'État. I.e bracon-
nage a fait son œuvre. Plus rien ! On peut réparer le mal en cinq ans; il
faut surveiller et être sévère, demander le rétablissement des échelles,
protéger la reproduction, et.". »
— M. Ernest Covelle, directeur de l'établissement cantonal de pisci-
culture de Genève, écrit à M. le Secrétaire des séances : « M. Jaeger,
membre de la Société d'Acclimatation, m'a transmis les Bulletins men-
suels dans lesquels j'ai lu avec beaucoup d'intérêt vos remarquables
articles sur la pisciculture à l'étranger. Je me permets de vous deman-
der un renseignement sur les Coregonus alhiis.
» Depuis l'année dernière le gouvernement fédéral reçoit d'Amérique
des œufs de Coregonus albiis; W m'en a envoyé à l'établissement que
je dirige. ]>es alevins éclos sont mis dans le lac Léman. Je voudrais
savoir si le Coregonus albus, qui habite les grands lacs américains, fraye
le long des bords ou à une certaine profondeur, alin de pouvoir mettre
les alevins en liberté soit près des bords, soit en avant au-dessus d'une
certaine profondeur. Nous avons dans le lac l.énian deux espèces de
Gorégones : le Gorégone Fera, qui fraye en février, au fond, entre 40 et
150 mètres, et le Gorégone Gravenche, qui fraye au bord, en novembre et
décembre.
» Les alevins de Fera doivent passer leur premier âge à une grande
profondeur, car on n'en voit jamais près des bords, tandis que les ale-
vins de Gravenche naissent sur les bords à fond de gravier et ne ga-
gnent que plus tard les grandes profondeurs. Si donc vous pouviez me
renseigner sur les mœurs du Coregonus albus, cela me rendrait ser-
vice.
» L'établissement de pisciculture, que je dirige depuis deux ans, ap-
partient à l'État de Genève, il a été créé surtout pour l'élevage des œufs
de Truite des lacs que nous faisons pécher dans le Rhône au moment
du frai; on ne prend guère alors que des sujets de 4 à 17 kilogrammes,
qui donnent de gros œufs (de 8000 à 6000 au kilogramme), le diamètre
de ces œufs variant de 5""", 76 à 6'"'", 50.
» Par suite de grands travaux entrepris pour la régularisation du
niveau du lacet la construction d'établissements pour l'emploi de forces
motrices du Rhône, la pêche n'a pu être très productive celte année.
Je n'ai obtenu que 200000 œufs environ. On peut en temps ordinaire
en récolter beaucoup plus. Les alevins, une fois la résorption de la vési-
cule accomplie, sont répandus dans le Rhône, oîi ils restent jusqu'en
automne, époque où presque tous regagnent le lac. Ils y passent l'hiver
et reviennent au printemps suivant dans le Rhône, pesant en moyenne
de 100 à 125 grammes. »
Dans une seconde lettre, M. Covelle remercie, en ces termes, des
renseignements qui lui ont été adressés d'après sa demande : « Je vous
PROCÈS-VERDAUX. 221
^
remercie infiniment de l'empressement que vous avez mis à me répon-
dre. Les renseignements que vous me donnez sur les Corégones me sont
précieux, voici pourquoi. J'ai à mellre à l'eau la plus grande partie de
200000 alevins qui finissent d'éclore, et je n'étais pas encore fixé sur
l'endroit oîi il fallait les lâcher. Si, comme vous me le dites, le Corc-
gonus albus vient frayer près des bords, comme d'ailleurs presque tous
nos Corégones, sauf la Fera, il vaut mieux mettre les alevins en liberté
au-dessus de la partie oîi le fond du lac commence à descendre, ce que
nous appelons ici le bord du mont. La grève s'étend sur une largeur
très variable, depuis quelques mètres jusqu'à 200 ou 300 mètres, avec
une profondeur de 2 ou 3 mètres seulement; puis le fond descend rapi-
dement pour atteindre, dans la partie du lac qui nous avoisine, jusqu'à
AO ou 50 mètres. L'important est de mettre les alevins en dehors du
chemin suivi par les nombreux bancs de petites Perches qui sont très
voraces et qui mangent les quatre-vingt-dix-neuf centièmes du produit
du frai des Gardons et des Ahlettes. Ces bancs de Perchettes se mon-
trent, depuis le mois d'avril ou de mai, près des bords. En mettant les
alevins de Gorégone en avant de la gvève, ils seront un peu à l'abri des
poissons voraces.
» J'ai reçu de Berne, en même temps que les œufs de Gorégone , une
dizaine de mille œufs de Truite saumonée américaine, dont on n'a pas
pu me donner le nom exact. Les alevins commencent à éclore. J'en
lâcherai la plus grande partie dans le Rhône avec nos alevins de Truite;
mais j'en garderai quelques centaines que j'élèverai dans un grand bassin
d'une de nos promenades publiques, otjjai déjà élevé des Truites qui
ont bien réussi.
» L'établissement de pisciculture de Genève est neuf; il a été con-
struit il y a quatre ans, d'après les plans des meilleurs établissements.
11 contient quatorze tables doubles en ciment de 2"',50 sur 70 centimè-
tres de large et 15 à 18 de profondeur, pour l'incubation des œufs de
Truite. Dans ces tables je dispose des claies en toile métallique sur
lesquelles se mettent les œufs. Dès que tout est éclos, j'enlève les claies
et les alevins se développent sur une couche de gravier dont le fond est
garni. 11 n'y a que deux ans que j'ai la direction de cet établissement et
l'année dernière j'ai élevé 250000 alevins de Truite. La perte totale n'a
pas excédé 5 pour 100. Cette année j'ai le même nombre à peu près, et
la perte en œufs mauvais est plutôt plus faible.
» J'ai ajouté à l'établissement des grands aquariums que je possédais
et dont je me sers pour l'éclosion des œufs de Gorégone, par une ap-
plication modifiée des appareils coniques. Nos appareils coniques sont
faits avec de grands entonnoirs en verre, de sorte que l'on voit au tra-
vers ce qui se passe. Les alevins éclos tombent dans l'aquarium et
nagent autour des entonnoirs. Chaque aquarium (il y en a quatre acco-
lés) a r,iO de long, O^.OO de large et 0^45 d'eau. Les entonnoir»
222 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
ont 0"\30 de diamètre en haut. Du dernier aquarium l'eau tombe dans un
appareil en zinc qui contient aussi des œufs de Corégone. C'est un
appareil cylindrique où l'eau arrive par le tour; il est connu et men-
tionné dans vos rapports.
j L'eau nous est fournie par la ville de Genève; elle arrive avec une
pression de 1 d/2 atmosphère, ce qui permet de la distribuer dans les
tables d'éclosion au moyen de robinets munis d'appareils d'aérage, et
dont elle n'a d'ailleurs guère besoin. Elle est, en général, parfaitement
limpide et n'a pas besoin d'être filtrée. Après plusieurs jours de gros
vents du nord elle se trouble fréquemment; mais je ne me suis pas
aperçu que le dépôt qu'elle contient ait fait du mal aux œufs. Tels sont
les quelques détails que je puis vous donner rapidement...
» Vous avez visité l'établissement de Gremat, dirigé par M. Lugrin.
Cet établissement, qui va très bien, a été créé sur les indications de
M. le docteur Mayor et les miennes. Nous avons fait tout le travail
théorique sur la manière de nourrir les Truites avec de la nourriture
vivante. M. Lugrin a passé de la théorie à la pratique, et il a réussi au
delà des prévisions dans la production de celle nourriture. »
— M. Uaveret-Wattel signale le développement, chaque jour plus con-
sidérable, que la pisciculture prend aux États-Unis. Au laboratoire
d'éclosion de Cold Slream, à Enfield (Maine), 700 000 œufs de Saumon
ont été mis en incubation cette année pour le repeuplement de la rivière
Penobscol. Exécutés sur une très vaste échelle, les travaux d'empois-
sonnement donnent, dans l'Etat du iMaine, des résultats on ne peut plus
satisfaisants. Dans plusieurs cours d'eau, qui avaient été complètement
dépeuplés, le poisson est aujourd'hui redevenu plus abondant qu'on ne
l'avait vu depuis vingt-cinq ans.
— M. Zipcy, sous-directeur et professeur à la ferme-école de Chavai-
gnac (Haute-Vienne), nous écrit : « Depuis quelques années déjà, je
m'occupe d'une façon spéciale de la culture des eaux (Salmonidés et
Cyprins) et de leur repeuplement par les moyens les plus simples et les
plus pratiques.
î La pisciculture , malheureusement délaissée jusqu'à ce jour, est
appelée à produire, quand elle sera suffisamment connue et convenable-
ment pratiquée, de remarquables résultats dans tous les pays qui^
comme le Limousin, possèdent une grande (juantité d'eaux en sources,
ruisseaux, étangs, etc.
» Le point capital en ce moment est de prêcher par l'exemple. Il
s'agit de faire voir et saisir les résultats obtenus, par des moyens à la
portée de tout le monde, simples et économiques. C'est le but de mes
travaux; en un mol, faire passer la science piscicole dans le domaine
de la pratique, améliorer la situation du cultivateur et produire une
<:]uanlité considérable de nourriture à un prix relativement bas.
î Si la Société nationale d'Acclimatation de France me fait l'honneur
PUOCÈS-VEUliAUX. 223
de in'eiicourager dans mes travaux et mes recherches, dans l'intérêt
commun, je lui en serai très reconnaissant. »
— M. Uupic, membre du Conseil général de hi Creuse, écrit de Gen-
tioux : « Vous avez bien voulu m'écrire au sujet de mes essais de pisci-
culture. Je serai très heureux de profiter de vos conseils et de vos
offres. J'ai d'abord fait réussir quelques œufs pour moi; puis, depuis
quelques années, j'en ai fait éclore pour le déparlement de la Creuse,
qui m'en a confié cette année cin(]uante mille, destinés à repeupler les
rivières de la contrée. J'ai assez bien réussi l'éclosion; mais je n'ai pas
encore pu nourrir les alevins, que je suis obligé de verser dans les
cours d'eau dès que la vésicule a disparu. J'ai essayé plusieurs fois de
meltre dans les bassins de la viande ou des œufs cuits, mais tout ce que
je plaçais dans l'eau se couvrait de mousse et ne tardait pas à la cor-
rompre. Je serais très heureux de pouvoir nourrir les alevins pendant
quelque temps, car je crois qu'ils réussiraient mieux s'ils étaient plus
forts au moment où ils sont versés dans les ruisseaux.
» Si vous voulez bien me coulier des œufs ou des alevins qui puissent
réussir dans des eaux froides et vives, je suis entièrement à votre dis-
position.
» Je m'occupe aussi beaucoup de sylviculture. Si vous désirez faire
essayer des graines à une altitude de 8 à 900 mètres, je le ferai avec
plaisir. »
— MM. les préfets des Hautes-Alpes, de la Charente-Inférieure, de la
Dordogne, du Doubs, de la Haute-Garonne, de l'Indre, d'Iudre-et-Loire,
de l'Isère, des Pyrénées-Orientales, du Rhône, de la Haute-Saône, de la
Seine, de Tarn-et-Garonne et de la Vendée, adressent des réponses aux
demandes de renseignements qui leur ont été faites sur la situation de
la pisciculture dans leurs départements. — lîemerciemenls.
— M. Gobin, professeur départemental d'agriculture à Auxerre, écrit
à M. le Secrétaire général : « Je suis extrêmement flatté de la demande
que vous avez bien voulu m'adresser, de vous communi(juer mon tra-
vail sur la pisciculture.
» Je regrette bien vivement de ne pouvoir accéder en ce moment à
voire désir. Ce travail, manuscrit et dont je n'ai point de copie, est en
discussion à la Société nationale d'agriculture de France ; la section
d'Économie des animaux a remis la séance à la mi-mars. J'espère qu'il
obtiendra une récompense; je ne puis donc le reprendre.
» Je puis vous indiquer succinctement en quoi consiste ce travail tout
théorique, ce qui m'a semblé le devoir faire ressortir de la Société na-
tionale d'agriculture plutôt (jue de la Société d'Acclimatation qui veut
des faits accomplis. H se compose de trois mémoires :
» 1" Migrations et hibernation des poissons; causes; latitudes; pro-
fondeurs; zones d'eaux à température constante; le rôle de la vessie
natatoire ; études à entreprendre ;
224 SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
» 2" Exploiralion des mers; poissons liltoraux sédentaires; les frayè-
res; les herbiers ; les fonds ; nature du sol et des rochers ; les réserves
doivent être permanentes et non alternantes; protection aux œufs et
aux alevins ;
» 3° Étude des courants qui intéressent le littoral de la France; in-
certitude des notions à cet égard; le Gulf Stream; le Rennel; le cou-
rant de la Manche; celui de la Manche àl'Elbe; le courant de Gibraltar;
le courant circulaire de la Méditerranée; l'influence des courants sur
les migrations des poissons, sur les bancs naturels d'Huîtres, sur la
multiplication des Moules, etc.
» Ce ne sont point des études faites, mais des études proposées et
une direction indiquée.
» Ceci établi, Monsieur le Secrétaire général, je ne puis que vous
répéter qu'une fois redevenu maître de mon travail, dans quelque con-
dition que ce soit, je m'empresserai de vous le transmettre et de l'of-
frir à la Société, si vous pensez qu'il puisse avoir pour elle quelque
intérêt. »
— M. d'Audeville adresse des renseignements sur son élevage d'Om-
bles-chevaliers à la pisciculture du château d'Andecy (Marne).
— M. L. Véron, ancien lieutenant de vaisseau, écrit du manoir du
Grand-Moros, près Concarneau, qu'il s'intéresse vivement à la piscicul-
ture et qu'il serait très heureux de pouvoir contribuer au développe-
ment de cette industrie, pour laquelle il y aurait beaucoup à faire
dans le département du Finistère, autrefois très riche en Saumons.
— M. E. Thomas, directeur de la station agronomique du Lézardeau
et du laboratoire départemental du Finistère, auquel des renseigne-
ments ont été demandés sur les expériences de pisciculture entreprises
à la station, remercie la Société de l'intérêt qu'elle prend à ses travaux
et veut bien lui promettre de la tenir au courant du résultat de ses
essais.
— M. Paul Boissel, graineur et éducateur à Bessèges (Gard), écrit à
M. le Secrétaire général : « Je lis dans le Petit cultivateur du 14 fé-
vrier que M. Fallou, de la Société nationale d'Acclimatation, a fait une
importante communication sur les races de Vers à soie exotiques.
» Depuis 1867, je m'occupe de l'industrie séricicole. Possédant et
cultivant les principales races françaises, j'ai l'honneur de me mettre à
la disposition de la Société pour lui fournir gratuitement les types de
Vers qu'elle pourrait désirer.
» Je pourrais également faire essayer par mes éducateurs les races
exotiques que M. Fallou a étudiées, et je me ferais un devoir de porter
à sa connaissance toutes les expériences faites et les renseignements
fournis par les éducateurs. »
— M. Madelain, directeur des jardins publics de la ville de Tours,
écrit en date du 25 février 1886 : « J'ai, dans le Jardin public de Tours,
PROCÈS-VERBAUX. 525
deux Palmiers qui accomplissent leur troisième hiver à la pleine terre,
sans avoir souffert du froid. Ces arbres sont abrités par un coffre recou-
vert d'un châssis. Ce sont le Pritchardia filifera et le Cocos australis,
plus connu sous le nom de Diplotemium campestre. J'ai également un
Phormium tenax à feuilles panachées, qui a bien résisté. »
— En annonçant l'ouverture du scrutin pour l'élection du Bureau et
(l'une partie des Membres du Conseil, M. le Président rappelle que le
Conseil a décidé qu'en signe de deuil il ne serait pas procédé cette an-
née à la nomination d'un Président, en remplacement de M. Henri Bou-
ley, décédé le 30 novembre dernier.
iM. le Président désigne, pour faire le dépouillement des voles, une
Commission composée de MM. J. Cloquet, E. Decroix, J. Fallou, Mégnin
et Paillieux.
— M. Hédiard dépose sur le bureau :
1» Des bulbilles d'Igname de la Martinique et un échantillon d'Igname
couscouche, variété d'excellente qualité, à chair blanche, très fari-
neuse et à rhizome peu profond;
2" Une courge Carabassette du Pérou, très bonne variété, cultivée en
Algérie depuis plusieurs années et susceptible d'être cultivée même sous
le climat de Paris, en renouvelant fréquemment la graine ;
3° Des semences de Haricot Saint-ciboire, variété introduite, en 1883,
par notre collègue, qui l'a trouvée très productive; c'est un Haricot sans
rames, à grain très farineux et à gousse sans parchemin;
4" Des noix de Cocos provenant de la Martinique. M. Hédiard signale
à celte occasion l'emploi qui est actuellement fait de l'enveloppe fibreuse
des noix de Coco pour la confection des tapis-brosses; cette fabrication a
lieu particulièrement en Auvergne.
— M. le Secrétaire général donne lecture d'une Note de M. Créput, de
Missergbin, sur l'élevage de l'Autruche en Algérie. (Voy. au Bulletin.)
Au sujet d'un passage de cette Note, signalant l'abaissement très con-
sidérable subi, dans ces dernières années, par le prix des plumes d'Au-
truche, M. Geoffroy Saint-Hilaire communique à l'assemblée des rensei-
gnements très intéressants, adressés par M. Laloue , sur les causes des
abaissements des cours, sur l'importance du commerce des plumes et
sur les avantages que peut présenter l'élevage de l'Autruche. (Voy. au
Bulletin.)
— M. Hédiard fait connaître que les œufs d'Autruche trouvent à Paris
un certain débouché ; ces œufs se vendent généralement de 5 k 6 francs
la pièce. Depuis quel(|ue temps, des industriels ont même eu l'idée
d'imiter ces œufs par des moulages en plâtre, qu'ils vendent pour des
œufs naturels.
— M. Pichot donne communication d'une lettre qui lui est adressée
des État-Unis concernant la création d'une ferme-école à Autruches en
Californie. (Voy. au Bulletin.)
4« SÉRIE, T. ni. - Avril 1886. 15
226 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
M. le Secrétaire général rappelle à ce sujet que , déjà sur un très
grand nombre de points, on a essayé l'élevage de l'Autruche : dans la
Caroline du Sud, dans la République Argentine, à la Réunion, à l'île
Maurice, en Australie. La production est devenue, par suite, très al)on-
dante, et, en outre, la plume étant, pour le moment, moins à la mode
qu'il y a quelques années, le prix devait forcément baisser.
— M. Raveret-Wattel signale que, d'après un article récemment pu-
blié par le journal anglais : The Colonies and India, l'élevage de l'Au-
truche tendrait actuellement à être délaissé dans la colonie du Cap, oîi
l'on ne trouve plus suffisamment rémunérateurs les produits de cette
industrie et où l'on préfère s'occuper de la production de la laine. De
ce côté, la concurrence ne paraît donc plus à craindre pour les éleveurs
d'Autruches de l'Algérie.
— M. Berthéol présente différents appareils de pisciculture dont il est
l'inventeur. 11 soumet notamment une auge perfectionnée pour l'éclo-
sion des œufs de Salmonidés; Cette auge, de dimension suffisante pour
recevoir 3000 œufs de Truite ou de Saumon , est accompagnée d'un ou-
tillage complet de pisciculture: filtre pour l'eau, thermomètre, pince à
enlever les œufs gâtés, filets pour puiser les alevins , brosse pour le
nettoyage des appareils, loupe servant à l'examen des œufs, ardoise en-
cadrée, avec crayon, pour enregistrer les observations faites, etc. Le
tout, complété par une instruction sommaire sur les soins à donner aux
œufs et aux alevins, est livré au prix de 20 francs. Des appareils de plus
grande dimension, construits d'après le même système, peuvent rece-
voir jusqu'à 20 000 œufs et servir en outre de bacs d'alevinage.
— M. Raveret-Wattel signale lesavantages que présente l'emploi de
semblables appareils, depuis longtemps adoptés dans plusieurs pays
étrangers. En Allemagne, oîi l'enseignement de la pisciculture est très
répandu, on apporte, à bon droit , une sérieuse attention à la question
des appareils. Depuis longtemps déjà, l'Académie forestière de Tharand
(Saxe) a recommandé l'emploi d'un outillage analogue à celui que pré-
sente M. Berthéol, et cette mesure a beaucoup contribué à la vulgarisa-
tion de la pisciculture dans le pays.
— M. le Président fait connaître le résultat du scrutin. Le nombre des
votants était de 283. (Outre les billets déposés dans l'urne par les Mem-
bres présents, beaucoup de bulletins avaient été envoyés sous plis ca-
chetés et contresignés.)
Les votes ont été répartis de la manière suivante :
Vice-Frésidents : iMM. D-- Ern. Cossou 280
Comte d'Éprémesnil 279
De Quatrefages 283
Marquis de Sinéty 282
Secrétaire général : A. Geoffroy Saint-Hilaire 264
PROCÈS-VERBAUX. 227
Secrétaires : E. Dupin 281
Maurice Girard 281
Raveret-Wattel 280
Flury-Hérard 278
Archiviste-bibliothécaire : Amédée Berthoule 2(37
Membres du Conseil : D-" Paul Brocchi 278
Camille Daresle 280
Alfred Grandidier 280
Edgar Roger 279
En outre, d'autres Membres ont obtenu des voix pour diverses fonc-
tions.
En conséquence, sont élus pour l'année 1886:
V ice-P résidents : MM.
Secrétaire général
Secrétaires :
Archiviste-bibliothécaire
Membres du Conseil :
D'' Ernest Cosson.
Comte d'Éprémesnil.
De Quatrefages.
Marquis de Sinéty.
A. Geoffroy Saint-Hilaire.
E. Dupin.
Maurice Girard.
Raveret-Wattel.
Flury-Hérard.
Amédée Berthoule.
D"" Paul Brocchi.
Camille Dareste.
Alfred Grandidier.
Edgar Koger.
Le Secrétaire des séances,
Raveret-Wattel.
I. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS-
DEUXIEME SECTION.
SÉANCE DU 2 FÉVRIEU 1886.
Présidence de M. Huet, Président.
31. Bcrlhoule dépose sur le bureau une proposition d'un système
unique de classification en zoologie spécialement pour l'ornitliologie par
M. des 31urs.
La section charge iM. Huet d'en faire un rapport.
iM. Dautreville demande la parole et dit que la poudre toni-nutritive
granulée au sang de bœuf desséché, destinée à l'élevage des Faisans,
dont il a déjà été question à la Société plusieurs fois depuis trois
années, vient de subir, au point de vue de l'aspect seulement, une
transformation sérieuse.
M. Dautreville présente à la section un échantillon de ce produit tel
qu'il sera désormais livré.
La composition de la poudre toni-nutritive est toujours la même, il
n'y a de changement apporté que dans la forme.
A propos des éléments constitutifs de l'alimentation artificielle dont il
est l'inventeur, .M. Dautreville rappelle qu'il les a réunis synthéliqueinent
en s'inspirant de la composition chimique des larves de|farine qu'il
s'agit de remplacer dans l'élevage.
Le mode opératoire et l'appareil de fabrication sont améliorés, d'oîi
il résulte, comme la section a pu le constater, que la poudre toni-nutri-
tive semble réunir aujourd'hui toutes les conditions désirables.
Les petits granules dont elle est composée sont tous à peu près sem-
blables, d'une couleur uniforme, d'une composition homogène et ne sont
plus ramollis comme autrefois par une poudre plus Une qui avait fait
l'objet d'observations de la part des éleveurs qui ont bien voulu expéri-
menter cette alimentation artificielle et rendre compte de leurs essais.
M. Audap offre gracieusement un lot de Canards l'ilets et [demande
qu'on lui confie d'autres espèces.
Le Secrétaire,
E. JOLY.
PROCÈS-VERBAUX. 229
TROISIÈME SECTION.
SÉANCE DU 10 FÉVrUEU 1886.
Présidence de M. Vaiu.ANT, président,
puis de M. Paillieux.
Le procès-verbal de la précédente séance est lu et adopté, avec addi-
tion et rectification demandées par M. Hathelot.
M. Berthoule parle, à nouveau, des Salmo Quinnat de l'aquarium du
Trocadéro. Un grand nombre d'Alevins ont été jetés dans la Seine, où
M. le Directeur de l'aquarium espère les voir prospérer.
M. Bertboule ne partage pas celte espérance et pense que les eaux du
bassin méditerranéen conviendraient mieux à cette espèce que celles du
bassin de la Manche.
M. Berthoule ajoute que M. Jousset de Bellesme a bien voulu mettre
à la disposition de la Société 1000 Alevins de ce Saumon, destinés à une
nouvelle tentative de repeuplement des eaux de l'Aude.
Enfin, M. Berthoule dit que, de l'avis du directeur de l'aquarium, l'a-
levinage prochain sera moins abondant que celui-ci, beaucoup de repro-
ducteurs ayant péri lors de la ponte.
M. Rathelot ne pense pas que l'aquarium du Trocadéro soit aussi
riche en Alevins de Salmo Quinnat qu'on l'a dit; au sujet de ceux qui
auraient été jetés en Seine, il y a lieu de faire des réserves expresses,
quelques journaux seulement ayant parlé de ce fait.
M. Berthéol voudrait que 500 Alevins seulement fussent jetés dans
l'Aude, et que les 500 autres fussent répartis entre quelques-uns de nos
collègues en état de les élever.
M. Berthoule répond que les 1000 Alevins ont été offerts pour être
envoyés dans un cours d'eau tributaire de la Méditerranée et qu'il serait
difficile de leur donner une autre destination si tant est que la Société
estime devoir adresser l'offre dont s'agit.
Finalement, la section, à la majorité, pensant que ce nombre de
1000 petits Saumons est insuffisant pour faire une tentative sérieuse
d'acclimatation, dans le bassin méditerranéen, décide qu'il n'y a pas lieu,
quant à présent, d'accepter ces poissons.
La section remercie M. le Directeur de l'aquarium du Trocadéro, de
son offre généreuse, et regrette de n'en pouvoir profiter.
M. Kaverel-Wattel fait savoir à la section que plusieurs réponses au
questionnaire sur l'étal de la pisciculture, dans les départements, nous
sont parvenus. Ces réponses sont adressées par MM. les ingénieurs, aux
préfets, qui nous les transmettent.
230 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
M. Rathelot pense que si nous adressions ces questions aux Conseils
généraux et aux Conseils d'arrondissement, nous pourrions en obtenir
quelques renseignements.
M. Raveret-Waltel fait observer que les circulaires ne sont guère lues
et que les lettres coûtent trop cher à envoyer. Notre collègue croit qu'il
serait utile de signaler aux fonctionnaires, à qui nous demandons des
renseignements, les personnes qui, à notre connaissance, s'occupent, ou
se sont occupées de pisciculture.
Ces propositions sont mises aux voix.
La section décide qu'il y a lieu d'adresser des demandes : i° aux
préfets, qui ont signalé déjà des pisciculteurs ; 2" aux présidents des
Conseils généraux ; 3" d'adresser des demandes d'insertions à plusieurs
journaux des départements.
Le Vice-Secrétaire,
Ch. Mailles.
QUATRIÈME SECTION.
SÉANCE DU 16 FÉVRIER 1886.
Présidence de M. Maurice Girard, Président.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. Fallou fait passer sous les yeux de ses collègues une boîte renfer-
mant les cocons de Lépidoptères, envoyés par le P. Camboué, de Mada-
gascar, comme cocons de la Saturnia Siiraka et Borocera Madagas-
cariensis (1) et il ajoute :
« Pendant que j'en faisais la préparation, MM. Wailly,Mabille et deux
autres entomologistes ont contesté l'exactitude de cette assertion, se
basant principalement sur les différences de proportion entre le cocon
et l'insecte parfait.
» Je ne partage pas celte opinion et je demande s'il ne serait pas
possible de prier le P. Camboué de nous envoyer les œufs, la chenille et
le papillon provenant d'éducation.
)) Danslanature,ily a de petites espèces qui produisent des cocons très
gros et réciproquement, par exemple le Bombyx du Chêne, dont le cocon
est très petit. »
M. Fallou présente également des cocons de Bombyx mori, recueillis
avant, pendant, et après la maladie des Vers à soie.
(1) Les figures de Boisduval et de Coquerel ne sont pas complètement cou-
formes aux Papillons envoyés actuellement de Madagascar.
PROCÈS-VERBAUX. 231
M. Paillieux lit une lellre relative à la destruction des Allises qui atta-
quent les Crucifères.
M. Maurice Girard recommande, d'après M. Pelouze, un mélange de
sable et de napthlaline brute. Ce mélange ne tue pas les Altises, mais les
écarte.
M. le Président lit une lettre de M. Faure, président du comice agri-
cole de Drioude, qui envoie en même temps un insecte coléoptère {Hylo-
bius abietis).
La présence de ce Charançon dans les vignes est due à l'habitude
qu'ont les vignerons du pays d'enfouir des branches de Pin comme drai-
nage et fumure.
Cet insecte, d'après 31. Faure, couperait les tiges au printemps et en
août, s'attaquerait aux raisins, mais celte assertion est loin d'être démon-
trée, l'insecte vivant exclusivement dans les branches des Conifères.
iM. l'Agent général attire l'attention de la section sur un article relatif
aux Diptères comestibles du Western Alkaline lake. Ce mémoire paraît
avoir échappé à la connaissance de feu M. Moleyre.
Le Secrétaire,
M. SÉDILLOT.
CINQUIÈME SECTION.
SÉANCE DU 23 FÉVRIER 1886.
Présidence de M. de Vilmorin, Président.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
M. le Secrétaire donne lecture de la note suivante de M. Dautreville
sur l'analyse, par lui faite, des tubercules du Stachys affinis :
« Dans la crainte de ne pouvoir assister à la prochaine séance géné-
rale, je viens vous prier de vouloir bien donner lecture de la note sui-
vante, qui a pour objet de répondre à une question posée par M. Chap-
pellier, au sujet de l'emploi des tubercules du Stachys affinis, dans le
régime prescrit aux diabéti(iues glycosuriques.
» Comme l'a fait remarquer M. Chappellier, la texture des Stachys
semble se rapprocher beaucoup des Salsilis, aussi notre honorable col-
lègue a-t-il pensé, sans toutefois l'afllrmer, que ceux-là pourraient
comme ceux-ci entrer dans l'aliinentaliou des malades atteints du
diabète.
î Je puis ajouter aujourd'hui que la composition chimique de ces
végétaux, spécialement au point de vue des principes féculents, absolâ-
ment proscrits dans cette affection, est la même; c'est du moins ce qui
résulte des essais comparatifs auxquels je me suis livré.
SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION.
» Vous savez, Messieurs, que les substances qui contiennent de la
fécule ou (le ramidon, sur lesquelles on laisse tomber une goutte de
teinture d'iode, donnent une coloration bleue d'autant plus foncée que
la proportion de matière féculente est plus forte. Soumettez, comme je
l'ai fait, à l'action de cette teinture, une Pomme de terre fraîchement
coupée, vous constaterez que cette réaction est très rapide, ce qui s'ex-
plique facilement puisque celte Solanée contient 20 pour 100 de fécule
au moins. Si maintenant on opère sur le Stachys ou sur le Salsifis, la
partie imprégnée de teinture d'iode conserve la teinte jaunâtre propre
à l'iode.
» Ce premier essai, bien que très simple, donne déjà des indications
qui ont leur importance. Le deuxième, qui a consisté à imiter le pro-
cédé usité dans la fabrication de la fécule, a été concluant.
î Après avoir réduit les tubercules du Stachys en pulpe au moyen
d'une râpe, j'ai d'abord délayé dans l'eau froide, puis passé au tamis,
et, si la fécule eût existé dans ce végétal, je l'aurais recueillie en lais-
sant déposer les eaux de lavage. Or le dépôt de ces eaux n'a pas donné
avec l'iode la réaction propre à la fécule. Mèmerésultatavec le Salsifis.
)) 11 résulte de ces faits que les tubercules du Stachys peuvent être
désormais, comme d'ailleurs les Salsifis, permis comme aliment aux ma-
lades atteints du diabète sucré. M. Paillieux d'abord, M. Chappellier
ensuite, auront donc rendu à l'acclimatation et aux malades un très ap-
préciable service, car, vous le savez, la liste des aliments probibés dans
le traitement de cette grave maladie est longue, et les diabétiques ac-
cueilleront avec plaisir ce tubercule, puisqu'il leur permettra d'apporter
un peu de variation à leur régime sévère et cela sans nuire au traite-
ment. »
M. Chappellier proteste contre la mention de son nom dans cette com-
munication, et déclare que tout le mérite de l'introduction du Stachys
revient à notre zélé confrère M. Paillieux.
Il est déposé sur le bureau : 1° une note de M. Romanet du Caillaud
sur le Tradescantia erecta, plante hémostatique du iMexique, intro-
duite en France par M. le général du Mariray;
2° Une note de M. Naudin, sur la première floraison du Jiibœaspecta
bilis à Lisbonne.
M. le Président signale à ce propos le bel exemplaire de la villa Thu-
ret, qui est sur le point de fleurir.
M. Paillieux communique à la section une lettre de M. Daruty, sur le
Matambala {Coleus tuberosus). M. Mares se propose de faire des essais
de culture de cette plante en Algérie.
M. Paillieux a reçu également du Président de la Société d'Acclima-
tation de Maurice des graines de Solanum macrocarpum ou grosse
Anguine; il est douteux que ces semences donnent des résultats sous
le climat de Paris.
rROCÈS-YERBAUX. 233
Notre confrère lit ensuite : 1" une lettre du P. Heude, sur diverses
plantes alimentaires chinoises; un Convolmilus, dont on mange les
pousses, serait peut-être intéressant à cultiver; 2" une lettre du D''Breit-
schneider, sur VEleocharis tiiberosns; 3° une lettre d'un membre de
l'Institut de Beauvais, sur la destruction de l'Allise.
A propos de celte dernière communication, M. le Président signale
l'emploi du Tourteau de Cameline comme donnant de bons résultats.
M. de Vilmorin présente à la section un rameau d'une nouvelle espèce
d'Eucalyptus, représentée seulement par deux exemplaires en Pro-
vence, l'un à la villa Thuret, l'autre chez IM. le D"" Jeannel, à Ville-
franche-sur-Mer.
Placé côte à côte avec un E. globulus, dans un terrain argileux assez
riche, la nouvelle espèce a crû avec une bien plus grande rapidité que
ce dernier.
Aujourd'hui l'arbre est âgé de six ans environ et mesure approxima-
tivement 14 mètres. Sa circonférence, à l'",30, est de 76 centimètres et
de 90 à 15 centimètres du sol. Il a fleuri en janvier 1885, et l'examen
de ses fleurs a permis de le classer dans la section des uniflores. Cet
Eucalyptus, qui avait été nommé provisoirement Ambigens et a été dé-
crit depuis; il est dédié au savant directeur du Jardin botanique de
Melbourne, M. le baron von iMùeller.
L'Eucalyptus Mulleri Ndn ne subit pas de transformation comme
la plupart des espèces de ce genre ; les feuilles du jeune âge sont celles
de l'âge adulte.
Il est présumable que des graines fertiles pourront être recueillies
celte année.
M. le Président présente ensuite une gerbe de Blé de Manitoba, sans
barbe, à épi blanc et à grain rouge. Semé à la mi-mai, ce Blé s'est bien
développé; mais comparé à notre Blé de mars, barbu, à épi rouge, ou
Blé de mai, l'avantage reste au nôtre au point de vue de la valeur du
grain.
Une discussion s'engage entre MM. de Vilmorin et Mailles au sujet de
l'influence solaire sur la maturation des céréales dans le Nord et les pays
tempérés, et à ce propos M. le Président signale les remarquables tra-
vaux de M. Flahaut.
Le Secrétaire,
Jules Gr isard.
IV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE.
Pi.scicuUiipe à rÊcole pratique (rAg^i*iciiltni*c
de Saint-Remy
Canton d'Amance (Haute-Saône).
Depuis 1883, la pisciculture l'ait partie du prograuiine de l'École
pratique d'agriculture de Saint-Kern y (Haute-Saône). Un crédit de
520 francs, du ministère de l'agriculture, et une somme de 300 francs,
allouée par le Conseil général de la Haute-Saône, ont permis la création
d'un laboratoire d'éclosion et d'alevinage alimenté d'eau par un réser-
voir en tôle galvanisée, de 4 mètres cubes, lequel se remplit au moyen
d'une pompe aspirante et foulante établie à demeure dans le labora-
toire.
Nous devons à l'obligeance de M. X. Binder, chargé du cours de pis-
ciculture à l'Ecole, d'intéressants détails extraits des Comptes rendus
de cet établissement et relatifs aux travaux de début du laboratoire.
Tout d'abord, ce n'est pas sans quelque difficulté qu'on s'est procuré
des reproducteurs en état de frayer. « Les informations prises de divers
côtés sur l'époque de reproduction des Truites étaient loin d'être con-
cordantes, dit M. Binder : ici, disait-on, la Truite fraye en novembre,
là en décembre, ailleurs en janvier et même en février. Je me suis long-
temps demandé quelle pouvait être la cause de cette différence dans
l'époque du frai. Je crus d'abord pouvoir l'attribuer à la nature des
eaux, les unes roulant sur le granit, tandis que les autres sortent du
calcaire. Mais j'ai dû renoncer à cette idée par suite de la difficulté
qu'il y a, dans l'état actuel de la science, de concevoir que les minimes
quantités de calcaire ou de silice en plus ou en moins puissent avoir une
influence aussi considérable sur l'époque du frai. Aussi ai-je porté mon
attention ailleurs, et j'ai cru trouver la solution du problème dans la
considération de la constitution géologique des terrains qui fournissent
les eaux.
» La Moselotte reçoit ses eaux d'un versant granitique ; or on sait
que dans les pays de granit les sources nombreuses sortent d'une très
faible profondeur (à part certaines eaux thermales), parce que l'imper-
méabilité du roc n'offre pas aux eaux ces larges tissures qui, dans les
terrains sédimentaires, leur permettent de s'enfoncer profondément et
de se soustraire aux variations de la température. Dans les formations
de sédiment, et plus particulièrement dans les roches jurassiques, il y a
de nombreuses crevasses par lesquelles les eaux se perdent à de grandes
profondeurs avant de donner naissance à des sources qui, comme l'on
dit souvent, fournissent une eau relativement chaude en hiver et fraîche
en été. C'est là précisément le cas des sources qui alimentent la Que-
FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 235
noclie, dans laquelle la Truite ne fraye que de la mi-janvier à la fin de
février, tandis que dans la Moselotle, dont les eaux ne viennent que de
sources très superliciellcs, susceptibles par conséquent de subir facile-
ment les influences de la température, le frai se termine vers la Un de
novembre. D'où je suis porté à conclure que c'est à celte différence de
température qu'il faut attribuer l'écart dans l'époque du frai de la
Truite.
» Si maintenant l'on se demande pourquoi cette particularité n'a en-
core été signalée dans aucun ouvrage, ne serait-ce pas que ceux qui ont
écrit sur la Truite n'ont guère étudié ce poisson que dans les pays
granitiques des Vosges, de l'Auvergne, ou dans les grands cours d'eau
dont la température, plus que celle des eaux sortant des couches pro-
fondes, subit l'influence de l'air ambiant?
» La première fécondation artilicielle a eu lieu le 5 décembre (1883),
la deuxième le 12 janvier. Les œufs étaient marqués un mois après la
fécondation, et l'éclosion a eu lieu le 16 février pour les uns, et le
23 mars pour les autres. Une eau d'une température à peu près inva-
riable se renouvelait sans cesse sur les œufs. Cette température oscillait
entre 5 et 6 degrés centigrades; le plus souvent le thermomètre indi-
({uait 5 degrés 1/2.
» Comme l'incubation des œufs provenant de Truites de la Moselotte
a duré 66 jours, et celle des œufs de Truites de la Quenoche 79 jours,
le nombre de degrés de température nécessaire à l'évolution de l'em-
bryon a été de 66 X 5 1/2 =: 3 630 degrés pour les uns, et de
79X5 1/2 := 4 245 degrés pour les autres.
j J'ignore la cause de celte différence. Je ferai simplement remar-
quer que les Truites de la Moselotte étaient jeunes et pesaient à peine
un quart de livre, c'était la lin de la saison du frai ; tandis que la
Truite de la Quenoche pesait une livre (elle a fourni 1000 à 1200 œufs),
et c'était le commencement du frai dans cette rivière.
» L'incubation de ces œufs s'est faite convenablement (quelques œufs
seulement avaient blanchi); ceux provenant de la première opération
étaient en partie éclos, les autres allaient être embryonnés, lorsque
j'aperçus dans les premiers des disparitions importantes, et dans les
seconds, outre la disparition de beaucoup d'œufs, l'altération de plu-
sieurs. J'attribuai tout d'abord ces dégâts aux Rats d eau, que j'accusais
de manger les alevins et les œufs embryonnés, de remuer dans d'autres
compartiments les œufs déjà marqués, et d'arrêter ainsi le travail de
l'embryogénie.
» Les augettes n'étaient alors couvertes que légèrement, car je ne
me proposais que de soustraire œufs et alevins à une lumière trop in-
tense ; mais, à partir de ce moment, je fis des couvercles solides et je
n'y laissai que des ouvertures circulaires d'à peu près un centimètre
pour livrer passage au filet d'eau qui alimentait le bassin. Or, la nuit
236 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
suivante, le nombre des œufs disparus était plus considérable encore,
et sur les deux mille œufs et alevins, c'est à peine s'il me restait une
centaine de cliaque espèce. J'étais désolé, mais non découragé; je ne
pouvais avoir affaire aux Rats d'eau qui, vu l'exiguïté de l'ouverture
laissée dans le couvercle, ne pouvaient s'introduire dans les bassins
d'éclosion ; c'était un autre ennemi à découvrir. Tant que les œufs et les
alevins s'étaient trouvés accessibles, les souricières étaient restées inu-
tiles; je pris donc la précaution de fermer hermétiquement les auges et
d'y introduire l'eau par de petits tuyaux en caoutchouc; j'installai les
souricières et enlin je parvins à capturer deux de mes mangeurs de
Truites. Ce n'étaient ni des Souris, ni des Rats d'eau, c'étaient des Musa-
raignes d'eau ou Musaraignes de Daubenton {Sorex fodlens), aux dents
rouges et épineuses, au museau effilé, et dont les pieds à cinq doigts
sont garnis de poils raides aidant à la natation. Ce petit animal me
paraît d'autant plus dangereux qu'il peut s'introduire très facilement
par les plus petites ouvertures.
■» Pour imiter la frayère naturelle, une double rangée de grosses
pierres moussues encadrant un lit de cailloux roulés a été disposée dans
le petit cours d'eau qui traverse les prairies de l'Ecole. C'est dans cette
frayère que vont être placés incessamment nos petits alevins de Truites
saumonées, car il importe que cette opération se fasse avant que la vé-
sicule ombilicale des alevins soit résorbée, alin que, n'étant pas encore
habitués à une nourriture artificielle, les petits poissons s'accommodent
plus facilement du milieu qu'on leur oiTre et des moyens de subsistance
qu'ils y trouvent. Ces derniers ne feront pas défaut, puisque les bords
du ruisseau sont bien enherbés et qu'on y observe une foule de mol-
lusques tels que les l.ymnées, les Paludines, les Planorbes, ainsi que de
petits crustacés et des vers. »
Quelques alevins sont conservés au laboratoire et nourris artificielle-
ment pour servir aux démonstrations pratiques de l'enseignement pisci-
cole. «Au début, dit M. le professeur Rinder, je les nourrissais de
jaune d'œuf, puis de cervelle et de viande hachée. Mais, d'une part, la
précipitation rapide de ces substances au fond des bassins d'élevage les
rendait inutiles aux alevins, qui ne touchent qu'aux éléments tenus en
suspension dans l'eau, et, d'autre part, produisait un dépôt insalubre
nécessitant des soins continuels de propreté. Aussi cette nourriture
morte ne me fournit-elle que de bien minces résultats : beaucoup d'a-
levins périssaient les uns après les autres, succombant à la maladie
des branchies.
ï Je m'adressai alors à la nourriture vivante. De petits vers limicoles,
que je croyais devoir ranger dans la famille des Naïdcs, pullulaient dans
l'étang de notre basse-cour. J'en recueillis une certaine quantité pour
les donner à mes petits poissons, qui s'en montrèrent très friands; mais
une fois distribués dans les bassins, ces limicoles se réunissaient rapi-
FAITS DIVERS Eï EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. ^5/
dément en pelote au fond de l'eau et parvenaient ainsi à se soustraire à
ralla(iue des alevins; mon but était manqué.
» A l'endroit même où je faisais la récolte de ces vers, j'avais remar-
qué une multitude de petits crustacés appelés communément Puces
d'eau : c'étaient des daphnies {Daphnia pulex).
» Les daphnies, crustacés appartenant au groupe des Cladocère.'- ,
sont caractérisées par un corps non segmenté, entièrement recouvert
d'une carapace bivalve; leur tète, munie antérieurement d'un seul œil,
porle de chaque côté une grande antenne fourchue et ciliée faisant
fonction de bras natatoires; elles s'en servent pour produire, dans
l'eau, des tourbillons et attirer ainsi les particules alimentaires.
» Les daphnies nagent avec facilité; au moindre mouvement de l'eau,
elles se dispersent en tous sens en progressant par bonds au sein de
l'eau : de là, sans doute, leur nom vulgaire de puces d'eau.
ï Ces petits êtres ne peuvent se multiplier que dans les eaux tran-
quilles des étangs et surtout des mares servant d'abreuvoir au bétail.
Dans le courant de l'été, lorsqu'on e.xamine une troupe de daphnies, on
est frappé de la diversité de leurs tailles; quelques-uns de ces crusta-
cés atteignent jusqu'à "2 millimètres 1/2 de longueur, tandisque d'autres
sont à peine visibles à l'œil nu : tous sont doués de la même ngililé.
» Cette différence dans la taille s'explique facilen^ent lorsqu'on sait
qu'un même groupe compte des daphnies provenant de générations suc-
cessives de l'année.
» D'après le professeur Claus (1), au printemps et en été on ne ren-
contre d'ordinaire que des individus femelles qui donnent naissance à
une série de générations parlhénogénes. Les œufs pondus à cette épo(jue
sont les œufs d'été, qui se développent rapidement dans une chambre
incubatrice située sous le test dorsal. Après quelques jours les œufs
écloseut; les jeunes daphnies quittent leur berceau, et elles ne tar-
dent pas à produire des œufs à leur tour.
» En automne, lorsque le froid menace l'existence de ces petits êtres
aquatiques, les femelles produisent les œufs d'hiver et assurent ainsi la
conservation de l'espèce. Ces œufs ne peuvent pas, comme ceux d'été,
se développer sans l'intervention des mâles : la fécondation est néces-
saire; aussi voit-on apparaître les daphnies mâles lorsque les conditions
biologiques deviennent défavorables.
3> Les œufs d'hiver, mêlés à la vase, sont plus gros et plus rustiques
que ceux d'été; ils sont d'ailleurs protégés par la chambre incubatrice
qui s'est détachée avec eux du dos de l'animal.
» Lorsque les froids de novembre se font sentir, les daphnies se ré-
fugient au fond des étangs ou des mares; là elles résistent pendant
quelque temps au froid, puis périssent dans le courant de l'hiver.
(I) Traité de Zoologie, par Claus, troihiit par .Moquin-Tandon.
3.S8 SOCIÉTÉ iNATlONALE d' ACCLIMATATION.
» Au printemps suivant, quand la température de l'eau s'est suflisam-
mcnt élevée, les œufs conservés dans la vase se développent et éclosent
vers la mi-avril, et bientôt les crustacés issus de celte première généra-
lion pullulent dans les eaux bourbeuses.
» Lorsqu'on veut se livrer à la culture des daphnies pour les besoins
de l'alevinage des salmonés, on peut ensemencer les réservoirs con-
struits d'après les indications de M. Pùvoiron, en y transportant de la
vase puisée dans une mare où l'automne précédent les daphnies s'é-
laienl fait remarquer par leur grand nombre. Avec cette vase on intro-
duit l'œuf d'hiver, qui sera le point de départ de nombreuses généra-
tions successives, à la faveur desquelles le réservoir se peuplera rapide-
ment.
» Les daphnies sont, sans [contredit, une précieuse ressource pour le
pisciculteur qui s'occupe d'alevinage artificiel; mais elles ne peuvent à
elles seules résoudre le problème de la nourriture par le vivant, puis-
qu'elles l'ont défaut dans la première période de l'alevinage, alors que
le besoin de ce genre de nourriture se fait le plus sentir. Ainsi, à Saint-
llemy, les premiers alevins, nés au commencement de janvier, avaient
leur vésicule ombilicale complètement résorbée vers le 15 février; et,
comme les daphnies ne sont en nombre que dans le courant de mai, il
faudrait pendant cet intervalle nourrir les alevins selon l'ancienne mé-
thode. »
Pendant la campagne 1884-1885, les opérations ont été poursuivies
sur une assez large échelle.
« L'année dernière, écrit M. Binder, j'avais transporté de Saulxures à
Saint-Remy tous les reproducteurs que j'avais pu me procurer pour les
besoins de notre campagne piscicole; cette année, fixé par l'expérience
sur la difficulté et les embarras d'un tel transport quand on veut opérer
sur des animaux vivants, j'ai préféré aller faire la fécondation sur
place; n'ayant eu qu'à m'en féliciter, mon intention .est de continuer
ainsi à l'avenir, sauf à me procurer dans les environs les étalons dont
j'aurai besoin pour les démonstrations à faire devant les élèves, qui
tous montrent le plus vif intérêt pour cette branche de leur instruction,
et pour les familiariser avec toutes les manipulations qui s'y rapportent.
» Tous ces œufs ainsi transportés à Saint-llemy immédiatement après
leur fécondation artificielle y sont arrivés en très bon état, ofi"rant ce
bel aspect que donne une fécondation réussie et qu'ils ont conservé
tout le temps de l'incubation : à peine quelques-uns de blancs. El ce-
pendant, bien que la période d'incubation se soit passée très régulière-
ment, sans que rien put me faire craindre un échec, près de 25 pour
100 ne sont pas arrivés à éclosion.
» U'où cela peut-il venir? Cette question, qui ne pouvait que m'inté-
resser vivement, ne me parait trouver sa réponse que dans cette
circonstance que plusieurs de mes étalons, échappés à la mortalité
FAIT-S DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 239
occasionnée par les chaleurs exceptionnelles de l'année, se trouvaient
cependant dans un état maladif qui avait nui à la vitalité d'une partie
des œuvées; et ce qui me confirme dans cette idée, c'est, d'une part,
la petitesse relative que j'ai constatée dans les œufs de cette année,
chose assez anormale, et, d'autre part, la parfaite transparence con-
servée par ceux des œufs qui ne se sont pas embryonnés, transparence
qui ne permet pas d'attribuer cet échec à ce que l'opération delà fécon-
dation aurait été mal exécutée.
» Mais ce qui, par-dessus tout, me confirme dans cette opinion, c'est
que les œufs inféconds, restés clairs, ne se sont guère trouvés que parmi
ceux obtenus des Truites de rivière, lesquelles avaient particulièrement
souffert des influences atmosphériques dont j'ai parlé, tandis qu'il n'y a
presque point eu de perte sur les œufs des Truites provenant des lacs.
N'est-ce pas que, ces dernières habitant des eaux plus profondes, le
développement de leur œuvée a pu suivre son cours régulier à l'abri
des circonstances défavorables dont a eu tant à souffrir la truite dans
nos rivières ?
y> Et si telle est, comme je le crois, la cause de l'amoindrissement
constaté dans le succès qu'il m'a été donné d'obtenir, quel déficit ne
laissera pas cette année la reproduction naturelle de la Truite, et com-
bien n'importe-t-il pas que par la fécondation artificielle et l'alevinage
on s'empresse de repeupler les eaux de la France, déjà si désastreuse-
ment ruinées depuis bien longtemps !
» Quant au reste de nos o pérations, tout a parfaitement réussi; nos
jeunes alevins sont bien venus, sans que nous ayons eu à constater au-
cune mortalité, et ils étaient pleins de vigueur quand je les ai mis à
l'eau. Environ 30 000 alevins de Truites ont été versés le 18 mars
dans une dérivation de la Lanterne. »
On peut juger, par les quelques citations qui précèdent, de la nature
de l'enseignement piscicole donné aux élèves de l'école de Saint-Remy.
Il y a tout lieu d'attendre les meilleurs résultats de semblables études à
la fois théoriques et pratiques.
R.-W.
V. BIBLIOGRAPHIE.
Journaux et Revues.
(Analyse des principaux articles se rattachant aux travaux de la Société.)
i,a mature (Paris, G. Masson, éditeur), n" 007, du 13 mars 1886.
Oui de nous n'a jamais admiré avec quelle prévoyante attention la
sage nature a pourvu à la défense de tous les êtres, donnant aux uns la
force musculaire, à d'autres l'aile rapide ou dos jambes d'acier, aux plus
déshérités eux-mêmes des armes inoffensives, mais le plus souvent suf-
fisantes pour leur sécurité. La timide Alouette, blottie dans le sillon,
ne sait-elle pas se rendre à peu près invisible, en confondant son plu-
mage dans les mouchetures du sol environnant? La Truite nuance sa
livrée suivant la nature des eaux où elle vit. Ainsi voyons-nous le Liè-
vre des contrées septentrionales se couvrir d'une fourrure blanche dès
les premières neiges de l'hiver. Ainsi encore, certaines Araignées et de
minimes Phalènes se confondent absolument avec les Lichens des vieux
arbres.
Ce jeu des couleurs n'est pas moins curieux à observer chez quel-
ques Papillons des pays tropicaux. Rappelons, avec le journal la Nature,
ce qu'écrivait à ce propos le célèbre voyageur anglais IL Wallace :
« Les ailes du Callima sont terminées à leur extrémité par une line
pointe, exactement comme celles des feuilles de beaucoup d'arbustes
des tropiques; entre ces deux pointes, court une ligne courbe et som-
bre, qui représente exactement la nervure médiane de la feuille, et d'où
rayonnent de chaque côté des lignes légèrement obliques qui imitent
fort bien les nervures latérales; ces lignes sont produites par des stries
qui se sont modifiées et renforcées, de façon à imiter plus exactement
la nervulation des feuilles ; la queue des ailes forme une tige parfaite,
et touche la branche, pendant que l'insecte est supporté par les pattes
du milieu, que l'on ne peut remarquer parmi les brindilles qui l'en-
tourent. »
M. Maindron a fait lui-même des observations analogues, au cours de
ses voyages en Malaisie. 11 décrit dans la même publication certains
orthoptères qui, s'attachant aux arbres, prennent dans leur premier
âge l'apparence de brindilles, pour ressembler, à mesure qu'ils gran-
dissent, à des rameaux, plus tard même à des branches.
Oue d'intéressantes pages n'écrirait-on pas sur cette extraordinaire et
providentielle prévoyance qui s'étend jusque sur les êtres les plus infi-
mes de la création ! Am. B.
Le Gérant : Jules Grisard.
5283. — BoiiRLOTON. — Imprimeries réunies, A, rue Mignon, 2, Paris.
TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ
NOTE
SUR LES MOUTONS CHINOIS PROLIFIQUES
(MOUTONS ONG-TI)
Par M. RONSARD
d'Omey (Marne)
Ayant reçu en cheptel, il y a cinq ans, un Bélier et deux
Brebis de la race Ong-ti, je viens rendre compte à la Société
des résultats obtenus.
Les débuts n'ont pas été heureux ; six mois après leur ré-
ception, une des Brebis mourait de tuberculose. Restaient donc
le Bélier et une Brebis dont la santén'était pas bien brillante.
Ma Brebis Ong-ti devint mère et donna le jour à deux
agneaux de sexe différent. Elle eut peine à les allaiter et il
fallut recourir au lait de chèvre pour les conserver tous deux.
Le mâle, d'abord magnifique, ne tarda pas à présenter les
symptômes de la tuberculose et ne vécut pas plus de treize
mois. La petite femelle, chétive au début, se développa avec
l'âge et devint la souche de quatre animaux de pur sang que
j'ai pu conserver.
La race Ong-li me paraît donc peu propre à l'élevage
sous notre climat. Sa prolificité ne persiste pas dans notre
pays, et la mère ne peut véritablement allaiter avec profit
qu'un petit. Vantée beaucoup à sa première apparition en
France, comme pouvant donner naissance à deux et trois
agneaux et les nourrir jusqu'au sevrage, elle n'a pas soutenu
4« SÉRIE, T. m. — Mai 1886. 16
242 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCGLIMATATION.
ici sa réputation (1) : le climat, la nourriture, ont modifié
cette qualité et ramené les Ong-ti au niveau des races du
pays. Il en a été de même auparavant pour la race du
Holstein, qui donne jusqu'à quatre petits à la fois et les
élève dans les polders et ne peut en nourrir qu'un sous un
autre ciel. Nos Brebis mérinos donnent souvent deux agneaux
et les bergers sacrifient presque toujours l'un d'eux, aimant
mieux un bon agneau que deux médiocres.
Au point de vue de la production de la laine, la race Ong-ti
ne peut être citée que comme porteuse d'une laine grossière,
souvent feutrée sur l'animal et en très petite quantité.
Quant à la viande, elle passe pour très bonne, mais je n'ai
pas encore dégusté celle d'animaux de pur sang et ne puis
en parler savamment.
Donc les Ong-ti, à part leur aspect original, avec leurs
petites oreilles, leur queue développée quand ils sont gras,
la laine du poitrail du Bélier formant une espèce de tablier
tombant jusqu'aux genoux, ne me semblent pas appelés à un
autre avenir que d'orner des parcs à Moutons sur les pelou-
ses d'un jardin d'agrément.
A côté du pur sang, j'ai élevé des métis; en donnant le
bélier Ong-ti à des brebis mérinos champenoises, j'ai obtenu
de nombreux produits. Les jeunes ont une croissance rapide ;
devenus adultes, ils donnent une laine à matelas de bonne
qualité; mais, comme la laine cesse d'être un produit rému-
nérateur, je ne puis insister sur ce point.
Reste à examiner la production de la viande. Ici les métis
Ong-ti mérinos sont véritablement remarquables. Il n'est pas
rare d'obtenir de Moutons élevés aux champs comme les mé-
(1) Les Moutons chinois ont donné au Jardin zoologique d'Acclimatation
des résultats plus satisfaisants que ceux indiqués par M. Ponsard.
On n'y a point vu d'animaux tuberculeux, les Brebis se sont montrées ex-
cellentes laitières, nourrissant facilement deux et même trois agneaux, enfin
les mères nées au Bois de Boulogne ont été tout aussi prolifiques que les im-
portées.
Il faut croire que le régime auquel les animaux étaient soumis à Omey ne
leur a pas convenu. Nous croyons que ces bêtes ovines craignent beaucoup
l'humidilé et qu'elles peuvent réussir quand elles sont bien nourries et entre-
tenues sur un sol sec.
A. G. S. H.
SUR LES MOUTONS CHINOIS PROLIFIQUES. 248
rinos un poids brut, à dix-huit mois, de 80 kilogrammes,
leur rusticité est parfaite, leur gigot et les côtelettes de haute
saveur. Ce n'est plus de la viande de mouton, ce n'est pas de
la chair de chevreuil, mais c'est certainement une viande
qui tient des deux et ressemble à de la venaison. Tous mes
amis qui ont dégusté cette viande sont d'accord sur sa qua-
lité supérieure et son fumet distingué.
J'espère former un petit troupeau de ces métis et pouvoir
un jour appeler l'attention des gourmets sur la finesse des
morceaux délicats qu'ils fournissent à l'âge de dix-huit mois
à deux ans.
En somme, je suis satisfait de l'expérience que je viens de
faire. La Société d'Acclimatation en important les Ong-ti aura
donné aux amateurs de bonne viande, sinon par les pur
sang, au moins par les métis, une nouvelle variété d'animaux
faciles à élever, familiers dans l'enclos dont ils feront l'orne-
ment, et remplis d'eflluves chers aux palais délicats, au mo-
ment où sur la table de l'amphitryon le couteau attaquera
leur cuissot tendre et saignant à réjouir Brillai-Savarin lui-
même.
CATALOGUE RAISONiNE
PAR RÉGIONS
DES ESPÈCES D'OISEAUX
qu'il V AURAIT LIEU
D'ACCLIMATER ET DOMESTIQUER EN FRANCE
Par L. MACiAL'D D'AUBVSSOIV
(Suite.)
TETRAONIDES.
Cette deuxième famille de Gallinacés, moins importante
que celle des Phasianides au point de vue des services que nous
pouvons en attendre, offre cependant un intérêt de premier
ordre, si l'on considère que la diminution croissante du gibier
dans nos campagnes rend indispensables des mesures sé-
rieuses de repeuplement. Or ce repeuplement doit s'effectuer
non seulement par une protection intelligente et énergique,
accordée à nos espèces indigènes, mais aussi par l'introduc-
tion de certaines espèces étrangères, dont les mœurs, les ha-
bitudes et le régime présenteront, peut-être, des moyens de
défense mieux appropriés aux conditions nouvelles du sol.
Les Tétraonides de la Chine comprennent quelques-unes
de ces espèces d'avenir. Nous devons les signaler, d'une ma-
nière spéciale, à l'attention des éleveurs.
Au préalable, nous énumérerons brièvement d'autres es-
pèces dont l'aire de dispersion s'étend sur plusieurs points du
vaste territoire chinois , mais que nous retrouverons plus
lird dans leur véritable patrie et sur lesquelles nous donne-
rons alors, s'il y a lieu, de plus amples informations.
Ainsi le Syrrhaple paradoxal, Tetrao paradoxaValhs, ori-
ginaire des steppes de l'Asie centrale, qui visite irrégulière-
ment l'Europe et dont les colonnes s'avancent parfois jus-
OISEAUX A ACCLIMATER. 245
qu'en France (1), niche dans toute la Mongolie et descend en
hiver, par bandes nombreuses, dans les plaines du Petchely,
On en prend au filet, dans cette saison, des quantités considé-
rables entre Tientsin etTakou (2).
Dans les montagnes boisées du nord de l'Empire, on ren-
contre quelquefois une race plus petite de noire Coq de
Bruyère, le Tetmo urogalloides Middendorl'; mais cet oiseau
habite principalement le Kamtschatka , la Transbaïkalie ,
l'Amourland el la Mantchourie.
La Mantchourie et la Chine septentrionale possèdent aussi
la Gelinotte vulgaire, Tetrao honasia Linné, qui est assez
commune dans les montagnes de l'Europe occidentale et en-
core plus répandue dans le nord de la Russie et dans la Sibé-
rie orientale, où elle s'avance, d'après Middendorf, jusqu'au
69' degré de latitude nord (3). Cet oiseau se reproduit même
dans la province de Pékin, sur les hautes montagnes boisées
du Peythang et du Tonglin. Les Chinois le désignent sous le
nom de Chou-ky, « Poule d'arbres », parce qu'il vit dans les
bois et se tient d'ordinaire perché sur les branches.
Il est possible que l'on rencontre également sur les fron-
tières septentrionales de la Chine une autre espèce de Tétras,
Tetrao falcipennis Hartlaub. Radde (4) et après lui Midden-
dorf observèrent cet oiseau dans la Sibérie orientale et le
confondirent avec le Telrastes Ca.nadensis. C'est probable-
ment cette espèce que M. Préjevaiski dit avoir trouvée en
Mantchourie et non, comme il le pense, la Gelinotte du Ca-
nada.
Sur les rochers et dans les terrains pierreux des parties
montagneuses de la Mongolie et du nord-ouest de la Chine,
vit en grand nombre la Perdrix chukar, Cacabis chukar
(1) En 1863, il y eut une véritable invasion de Syrrhaptes en Europe. Des bandes
plus ou moins nombreuses se montrèrent sur beaucoup de points de la Russie,
de l'Allemagne, du Danemark, de la Hollande, de l'Angleterre, de la Suisse, de
la France. Elles se répandirent dans plusieurs de nos départements, notamment
dans ceux de la Somme, de l'Aube, de la Vendée, de la Moselle.
(2) Ces oiseaux sont si nombreux, qu'en 1861 ils servirent pour une large
part au ravitaillement de l'armée anglo-française.
(3) Sih. Reis., t. Il, p. '2ii^2, pi. XVIl, fig. 4 (1847-1859).
(4) Reis. in S. 0. Sib., t. 11, p. 301 (1863).
246 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
Gray. Cet oiseau, que l'on a signalé d'abord dans l'Himalaya
a élé retrouvé depuis dans diverses contrées de l'Asie et jus-
qu'en Grèce, notamment dans l'île de Crète.
D'après M. Swinhoë, il y aurait en Chine deux espèces de
Cailles proprement dites, au sud la Caille d'Europe, Colur-
nix communis Bonnalerre, et au nord la Caille du Japon,
Coturnix Japonica Temminck et Schelegel (1). Il existe ce-
pendant peu de différences entre les oiseaux qui proviennent
des diverses provinces de l'Empire chinois. Celles que l'on
indique peuvent tout au plus servir à caractériser une race et
encore sont-elles loin d'être constantes. D'autre part, Cotur-
nix Japonica, qui se trouve non seulement au Japon, mais
aussi dans la Chine septentrionale et en Daourie, ne nous pa-
raît pas différer spécifiquement de Coturnix communis.
Les Chinois dressent la Caille commune pour le combat, et
ils apportent à ce genre de plaisir une ardeur au moins égale
à celle des Malais pour les combats de Coqs.
Un Européen, qui a longtemps séjourné en Chine, nou-
donne quelques détails curieux sur ce sport singulier.
« Les Chinois, dit-il, qui ont la passion du jeu poussée très
loin, comme la plupart des peuples de l'Asie, se rendent dans
les maisons de jeu avec un certain nombre de Cailles renfer-
mées chacune dans une bourse en toile fermée, dans sa partie
supérieure, par une coulisse. Là ils trouvent bientôt un ad-
versaire qui accepte le pari proposé, et immédiatement on
lâche les deux champions sur un turf de la forme d'un crible
dont le fond est en toile, clouée extérieurement sur un cercle
en bois, ayant environ 70 centimètres de diamètre sur iO de
haut. Là, nos petits adversaires se trouvent comme en champ
clos et s'attaquent sans hésitation. Le sort du combat est aussi
très court : il dure de une à trois minutes, et enfin , après
l'issue du combat, chacun des éleveurs reprend son petit anis
mal, lorsqu'il n'a pas péri dans la lutte, le replace dans la
bourse dans laquelle il l'a apporté, et en sort un autre tout
frais, offrant une revanche à celui qui a perdu , et souvent
(l) Fauna japonica. Aves, p 103, pi. 61.
OISEAUX A ACCLIMATER. 247
même défiant les spectateurs, surtout lorsqu'il a été victo-
rieux (i). »
Le P. David complète ces renseignements par les indica-
tions suivantes. « Les Chinois emploient la Caille comme
oiseau de combat : pour l'apprivoiser et pour augmenter ses
dispositions belliqueuses, ils lui font prendre des bains de thé
chaud, puis ils la font sécher en la tenant dans leur manche.
Après un certain nombre de ces bains, qui sont suivis d'au-
tant de repas, l'oiseau est suffisamment habitué à la main de
l'homme et tout disposé à entrer en lice contre ses semblables.
Ces sortes de combats font les délices des Chinois, qui y enga-
gent souvent des sommes considérables (2). »
Dans l'île de Formose et dans les provinces méridionales
de la Chine, on rencontre une très jolie petite espèce connue
depuis longtemps, décrite par Brisson dans son Ornitholo-
gie (3) sous le nom de Caille des Philippines, et par Sonne-
rat, dans son Voyage dans la Nouvelle-Guinée {-i) , sous celui
de Petite Caille de l'île de Lugon. Temminck l'a appelée Co-
turnix excalfactoria, mot à mot : Caille échauffante, qui
'produit de la chaleur, parce que, disait-on, les Chinois s'en
servaient pour se chauffer les mains en hiver. « En effet, dit
Temminck, ces peuples nourrissent une multitude de ces pe-
tits oiseaux, qu'ils tiennent dans des cages et les portent vi-
vants pour se tenir les mains chaudes, ce qui fait supposer
dans ces animaux une chaleur naturelle très forte (5). »
Bonaparte a fait de la dénomination spécifique assez sin-
gulière de cet oiseau un nom de genre, et celte Caille naine
est aujourd'hui généralement connue des ornithologistes sous
(1) Tastet. D'après Brehm, Ois., édit. fraiiç., t. II, p. 381.
(2) David et Oustalet, Les Oiseaux de la Chine, p. 396 (1877).
(3) T. I, p. 254, pi. 25, fig. 1.
(4) P. 54, pi. 24.
(5) Histoire naturelle générale des Pigeons et des Gallinacés, t. III, p. 516
(1815). — Cet usage rappelle ces boules en cuivre connues sous le nom de
chauffe-mains dont on se servait en Europe au seizième siècle.
Ces boules attachées au bras par une chaînette, s'ouvraient et portaient à
l'intérieur quelques braises ardentes dans un petit fourneau, sur pivot mobile,
à double mouvement et disposé de manière à n'être point renversé, quelle que
soit la position prise par la boule.
On peut voir plusieurs de ces curieux ustensiles au Musée de Cluny.
248 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
le nom d'Excalfactoria de la Chine {Excalfacloria Chinensi$
Bonaparte) (1), bien qu'elle se trouve encore à Ceylan, au
Bengale, dans l'Assam, dans la Birmanie et aux Philippines.
Enfin le Turnix de Dussumier est répandu en grand nombre
sur les collines herbeuses de l'île de Formose, mais il est plus
commun encore dans les champs et les prairies de l'Inde.
TÉTRAGALLE DU THiBET {Tetvaogallus tibetcmus Gould).
Tetraogallus tibetanus, Gould, Proc. Zool. Soc. {lSb3),'p.il ; Birds of Asia (1853),
livr. V, pi. — David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877), p. 391.
Les Tétragalles établissent une transition entre les Tétras
et les Perdrix. Ce groupe offre une grande importance au
Tétragalle du Thibet (Tetraogallus tibetanus Gould). 1/5 gr. nat.
point de vue de l'utilité que l'homme peut en retirer, car les
oiseaux qui le composent sont tous d'excellents gibiers que
(1) Compt. rend. Ac. se, t. XLII. Tabl. des GalL, n" 288.
OISEAUX A ACCLIMATER. 249
l'avenir nous lient en réserve pour repeupler nos hautes
monlaones.
Nous nous étendrons plus longuement sur ce sujet lorsque
nous arriverons au Tétragalle de l'Himalaya. Il nous suffit,
pour le moment, d'inscrire parmi les Gallinacés de la Chine
une espèce que l'on rencontre plus particulièrement dans le
Thibet proprement dit, mais qui habite aussi , quoique en petit
nombre, les montagnes de la Chine occidentale.
Les deux premiers spécimens de cet oiseau furent envoyés
à « The Honourable East India Company », l'un par le capi-
taine Strachey, l'autre par Hodgson. Gould décrivit cette nou-
velle espèce et lui donna le nom de Tibetanus.
Ce Tétragalle, le plus petit de son genre, a le bec orangé
vif et les pattes rouges; la gorge, la poitrine et l'abdomen
blancs, ce dernier strié de noir sur les flancs et en arrière.
Les parties supérieures du corps sont variées de noir et de
gris avec les plumes du milieu du dos et les sus-alaires lar-
gement bordées de jaune pâle, le croupion et les sus-caudales
nuancés de roux.
PERDRIX BARBUE
{Perdix harhata J. Verreaux et 0. des Murs).
Tetraoperdix, var. Daurica, Pallas, Zoogr. (1811), t. Il, p. 78. — Perdix
barbata, J. Verreaux et 0. des Murs, Proc. ZohI. Soc. (1863), p. 62 et
p. 371, pi. y.— Swinhoë, ibid. (1863), p. 307. — A. David, Nouv. Arch. du
Mus. (1871), Bull. Vil. — Gould, Birds of Asia (1871), livr. xxiii. —
David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877), p. 392.
Cette espèce se rapproche beaucoup de notre Perdrix grise
d'Europe. Elle en diffère cependant par sa taille plus faible,
les plumes longues et acuminées qui garnissent sa gorge et
qui lui ont valu son nom de barbue , la couleur de la grande
tache, en forme de fer à cheval, qui orne l'abdomen du mâle
et qui est d'un noir profond au lieu d'être d'un brun mar-
ron, enfin par la présence de deux petites raies noires situées
l'une sur les narines, l'autre au-dessous de l'œil.
Celte Perdrix, déjà rencontrée par Pallas, habite non seu-
250 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
lement le sud de la Sibérie orientale, mais la Mongolie et le
nord de la Chine et s'avance jusque dans le Chensi méridio-
nal. Elle fréquente les endroits montueux et les plaleaux éle-
vés, au milieu des herbes et des broussailles. « Dans toute
cette région, dit le père David, l'espèce doit être fort abon-
dante, à en juger par le grand nombre de ces oiseaux
qu'on apporte souvent, en hiver, au marché de Pékin. J'en
ai vu des monceaux de quatre à cinq cents individus. »
[LERWE DES NEIGES {LcTwa mvicolci Hodgsou).
Perdix lerwa, Hodgson, Proc. Zool. Soc. (1833), p. 107. — Gray, III. Ind.
Zoo/. '(1830-ci4), t. II, pi. 44, f. I. — Lerwa nivicola, Hodgson, Madras Jour.
(1837), p. 301.— Gould, Birds of Asia (1855), livr. vu, pi. —A. David,
Nouv. Arch. du Mus. (1871), Bull. VII.— Swiniioë, Proc. Zool. Soc. (1871),
p. 400. —David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877), p. 392.
Cette Perdrix qu'Hodgson nous a fait connaître, et qu'il
décrivit le premier en 1833, dans les Proceedings of the
Zoological Society sous le nom de Perdrix lerwa et pour
laquelle il créa plus tard un genre à part, présente un inté-
rêt sérieux au point de vue de l'acclimatation. Elle peut, en
effet, devenir un nouveau gibier, à côté du Tétragalle, pour
les hautes montagnes de nos contrées.
Elle habite les régions élevées de l'Himalaya (1) et du
Thibet, ainsi que les montagnes de la Chine occidentale,
dans le voisinage des neiges éternelles. Le père David l'a
rencontrée à Moupin, à plus de 4000 mètres d'altitude.
Ces oiseaux vivent en petites bandes sur les rochers escarpés
et préfèrent aux parties boisées les endroits arides où crois-
sent çà et là quelques touffes de bruyère. Ils placent leur nid
à l'abri d'une saillie de la roche. Leur nourriture consiste en
herbes, racines, grains et insectes. Faciles à effaroucher, ils
fuient d'un vol vigoureux et se réfugient au milieu des gla-
(1) Bien que cet oiseau appartienne plus spécialement à la faune hima-
layenne, nous le faisons figurer au nombre des oiseaux de la Chine thibétaine,
parce qu'il se trouve en nombre très considérable dans les montagnes de cette
région, d'où il est plus facile de le faire venir, par les débouchés de la Chine
occidentale.
OISEAUX A ACCLIMATER. 251
ciers lorsqu'on vient les troubler. Us font entendre alors un
cri bref qu'on peut rendre par « Oniok, quiok ». Leur chair
est blanche et délicate.
La Lerwe des neiges, qui mesure environ O^jSS, a toutes
les parties supérieures du corps rayées transversalement de
noir, de blanc ou de roux. La poitrine est d'un brun mar-
Lerwe des neiges {Lerwa nivicola Hodgson).
ron. La même teinte règne sur les flancs et les sous-caudales
qui sont marquées de taches blanches et noires. Les rémiges
sont brunes, légèrement pointillées de blanc, le bec et les
pattes rouges.
Le mâle et la femelle se ressemblent et sont à peu près de
la même taille. Les jeunes, d'après Hodgson, ne diffèrent des
adultes que par les teintes plus sombres de la poitrine et des
flancs.
Les Chinois nomment cet oiseau Sué-Ky, « Poule des
neiges ».
252 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
OREOPERDRIX A GORGE SANGLANTE
{Oreoperdix crudigularis Swinhoë).
Oreoperdix crudigularis, Swinhoë, Ibis (1864), p. 426. — Jbid. (1865), p. 542.
— Ibid. (1866), p. 133, 134, 401. — Proc. Zool. Soc. (1871), p. 400.— David
et Ouslalet, Ois. de la Chine (1877), p. 393.
Cette Perdrix n'a été signalée jusqu'à présent que dans
l'île de Formose. Elle y fut rencontrée par M. Swinhoë et
décrite par lui pour la première fois dans VI bis, en 1864-.
Elle est remarquable par la dénudation de la gorge recou-
verte seulement de quelques plumes noires éparses sur la
peau d'un rose qui passe au rouge vif dans la saison des
amours. Le brun-olive et le gris jaunâtre dominent dans le
plumage. Ces teintes sont relevées par le noir des joues et
des sourcils, le rose carminé de la peau nue qui entoure
l'œil, les mouchetures des flancs, des scapulaires et des rémi-
ges, les barres irrégulières noires des rectrices, les pattes
roses et le bec noir.
PERDRIX DES BAMBOUS ORDINAIRE
{Bambusicola thoracica Swinhoë).
Perdix thoracica, Temminck, //fsf. nat. Pigeons et GaZ/inaces (1813-18), t. III,
p. 335. — Perdix sphenura, Gray, Zool. Mise. (1844), p. 2. — Bambusicola
sphenura, Gould, Proc. Zool. Soc. (1862), p. 285. — Arboricola bambusse,
Swinhoë, /6i5 (1862), p. 259. — Bambusicola tlioracica, Swinhoë, Proc. Zool.
Soc. (1863), p. 307; Ibid. (1871), p. 400. — David et Oustalet, Ois. de la
Chine (1877), p. 393.
Dos d'un brun olivâtre taché de brun marron et marqué de
quelques points blancs. Front gris, sourcils de même cou-
leur se prolongeant de chaque côté de la nuque. Bec brunâ-
tre. Menton et gorge d'un rouge ferrugineux plus foncé sur
les côtés du cou ; poitrine traversée par une large bande
grise; abdomen d'un roux ferrugineux, taché de brun noirâ-
tre sur les flancs. Rémiges brunes bordées de roux. Pattes
gris jaune. Iris brun clair.
Cette espèce, d'après le père David, habite toute la Chine
OISEAUX A ACCLIMATER. 253
méridionale depuis le Fokien jusqu'au Setcliuan et au
Chensi méridional, mais ne dépasse point au nord le bassin
du Yangtzé. Elle vit en couples sur les collines couvertes de
buissons et de taillis ou dans les bambouseraies et se tient
fréquemment perchée. Son cri consiste en une longue série
de notes perçantes et diffère totalement de celui de nos
Perdrix.
Cet oiseau, connu aussi sous les noms de Perdrix ouakiki,
Perdrix peixheuse de la Chine, a été bien étudié comme
gibier nouveau à introduire par un éleveur fort habile,
M. E. Leroy.
Dans un mémoire adressé à M. le président de la Société
d'Acclimatation, l'auteur fait ressortir les avantages que pré-
sentent, parmi les Perdrix, les espèces percheuses sur celles
qui ne le sont pas.
« Outre, dit-il, qu'elles offrent moins de prise aux engins
destructeurs du bi'aconnage, leurs habitudes naturelles, c'est
un point sur lequel on ne saurait trop insister, leur inter-
disent d'une façon absolue la nidification en rase campagne. »
M. Leroy, développant cette idée, ajoute : « Voici, en effet,
ce qui se passe chez la Perdrix percheuse :
» La femelle niche à terre, comme notre Perdrix, mais
l'affection pleine de sollicitude du mâle pour sa compagne
est telle qu'il ne la quitte pas d'un instant, tant que durent
l'incubation et la première éducation des jeunes. D'un autre
côté, sa nature lui fait un besoin impérieux de rester branché
une partie des heures de la journée et invariablement la nuit.
Du haut de sa branche, il fait bonne garde en môme temps
qu'il se tient en communication constante avec sa compagne,
affaissée sur ses œufs ou sur ses petits nouvellement éclos, et
qu'il échange avec elle des conversations à voix contenue.
j La nécessité de concilier ses instincts les plus intimes de
vie de famille avec sa nature impérieusement percheuse in-
terdit dès lors à cette Perdrix toute velléité de reproduction
en plaine.
» Il lui faut des bois, des bosquets ou des bordures de bois.
» Comme conséquence, avec elle plus à redouter de ces
254 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
hécatombes d'œufs si regrettables, à l'époque, trop précoce
pour nos Perdrix françaises, de la fauchaison des prairies
artificielles.
» Aussi estime-t-on généralement que le salut de nos chas-
ses à tir réside dans l'introduction de Perdrix percheuses. »
Pénétré de cette conviction, M. Leroy a apporté à ses ob-
servations un soin et une assiduité en rapport avec l'avenir
brillant qu'il entrevoyait pour la Perdrix percheuse. Par sa
persévérance il l'a forcée à lui livrer les secrets de ses mœurs
et de ses aptitudes. De cette étude prise, comme il le dit, sur
le vif, vécue avec le sujet, et des succès de reproduction
qu'il a obtenus, il croit pouvoir conclure en disant:
(( Il nous est donc permis d'espérer que le jour malheureu-
sement [à prévoir où nos Perdrix françaises auront disparu,
la Société d'Acclimatation sera en mesure de combler cette la-
cune regrettable et de répondre aux doléances des disciples
de saint Hubert par ces bonnes paroles qui valent tout un
poème :
» Voilà une Perdrix (1) ! »
Nous nous associons à cet espoir, mais pour le voir se réa-
liser, il est nécessaire de multiplier les expériences, de les
renouveler dans les conditions où devra se trouver l'oiseau
à l'état libre, d'adapter enfin peu à peu le sujet au milieu qui
doit le recevoir. Aussi recommandons-nous cette Perdrix
percheuse à toute. Ja sollicitude des éleveurs et serons-nous
heureux d'enregistrerles efforts tentés dans cette voie et les
résultats, acquis.
(1) Étude sur la Perdrix Omkild ou Perdrix percheuse de la Chine (Gallo-
perdix sphenura) (Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation, 1880,
p. 693).
OISEAUX A ACCLIMATER.
-255
PERDRIX DES BAMBOUS A VOIX RETENTISSANTE
(Bambusicola sonorivox Gould).
Bambusicola sonorivox, GouUl, Proc. Zool. Soc. (1862), p. 285. — Swinhoë,
Uns (1863), p. 399. — Gould, Birds of Asia (1864.), livr. XVI, pi. — Swinhoë,
Proc. Zool. Soc. (1871), p. 4-60. —David et Ouslalet, Ois. de la Chine (1877),
p. 394.
Plus petite que l'espèce précédente qu'elle remplace dans
l'île de Formose, celte Perdrix ressemble à sa congénère par
les mœurs, la voix et même l'aspect général du plumage,
Perdrix des Bambous à voix retentissante {Bambusicola sonorivox Gould).
dont la coloration cependant offre quelques différences. Ainsi
les grandes taches des parties inférieures sont rousses au lieu
d'être noires, celles du sommet de la tête sont au contraire
d'un brun noirâtre au lieu d'être rousses, et enfin la teinte
grise de la poitrine est moins prononcée et ne s'étend point
sur les joues et les côtés du cou.
256 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
PERDRIX DES BAMBOUS DE FYTCHE
(Bambusicola Fylchii Anderson).
Bambusicola Fytchii, Anderson, Proc. Zool. Soc. (1871), p. 214 et pi. XI. —
Swinhoë, ibid. (1871), p. 400. — David et Oustalet, Ois. de la Chine (1877),
p. 394.
Celte espèce a été découverte sur les frontières occidentales
du Yunam, mais peut-être, d'après le père David, son aire de
dispersion s'étend-elle jusqu'au Setchuan. Ce missionnaire a
vu, en effet, dans cette province un de ces oiseaux qui avait été
apporté en cage par des Chinois venus de l'angle méridional
du Yangtzé.
Poitrine du mâle d'un gris cendré tacheté de roux ; face et
devant du cou jaunâtres ; ventre blanc, taché largement de
noir ; parties supérieures du corps d'un gris brunâtre, ver-
miculées de noirâtre et tachées de roux et de noir. Une raie
partant de l'œil descend sur le côté du cou, noire chez le
mâle, rousse chez la femelle.
FRANCOLIN PERLÉ OU FRANCOLIN DE LA CHINE
(Francolinus sinensis Swinhoë).
Perdix Sinensis, Brisson, Omith. (1760), t. I, p. 23i, pi. 28.— Tetrao Sinensis,
Osbeciv, A voijage to China (1771), t. I. —Le Francolin de Tlsle de France,
Sonnerat, Voy.Ind. (1782), p. 166, pi. 97. — Francolinus perlatus, Stricktand,
Proc. Zool. Soc. (1842), p. 167. — Swinhoë, Ibis (1860), p. 63. — Francolinus
Sinensis, Swinhoë, Proc Zool. Soc. (1863), et ibid. (1871), p. 400. — David
et Oustalet, Ois. de la Chine (1877), p. 400.
Les Francolins ont beaucoup de rapports avec les Perdrix
et ce n'est que par quelques particularités organiques d'assez
peu d'importance telles que la présence d'un éperon chez les
mâles, la queue plus longue et un bec plus fort qu'on peut
les distinguer. Encore ces caractères ne se trouvent-ils pas
toujours réunis, d'où il est résulté qu'on a longtemps con-
fondu génériquement ces deux groupes.
Les mœurs de ces oiseaux ne sont pas encore très bien
connues ; mais ce que l'on en sait permet d'affirmer qu'elles
ont également une grande analogie avec celles des. Perdrix.
OISEAUX A ACCLIMATER. 257
€omme ces dernières, ils sont monogames, demeurent habi-
tuellement dans la contrée où ils sont nés, courent rapide-
ment, volent bien, mais à courte distance, se rappellent lors-
qu'ils sont séparés, sont très féconds, très attachés à leurs
Jeunes, et les mâles se livrent des combats violents pour la
possession d'une femelle.
' D'un autre côté, ils ont des habitudes qui leur sont propres.
'Ainsi, aux lieux découverts ils préfèrent les bois, ceux sur-
tout où dominent les buissons qui leur fournissent un refuge
et des aliments. Ils fréquentent aussi les plaines humides,
marécageuses, couvertes de joncs.
Certaines espèces ont l'habitude de percher, comme on
Ta le voir pour le Francolin de la Chine; d'autres le font plus
rarement, et il en est même, paraît-il, qui ne perchent pas.
Ils vivent par paires et par familles.
Leur régime est très varié ; ils se nourrissent de bourgeons,
de feuilles, de pousses d'herbes, de baies, de graines, de
vers, d'insectes, de bulbes de plantes et de racines, qu'ils
découvrent en fouillant la terre avec leur bec.
Le Francolin perlé a le sommet de la tête varié de fauve et
de brun, le front jaunâtre, deux traits noirs sur les côtés de
la tête, séparés par une bande blanche, la gorge blanche, le
dos, la poitrine et l'abdomen noirs semés de taches arrondies,
blanches sur les parties supérieures du corps et le thorax,
d'un jaune ocreux sur les flancs et en arrière, l'iris brun,
le bec noir et les pattes jaunes.
Le fond du plumage de la femelle est brun varié de rou-
geâtre, et chez elle les taches arrondies sont remplacées par
des raies irrégulières.
Cet oiseau habite les parties montagneuses de la Chine
méridionale et l'île de Haïnan (1). On le rencontre aussi en
Gochinchine et en Birmanie.
Dans une lettre que nous a adressée dernièrement M. Ha-
mel de la Bassée, chargé par le Ministre de l'Instruction pu-
(1) Si l'on en croit Osbeck {A voijage to China, 1771, t. I), les Chinois se
servaient de cet oiseau, comme de la Caille, pour s'échautrer les mains pen-
dant l'hiver.
4= SÉRIE, T. III. — Mai 1886. 17
258 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCGLIMATATION.
blique d'une mission en Gochinchine, nous relevons sur l'oi-
seau qui nous occupe les renseignements suivants :
« Le Francolin de la Chine, dont le nom annamite est
« Gon-da-da», imitation d'ailleurs parfaite de son cri, est
fort commun dans le nord de la Gochinchine, en Annam, au
Gambodge.
» Dans l'arrondissement de Tayninh (Gochinchine), que
j'ai parcouru dans tous les sens, il m'est arrivé souvent d'en
tuer une dizaine dans ma matinée, pendant la saison sèche,
chassant avec un bon chien d'arrêt.
» Le Francolin de la Chine se tient de préférence dans les
plaines broussailleuses avoisinant les bois. Son vol au départ
est bruyant, pointant vers le ciel, puis rapide et soutenu.
. » Jamais je ne l'ai observé en compagnie.
» Il se perche habituellement sur un arbre de la lisière du
bois, ou encore au beau milieu d'une plaine, sur un arbre
isolé, et de là il lance à toute volée ce cri de « con-da-da,
con-da-da », plusieurs fois répété, et qui s'entend à une
distance considérable.
» C'est un fort beau coup de fusil, et sa chair, sans avoir
la saveur de celle de la Perdrix grise, est un manger dé-
licat. »
Ce Francolin habite également les lieux bas et humides.
Le même voyageur l'a rencontré souvent dans des plaines
inondées, coupées çà et là seulement de petites éminences
recouvertes de buissons. « J'en ai fait lever, nous écrit-il,
presque dans l'eau. »
TURNix MOUCHETÉ {Tumix mctculatus Vieillot).
Hemipodius maculosus, Teniminck, Ilist. nat.Pig. et Gall. (1813-1818), t. III,
p. 631.— Turnix maculatus, Vieillot, iVowî;. Dicl. d'hist. nat. (1819), t. XXXV,
p. 47, et Galerie des Ois. (1825), p. 25, pi. 217. — Turnix maculata, Bona-
parte, Compt. rend. Ac. se. (1856), t. XLII, p. 12. Tabl. des GalL, n" 305. —
Hemipodius vicarius, Swinhoë, Proc. Zool. Soc. (1871), p. 402. —Turnix
maculatus, David et Ouslalet, Ois. de la Chine (1877), p. 398.
Les Turnix comprennent les plus petits des Gallinacés. Ils
sont surtout caractérisés par leur queue très courte, presque
OISEAUX A ACCLIMATER.
259
enlièrement cachée par les sus et sous-caudales et par leurs
doigts au nombre de trois.
Leurs mœurs tiennent ta la fois de celles des Cailles et de
celles des Pluviers; aussi Gould les a-t-il regardés comme
établissant la transition des Gallinacés aux Charadriidés.
Ces oiseaux mènent une vie très cachée parmi les hautes
herbes et les broussailles qui recouvrent les plaines sablon-
neuses et les vallées semées de rochers. Lorsqu'on les force à
prendre leur vol, ils partent comme une flèche, mais s'abat-
Turnix moucheté (Turnix maculatus Vieillot).
lent presque aussitôt, et après un premier vol, ils prennent
difficilement une seconde fois leur essor. Dans la saison des
amours, ils deviennent plus actifs; les mâles, jaloux et que-
relleurs, se livrent des combats acharnés.
Leur nourriture se compose principalement d'insectes et
de semences. Le nid, sans art, est formé de quelques herbes
rassemblées dans une dépression du sol ; la ponte est de
quatre œufs.
Mais le point essentiel qui fait différer les Turnix des
Cailles, c'est qu'ils n'émigrent point, ou, s'il leur arrive de
s'éloigner des lieux où ils sont nés, ils n'entreprennent ja-
260 SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION.
mais de ces lointains voyages qu'accomplissent périodique-
ment les Cailles.
Nous avons parlé plus haut du Turnix de Dussumier, Son
congénère, le Turnix moucheté, se trouve sur toute l'étendue
de l'Empire chinois. D'après le père David, il est commun,
en été, aux environs de Pékin, et se relire pendant l'hiver
dans les provinces centrales et méridionales (1).
Cet oiseau a le dessus de la tête brun mélangé de roux
fauve, les joues d'un jaune pale varié de brun et la nuque
ornée d'une large tache d'un roux ferrugineux, le dos marqué
de bandes irrégulières noires, rougeâtres et fauves, la poi-
trine d'un roux vif et l'abdomen blanc, l'iris blanc, le bec
jaune avec la pointe brunâtre, les pattes jaunes.
aréoturnix de formose {Areoturniœ rostrata Swinhoë).
Turnix oscellatus, Swinhoë, Ibis (1863), p. 398. — Turnix rostrata, Swinhoë,
Ibis (1865), p. 542, 544; (1866), p. 131, 297, 403; (1867), p. 230. - Aréo-
turnix rostrata, Swinhoë, Proc. Zool. Soc. (1871), p. 401. — David et Ous-
lalet, Ois. de la Chine (1877), p. 399.
En 1863, M. Swinhoë décrivit dans VIbis une nouvelle
espèce de Turnix qu'il venait de découvrir dans le sud de l'île
de Formose, sur des collines rocailleuses couvertes de brous-
sailles.
Cet oiseau, d'après l'auteur, a les parties supérieures
brunes mouchetées de noir, et parsemées de quelques taches
fauves, avec les scapulaires nuancées de rouge et les couver-
tures supérieures de l'aile d'un roux pâle, tachées de brun
noirâtre, les joues et la gorge blanches, marquées de quel-
ques points noirs, le milieu de l'abdomen blanchâtre, les
flancs et le bas ventre d'un roux vif, les côtés de la poitrine
d'un roux un peu plus clair avec des barres et des taches
d'un brun très foncé, les rémiges d'un brun châtain, la pre-
mière penne bordée extérieurement de jaunâtre, la queue
(Ij Les premiers exemplaires de Turnix maculatus ont été apportés au
Mushim par es naturalistes qui accompagnaient le capitaine Baudin aux Terres
australes sur les corvettes le Naturaliste et le Géographe.
OISEAUX A ACCLIMATER. 261
courte, à peine distincLe, l'iris jaune pâle, presque blanc, le
bec jaunâtre avec Tarête supérieure et la pointe d'un bleu
noirâtre, les pattes d'un blanc jaunâtre, nuancées d'un bleu-
indigo.
La femelle est de taille plus forte que le mâle, et, chez
elle, la gorge devient noire en été.
Enfin, M. Swinhoë a établi une nouvelle espèce sur un
oiseau tué près de Canton par le capitaine Blakiston, d'où le
nom qu'il lui a donné : Areotiirnix Blakistoni. Elle est très
voisine du Turnix combattant des îles de la Sonde, Hemipo-
dius pugnax Temminck, mais s'en distingue par une taille
plus faible, des doigts plus courts et un bec très petit. Les
parties supérieures du corps sont fortement nuancées de
roux, et la poitrine porte, au lieu de taches, des raies trans-
versales.
{A suivre.)
DU DÉPEUPLEMENT ET DU REPEUPLExMENT
DES RIVIÈRES ET COURS D'EAU DE FRANGE
Par M. Albert LEROY
Ayant à écrire il y a quelque temps à la Société d'Accli-
matation, je profitais de ma lettre pour ajouter, dans un
postscriptum de quelques mots, un moyen que je considérais
comme efficace, pratique et peu coûteux pour le repeuple-
ment de nos cours d'eau.
Le Président de la troisième section voulut bien prendre
en considération mon moyen et me demanda de faire un petit
mémoire et de donner plus de développement à ma pensée.
J'aurais préféré voir un des membres plus compétents adop-
ter mon idée, et la soumettre à votre haute appréciation.
Les causes de dépeuplement des rivières de France sont
multiples :
Parmi les plus importantes on place le braconnage et Véta-
blissement d'usines.
Le braconnage s'exerce jour et nuit et en tout temps, non
seulement avec des lianes de fond et des engins de toutes
sortes, mais encore par des modes de destruction dignes des
temps les plus barbares : on a été, en effet, jusqu'à empoi-
sonner des cours d'eau et à se servir de la dynamite.
Le meilleur moyen d'empêcher le braconnage, c'est d'exer-
cer une grande surveillance.
V établissement des usines fournit encore plus de causes de
dépeuplement que le braconnage; mais il faut avouer que les
avantages que le pays retire de ces fabriques compensent lar-
gement les dégâts causés.
Le dépeuplement occasionné par les usines a deux causes
principales :
A. h' empoisonnement de Veau par les matières chimiques,
le chlore principalement, et les détritus empestés provenant
des féculeries, distilleries, etc.
PISCICULTURE. 263
Le remède à V empoisonnement de Veau est peut-être plus
difficile à appliquer, mais il me semble que l'on arriverait à
un bon résultat, en forçant les usiniers à filtrer leur eau em-
poisonnée par un procédé semblable à celui employé dans la
presqu'île de Gennevilliers pour les eaux d'égout, de manière
que l'eau arrivât à la rivière épurée de toute composition mal-
saine.
Mais qu'arriverait-il le jour où cette terre serait saturée de
ces produits? Le filtrage et l'épuration s'opéreraient-ils tou-
jours d'une manière efficace?
Peut-être, au contraire, obtiendrait-on un meilleur résultat
en laissant séjourner dans des bassins él^nches ces eaux mal-
faisantes, et trouverait-on un procédé chimique et peu coû-
teux pour précipiter rapidement toutes les matières étran-
gères.
Une vanne permettrait l'écoulement de l'eau assainie dans
la rivière et on enlèverait du fond du bassin le précipité ob-
tenu qui, sans doute, trouverait encore son emploi.
B. La deuxième cause principale de dépeuplement occa-
sionné par rétablissement d'usines provient des différences
de niveau de l'eau, soit par suite de réparations, soit que
l'eau, employée comme force motrice, soit retenue dans un
bief à une certaine hauteur pour descendre souvent, après
quelques heures de marche, à un mètre au-dessous.
Je ne cite que pour mémoire les irrigations et les faucar-
dages répétés et souvent intempestifs que les usiniers ne
manquent pas de faire, principalement au printemps et à l'au-
tomne.
Combien d'œufs coagulés à ces herbes et à ces roseaux cou-
pés sont perdus. Si les usiniers se contentaient de couper et
laissaient les herbes aller au courant de l'eau, le mal serait
moindre, parce qu'on aurait la chance de voir ces œufs en-
traînés éclore plus bas. Mais toujours ces herbes sont retirées,
mises en tas et converties en riche fumier.
Ne pourrait-on astreindre les usiniers à un certain règle-
ment concernant le faucardage des rivières ?
Mais j'estime que toutes ces causes de dépeuplement se-
64 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
raient largement compensées si tous les œufs fournis par le
petit nombre de poissons survivants venaient à bien (on sait,
en effet, qu'il n'est pas rare de trouver dans le ventre de cer-
taines femelles de cinquante à trois cent cinquante mille
œufs) et si tous les alevins qu'on a lâchés depuis une dizaine
d'années avaient vécu.
Les personnes qui se sont occupées de pisciculture ont,
selon moi, toujours voulu procéder trop rapidement ; elles se
sont demandé quelles étaient les espèces les meilleures et,
sans se préoccuper de savoir si la rivière qu'elles voulaient
repeupler pouvait les nourrir, elles ont lâché des milliers
d'alevins de Truites, d'Ombres Chevaliers, de Saumons et
d'autres espèces voraces.
Qu'est-il arrivé? D'abord beaucoup de ces alevins sont
morts; ceux qui ont survécu ont commencé par manger ce
qui restait de poissons dans le cours d'eau, puis se sont dévo-
rés entre eux jusqu'à ce que ne trouvant plus rien à manger
ils aient émigré dans des eaux moins dépeuplées, ou soient
morts de faim.
Donc le résultat a été souvent non seulement mauvais, mais
encore néfaste ; au lieu de peupler, on a dépeuplé !
Il y a quinze ou vingt ans un étang que je pourrais nom-
mer, était richement peuplé de Gyprinides de toutes sortes;
le propriétaire y mit des Brochets. Trois ans après il fut
étonné de trouver beaucoup moins de petits poissons et à
chaque pêche son produit diminua d'une façon inquiétante ;
enfin aujourd'hui cet étang, qui contenait alors peut-être cinq
ou six milles Carpes marchandes, n'en contient plus que deux
ou trois cents sans que le nombre des Brochets ait sensible-
ment augmenté. On sait en effet qu'un Brochet peut manger
ou détruire desCarpes d'un poids presque égal au sien et que,
faute d'autres proies, il attaque ses congénères, qui, s'ils ne
sont dévorés, reçoivent souvent des coups de dents qui déter-
minent des végétations cryptogamiques occasionnant la mort.
Il est très imprudent de lâcher dans des rivières peu pois-
sonneuses des espèces voraces.
Il faut donc, avant de lâcher des Salmonidés, commencer
PISCICULTURE. 265
par peupler un cours d'eau de poissons qui y trouveront faci-
lement leur nourriture, tels que Carpes, Chevaines, Gardons,
Brèmes, Tanches et Vérons.
Les œufs de poissons éclosent mal dans les rivières pour
plusieurs raisons; une des principales, ainsi que je le disais
tout à l'heure, provient du niveau inconstant.
Les poissons, en général, frayent au printemps et c'est à
cette époque qu'ont lieu le plus souvent les inondations plus
ou moins importantes (les déboisements pourraient donc
être considérés encore comme une des causes de dépeuple-
ment des rivières) : certains poissons déposent leurs œufs sur
le sommet des herbes ou sur les radicelles qui se trouvent à
fleur d'eau ; l'eau se retire, ou le moulin marche et l'eau
baisse, et voilà des milliers d'œuls hors de l'eau et, par con-
. séquent, perdus.
Bien heureux encore si ces herbes n'ont pas été coupées
entre la ponte et l'éclosion des œufs.
Une autre raison qui empêche les œufs d'éclore, c'est qu'ils
sont mangés.
Tous les meuniers ou usiniers ont jusqu'à deux cents Ca-
nards et plus qui naturellement trouvent leur nourriture
dans la rivière et Dieu sait ce qu'un Canard peut manger
d'œufs et d'alevins. (Pourquoi n'empècherait-on pas les Ca-
nards de pêcher en temps prohibé ?)
A ces Canards domestiques il faut ajouter les Bats d'eau,
les Canards sauvages, les Sarcelles, les Poules d'eau, les Mar-
tms-Pêcheurs, etc.
L'année dernière, étant à canoter sur le Loir, près de sa
source, vers le 15 juillet, je vis des Gardons frayer et dépo-
ser leurs œufs sur des radicelles d'aulne. — Je m'approchai
et j'emportai chez moi environ la moitié de ces racines cou-
vertes de milliers d'œufs : je les mis simplement dans un ba-
quet rempli d'eau et au bout d'une quinzaine de jours j'avais
presque autant d'alevins que j'avais mis d'œufs en incubation.
Dans une promenade en bateau je surveillais les œufs que
j'avais laissés et tous les jours je m'apercevais que leur
nombre diminuait; j'en eus l'explication en voyant un jour
260 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
une demi-douzaine de Canards fouiller les racines de leur
large bec.
Enfin une autre fois, mes œufs étaient déjà éclos depuis
deux ou trois jours, l'eau dans la rivière était basse, les ra-
cines étaient sèches et étaient à plus d'un pied au-dessus de
l'eau.
Je pourrais affirmer que pas un des œufs que j'avais laissés
dans la rivière n'est venu à bien et qu'au contraire presque
tous ceux que j'avais mis en incubation m'ont donné des ale-
vins que, du reste, je rejetai à la rivière dès que la vésicule
fut résorbée.
Ce que j'ai fait, tout le monde peut le faire sans aucune dé-
pense : je n'avais aucun appareil de pisciculture ni eau cou-
rante à ma disposition.
Je voudrais que les garde-rivières, tout en étant des agents
de répression, fussent surtout des agents conservateurs et
producteurs.
A défaut de garde-rivières, on pourrait prendre l'agent
voyer, le cantonnier-chef ou le maître d'école.
Les garde-rivières, ainsi que je l'ai fait, pourraient récol-
ter facilement des œufs le long des cours d'eau confiés à leur
garde ; les poissons ayant des dates à peu prés fixes de frai
dans chaque rivière, je suis sûr qu'au bout de quelque temps,
ces agents auraient acquis assez d'expérience pour suivre les
Poissons dans leurs évolutions et prendre chaque jour des
milliers d'œufs, qu'ils mettraient en incubation le soir en
rentrant.
Ils lâcheraient les alevins en temps opportun.
La récolte des œufs serait bien simplifiée si l'on établis-
sait sur les rivières des frayères artificielles : de simples balais
de bouleau, de genêt et mieux de bruyère suffiraient, ainsi
que j'ai pu le constater.
Ce moyen de repeuplement peut être employé sans dé-
penses appréciables.
Mais ce que je préférerais voii-, c'est que l'on donnât à
chaque garde-rivière (ou au maître d'école, à défaut d'autre
agent), la jouissance d'une mare, n'eût-elle que 25 à 30 mè-
PISCICULTURE. 267
très de superficie sur 1 mètre de profondeur; dans cette
mare il pourrait avoir des Gardons, Tanches, Carpes, etc., de
quatre à dix de chaque espèce, suivant l'importance de la
pièce d'eau, qui viendraient frayer sur des balais de bruyère
disposés tout autour de la rive.
Le garde-rivière, agent voyer, cantonnier-chef ou institu-
teur, ferait facilement sa récolte, mettrait en incubation ses
œufs et lâcherait les alevins dans les différentes parties des
cours d'eau.
Ce moyen qui n'entraînerait pas à une dépense de 50 francs
par an rendrait certainement les meilleurs résultats.
Le jour où nos rivières seront, grâce à ce procédé, riche-
ment peuplées de Carpes, Tanches, Gardons et autres Pois-
sons, alors seulement on pourra songer à acclimater des espèces
telle que des Salmonidés.
SUITE ET REPONSE
A CERTAINES ORJECTIOMS FAITES A LA COMMUNICATION PRÉCÉDENTE
Dans la communication que j'eus l'honneur de lire à la
séance générale du vendredi 13 avril 1883 sur le dépeuple-
ment et le repeuplement des rivières et cours d'eau de France,
je proposais l'établissement de Carpières dans les endroits où
il y aurait un agent de l'administration : garde-rivière, agent
voyer, cantonnier-chef, etc. Je m'appuyais sur ce fait indé-
niable que les essais de repeuplement par les Salmonidés
avaient coûté très cher sans grand résultat, tandis que le re-
peuplement par les Cyprinidcs pouvait être tenté sans dépenses
appréciables. Qu'en plus ceux-là devaient être nourris et que
ceux-ci trouvaient facilement leur nourriture dans nos cours
d'eau.
J'ajoutais que le jour où nos rivières seraient largement
peuplées de poissons ordinaires, on pourrait tenter l'acclima-
tation d'espèces rares et voraces qui trouveraient alors facile-
268 SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
ment leur nourriture, mais qu'il faudrait quand même conti-
nuer l'éducation des Gyprinides.
Un de nos collègues fit observer que dans beaucoup d'en-
droits on avait établi sur les cours d'eau des réserves dans
lesquelles, sous aucun prétexte, il n'était permis de pêcher,
même à la ligne volante, et que ces réserve s atteignaient le but
que je me proposais.
Je considère ces réserves comme une excellente chose,
mais je les crois absolument insuffisantes malgré les bons ré-
sultats qu'elles ont donnés, et les observations que je fis alors,
d'une manière générale, sur les rivières peuvent également
s'appliquer à ces réserves.
D'abord ces réserves sont-elles assez nombreuses ? En
existe-t-il sur tous les cours d'eau ? Je ne sais ; mais dans mon
département (fEure-et-Loir) je n'en connais aucune et il y a
encore douze ou quinze rivières principales, sans parler des
ruisseaux, qui ne sont toutes, il est vrai, ni flottables, ni
navigables. — Si ces réserves ne sont établies que sur les
canaux ou rivières flottables ou navigables, c'est bien peu de
chose, car ceux-ci ne représentent pas la dixième partie
linéaire des cours d'eau.
Mais supposons qu'en France le quart de l'eau soit réservé
(ce n'est pas le quart qu'il faudrait sans doute dire, mais la
millième partie) :
Ces parties réservées, c'est-à-dire soi-disant poissonneuses,
ne sont-elles pas justement celles sur lesquelles s'exerce le
plus le braconnage?
Les poissons, s'ils sont nombreux à cet endroit, iront et
viendront dans les eaux non défendues pour y trouver une
nourriture plus abondante et se feront prendre au premier
piège qui leur sera tendu.
Ces réserves sont-elles à l'abri des Brochets, Perches,
Loutres, etc. ? Non, c'est au contraire là que ces voraces se-
ront le plus nombreux.
Les oiseaux aquatiques sauvages ou domestiques ne vont-ils
pas là comme ailleurs ?
Les dilïérences de niveau ne s'y font-elles pas sentir comme
PISCICULTURE. 269
dans le reste de la rivière? Les eaux malfaisantes des usines
n'y coulent-elles pas?
On ne pêche pas dans ces réserves, une surveillance sévère
en éloigne les braconniers, soit; mais quel moyen efficace
avez-vous de protéger la reproduction?
Les causes de dépeuplement que je signalais, en termes
généraux, se manifestent dans ces réserves aussi bien qu'ail-
leurs, car, je le répète, pour moi, le dépeuplement des ri-
vières vient surtout de ce que les œufs et les alevins sont
exposés h des milliers de causes de destruction dans les eaux
courantes principalement, causes auxquelles échappent en
partie les poissons d'un an et au-dessus.
Je crois que, concurremment avec les réserves, l'établisse-
ment de Carpières, de simples mares d'une quarantaine de
mètres superficiels dans lesquelles se trouveraient toutes
sortes de Cyprin ides et sous la direction d'agents compétents,
serait le meilleur moyen de repeuplement, cà la condition
toutefois que les élèves soient lâchés en temps opportun,
temps variant suivant les localités : après les irrigations, les
curages, les faucardages, etc.
L'année suivante les Carpes, Tanches, Gardons, etc., seront
déjà assez forts pour résister à certaines causes de destruction
et trop gros pour s'aventurer dans la plupart des canaux
d'irrigation.
L'an dernier, je mis déjà un peu en pratique mon système;
je compte cette année, si rien ne vient me déranger, renou-
veler mon expérience plus grandement.
Je me propose de repeupler de Cyprinides environ 6 kilo-
mètres de rivière : 4 kilomètres du Loir, qui est à une lieue et
demie de sa source et deux kilomètres de la Thironne, le pre-
mier affluent du Loir.
Je serai limité en aval par le premier moulin qui se trouve
sur le Loir un peu plus bas que le confluent du Loir et de la
Thironne, en amont sur la Thironne par un gué et sur le Loir
par une pente assez rapide sur laquelle la rivière, sans pro-
fondeur pendant 60 ou 80 mètres, coule rapidement entre de
grosses pierres.
^70 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Celle partie de rivière est très froide, étant alimentée par
de nombreuses sources dont quelques-unes donnent depuis
1 mètre jusqu'à 3 mètres cubes d'eau à la minute. Ce froid
est très contraire au frai des Cyprinides.
A 1 kilomètre au-dessus se trouve une féculerie qui pendant
trois ou quatre mois de l'année envoie ses eaux empoison-
nées dans la rivière.
Le Loir à cette portée est très sujet aux inondations : pleut-
il pendant cinq ou six heures de suite dans le haut de son
bassin déboisé, douze heures après on voit la rivière monter
souvent d'un mètre pour redescendre du reste aussi rapide-
ment qu'elle a monté.
Quoique j'aie vu des Gardons frayer vers le 15 juillet dans
le Loir, je crois que les Carpes ne s'y reproduisent pas, du
moins à cet endroit, et cependant les Carpes du Loir ont une
certaine célébrité. J'ai tout lieu de penser que les Carpes pê-
chées viennent des étangs en amont, d'où elles s'échappent au
moment des grandes eaux ou de la pêche. Une fois dans la
rivière, elles se débarrassent de leur désagréable goût de vase.
Je suis donc dans de très mauvaises conditions pour expé-
rimenter, puisque j'ai contre moi eaux empoisonnées d'une
féculerie, niveau très inconstant, inondations fréquentes,
rivière très froide, moulin en aval, Canards et canaux d'irri-
gation.
Malgré toutes ces causes, j'espère réussir à repeupler sans
aucune dépense et dans deux ou trois ans, si cela peut vous
intéresser, avoir à vous communiquer le succès de mon ex-
périence.
II. EXTRAITS DES PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ
SEANCE GENERALE DU 19 MARS 1886.
Présidence de M. le marquis de SiNÉiy, Vice-Président.
Le procès -verbal de la séance précédente est lu et
adopté.
— M. le Président proclame les noms des membres nou-
ellement admis par le Conseil, savoir :
V
MiM. PRÉSENTATEURS.
Farran (Henri), propriétaire, au château de ( E. Bellot.
Verneuil, commune de Migné, par Poitiers ] A. Geoffroy Saint-Hilaire.
(Vienne). ( A. Moreau.
TOURNAT DE BuzENAUD, inspecteur de l'agri- \ ^^- ^eofoy Saint-Hilaire.
culture à Quintenas (Ardèche). i Sa,nt-Yves Menard.
l, Wuirion.
r /iT- . Aie JN •'. • /'A. Berthoule.
LouvET (Viclor-Allred), propriétaire, avenue \ „ ...
de Neuilly, 136 bis, à Neuilly (Seine). f ^ . '
•^ -^ ^ ' \ Poupinel.
n /nui- \ ■'. ■ • 17 II A. Berthoule.
Régnier (Philippe), propriétaire, a Forreuil, \ , -^ ^v. ^ • . t,-i •
V trnff y A. Geoffroy Saint-Hilairc.
par Epernon (Eure-et-Loir). t o ■ . ^t ai -
*^ ^ V Saint-Yves Menard.
;' E. Barrachin.
Thoureau (Edme), 8, rue d'Aumale, à Paris. A. Geoffroy Saint-Hilaire.
V Saint-Yves Menard.
Thoureau (Félix), administrateur du Crédit ( ,*,^' „ „'. ,.., .
ta A ni^, A ' n • A. Geoffroy Saint-Hilaire.
foncier, z, rue de Chateaudun, a Pans. ., ■ ,, ,, .
V Saint- Yves Menard.
— M. le D'Brocchi adresse des remerciements au sujet de
sa récente élection aux fonctions de membre du Conseil.
— M. Mengin annonce le renvoi de la femelle de son
cheptel de Coloinbes poignardées.
— M. E. Joly accuse réception du cheptel de Faisans de
Lady Amherst qui vient de lui être expédié.
— En remei^iant du couple de Lapins béliers qui lui a été
accordé, M. le comte de Buisseret sollicite un cheptel de
Poules de Campine.
272 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACGLIMATATION.
— Des remerciements pour les cheptels qui leur ont été
accordés sont adressés par MM. Achille Adam fils, Al. Audap,
Gustave Conte, O'Neill, Emile Delloye, de Confévron, N. Pau-
tier, Mengin et Ramelet.
— MM. les préfets de la Gironde, de l'Hérault, de Loir-et-
Cher, de la Loire, de Maine-et-Loire, de la Nièvre, de l'Orne,
de la Sarthe, des Deux-Sèvres et de la Haute-Vienne adressent
des réponses aux demandes de renseignements qui leur ont
été faites concernant la situation de la pisciculture dans leurs
départements.
— M. Max von dem Borne, de Berneuchen, demande des
renseignements sur les principales espèces de poissons qui
peuplent les eaux du Doubs, et sur les endroits où la pêche
de ces poissons peut s'exercer le plus fructueusement.
— En réponse à une lettre qui lui a été récemment adres-
sée, M. Jules Tardy, sous-directeur de la ferme-école de La
Roche (Doubs), veut bien promettre de tenir la Société au
courant de ses travaux de pisciculture.
— M. Paul Carbonnier, banquier à Bergerac, neveu de
notre regretté collègue M. Pierre Carbonnier, annonce l'envoi
de renseignements sur un établissement de pisciculture nou-
vellement créé près de Bergerac.
— M. le comte Giberto Borroméo, de Milan, demande à
prendre part à la distribution des graines envoyées de Mada-
gascar par le R. P. Camboué.
— M. le D' A. Ricard, professeur à l'Académie commerciale
de Prague, sollicite un envoi de semence de Riz de Mand-
chourie.
— M. le D' Louis Gaucher écrit d'Aïn-Témouchent (Al-
gérie) :
J'ai reçu en son temps 1 échantillon de Blé Schériff que la Société a
eu l'obligeance de m'envoyer pour servir à des essais. Semé dans de
très bonne terre, le résultat a été absolument nul. Cette variété est trop
tardive pour notre région. Alors que les Blés durs tangaros et les
Blés tendres étaient en état d'être récoltés, le Blé Shérilf était encore
très vert dans toutes ses parties et le grain à peine formé. Deux jour-
nées de vent chaud du Sud l'ont complètement détruit.
PROCÈS-VERBAUX. 273
Je pense que la Noix de Pacanier pourrait réussir ici à certaines
expositions. M. Sanford devant en expédier à la Société, je serais heu-
reux qu'elle pût m'en attribuer quelques-unes, afin que j'essaye l'intro-
duction de cet arbre dans notre région. Les Orangers produisent beaucoup
ici, ainsi que les Grenadiers et les Figuiers; c'est ce qui me permet de
supposer que la Noix de Pacanier pourrait augmenter encore le nombre
si restreint des essences utiles que l'on trouve dans le pays. J'avais bien
songé au Cacaotier, mais il m'a toujours été impossible de me procurer
des graines de cet arbre.
— M. Léon Marquiset annonce qu'il soumellra prochaine-
ment en séance généivale le résultat de ses essais de culture
de Kuzu {Puer aria Thumber glana).
— M. Berthoule donne, d'après un article publié par le
journal The Colonies and India, d'intéressants détails sur
l'histoire des fermes d'Autruches dans la colonie du Cap.
— M. Berthéol présente un appareil de pisciculture de son
invention; c'est un appareil d'éclosion avec flotteur, disposé
pour être employé dans un cours d'eau.
— M. Saint-Yves Ménard donne lecture d'une note de
M. Ponsard, d'Omey (Marne), sur les Moutons prolifiques de
Chine. (Voy. au Bulletin, p. 24-1.)
— M. Jules Grisard communique une note de M. Rieffel
sur les Chiens de prairie {Cynomys Ludoviciana). (Voy. au
Bulletin.)
— M. Brocchi donne lecture d'une note de M. Noordhoeck-
Hegt, sur la pisciculture dans le Rhin inférieur. (Voy. au
Bulletin.)
— M. Hédiard présente un régime de Palmier sagoutier
(Sagus Bhumphi) provenant de la Martinique, et il donne
les détails ci-après sur les produits tirés de cet arbre, notam-
ment sur le sucre que fournit la sève : ,
Les graines sont arrivées très fraîches et sans altération aucune, ce
qui permettra de les faire germer en serre. Je vais en adresser à plu-
sieurs de mes correspondants d'Algérie.
Le Palmier sagoutier est très commun à Madagascar; on en trouve
également beaucoup atix îles Moluques et dans diverses contrées de
rOcéanie. L'indigène tire de ce Palmier de nombreux produits; c'est
une source de richesse pour les pays où pousse le Sagoutier. Il y a
4' SÉRIE, T. 111.— Mai 1886. ^[^
274 SOCIÉTÉ NATIONALE D'aGGLIMATATION.
d'abord la sève, que l'on obtient en pratiquant une incision à la base
du régime; c'est la liqueur dite vin de palme. On suspend à l'endroit
de cette incision un gobelet formé d'un morceau de bambou. Une sève
abondante coule constamment. Mais on a remarqué que la nuit l'écou-
lement est plus abondant que pendant le jour. 11 est très curieux de
voir ce Palmier garni de gobelets, où chacun vient se désaltérer comme
à un buffet permanent. Avec le vin de palme, on obtient, par la fermen-
tation, une liqueur dite arach, qui est une sorte de rhum. Si on laisse
aigrir ce liquide, il se transforme en vinaigre. Pour en obtenir du sucre,
il suffit de faire évaporer le liquide, qui cristallise et donne un sucre
de couleur brune dont le goût est agréable.
De la moelle de ce Palmier on extrait une fécule qui, granulée, forme
le sagou (espèce de tapioca), très nourrissant et très agréable en potage.
Les fibres, qui sont autour de la moelle, s'exportent aujourd'hui en
grande quantité, comme liens très solides et résistant à l'humidité. Dans
les colonies, cette fibre trouve de nombreux emplois : on en fait des
nattes, des tapis, des vêtements, des couffins pour l'emballage du sucre
ou du café, etc.
Le bois est très dur et sert aux constructions.
Les régimes du Palmier sagoutier atteignent un volume considérable ;
les grains, en forme de cône de pin, sont d'un bel effet ornemental, leur
couleur acajou est très brillante et se conserve indéfiniment. Ces énormes
grappes de graines, qui semblent avoir été vernies, sont fréquemment
employées pour orner les demeures. Peut-être le Sagoutier pourrait-il
réussir dans certaines parties de l'Algérie.
— M. Rathelot dit qu'il a eu occasion de goûter du sucre
de Sagoutier et qu'il l'a trouvé excellent. Ce sucre ressemble
par la couleur à la cassonade, mais il est plus foncé.
iSÉANCE GÉNÉRALE DU 2 AVRIL 1886.
Présidence de M. Saint-Yves Ménard, Trésorier,
puis de M. le marquis de Sinéty, Vice-Président.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
— M. le Président proclame les noms des membres nouvel-
lement admis par le Conseil, savoir :
M. présentateurs.
. ,, ,,, ^ . ti 1 f A. Berthoule.
Arjuzon (le comte d ), 5, square du Roule, \ „ . n i * n
. n ■ /' ' ^ j Comte Galvet-Rogniat.
( A.Geoffroy Saint-Hilaire.
PROCÈS-VERBAUX. :275
MM. PRÉSENTATEURS.
f, ,., ,„ .X . n • I ( J- Gornély.
Gaillard lus (Honore), a Pussigiiv, par les \ . ^ «. <- • . n-i •
f. /u- \ o j' r } A. Geoffroy Saint-Hilaire.
Ormes (Vienne). / /
(G. Pays Melher.
/-. /» i_ii \ lo 1 ' n • 1 A. Berllioule.
Grapanche (Achille), 18, rue Juge, a Pans \ . ^ ^ ^ . „., .
. /- T^ . jn . . ' M v^ I 1 A. Geoffroy Saint-Hilaire.
et 4/ East 19 Street, a New-York. / „ . ,, \, ,
V baint-Yves Menard.
SucHETET (Luc-André), au château d'Auti- ^ ' „ ^, ". „., .
... ,-, , .,, ,,^ . T f • \ \ A. Geolhoy baint-Hilaire.
ville, par GoderviUe (beine-Inferieure). c ■ ir ». .
^ V Saint-Yves Menard.
r^ ,, . , . . . , -, i G. Conte.
pRAX (Louis), commissaire-priseur, a JNar- \ . ^ .u i
,,\\ , A. Berthoule.
bonne (Aude). i k r «• o • . ui •
^ ' \ A.GeoiiroySaint-Hilaire.
— Des remerciements pour les cheptels qui leur ont été
accordés sont adressés par MM. Laborde, comte de Montle-
zun, Ghandèze, Roussel, D' J. J. Lafon, et baron Le Pelle-
tier de Glatigny.
— M. Edouard Maistre écrit de Villeneuvette, par Cler-
mont-l'llérault :
Je viens vous demander la permission de vous adresser quelques
observations au sujet de certaines opinions émises par plusieurs de nos
honorables collègues, et notamment MM. Joly et Mailles, sur les Lépo-
rides, dans les séances des 10 novembre et 8 décembre derniers.
Je dois dire que si je prends la parole à ce sujet, c'est que depuis trois
ans j'élève des Léporides (du commerce), et que depuis deux ans envi-
ron, dans le but d'en avoir d'authentiques, je fais des expériences sur la
production directe de l'hybride du Lièvre et du Lapin domestique.
Pendant la même période, je me suis occupé aussi de trois questions
qui paraissent au premier abord complètement étrangères à celle en
discussion, mais dont l'étude peut, par analogie, en éclaircir certains
points :
1* Reproduction du Lièvre en captivité étroite;
2° id. du Lapin sauvage;
3" Croisement du Lapin sauvage avec des Lapins domestiques, et en
particulier avec le Léporide.
Je ne néglige rien pour résoudre ces différentes questions, mais sur-
fout pour avoir des résultats dont l'exactitude ne puisse être révoquée
en doute et, dans ce but, je note tout ce qui se passe dans mon clapier,
je recueille la plus grande quantité possible d'observations sur les ani-
maux que j'étudie, et que j'ai presque constamment sous les yeux.
Dans ces conditions, cependant, si j'arrive au résultat cherché (acoou-
276 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
plement d'un Lièvre et d'une Lapine, et si je l'annonce à notre Société,
me croira-t-on lorsqu'on met en doute les affirmations émises par l'hono-
rable M. Eugène Gayot dans ses différents ouvrages sur la question,
affirmations justifiées par les expériences instituées par lui dans un but
scientifique? Quelles sont les preuves qui vaudront plus que son témoi-
gnage ?
Eh bien, le résultat cité ci-dessus, je viens de l'obtenir, mais impar-
fait : le 29 janvier dernier, une femelle de Lapin domestique, fécondée
par un bouquin de Lièvre, donnait naissance à quatre petits, qui malheu-
reusement furent trouvés morts le lendemain; les rats en avaient à moi-
tié dévoré un, ce qui avait probablement été la cause que la mère avait
laissé périr les autres, bien conformés, d'ailleurs.
Ici, pas de doute au sujet de la valeur spécifique des reproducteurs :
le bouquin est bien un Levraut pris jeune, il y a deux ans, dans une
luzerne, et élevé depuis dans mon clapier; la Lapine est d'une race assez
petite, grise, et se rapprochant assez, malgré son volume double, de la
race sauvage.
J'ai conservé dans l'alcool deux des petits Léporides ainsi obtenus, et
si la 1" section le désire, je puis lui en envoyer un, on pourrait le com-
parer avec un Lapin du même âge, c'est-à-dire venant de naître. Quant
aux reproducteurs, je les ai réunis de nouveau pour essayer d'arriver à
un résultat plus satisfaisant.
Il est prouvé pour moi que la chose est possible; les faits cités par
M. Gayot m'en avaient d'ailleurs donné la certitude.
En effet, on objecte que M. Gayot a appelé Léporides le produit de La-
pines avec un certain « Bibi » dont la valeur spécifique n'était pas bien
connue, il en convient lui-même {Les petits quadrupèdes de la maison
et des champs, f. II, p. 18); mais la dernière édition de cet ouvrage
(1871) porte à sa dernière page (f. Il, p. 379) une note certifiant, d'après
l'autopsie de cet animal, que Bibi était bien un lièvre.
D'ailleurs M. Gayot cite plusieurs exemples d'accouplements féconds
entre des Lapins et de véritables Lièvres, et notamment {même ouvrage,
f. Il, p. 9-17) le cas d'un Lièvre à lui appartenant, qui a fécondé vingt-
huit Léporides demi-sang.
Mais, puisque des affirmations, même de la part de personnes aussi au-
torisées que M. Eugène Gayot ne suffisent pas à établir l'authenticité des
Léporides, il est nécessaire, pour arriver à connaître la vérité sur ce
point, non seulement d'adresser des questionnaires détaillés aux per-
sonnes s'oftcupant de cette question, mais d'envoyer chez elles une com-
mission spéciale pour contrôler de visu leurs expériences.
Il est certain que les Léporides du commerce, en grande partie du
moins, n'ont aucun droit à ce nom, et c'est facile à comprendre, car les
éleveurs (jui possédaient des Léporides authentiques ont dû souvent être
assez peu scrupuleux pour vendre sous ce nom des produits de ces Lépo-
PROCÈS-VERBAUX. 277
rides avec des Lapins, ou même certaines races de Lapins ayant des ana-
logies avec les Léporides, l'acheteur ne sachant pas, la plupart du temps,
les caractères distinctifs de ceux-ci. Ce n'est donc pas en confiant un
couple de Léporides du commerce à un membre de la Société qu'on
apprendra quelque chose sur l'hybride du Lapin et du Lièvre ; ce n'est
pas non plus en conflant à un membre un Lièvre et une Lapine : comme
le dit très bien M. Mailles, le résultat, fort douteux, se ferait longtemps
attendre très probablement, car il faut bien se garder, dans ces expé-
riences, d'opérer dans de pareilles conditions : on ne doit pas opérer sur
une petite échelle, car le résultat, quel qu'il soit, ne pourrait être géné-
ralisé dans ce cas ; on ne doit pas mettre en scène des animaux brus-
quement changés de milieu, expédiés à une distance plus ou moins
grande, je parle pour les Lièvres, auxquels une pareille secousse enlève
souvent, pour un temps, leurs facultés génératrices; endn, il faut (si ce
n'est pas une condition sine qua non de la réussite, c'est toujours un grand
point) que l'expérimentateur y apporte une très grande persévérance,
les résultats se faisant ordinairement longtemps attendre et, j'irai plus
loin, je trouve que, de plusieurs expérimentateurs consciencieux, celui
qui est convaincu de la possibilité du fait contesté, arrivera plus tôt au
but que l'indifférent, à plus forte raison que celui qui nie de parti pris.
D'après ces considérations, ne semble-t-il pas que le mieux serait
d'étudier bien en détail, de contrôler les résultats chez ceux qui se
sont occupés, s'occupent ou vont s'occuper de la question, et après
avoir discuté leur valeur scientifique, en faire connaître les conclu-
sions pratiques, ce qui est le but final des travaux de notre honorable
Société?
En ce qui me concerne, je me mets entièrement à sa disposition, soit
pour faire visiter mon clapier d'expériences, soit pour donner sur les
questions mentionnées plus haut, et à la solution desquelles il est des-
tiné, les détails qui me seront demandés.
M. Edouard Maistre, ayaot été piûé de vouloir bien faire
parvenir à la Société un de ses jeunes Léporides, adresse la
lettre suivante :
Conformément au désir que vous exprimez, je vous ai expédié ce matin
par la poste, dans un bocal cacheté, un des jeunes Léporides que j'ai
obtenus, et qui sont morts en naissant, ou quelques heures après leur
naissance. Dans ma dernière lettre, j'attribuais leur mort à la dent des
rats, qui en avaient rongé un, en effet; mais, après réflexion et examen
de la mère et des petits, je crois plus probable que le volume relative-
ment très considérable de ceux-ci et l'état d'embonpoint exagéré de
celle-là ont rendu l'accouchement très laborieux, et causé la mort des
jeunes.
278 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Et, à ce propos, je crois devoir signaler à la Sociélé un écueil contre
lequel se lieurleront souvent les personnes poursuivant de semblables
expériences.
Les femelles de Lapin mises en cohabitation avec des bouquins de
Lièvre restent souvent fort longtemps sans produire, soit que la résis-
tance provienne d'elles ou des mâles; il en résulte qu'elles s'engraissent
outre mesure, d'autant plus que, mangeant toute la journée, elles con-
somment, en outre de leur ration, une partie de celle de leur compagnon,
qui ne mange guère qu'aux environs de la nuit.
Cet embonpoint finit par les mettre dans l'impossibilité, soit de con-
cevoir, soit de mener à bon terme leur portée, soit, comme c'était ici le
cas, de mettre bas dans de bonnes conditions.
Pour éviter cet inconvénient, il faut, de temps en temps, accoupler
avec des Lapins les femelles en expérience et les remettre avec les bou-
quins dès la mise bas, en sacrifiant leur nichée, ou une trentaine de
jours après, si on veut la conserver.
— M. Berthoule accuse réceplion des 500 œufs de Truite
arc-en-ciel dont la Société a bien voulu disposer à son profit.
Ces œufs ont accompli leur long voyage dans les meilleures
conditions. C'est à peine si on a compté 40 morts à leur
arrivée. Leur évolution embryonnaire était déjà très avan-
cée, et tout fait espérer que l'éclosion se produii^a de la façon
la plus satisfaisante.
— M. Vincent accuse également réception des œufs de
Truite arc-en-ciel qui lui ont été adressés.
— M. Glaser fils, de Bàle, fait connaître les prix auxquels
il pouiTait fournir à la Société des œufs embryonnés de
Saumon, de Truite et d'Omble-Chevalier.
— M. Berti^and, ingénieur des ponts et chaussées, à Poi-
tiers, chargé de dresser le projet d'une échelle à Saumons
pour le barrage de la Vienne, à Châtellerauit, prie la Société
de vouloir bien lui fournir quelques informations sur les di-
vers types d'échelles à Saumons en usage à l'étranger.
Dans une seconde lettre, M. Bertrand remercie des rensei-
gnements qui lui ont été adressés en réponse à sa demande.
— M. le Préfet des Côtes-du-Nord fait parvenir sa réponse
à la demande de renseignements qui lui a été adressée sur la
situation de la pisciculture dans son département.
— M. Max von dem Borne, de Berneuchen, demande
PROCÈS-VERBAUX. 279
quelles sonl les principales espèces de poissons qui peuplent
les eaux du Doubs, et quelles sont les parties de ce cours
d'eau où la pêche peut s'exercer le plus fructueusement.
— M. Raveret-Wattel signale un nouvel essai tenté par le
gouvernement de la Nouvelle-Zélande pour l'introduction du
Hareng (Clupea harengus) dans les eaux qui baignent cette
colonie. Le 13 mars dernier, le vapeur Jackal est parti de
Plymouth emportant une cargaison considérable d'œuls fé-
condés, qui ont été recueillis par M, le professeur Cossart
Ewart sur des Harengs péchés aux bancs de Ballantrae, sur la
côte sud de l'Ayrshire. Comme on le sait, les œufs de Hareng
éclosent en l'espace de seize à dix-sept jours. 11 est donc
nécessaire de retarder le développement d'une quarantaine
de jours, pour éviter que l'éclosion ne se produise pendant le
voyage, ou, tout du moins, trop longtemps avant l'arrivée à
destination. Des glacières et des bacs spéciaux ont, en consé-
quence, été installés à bord du navire, pour loger les œufs et
pour recevoir les alevins qui viendraient à naître en route.
Les œufs seront soumis à une température constante de
-j- i degré environ.
><i'*-^ M. l'abbé A. Mondain, directeur de l'Orphelinat agri-
cole de La Breille (Maine-et-Loire), sollicite un envoi de tuber-
cules de Stachys affinis.
— M. Joseph Clarté, de Baccarat, met à la disposition de la
Société des boutures d'Elœagnus edulis. — Remerciements.
— M. le Directeur de la Société « La Ramie française »
adresse quelques exemplaires de la brochure de M. P. A. Fa-
vier sur la Ramie.
— M. Sandford annonce l'envoi qu'il fait faire à la Société
d'une barrique de noix de Pacanier. — Remerciements.
""— A l'occasion de la lettre de M. Ed. Maistre, relative aux
Léporides, M. Decroix fait connaître que la 1" section, qui a
déjà reçu communication des renseignements contenus dans
cette lettre, prendrait également connaissance avec intérêt
de toutes les observations dont on voudrait bien lui faire
part concernant les Léporides.
— M. le D"" Brocchi fait remarquer que, d'après les termes
280 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
de sa lettre, notre correspondant semble croire que l'on nie
la reproduction du Lièvre et du Lapin. Or, ce qui est mis en
doute, ce n'est pas la possibilité du croisement, mais la pos-
sibilité d'obtenir par ce croisement une race qui se perpétue,
sans que les sujets obtenus retournent, par un phénomène
d'atavisme, aux caractères de l'une des deux espèces croisées.
— M. Decroix annonce que le Lièvre confié à la 1" section
pour les expériences dont elle s'occupe paraît avoir été appri-
voisé, tout en montrant un naturel assez méchant. Cet ani-
mal serait, en outre, cryptorchide. Quant à la Lapine qui
l'accompagnait, elle avait déjà été couverte par un Lapin, et
elle a mis bas trente jours après son arrivée chez notre col-
lègue, M. Joly, qui a bien voulu se charger de suivre les
essais.
— M. Decroix signale l'intérêt que présente l'envoi de
noix de Pacanier annoncé par M. Sandford; on peut seule-
ment regretter, ajoute notre collègue, que cet envoi nous soit
fait un peu tard en saison, et il importera de mettre les noix
en distribution aussitôt qu'elles nous parviendront, afin que
les semis puissent avoir lieu le plus tôt possible.
. — M. A. Laloue fait une communication sur la valeur des
produits industriels des Autruches domestiques (voy. au Bul-
letin). 11 complète ces renseignements par les détails ci-après
sur rélevage et la nourriture des Autruches en captivité :
Nous avons, malheureusement, en Algérie, un grand inconvénient.
Soit faute d'une nourriture convenable et bien distribuée, soit faute
d'un espace suffisant, tous nos élèves sont atteints d'une maladie des
jambes à l'âge de trois à six mois. Nous en perdons une grande partie
par suite de rupture des membres. Nous n'avons pas su, jusqu'à pré-
sent, trouver le moyen d'éviter ces accidents. Il nous est arrivé, sur
vingt-quatre Autruchons mâles, par exemple, de n'en sauver qu'un ou
deux, ce qui nous a empêchés de prospérer, car depuis quelques années,
on s'est donné en Algérie toutes les peines possibles pour arriver à un
bon résultat.
Pour la nourriture d'une Autruche, il faut compter environ 100 francs
par mois. On nourrit ces animaux avec de l'herbe, de la luzerne, quel-
quefois des feuilles de vigne. Lorsqu'on manque de verdure, il suffit de
leur donner des fourrages arrosés d'eau avec un peu de sel. Il est vrai
PROCÈS-VERBAUX. 281
que cette nourriture n'est pas favorable et ne pourrait être employée
longtemps ; mais, faute d'autre, elle permet d'attendre un temps meilleur.
Nous avons pu entretenir des Autruches pendant plus d'un mois et
demi rien qu'avec des luzernes sèches arrosées d'eau, avec du seigle,
de l'avoine, de l'orge. Quant au prix d'entretien, il dépend naturelle-
ment du nombre de personnes employées pour soigner les animaux.
. Les sujets reproducteurs sont installés de différentes façons. Au Jardin
d'essai, ils sont dans des parcs d'une contenance d'environ 300 mètres,
entourés de murs, de grillages pour intercepter le jour entre les dif-
férents parcs. Il est indispensable que les oiseaux ne s'aperçoivent pas
mutuellement; sans quoi la jalousie s'en mêle. Ils s'envoient mutuelle-
ment des coups de pied à travers les barrières ; celles-ci se brisent et
bientôt s'engagent des batailles qui amènent de graves blessures.
Nous avons vu des pieds entamés où l'on apercevait l'os. Les animaux
toutefois ont une très bonne charnure ; on les guérit très rapidement.
A Aïn-Marmora, on a construit des murs qui sont élevés de 2 mètres et
plus. J'avoue que c'est là une grosse erreur, car la dépense est très
lourde. Les animaux ne s'en trouvent pas mieux, au contraire ; ils ne
paraissent pas s'y convenir. Cependant on a obtenu des résultats dans
ce parc.
A Zéralda, on a installé des parcs avec des clôtures. On a laissé
dans l'intervalle un espace de 3 ou 4 mètres, suivant les dispositions,
dans lequel nous laissons pousser des broussailles vives, avec l'espé-
rance qu'un jour ces broussailles remplaceront les fagots qui y sont
actuellement. Les oiseaux s'y trouveraient mieux.
Les parcs de Marmora ont 300 à 400 mètres de superficie : 15 mètres
sur 25. Ceux de Zéralda sont inégaux : les uns ont 300 mètres; les
autres 400. On a profité des accidents de terrain de façon à donner le
plus d'espace possible et à profiter des broussailles pour les isoler les
uns des autres. En principe, il convient de donner 300 mètres d'espace
aux oiseaux reproducteurs.
Au Cap de Bonne-Espérance, on donne un plus grand espace. Mon avis
est que c'est là une des causes du succès; je crois qu'en donnant un
espace plus grand, oh il y aurait de la verdure, une culture quelconque,
où les animaux pourraient courir toute la journée, à droite et à gauche,
je crois, dis-je, que nous obtiendrions un meilleur résultat.
L'année dernière, nous avons essayé trop tard, nos animaux étaient
déjà pris de la maladie ; nous n'avons pu conserver que ceux qui ont
profité de l'espace donné, et qui depuis sont devenus bien plus grands
que ceux que nous avions l'habitude d'obtenir jusqu'à présent.
— M. le Secrétaii'e général rappelle à ce sujet qu'une
opinion absolument conforme à celle de M. Laloue a été
émise, il y a déjà longtemps, par M. Gréput :
SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION.
Tout récemment encore, dit M. Geoffroy Saint-Hilaire, j'avais l'hon-
neur de donner communication à la Société d'un mémoire dans lequel
M. Créput expliquait comment, après des tâtonnements nombreux, après
avoir modifié la nourriture de plusieurs façons, il est arrivé à penser
que si l'Autruche était prise de rachitisme entre quatre et huit mois,
ce devait être manque d'espace. M. Créput a mis ses jeunes élèves dans
des conditions de mouvement, de liberté plus importantes, et il a dé-
claré avoir obtenu un résultat plus considérable. Il avait amené à bien
son élevage entier sans plus de peine que pour des Poulets.
Les Autruches, à l'état sauvage, sont obligées de déployer une acti-
vité incessante pour chercher leur nourriture, qui est très clairsemée,
sur d'immenses terrains. Elles font de grands parcours pour se saisir
des Lézards, des Insectes, des graines dont elles font leur alimentation ;
il leur faut faire beaucoup de chemin pour trouver ce qui est néces-
saire à leur pâture.
M. Laloue est donc en accord parfait avec notre collègue, M. Céput,
sur la solution, qui semblerait trouvée aujourd'hui.
— M. le Président demande quel est l'espace qu'il con-
vient de donner aux Autruches pour qu'elles soient dans de
bonnes conditions.
— M. Laloue répond qu'un espace d'au moins 4-00 à
500 mètres est nécessaire et il donne à ce sujet les détails
ci-après :
Dans notre établissement, nous leur avons donné presque un hectare,
dans lequel, au lieu d'avoir du sable, nous avons fait semer de laluzerne, de
l'orge, des graminées quelconques. L'animal court toujours à droite et à
gauche et se donne de l'exercice. De plus il mange un peu toute la
journée, sa digestion se fait graduellement. Quand, au contraire, on
lui apporte sa nourriture une, deux, trois fois dans la journée, c'est in-
suffisant. Ces animaux sont très gloutons; ils avalent immédiatement ce
qu'on leur apporte. Nous en avons eu plusieurs qui sont morts d'indi-
gestion pour avoir trop mangé. Les cailloux sont absolument nécessai-
res à leur existence. En Algérie, lorsque nous avons distribué la nour-
riture, l'orge, la verdure, etc., les oiseaux se précipitent vers des tas
de cailloux qui sont mis à leur disposition. Ils avalent des pierres très
grosses. Ces pierres semblent indispensables à leur existence ; quand
ils n'en ont pas, ils souffrent. Nous en avons perdu plusieurs qui ont
péri étouffés; ils n'avaient pas de cailloux dans leur gésier.
— M. Raveret-Wattel fait une communication sur les
PROCÈS-VERBAUX. 283
travaux entrepris au laboratoire d'agriculture marine de
Flôdevig (Norvège) par M. le capitaine G.-M. Dannevig.
• — M. de Barrau de Muratel signale l'arrivée précoce des
Hirondelles dans le Tarn. Notre collègue a vu de ces oiseaux
dès le i-4 mars ; à la vérité le temps était beau et chaud depuis
plusieurs jours. Le 58, il en a vu trois ensemble. Peut-être
formaient-elles l'avant-garde des légions qui devaient arriver ;
mais M. de Barrau de Muratel n'a pas pu s'en assurer, étant
parti pour Paris le 30 mars. Jamais, ajoute notre collègue, je
n'avais vu d'Hirondelles avant les premiers jours d'avril.
— M. le Président estime que les arrivages d'Hirondelles
ne varient guère que d'une quinzaine de jours. Les observa-
tions faites à ce sujet ont permis de dresser des tables des
migrations.
— M. de Barrau de Muratel se demande si l'arrivée précoce
des Hirondelles serait l'annonce d'un été chaud ; lorsqu'il a
vu ces oiseaux, le thermomètre oscillait entre 45 et 20 degrés,
ce qui est une température très suffisante pour les Hiron-
delles.
— M. le D' Brocchi fait observer que ce n'est pas parce que
l'on aura vu deux ou trois Hirondelles, qu'on peut dire
qu'elles sont arrivées. Tous les ans, un certain nombre d'Hi-
rondelles, pour une raison quelconque, ne partent pas avec
les autres ; elles hivernent, elles restent dans des trous et elles
profitent des beaux jours. On en voit quelquefois, en plein
hiver, qui sortent quand il fait beau et chaud.
— M. Mailles rappelle que les premières Hirondelles arri-
vent dans les environs de Paris vers le 21 mars ; ce sont des
Hirondelles de cheminée. Les Hirondelles de fenêtre n'arri-
vent pas avant le mois d'avril.
— En annonçant l'arrivée au Jardin d'acclimatation de
Chabins et de Bœufs nalos du Chili, M. Geoffroy Saint-Hilaire
met sous les yeux de l'assemblée des aquarelles représentant
ces animaux. Il rappelle que les Bœufs natos se rencontrent
dans un certain nombre de provinces de l'Amérique du Sud.
Cette race est caractérisée par le peu de longueur des jambes
et par une conformation particulière de la lêle ; le maxillaire
284 SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIMATATION.
inférieur est beaucoup plus long que la mâchoire supérieure,
de sorte que les dents font saillie, absolument comme chez le
Chien bouledogue. En Europe, il n'est pas rare de voir naître
des Veaux avec cette difformité, qui, devenue héréditaire et
complètement fixée après un certain nombre de générations,
a formé, en Amérique, la race nata. Chez cette race, les pro-
portions de la tête sont singulièrement modifiées. Tandis que,
chez notre Bœuf domestique, l'œil se trouve placé à peu près
aux deux tiers supérieurs de la tête (c'est-à-dire qu'en divi-
sant la longueur de la tête en trois parties, il y en a deux au-
dessous de l'œil et une au-dessus), chez les Bœufs natos,
l'œil se trouve à peu près à égale distance du sommet de la
tête et de l'extrémité du mufle. Si ces animaux sont curieux,
ils ne peuvent rendre aucun service particulier. Leur alimen-
tation ne se fait que d'une façon défectueuse; ils ne sauraient
donc être recommandés au point de vue de la multiplication
dans l'agriculture. Au Chili, on leur trouve un avantage:
celui d'être plus faciles à tenir enfermés dans les clôtures,
qu'ils|nefpeuvent franchir aisément à cause de leurs jambes
courtes.
Quant aux Chabins, ou hybrides féconds du Mouton et delà
Chèvre, leur existence a souvent été niée. L'arrivée en France
de spécimens de celte race présente donc de l'intérêt. Ces
animaux vont être soumis à M. le professeur Sanson et seront,
de sa part, l'objet d'un rapport dont la Société recevra com-
munication.
— M. Maurice Girard annonce que l'École d'agriculture de
Grignon vient de recevoir également trois Chabins : un mâle
et deux femelles.
— M. Daresle rappelle qu'il y a une vingtaine d'années,
étant professeur à la Faculté des sciences de Lille, il a eu
occasion d'observer, dans une localité voisine de cette ville,
un Veau qui présentait tous les caractères de la race nata. Un
travail publié à ce sujet, par noire collègue, dans le Bulletin
du comice agricole de Lille, mentionnait, avec détails,
l'existence de? Bœufs natos de l'Amérique du Sud. Mais
quelques personnes contestèrent l'existence de cette race.
PROCÈS-VERBAUX. 285
L'arrivée au Jardin d'acclimatation des aniniaux qui lui ont
été expédiés du Chili, vient rendre le doute impossible. Au
Mexique, il existait, paraît-il, une race de Bœufs natos sans
cornes.
M. Dareste ajoute que, chez nos Bœufs domestiques, les
naissances de sujets présentant cette difformité des mâchoires
n'est nullement rare. Une thèse, récemment publiée, cite de
de nombreuses observations recueillies dans le département
du Pas-de-Calais. Dans presque tous les cas, la déformation de
la tête était accompagnée d'autres monstruosités portant sur
différentes parties du corps, spécialement sur le rectum et
sur les organes génitaux.
— M. le Secrétaire général constate qu'en effet presque
tous les Veaux qui naissent entachés de monstruosité dans la
forme de la tête, présentent d'autres vices de conformation
qui en rendraient l'élevage difficile.
— M. Saint-Yves Ménard a eu occasion d'examiner un Veau
à tête de bouledogue qu'exhibait un bateleur. Ce Veau,
auquel la conformation de ses mâchoires n'aurait pas permis
de teter, avait dû être allaité artificiellement; les membres,
fortement incurvés etd'une très grande faiblesse, ne pouvaient
porter l'animal. Chez les Bœufs du Chili qui viennent d'ar-
river au Jardin d'acclimatation, les membres sont droits, bien
conformés et seulement un peu courts.
Notre confrère saisit cette occasion pour rappeler que le
Jardin d'acclimatation a reçu en juillet 1883 une Mule arabe
(Catherine) , accompagnée d'une jeune Pouliche , sa fille
(Gonstantine), née en mars 1873, et d'un Cheval barbe (Caïd),
son étalon.
Le fait d'une Mule fécondée par un Clieval, sans être nouveau, dit
M. Ménard, était assez rare pour attirer l'attention ; et ce qui frappait
particulièrement, c'était la[^,vigueur de la petite Pouliche qui paraissait
devoir s'élever très facilement.
Dans les exemples de reproduction des Mules connues jusqu'alors, on
remarque une sorte de gradation de la fécondité. Les femelles fécondées
ont été peu nombreuses ; souvent elles ont avorté, rarement elles ont
donné des produits viables, et c'est très exceptionnellement que ceux-
ci ont pu être élevés comme des]^animaux ordinaires.
286 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
Eh bien, Constantinea pris un très beau développement, elle a atteint
la taille de son père, l^jdb environ, et elle est devenue une bêle de
service remarquable.
A son entrée au Jardin d'acclimatation, la Mule Catherine était encore
pleine du même Cheval. En avril 1874, elle a donné le jour à une se-
conde Pouliche (Hippone) qui s'est développée comme sa sœur aînée,
qui a fait paire avec elle à la voiture et qui est aujourd'hui une des
meilleures bêtes de selle du manège du Jardin d'acclimatation.
Ces deux produits de la Mule, qui sont trois quai'ts de sang Cheval,
ressemblent absolument à des Chevaux, l.es personnes non prévenues
les considèrent comme tels et l'examen le plus approfondi des carac-
tères extérieurs (oreilles, crinière, queue, etc.) ne décèle en rien le
quart de sang d'Ane. Seul, le hennissement présente une petite différence
avec celui du Cheval.
La descendance de Catherine ne s'est point arrêtée là. Notre Mule
accouplée avec un Ane d'Egypte a donné naissance à deux sujets mâles,
Salem en juin 1875 et Athman en janvier 1878. Ce sont des animaux
d'une vigueur peu commune, d'une grande vitesse, d'une résistance au
travail tout à fait extraordinaire. Chose curieuse ! ces produits trois
quarts de sang Ane, que l'on pouvait s'attendre à voir rapprochés du
Cheval, ressemblent absolument à des Mulets. Toutes les personnes qui
les voient faire le service de ti-amw^ay de la Porte Maillot au Jardin
d'acclimatation les prennent pour desjMulets. Ils ont les oreilles demi-
longues, la crinière un peu courte et tombante, la queue à moitié garnie
de crins vers le haut ; leur voix tient le milieu entre le hennissement
et le braiment.
Enfin Catherine a été représentée à son premier étalon Caïd ; elle a
avorté en 1879, puis elle a donné en juin 1881 un cinquième produit
« Kroumir » qui ressemble à un Cheval comme Constantine et Hippone,
qui commence à travailler et qui promet de ne le céder en rien à ses
frères et sœurs sous le rapport de la bonne constitution et de l'énergie.
Ces animaux présentent un réel intérêt scientifique et peuvent éclai-
rer plusieurs points de la question de l'hybridation.
Us démontrent tout à la fois et la rapidité, en certains cas, du retour à
l'espèce qui intervient à la seconde génération (Constantine, Hippone,
Kroumir), et l'irrégularité de ce retour (Salem et Alman).
Nous avons voulu nous rendre compte de la fécondité des enfants de
la Mule.
Accouplée avec Caïd, puis avec un Cheval japonais, « Nippon », Cons-
tantine a été pleine deux fois, et les deux fois en 1871 ; puis en mars
1886, elle a mis bas à terme, mais elle a eu des produits chétifs, inca-
pables de se porter, hors d'état de vivre. Ces produits avaient tous les
caractères du Cheval.
Hippone, saillie par le même étalon japonais, sujet très vigoureux.
PROCÈS-VERBAUX. 287
a été pleine également et a eu en août 1882 un produit débile sem-
blable aux précédents, qu'elle n'a pas élevé.
Quand à Salem, il a sailli plusieurs juments sans résultats ; cela donne
une présomption de son infécondité. Nous n'en pouvons pas dire da-
vantage.
— M. le Sécrétai l'e général fait remarquer à cette occasion
que, chez les animaux hybrides, l'infécondilé des mâles est si-
non générale, au moins très fréquente. C'est ainsi, par exemple,
que dans les divers croisements qui ont été faits en Europe,
de l'Yack avec le Bœuf ordinaire et avec le Zébu, les femelles
hybrides se sont toujours montrées d'une fécondité extraordi-
naire, tandis que jamais les mâles n'ont pu être employés
comme étalons.
— M. Raveret-Wattel rappelle que, dans les essais de croi-
sements faits à Halle, par M. le pi^ofesseur Kûhn, entre le
Gayal de l'Inde (Bibos frontalis) et le Bœuf domestique, les
produits femelles se sont toujours montrés féconds ; les sujets
mâles, au contraire, n'ont, jusqu'à ce jour, donné aucun
produit, pas plus avec des femelles d'une des deux espèces
souches qu'avec des Vaches hybrides comme eux.
Des faits analogues ont été observés chez les Poissons. De
nombimix essais de croisements ont eu lieu, dans ces der-
nières années, entre diverses espèces de Salmonidés ; parmi
les produits obtenus, on trouve fréquemment des femelles
donnant des œufs, tandis qu'il est très rare, au contraire, de
rencontrer des mâles dont la laitance renferme des sperma-
tozoïdes.
— M. le Président demande s'il y a quelque chose de fondé
dans l'opinion, assez répandue dans les campagnes, que,
quand une Jument a été saillie par un Ane et qu'elle a donné
naissance à un Mulet, si elle est ensuite saillie par un Cheval,
le nouveau produit obtenu tient toujours un peu du Mulet.
— M. Dareste rappelle qu'un fait analogue a été raconté au
sujet d'une Jument qui aurait été fécondée une première fois
par un Zèbre, et dont, ultérieurement, les produits se seraient
toujours i^essentis de cette union ; mais ce . l'ait a été très
sérieusement contesté.
288 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
— M. Saint-Yves Ménard dit que, dans les campagnes, où
cette influence du mâle est généralement admise, on a donné
le nom de Chevaux-Mulets aux produits d'une Jument qui a
été une première fois saillie par un Ane. Dans les essais de
croisements faits au Jardin d'acclimatation, une femelle de
Daw, qui, après avoir été couverte deux fois par un Cheval,
avait été donnée à un mâle de son espèce, aurait pu fournir
d'intéressants éléments d'observation sur la question ; mal-
heureusement, le sujet est mort avant que le fœtus ait ses
zébrures dessinées.
— iM. Geoffroy Saint-Hilaire fait connaître que cette expé-
rience va pouvoir être reprise avec une femelle de Daw, qui
se trouve en ce moment au Jardin zoologique de Marseille.
Le Secrétaire des séances,
G. Raveret-Wattel.
IHIV
If •
III. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DES SECTIONS.
PREMIERE SECTION.
SÉANCE DU 2 MARS 1886.
Présidence de M. Decroix, Président.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. Cretté de Palluel déclare qu'il a essayé, à plusieurs reprises
d'obtenir des Léporides, en formant des couples de Lapins et de Hases;
mais le résultat a toujours été négatif.
M. le Président pense qu'il serait utile que des tentatives de ce genre
fussent reprises, avec des couples Lièvres et Lapines.
M. Cretté de Palluel répond qu'il n'est plus à même de se livrer à
des expériences semblables.
M. Joly dit qu'il a eu de ces ménages Lièvres-Lapines, et qu'aucun
produit n'a été obtenu.
M. Cretté de Palluel signale les hybrides de Chardonnerets et de Se-
rines; ces hybrides s'obtiennent difficilement, et il faut, le plus sou-
vent, former un grand nombre de couples pour réussir avec un ou
deux.
M. Mailles fait observer qu'en général les oiseaux donnent plus
facilement des produits hybrides que les mammifères, puisque l'on ob-
tient de ces reproductions non seulement d'espèces appartenant au
même genre, mais aussi à des genres différents ; tandis que les mam-
mifères, surtout les petits, et notamment les rongeurs, se montrent
rebelles aux croisements entre espèces distinctes, quoique du même
genre; les grandes espèces, surtout les ruminants et les solipèdes,
donnent plus aisément de ces produits.
M. Huet cite les hybrides de Faisans de diverses espèces et même de
divers genres, et ceux obtenus de l'union du Coq faisan et de la Poule
domestique. On peut voir de ces différents produits à la Ménagerie et
au Jardin d'Acclimatation.
■ M. Berthoule donne ensuite lecture d'une lettre de M. Egal, dans
laquelle notre collègue déclare ne posséder que des Léporides 3/i sang
Lièvre; M. Egal offre, en même temps, quelques-uns de ces animaux
à la Société, offre que la section accepte avec reconnaissance.
M. Mailles propose qu'une note soit insérée dans la Chronique, dans
le but d'obtenir des renseignements sur l'état actuel de la colonie des
Dipodillus Simoni (Lataste).
M. Decroix déclare s'intéresser méJiocrcment à ce petit rongeur; s'il
4" SÉRIE, T. III. — Mai 1886. 19
290 SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION.
appuie la proposition de M. Mailles, c'est uniquement parce qu'il s'agit
d'une expérience intéressante, dont le but est de suivre les modifica-
tions successives que pourra subir, par l'effet de la domesticité, le
petit animal.
31ise aux voix, la proposition est adoptée.
Le Secrétaire,
GH. 3IAILLES.
DEUXIÈME SECTION.
SÉANCE DU 2 MARS 1886.
Présidence de M. HuET.
Lecture du procès-verbal, qui est adopté.
M. Gretté de Palluel rappelle que, dans une séance de l'année der-
nière, il avait été amené à parler de la mue des oiseaux; cette commu-
nication lui valut une lettre de M. Rogeron, lettre dans laquelle
M. Rogeron se sert d'expressions qu'il ne peut accepter,
MM. Huet, Joly et plusieurs membres de la section confirment ces
paroles
M. Gretté de Palluel, à la demande de la section, veut bien promettre
de donner dans une procbaine séance un rapport sur ce sujet.
M. Huet donne lecture d'un rapport sur un mémoire de M. des Murs,,
sur une exposition d'un système unique de classification en zoologie,
spécialement pour l'ornithologie.
Dans cette notice, M. des Murs émet le vœu que l'on change la mé-
thode de classification des êtres qui depuis les premiers auteurs sont
classés des plus parfaits aux plus dégradés.
M. des Murs propose au contraire, rappelant en cela les idées de
Schaeffer, Lamarck, Lesson et Reichenback, de commencer par les êtres
les plus inférieurs, pour terminer par les plus élevés comme organisa-
tion.
De plus M. des Murs se demande s'il n'y aurait pas lieu d'instituer
deux ordres de plus dans la classe des oiseaux :
Parmi les Nageurs, l'ordre des Manchots ;
Parmi les Gallinacés, celui des Mégapodes.
Enfin M. des Murs exprime le vœu que la Société prenne l'initiative, en
cette occasion, pour formuler une proposition dans ce sens, et croit que
cette initiative prise par elle ferait prendre en considération cette pro-
PROCÈS-VERBAUX. 291
position, qui rendrait plus logique et plus rationnel l'enseignement
officiel des sciences naturelles et aiderait au progrès de l'instruction
publique. , •
Le Secrétaire,
E. JOLY.
TROISIEME SECTION.
SÉANCE DU 10 MARS 1886.
Présidence de M. Vaillant.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
M. Berthoule donne lecture d'une lettre de M. Lefebvre, dans laquelle
il est fait mention de la présence de Saumons dans les eaux de la vieille
Somme. M. Lefebvre ajoute que ses essais d'élevage de Salmonidés ont
été contrariés par un accident survenu à la vésicule, qui était double
chez un grand nombre d'alevins.
M. Berthoule pense qu'il s'agit de fragments d'enveloppe d'œufs restés
fixés contre la vésicule, ce qui a pu induire M. Lefebvre en erreur ;
iM. Berthoule ajoute que cette particularité s'observe assez souvent.
M. Rathelot déclare qu'il n'a jamais constaté la présence de fragments
d'œufs restés ainsi fixés; mais notre collègue croit que M. Lefebvre ne
commet pas d'erreur en signalant le fait d'une épidémie ayant pour
caractère apparent le dédoublement de la vésicule. M. Rathelot a pu
observer fréquemment cet accident pathologique.
M. le comte d'Esterno entretient la section au sujet des ophidiens de
son département et d'un Saurien apode, l'Orvet. Mais les paysans de
cette contrée croient à l'existence d'une Vipère pourvue de deux pattes.
Renseignements pris, M. d'Esterno a reconnu qu'il s'agit simplement de
Vipères ordinaires qui, sous l'influence d'une souffrance vive, ont projeté
extérieurement leurs appareils reproducteurs, internes lorsqu'ils sont au
repos et garnis d'appendices épineux.
M. Vaillant dit que ce sont les pénis, doubles chez ces animaux, qui
sont garnis d'épines.
M. le D' Brocchi entretient la section au sujet de la reproduction de la
grande Lamproie. Ce poisson étant vivipare, il est évident qu'il y a un
véritable accouplement, comme l'a dit M. Léon Fairy.
M. Vaillant appuie celte opinion.
M. Raveret-Wattel pense qu'il serait intéressant de se procurer de ces
Lamproies et de faire de nouvelles observations à ce sujet.
La section s'occupe ensuite de la reproduction de l'Anguille. Rien de
certain n'a encore été découvert sur ce point.
292 SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCCLIMATATION.
M. Berthoule donne lecture d'une lettre par laquelle M. Vidal déclare
ne pouvoir accepter la continuation de ses fonctions de secrétaire de la
troisième section. ,
En conséquence, il est procédé à de nouvelles élections, pour la no-
mination d'un Secrétaire, d'un Vice-Secrétaire, et du Délégué aux ré-
compenses, pour la continuation de la présente session.
Sont nommés à la majorité :
Secrétaire : M. Mailles.
Vice-Secrétaire : M. Cloquet.
Délégué aux récompenses : M. Berthoule.
Le Secrétaire,
Gh. Mailles.
QUATRIÈME SECTION.
SÉANCE DU 16 MARS 1886.
Présidence de M. Maurice Girard, Président.
Le procès-verbal de la précédente séance est lu et adopté.
M. Mailles lit l'extrait suivant d'un travail de M. Williston sur un
Diptère comestible :
« Grâce à la bonté des professeurs G. -F. Brush et S.-J. Smith, j'ai
reçu dernièrement une grande quantité de larves d'un Diptère, inté-
ressantes, et parce qu'elles habitent des eaux très alcalines, et parce
qu'elles servent à l'alimentation de l'homme, ce qui est un fait unique,
à ma connaissance, concernant cette famille d'insectes. Ces spécimens,
appartenant au genre Ephydra, proviennent des lacs qui se trouvent
près de Ragtown (Nevada). Arnold Hague donne une description du plus
grand de ces lacs. La teinte des eaux en est bleu clair; cet étang n'a
pas de déversoir, et est alimenté par une source d'eau très fraîche. Les
eaux sont fortement alcalines et si denses qu'un corps humain flotte à la
surface, et, après un séjour prolongé dans cette eau, la peau du cadavre
est couverte d'un épais enduit blanc.
» On supposerait qu'aucun être ne peut vivre dans ce lac. Cependant,
à certaines époques, il s'y trouve de grandes quantités de larves d'une
petite Mouche que les Indiens Pah-Ute font sécher et pulvérisent en une
sorte de farine.
» En comparant ces larves avec celles que le professeur Silliman
avait récollées dans le lac Mono, je ne trouvai aucune différence entre
elles, au moins en apparence; et, de plus, les eaux du Mono, d'après la
description du professeur W.-H. Brewer, sont à peu près de la nature
de celles dont j'ai parlé, et, comme ces dernières, habitées seulement
PROCÈS-VERBAUX. 293
parées larves. Les Indiens de la région les mangent également. Il est
donc 1res probable que les Diptères des lacs de l'Ouest et du lac Mano
sont identiques et appartiennent à l'espèce Californica {Ephydra Cali-
fornica Pack). D'ailleurs ce genre renferme plusieurs espèces voisines
entre elles et vivant dans des conditions analogues, tels que les Ephydra
subopaca Lœw, halophila Pack, gracilis Pack, et VEphydra Mans
Say, des environs de Mexico, où la larve vit dans des eaux également
alcalines. »
M. le Président fait remarquer que le genre Ephydra existe aussi
dans les eaux de France.
M. Fallou annonce que le Conseil a écrit au P. Camboué pour lui de-
mander des renseignements; le P. Camboué annonce, du reste, qu'il va
étudier les espèces du genre Borocera qui vivent à Madagascar.
M. Fallou présente à la section des cocons de Theophila mandarina,
Ver à soie du Miîrier, qui lui ont été gracieusement envoyés par le Pré-
sident du Laboratoire d'étude de la soie à Lyon.
Ces Cocons proviennent de la province de Kianson (Chine), sur la rive
occidentale du lac Taï-Hou, oîx ils ont été récoltés sur les Mûriers en
très grande quantité à l'état sauvage.
M. Fallou promet pour la séance prochaine une note détaillée sur ce
Theophila, dont il a aussi reçu des papillons qu'il compte préparer et
soumettre à la Société.
M. Fallou présente également des Cocons de Caligula Suraka, Sa-
turnia Japonica, S. Diana et S. Jankowskii.
D'après M. Rondot, l'industrie emploie déjà, malgré sa grossièreté, le
cocon de S. Japonica, dont la larve vivrait sur un Châtaignier.
M. l'Agent général signale à la section une Monographie du Tussore
et d'autres Soies sauvages de l'Inde, qui a paru cà l'occasion de l'Expo-
sition universelle de 1878. Ce travail, dû à M. Thomas Wardle, contient
un certain nombre de renseignements intéressants, notamment en ce
qui concerne l'alimentation des divers séricigènes des Indes.
M. J. Grisard fait en outre remarquer qu'il existe une grande ana-
logie entre le T.' mandarina, signalé par M. Fallou, et le Bombyx
texta dont parle M. Wardle dans sa brochure. Il pourrait fort bien se
faire que l'on eût affaire à une seule et même espèce.
M. le Président fait remarquer à cette occasion que l'éducation du
Cynthia vera fut entreprise d'abord à la Société d'Acclimatation et en-
suite à la Ménagerie des Reptiles au Muséum par M. Vallée.
M. Fallou annonce la découverte d'une nouvelle espèce d'Attacus
{A. Wagner i), sur laquelle il n'y a pas encore de renseignements suf-
fisants.
Le Secrétaire,
M. SÉDILLOT.
294- SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
CINQUIÈME SECTION.
SÉANCE DU 23 MARS 1886.
Présidence de M. Paillieux, vice-président.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
M. Paillieux rappelle à la section qu'il a publié en 1879, en collabo-
ration avec M. Bois, sous le titre de Nouveaux légumes (Vhiver, un
opuscule sur divers étiolats de plantes qui ne sont pas ordinairement
employées dans l'alimentation. Ces essais d'étiolement avaient été ac-
cueillis avec un intérêt dont ces messieurs avaient reçu de nombreux
témoignages.
Dans la Société d'horticulture, le rapporteur de la Commission des
récompenses disait, le 26 novembre 1880 : «MM. Paillieux et Bois ont
fait hommage à la Société d'un petit livre intitulé : Nouveaux légumes
(V hiver, dans lequel ils ont consigné les résultats de leurs expériences
faites en vue de modifier par l'étiolement la saveur et la consistance
d'une centaine de plantes, dans l'espoir de les rendre alimentaires. Ce
travail, de tous points intéressant, a été l'objet de deux rapports égale- _
ment favorables, et dus, l'un à M. Siray, l'autre à M. Ed. Prillieux.
Saisie de ces rapports par un vote de la Société, et partageant la bonne
opinion qui y est exprimée sur le livre de MM. Paillieux et Bois, la Com-
mission des récompenses accorde aux deux auteurs une médaille d'ar-
gent. »
En cette même année 1880, M. A. Geoffroy Saint-Hilaire, au nom de
votre Commission des récompenses, disait à son tour : « MM. Paillieux
et Bois, dans un ouvrage consciencieux, ont fait connaître leurs essais
pour rendre comestibles par l'étiolement divers végétaux qui ne sont
pas ordinairement employés dans la consommation. Ces messieurs ont
démontré qu'un certain nombre d'espèces, cultivées d'une façon rai-
sonnée, pouva.'ent devenir de bons légumes d'hiver. MM. Paillieux et
Bois continueront leurs expériences; la Société récompense d'une mé-
daille de première classe les résultats obtenus. »
MM. Paillieux et Bois ne s'étaient pas bornés à écrire, ils avaient
exposé, hors concours, au Concours général agricole de 1880, un grand
nombre d'étiolats fort remarqués. L'exemple était donné.
« De timides essais, dit M. Paillieux, ont suivi; mais enfin, cette
année, une magnifique exposition de plantes étiolées vient d'obtenir
une médaille d'or au Concours général agricole; vous comprendrez
tout le plaisir que j'ai eu à l'admirer.
3) L'exposant, M. H. Buisson, cultivateur à Montreuil-sous-Bois, m'a
remis la liste de ses étiolats, ainsi composée :
PROCÈS-VERBAUX. 295
Chicorée de Bruxelles, à grosse racine
(à café), Witloof des Belges.
Chicorée de Magdebourg, à grosse
racine (à café).
Chicorée de Brunswick, à grosse ra-
cine (à café).
Chicorée sauvage d'Italie, à feuille
rouge.
Chicorée sauvage panachée.
Scorsonère.
Scolyme d'Espagne.
Bardane du Japon {Lappa edulis).
Bardane sauvage.
Bon Henri.
Pissenlit à cœur plein.
Pissenlit très hàtif.
Pissenlit commun.
Raifort.
Cerfeuil musqué.
Crambé.
Salsifis. j Etc., etc.
• » Toutes les Chicorées exposées étaient superbes. Les variétés à
feuilles rouges ou panachées forment la meilleure et la plus jolie salade
qui puisse être servie sur une table.
» J'ai remarqué les variétés de Pissenlit, qui rivalisent avec les Chi-
corées; le Salsifis, le Raifort, le Cerfeuil musqué, auquel j'attache de
l'importance ; le Scolyme d'Espagne, qui était très beau.
î J'aurais voulu trouver, dans l'exposition de M. Buisson, le Witloof
pommé, pour lequel nous sommes encore tributaires des Belges; les
pousses des vieux pieds d'Artichaut, que nos pères estimaient beaucoup,
qu'ils préféraient même au Cardon, et qu'on obtient facilement des
vieux pieds, aujourd'hui jetés et perdus.
» Le Crambé exposé était bien venu, et j'appelle de nouveau votre
attention sur ce légume trop négligé, que nos marchands de comestibles
font souvent venir d'Angleterre, et dont la culture est facile.
» Les Nouveaux légumes d'hiver n'ont pas été publiés par la Société
d'Acclimatation, et la plupart d'entre vous ne connaissent pas la leçon
de botanique du professeur Henri Lecoq, intitulée: Note sur deux cents
légumes nouveaux, qui a inspiré notre petit livre et lui sert de préface.
^» Cette note est extrêmement curieuse et instructive; elle est le point
de départ de tous les progrès que pourra faire l'industrie de l'étiolement.
» Une erreur s'est glissée dans le compte rendu de nos essais, 2* série.
Nous avons donné à VAralia raccmosa le nom à'Aralia esculenta.
La méprise est grave. Je fais de grands efforts pour acquérir la seconde
de ces plantes. Ils seraient vains sans l'inépuisable obligeance de la
maison Vilmorin.
s J'ai reçu d'elle des graines qui n'ont rien produit, parce que les
graines des Aralia perdent très promptement leur propriété germina-
tive et qtt'il y a loin de Yokohama à Paris. J'ai reçu plus récemment, de
la même maison, du plant que j'ai mal cultivé. Quelques pieds sont-ils
sauvés? Je l'espère.
» J'attache une grande importance à l'acquisition de l'Aralia comes-
tible, qui, sous le noni de Oudô, tient au Japon une place notable dans
la consommation. »
M. Paillieux entretient ensuite la section des ravages que fait l'Altise
296 SOCIÉTÉ NATIONALE d'ACCLIMATATION.
dans les plantations de Crucifères. Dans le territoire de Crosnes, les
Choux, les Radis, les Cressons, sont littéralement dévorés. Au mois
d'août, notre confrère ne peut cultiver ni la Moutarde tubéreuse ni
le Daïkon. Les jeunes plantes ne peuvent pas même se montrer, et,
lorsqu'il s'agit de faire un nouveau semis, il est trop tard.
Un remède ou un palliatif des insectes a été proposé dernièrement
par la section d'insectologie. La naphtaline, paraît-il, fait fuir l'Altise
sans nuire aux plantes. 11 est désirable de l'essayer.
« Je le ferai pour ma part, dit M. Paillieux; mais je désire que plu-
sieurs de mes confrères expérimentent en même temps cette matière, et
veuillent bien nous rendre compte des résultats qu'ils auront obtenus.
Je mets donc à la disposition des amateurs de bonne volonté dix paquets
d'un kilogramme de naphtaline. J'espère que dix personnes consentiront
à envoyer chercher de ces paquets et à en répandre le contenu sur les
Crucifères de leur culture.
» On mêle la naphtaline à du sable, et l'on répand ce mélange sur
le sol. »
M. Hédiard donne quelques détails sur la production et la culture de
l'Endive dans les départements du Nord.
M. le Président fait remarquer que non seulement cette plante donne
une salade appréciée, mais encore que l'on peut en utiliser les feuilles
pour les manger cuites.
M. Marquiset dit que si l'on pousse à la production des feuilles, la
racine de la Chicorée à café donne des produits très inférieurs et perd
40 pour 100 de sa valeur.
M. Hathelot ajoute que ces Chicorées épuisées sont colorées artificiel-
lement et vendues néanmoins comme étant de bonne qualité.
M. Hédiard distribue : i° des semences d'un Haricot originaire de
l'Inde, qu'il a nommé Haricot Saint-Ciboire. C'est une espèce naine, très
productive; on la mange en vert; 2" des graines de Carabassette du
Pérou, provenant de fruits récoltés en Algérie ; 3° des bulbilles d'Igname;
4» des graines de 3Ielon de Valence.
Revenant sur l'Altise, M. Chappellier dit que, dans le Midi, cet insecte
fait un tort énorme à la Vigne. On le détruit en secouant les branches
dans une sorte d'ombrelle renversée, qui porte à son extrémité un en-
tonnoir terminé par un sac qui recueille ainsi tous les insectes.
M. Marquiset présente des échantillons de papier de Kuzu. A ce pro-
pos, M. Ralhelot dit qu'il a essayé le tissage des tiges de Houblon; et qu'il
en a obtenu un fil extrêmement solide.
Le Secrétaire ,
Jules Grisard.
IV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE.
Pêcheries aux iles Loffoden.
La Société de géographie commerciale a clos le carême (séance du
20 avril) avec le plus grand à-propos, par une humoristi(}ue commu-
nication de M. Rabot sur les pêcheries de Harengs et de Morues en
Laponie. Dans ces contrées déshéritées qu'éclairent timidement les
pâles rayons d'un soleil sans chaleur, que les glaces abandonnent
comme à regret, quelques semaines à peine, dans lesquelles, par con-
séquent, la nature est sans vie et la terre sans printemps, l'indigène
n'a d'autres domaines que la mer et ses fjords; aussi les exploite-t-il
avec une infatigable ardeur; tous, hommes, femmes, enfants, travaillent
avec courage, les uns bravement à la lame, les autres sur le rivage.
Les Harengs se montrent au printemps et en automne, ils envahissent
les fjords par bancs serrés et innombrables ; le télégraphe signale leur
arrivée sur tous les points de la côte, et aussitôt tous les hommes valides
prennent la mer, les filets sont jetés à l'eau, ils se rompent sous le poids
du poisson, et l'on a souvent, alors, le spectacle de nouvelles pêches
miraculeuses. On estime à 900 000 livres la quantité moyenne prise
chaque année dans ces parages.
La pêche de la Morue est plus importante encore ; elle absorbe et fait
vivre une population de 25 000 individus, Suédois, Russes ou Lapons.
La saison venue, ces intrépides marins s'aventurent au large, sans se
soucier de la tempête si redoutable dans ces mers, aux abords des îles
Loffoden. Leurs embarcations très petites, gréées d'une simple voile
carrée, ne sont pas même pontées; elles tiennent mal la mer et chavi-
rent souvent à la lame ; mais les braves gens, sans s'émouvoir beaucoup
de ces accidents trop fréquents, se tiennent accrochés à leur chaloupe
renversée et attendent patiemment le secours de quelqu'un des leurs.
Cette pêche est très productive; on prend, bon an mal an, sur ces côtes,
cinquante millions de Morues, d'une valeur de 15 à 20 millions de francs.
Aussitôt déposés au port, les poissons sont dépecés, les uns sont salés
(salt-fisli), les autres accrochés, pour être séchés, à des forêts de mâts
sur le rivage (stock-fish). On les exporte bientôt sur tous les ports du
globe. Les têtes, bouillies et mêlées à quelques maigres herbes, servent
à la nourriture du bétail : les foies produisent l'huile si précieuse que,
trop souvent malheureusement, on mélange à l'huile de baleine; enfin,
les débris de toute nature sont convertis en un guano dit guano de
poisson, qui constitue un engrais d'une certaine valeur.
La pêche de la Baleine est pratiquée avec un acharnement toujours
croissant; on compte actuellement plus de vingt grandes compagnies,
ayant chacune sa flotte de guerre ; déjà même quelques bateaux mar-
chent à la vapeur et sont armés à l'avant d'un canon lance-harpon : le
canon est placé sur un aff'ût à pivot, mobile en tous sens ; le harpon
298 SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION.
part sous l'explosion d'une forte charge de poudre, en déroulant un
cable dont l'extrême bout est fixé au bateau; il porte en pointe un obus
percutant qui produit une blessure le plus souvent mortelle; les fortes
barbes du harpon s'ouvrent dans la plaie, et le malheureux Cétacé, im-
puissant à se dégager, bientôt à bout de forces, est tiré au rivage après
s'être épuisé dans une lutte désespérée, qui n'est pas exempte de péri-
péties. Un essaim de travailleurs, armés de longs coutelas, s'abat alors
sur son cadavre ; il est dépecé en de larges lanières, la graisse est fon-
due, certaines parties des chairs sont préparées en conserves, dont le
jeune voyageur a pu apprécier la haute saveur; enfin les fanons de ce
monstre informe, qui semble si peu fait pour servir d'auxiliaire à la
grâce, s'en vont servir aux intimes et mystérieux usages que connaît le
beau sexe. 11 paraît mênie que les barbes, trop faibles pour secourir de
la sorte dame nature, font néanmoins l'objet d'une exportation considé-
rable en Angleterre, oîi on les convertit... en plumes d'Autruches!
N'est-ce pas le dernier mot de l'antithèse?
Quoi qu'il en soit, la capture d'une Baleine a son importance; quel-
ques-unes représentent une valeur de 5 à 6000 francs; les moins appré-
ciées ne valent pas moins de 800 francs. On en prend encore environ
quatorze cents chaque année ; mais leur nombre diminue sensiblement,
et déjà on peut prévoir l'heure prochaine où elles auront complètement
disparu des mers polaires, leur dernier refuge.
Si nous ajoutons que ces récits, faits avec entrain, ont été accompa-
gnés de nombreuses projections; que M. Rabot nous a ainsi montré la
sauvage nature du Nord, les pittoresques anfractuosités des fjords, les
scènes de la vie indigène, les opérations du dépeçage des baleines, voire
même un soleil de minuit, on verra que, pour une conférence de carême,
celle-ci a élé fortement nourrie et n'a pas valu la moindre abstinence à
l'esprit des auditeurs.
Le gouvernement norwégien se préoccupe aujourd'hui de la diminu-
tion du poisson sur ses côtes. Il ne peut malheureusement pas grand'
chose pour la protection de la Baleine ; mais du moins travaille-t-il à la
multiplication artificielle des Morues et de quelques autres espèces ma-
rines. La Société d'Acclimatation elle-même, toujours soucieuse d'en-
courager, par les moyens en son pouvoir, des entreprises d'une si incon-
testable utilité, en quelque pays qu'elles soient faites, a reçu cette année
même un intéressant rapport sur l'une de ces stations récentes, la sta-
tion de Flôdwig, dirigée par M. le capitaine Dannevig, où l'on a obtenu
en 1885 vingt-huit millions d'alevins de Morues. Ce rapport a été trans-
mis cà notre Commission des récompenses ; il ne nous appartient pas de
divulguer avant l'heure le résultat de ses délibérations, mais nous pou-
vons dire que les travaux de M. le capitaine Dannevig ont attiré vive-
ment son attention.
Am. Berthoule.
FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 299
Pisciculture dans la Souinie.
Je vais essayer de répondre au questionnaire que vous me faites
l'honneur de m'adresser, relativement à la récolte que j'ai faite d'envi-
ron 26 000 œufs de Saumon, provenant de trois femelles prises dans la
vieille Somme, en aval d'Amiens et du barrage de la Chaudière. A cet
endroit, la Somme se divise en deux bras, qui suivent une direction pa-
rallèle, laissant entre eux une bande de terre appelée île Sainte-Ara-
gonne.
A droite, c'est le canal de la Somme; à gauche, c'est la vieille
Somme, qui n'est pas navigable. A 70 mètres du barrage existe sur
cette rivière une passerelle. C'est à partir de ce point, sur un espace
d'environ 60 mètres en descendant , que les pêcheurs jettent l'épervier
pour prendre le Saumon qui vient là pour frayer. 11 s'y trouve un fond
de 4-0 centimètres de cailloux sur lesquels, avec des bottes, on peut
s'avancer à plusieurs mètres du bord. Le maximum de profondeur est
de l'-SSO.
Pour la première fécondation, qui eut lieu le 28 novembre, avec une
femelle et deux mâles, et la deuxième, le 2 décembre, avec un seul sujet
de chaque sexe, je me suis servi d'individus de taille moyenne, c'est-à-dire
de 6 à 7 kilogrammes, sauf l'un des deux premiers mâles, dont le poids
peut être évalué à i^'-^,hQO. J'ai employé pour la troisième opération, le
U décembre, la plus forte femelle prise cette année; elle pesait 11 ki-
logrammes. Je ne lui ai enlevé qu'une partie de ses œufs, que j'ai arrosés
de la laitance du plus petit mâle qu'on ait encore observé; son poids ne
dépassait pas 2^3,500.
Le plus fort mâle p